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19/04/2024 | FRANCE | N°23NT00461

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 4ème chambre, 19 avril 2024, 23NT00461


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La commune de Saint-Guinoux a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, de condamner solidairement M. A... B..., la SARL Rolland, la société Qualiconsult et la société Le Coz à lui verser une provision de 215 394 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices et à lui verser les sommes de 6 647 euros au titre du préjudice d'exploitation, de 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance et de 1 800 euros toutes taxes comprises en remboursement

des frais de l'expert ayant rendu un avis sur la solidité du bâtiment, et, à titre sub...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Saint-Guinoux a demandé au tribunal administratif de Rennes, à titre principal, de condamner solidairement M. A... B..., la SARL Rolland, la société Qualiconsult et la société Le Coz à lui verser une provision de 215 394 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices et à lui verser les sommes de 6 647 euros au titre du préjudice d'exploitation, de 10 000 euros au titre du préjudice de jouissance et de 1 800 euros toutes taxes comprises en remboursement des frais de l'expert ayant rendu un avis sur la solidité du bâtiment, et, à titre subsidiaire, de les condamner solidairement à lui verser la somme de 156 617,20 euros hors taxes au titre des travaux de reprise en sous-œuvre et ouvrages extérieurs dégradés de la salle polyvalente de la commune, la somme de 72 000 euros au titre des travaux de remise en état induits par ces travaux de reprise et la somme de 26 000 euros au titre des frais de maîtrise d'œuvre, de contrôle technique et de coordinateur de sécurité et de prévention.

Par un jugement n° 2005642 du 12 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a condamné solidairement M. B..., Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, et la société Qualiconsult à verser à la commune de Saint-Guinoux la somme de 248 012 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 16 décembre 2020 et capitalisation de ces intérêts, a mis à leur charge solidaire les sommes de 40 694,15 euros de frais d'expertise et de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et condamné M. B... et Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, à garantir solidairement la société Qualiconsult à hauteur de 95% des sommes mises à sa charge, Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, à garantir M. B... à hauteur de 35% des sommes mises à sa charge et la société Qualiconsult à garantir M. B... à hauteur de 5% des sommes mises à sa charge.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 20 février, 24 août et 19 septembre 2023, M. B..., représenté par Me Groleau, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 12 janvier 2023 en limitant le montant de la condamnation à 156 617,20 euros hors taxes et en condamnant Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, et la société Qualiconsult à le garantir de toute condamnation à hauteur de respectivement 60% et 30% ;

2°) de rejeter les conclusions incidentes de la commune de Saint-Guinoux ;

3°) de mettre à la charge de toute partie perdante la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'absence de réalisation de l'étude prévue à l'article 2.7 du cahier des clauses techniques particulières (CCTP) doit être reprochée principalement à l'entreprise et non à l'architecte ;

- il lui appartenait seulement de s'assurer que l'entreprise avait réalisé cette étude ;

- sa part de responsabilité à ce titre doit être limitée à 10%, compte tenu de son obligation de moyens ;

- la SARL Rolland, qui a manqué à son devoir de vigilance et à son obligation de résultats, doit voir sa part de responsabilité relevée à 60% ;

- la société Qualiconsult, dont la mission était de valider les travaux préconisés par l'architecte pour prévenir les aléas techniques, qui n'a fait aucune remarque sur la nécessité de réaliser une étude de sol des fondations, alors qu'elle s'était rendue sur place, doit voir sa part de responsabilité relevée à 30% ;

- les sommes de 72 000 euros relative aux travaux de remise en état après consolidation de la structure et de 26 000 euros au titre des frais de maîtrise d'œuvre, de contrôle technique et de coordinateur de sécurité et de protection de la santé (SPS), déjà prises en compte par l'expert, n'auraient pas dû être accordées à la commune de Saint-Guinoux ;

- le devis de la société Atelier Découverte du 23 juillet 2021 ne peut fonder la demande de la commune de Saint-Guinoux, faute d'avoir été produit dans le cadre de l'expertise judiciaire et alors qu'il a été rejeté par toutes les parties en défense ; il n'est pas probant ;

- la condamnation doit être limitée à hauteur du montant de 156 617,20 euros fixé par l'expert ;

- il n'avait pas de mission EXE à sa charge ;

- le fait que la société Rolland devait faire réaliser une étude de sol par une société tierce n'est pas de nature à réduire sa part de responsabilité ;

- aucune pièce ne permet d'établir de manière certaine l'impossibilité pour la commune de faire réaliser les travaux préconisés par l'expert judiciaire ;

- l'abattement de 20 % appliqué par les premiers juges est justifié parce que la commune aurait dû en tout état de cause supporter les travaux de fondations et par l'ancienneté du bâtiment ;

- le préjudice de jouissance de la commune de Saint-Guinoux n'est pas établi faute de démonstration que les travaux dureront nécessairement un an ;

- le préjudice de jouissance est déjà compris dans le préjudice de perte d'exploitation ; la somme demandée n'est pas justifiée ;

- l'expertise sollicitée par la commune de Saint-Guinoux n'est pas utile.

Par des mémoires, enregistrés les 10 juillet et 11 et 26 septembre 2023, la société Thélem assurances, assureur de la SARL Rolland, représentée par Me Simon-Guennou, demande à la cour :

1°) d'admettre son intervention ;

2°) de réformer le jugement du 12 janvier 2023 en ce qu'il a accordé à la commune de Saint-Guinoux les sommes de 72 000 et 26 000 euros ;

3°) de rejeter le surplus des conclusions de M. B... et les conclusions de la commune ;

4°) de mettre à la charge de tout succombant la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son intervention est justifiée dès lors que ni Me Després, ni la SARL Rolland ne sont représentées devant la juridiction administrative pour défendre leur droit ;

- c'est à juste titre que le tribunal a fixé à 60 % la part de responsabilité de M. B... du fait l'absence de réalisation de l'étude prévue à l'article 2.7 du CCTP ;

- M. B... avait une mission d'exécution en application du décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993, notamment le II de son article 8 ;

- les sommes de 72 000 euros et 26 000 euros n'ont pas été discutées lors de l'expertise judiciaire ;

- l'argumentation de la commune de Saint-Guinoux sur l'indice BT01 n'est pas fondée ;

- l'abattement de 20 % appliqué par les premiers juges est justifié parce que la commune aurait dû en tout état de cause supporter les travaux de fondations ;

- les préjudices de 6 647 euros et 14 000 euros ne sont aucunement justifiés par la commune ;

- les demandes d'expertise et de provision ne sont pas justifiées.

Par des mémoires, enregistrés les 14 et 26 septembre 2023, la commune de Saint-Guinoux, représentée par Me Castel, demande à la cour :

1°) de rejeter la requête de M. B... ;

2°) par la voie de l'appel incident et provoqué, à titre principal, de réformer le jugement du 12 janvier 2023 en ce qu'il ne lui a pas accordé, outre les sommes de 156 617,20 euros, 26 000 euros et 72 000 euros, augmentées de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), l'indexation de ces sommes sur l'indice BT01 du coût de la construction, la somme de 6 647 euros au titre du préjudice d'exploitation, la somme de 14 000 euros au titre du préjudice de jouissance et la somme de 1 800 euros au titre d'une facture d'avis de l'expert Mercadier, et de condamner solidairement M. B..., Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, et la société Qualiconsult à lui verser lesdites sommes ;

3°) à titre subsidiaire, de désigner un expert aux fins d'apprécier les travaux de remise en état des ouvrages existants de la salle polyvalente, de condamner solidairement M. B..., Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland et la société Qualiconsult à lui verser une provision de 217 712 euros à valoir sur l'indemnisation du coût des travaux de reprise des fondations, indexé suivant l'indice BT01 et de surseoir à statuer dans l'attente de la remise de ce rapport ;

4°) de mettre à la charge solidaire de M. B..., de Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, et de la société Qualiconsult les entiers dépens ;

5°) de mettre à la charge solidaire de M. B..., de Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, et de la société Qualiconsult une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre de la première instance ;

6°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, au titre de l'appel.

Elle soutient que :

- la responsabilité décennale de M. B... et des sociétés Rolland et Qualiconsult est engagée ;

- les travaux de reprise des désordres doivent être évalués en comptant le montant de 156 700 euros du devis de la société Epios et les montants de 26 000 euros et 72 000 euros du devis de la société Atelier découverte ;

- elle a droit à l'indexation sur l'indice BT01, à compter du 30 juin 2021, jusqu'à la date du jugement, compte tenu de sa situation financière ;

- l'abattement de 20% appliqué par le tribunal n'est pas justifié dès lors que les travaux de fondation étaient partie intégrante du marché ;

- elle a subi un préjudice d'exploitation de 6 647 euros ;

- elle a subi un préjudice de jouissance de 14 000 euros et a dû payer un avis technique pour un prix de 1 800 euros du fait des dommages subis ;

- l'expert s'est borné à établir une liste non exhaustive des travaux à réaliser, à la suite de la reprise en sous-œuvre, sans les chiffrer ; un complément d'expertise se justifie donc ; une provision de 217 712 euros à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices, correspondant au montant des travaux de reprise des fondations suivant devis de la société Epios, indexé sur l'indice BT01 entre la date du dépôt du rapport et la date du jugement se justifie dans l'attente de la remise de ce complément d'expertise.

Par un courrier du 17 janvier 2024, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la cour était susceptible de relever d'office l'irrecevabilité de l'intervention de la société Thélem assurances au motif qu'elle ne peut se prévaloir d'un droit auquel l'arrêt à intervenir est susceptible de préjudicier de façon suffisamment directe.

Par un mémoire, enregistré le 24 janvier 2024, la société Thélem assurances a présenté ses observations sur le moyen que la cour était susceptible de relever d'office.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Derlange, président assesseur,

- les conclusions de Mme Rosemberg, rapporteure publique,

- et les observations de Me Castel, pour la commune de Saint-Guinoux et de Me Collin, pour la société Qualiconsult.

Considérant ce qui suit :

1. En 2010, la commune de Saint-Guinoux (Ille-et-Vilaine) a décidé de restructurer et d'étendre sa salle polyvalente. La maîtrise d'œuvre de l'opération a été confiée à M. B... par acte d'engagement du 7 décembre 2010, complété par un avenant du 10 mars 2014. Une convention de contrôle technique a été conclue avec la société Qualiconsult, le 8 février 2011. Le lot n° l " Démolition - VRD - Gros œuvre - Extérieurs " a été attribué le 19 avril 2011 à la SARL Rolland, placée depuis en liquidation judiciaire, qui a sous-traité l'étude de structure en béton armé à la société Le Coz. La réception est intervenue le 15 juin 2012 avec des réserves. La commune de Saint-Guinoux a sollicité, le 24 février 2017, devant le juge des référés du tribunal administratif de Rennes, la désignation d'un expert afin de constater divers désordres affectant cette salle polyvalente. L'expert, désigné par ordonnance du 10 juillet 2017, a rendu son rapport le

26 avril 2019. Saisi par la commune de Saint-Guinoux, le tribunal administratif de Rennes a prononcé les condamnations susvisées par son jugement n° 2005642 du 12 janvier 2023. M. B..., condamné sur le fondement de la responsabilité décennale, demande à la cour de réformer ce jugement en limitant le montant de la condamnation à 156 617,20 euros hors taxes et en condamnant Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, et la société Qualiconsult à le garantir de toute condamnation à hauteur respectivement de 60% et 30%. La commune, par la voie de l'appel provoqué demande à la cour, pour l'essentiel, de faire droit à ses conclusions de première instance rejetées par le tribunal.

Sur l'intervention :

2. Dans les litiges de plein contentieux, sont seules recevables à former une intervention les personnes qui peuvent se prévaloir d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier. L'assureur d'un constructeur dont la responsabilité décennale est recherchée ne peut être regardé comme pouvant, dans le cadre d'un litige relatif à l'engagement de cette responsabilité, se prévaloir d'un droit de cette nature. Par suite, l'intervention de la société Thélem assurances, assureur de la société Rolland entre 2005 et 2012 ne peut être admise.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne les conclusions d'appel principal de M. B... :

S'agissant des parts de responsabilité dans la survenance des désordres :

3. Il est constant, comme cela ressort du rapport d'expertise judiciaire, que les désordres trouvent leur cause dans l'insuffisance des fondations, trop faiblement dimensionnées au regard de la médiocre qualité des sols, qui s'explique par l'absence de réalisation d'une étude de sol préalable aux travaux relatifs à ces fondations.

4. En premier lieu, M. B... soutient que sa part de responsabilité dans ces désordres ne peut dépasser 10%, en particulier en faisant état de ce qu'il résulte de l'article 2.7 du CCTP du lot Gros-œuvre - Démolition que c'était à la SARL Rolland qu'il revenait de réaliser l'étude de sol manquante. Toutefois, ces stipulations qui prévoient précisément que " l'entrepreneur, qui demeure responsable de la tenue des ouvrages, conserve la possibilité de contrôler à ses frais que les fondations forfaitaires définies à partir des résultats de l'étude de sol préalable sont bien compatibles avec la nature du sol rencontré. Dans le cas où les résultats des essais (...) le conduiraient à proposer des modifications, celles-ci (qui) devront être acceptées par le maître d'œuvre ... ", n'impliquent pas que la SARL Rolland devait réaliser une telle étude mais confirment qu'elle était prévue par les dispositions du marché et qu'il appartenait nécessairement à M. B... de s'assurer de son existence. Il résulte des pièces du marché, notamment de ces stipulations qu'il a lui-même rédigées et de l'acte d'engagement de M. B..., chargé d'une mission complète de maîtrise d'œuvre comprenant une mission de diagnostic, qu'il lui appartenait de faire réaliser cette étude préalable et de s'assurer qu'elle soit mise à la disposition des constructeurs. Il ressort du rapport d'expertise que " la structure de la salle avait déjà subi des déformations avant sa réhabilitation ", ce qui rendait d'autant plus nécessaire la réalisation de cette étude de fondations. Dans ces conditions, il y lieu de fixer la part de responsabilité de M. B... dans la survenance des désordres à hauteur de 60%, quand bien même il n'avait qu'une obligation de moyens.

5. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, et n'est d'ailleurs pas contesté en appel, que les mouvements de structure affectant la salle polyvalente avaient un caractère apparent pendant les travaux litigieux et que, le rapport initial de contrôle technique indiquait au sujet de l'entreprise chargée du lot " Gros-œuvre " que " en l'absence d'étude de sol, l'entreprise s'assurera sur site que les fondations ou gros béton reposent sur un terrain ayant une contrainte de sol minimale de 1 bar " et prescrivait qu'elle réalise des essais à la plaque. Dans ces conditions, il y lieu de fixer la part de responsabilité de la SARL Rolland dans la survenance des désordres à hauteur de 20%, au motif qu'elle a réalisé les travaux litigieux sans disposer de l'étude préalable de sol précitée et ne s'est pas rapprochée du maître d'œuvre en constatant ce défaut d'étude et les risques exposés lors du déroulement du chantier.

6. En troisième lieu, il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté en appel, que la société Le Coz, bureau d'étude de structure en béton armé, n'a pas vérifié les hypothèses de calcul transmises par le contrôleur technique pour calculer le dimensionnement des fondations, ce qui a conduit à réaliser des fondations superficielles pour l'ouvrage. Dans ces conditions, la part de responsabilité incombant à la société Le Coz doit être fixée à 15%, de sorte que la SARL Rolland, dont la société Le Coz était le sous-traitant et qui doit dès lors en répondre, doit voir sa part de responsabilité totale fixée à 35%.

7. En quatrième et dernier lieu, il résulte de l'instruction, en particulier du rapport d'expertise, et n'est d'ailleurs pas contesté en appel, que si la société Qualiconsult a fait état de l'absence de l'étude de sol, elle a rendu un avis favorable sur les fondations du nouvel ouvrage dans son rapport initial de contrôle technique, sans l'assortir de réserve. Dans ces conditions, il y lieu de fixer la part de responsabilité de la société Qualiconsult dans la survenance des désordres à 5%.

8. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rennes l'a condamné avec Me Després, liquidateur judiciaire de la SARL Rolland, à garantir solidairement la société Qualiconsult à hauteur de 95% des sommes mises à sa charge, a condamné Me Després à le garantir seulement à hauteur de 35% des sommes mises à sa charge et la société Qualiconsult à le garantir seulement à hauteur de 5% des mêmes sommes. Par suite, ses conclusions tendant à réformer le jugement attaqué sur ces points doivent être rejetées.

S'agissant du montant des travaux de remise en état :

9. Il résulte de son rapport que l'expert a admis un devis de 156 617,20 euros hors taxes, dont l'arrondi à 156 700 euros n'est pas contesté, au titre de la reprise en sous-œuvre des fondations et de la remise en état des ouvrages dégradés, comprenant les études, l'installation du chantier, le terrassement, les travaux de réalisation de micropieux, les longrines, la fourniture des armatures et du béton fondation, les remblaiements, la reprise des rampes concernées, des murets et des revêtements de sols extérieurs. Contrairement à ce que soutient M. B..., il ne résulte pas des termes de son rapport que l'expert, qui réservait expressément notamment l'évaluation du coût de reprise des ouvrages dégradés à l'intérieur de l'ouvrage, la dépose et repose d'éléments d'équipement (installations électriques, plomberie, cuisine aménagée...), les menuiseries, les seuils au droit des baies vitrées et les revêtements de sols, aurait entendu limiter l'indemnisation de la commune aux seuls travaux correspondant au devis susmentionné de 156 700 euros HT. Dès lors que M. B... ne conteste pas précisément devant le juge administratif, comme il a été mis à même de le faire, le devis, établi par un cabinet d'architecte, portant sur le coût de remise en état des ouvrages après consolidation de la structure, pour un montant complémentaire de 72 000 euros hors taxes, auquel s'ajoute un montant de 26 000 euros hors taxes pour les frais de maîtrise d'œuvre, de contrôle technique et de coordinateur de sécurité et de protection de la santé, il y a lieu d'admettre ces sommes au titre des préjudices subis par la commune de Saint-Guinoux, quand bien même ce dernier devis n'a pas été communiqué à l'expert.

10. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 9 que M. B... n'est pas fondé à demander la réformation du jugement attaqué.

En ce qui concerne les conclusions incidentes de la commune de Saint-Guinoux :

11. Dans le cadre de conclusions qu'elle qualifie d'appel incident, la commune de Saint-Guinoux sollicite l'indexation des indemnités suivant l'indice BT 01, demande que soit écarté l'abattement de 20% retenu par le tribunal administratif sur le coût des travaux de reprise des fondations, que l'indemnisation de son préjudice d'exploitation soit portée de 3 000 à 6 647 euros, que l'indemnisation de son préjudice de jouissance soit portée de 500 à 14 000 euros, soit 2 000 euros par an, et que le coût de l'avis d'un expert en bâtiment qu'elle a sollicité soit pris en compte pour une somme de 1 800 euros.

12. Pour ces sommes, la commune demande la condamnation de M. B..., appelant principal, solidairement avec la SARL Rolland représentée par son mandataire liquidateur et la société Qualiconsult, intimées. Ces conclusions sont donc dirigées contre des personnes autres que l'appelant principal et ne sont pas provoquées par l'appel principal. Par suite, elles ne sont pas recevables.

Sur les frais liés au litige :

13. D'une part, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné solidairement M. B..., la SARL Rolland représentée par Me Després, liquidateur judiciaire, et la société Qualiconsult à verser la somme de 3 000 euros à la commune de Saint-Guinoux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il ne résulte pas de l'instruction que le tribunal administratif ait fait une inexacte appréciation du montant des frais dus en première instance à la commune au regard des circonstances de l'espèce. Par suite, les conclusions de la commune tendant à la réformation du jugement attaqué pour porter cette somme au montant de 5 000 euros doivent être rejetées.

14. D'autre, part, les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de M. B..., partie perdante, ne peuvent qu'être rejetées. Toutefois, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à sa charge, la somme demandée par la commune de Saint-Guinoux au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens au titre de l'instance d'appel.

D E C I D E :

Article 1er : L'intervention de la société Thélem Assurances n'est pas admise.

Article 2 : La requête de M. B... est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Saint-Guinoux, à M. A... B..., à la SARL Rolland représentée par Me Després, liquidateur judiciaire, à la société Qualiconsult, à la société Thélem Assurances et à la société Le Coz.

Délibéré après l'audience du 2 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 avril 2024.

Le rapporteur,

S. DERLANGE

Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

C. WOLF

La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT00461


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT00461
Date de la décision : 19/04/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: M. Stéphane DERLANGE
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : ALPHA LEGIS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-19;23nt00461 ?
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