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05/01/2022 | FRANCE | N°20NT03204

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 05 janvier 2022, 20NT03204


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête n° 1913348, Mme B... D..., agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure, E... D..., a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé le 19 juin 2018 contre la décision du 16 avril 2018 de l'autorité consulaire française à Annaba (Algérie) refusant de délivrer à E... D... un visa de long séjour.

Par une requ

ête n° 1913359, Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête n° 1913348, Mme B... D..., agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure, E... D..., a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé le 19 juin 2018 contre la décision du 16 avril 2018 de l'autorité consulaire française à Annaba (Algérie) refusant de délivrer à E... D... un visa de long séjour.

Par une requête n° 1913359, Mme A... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté son recours formé contre la décision du 16 avril 2018 de l'autorité consulaire française à Annaba (Algérie) refusant de lui délivrer un visa de long séjour.

Par un jugement n°s 1913348 et 1913359 du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 7 octobre 2020, Mme B... D..., agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure, E... D..., et Mme A... D..., représentées par Me Huard, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler les décisions implicites par lesquelles la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leurs recours formés contre les décisions du 16 avril 2018 de l'autorité consulaire française à Annaba (Algérie) refusant de délivrer à E... D... et à Mme A... D... des visas de long séjour ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer les visas demandés ou de réexaminer les demandes ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Huard, leur avocat, de la somme de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elles soutiennent que :

- le jugement attaqué est entaché d'une irrégularité en ce qu'il n'examine pas le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions consulaires refusant la délivrance des visas demandés ;

- les décisions de l'autorité consulaire sont insuffisamment motivées ;

- la décision attaquée de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est fondée sur des faits matériellement inexacts et entachée d'erreur d'appréciation ;

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur leur vie privée et familiale ;

- elle est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant protégé par le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la demande de visa ne constitue pas une violation de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 14 octobre et 11 décembre 2020, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par les requérantes n'est fondé.

Mme E... D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 25 % par une décision du 28 août 2020 du bureau d'aide juridictionnelle (section administrative) du tribunal judiciaire de Nantes.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Ody a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 26 juin 2020, le tribunal administratif de Nantes a rejeté les demandes présentées par Mme B... D..., agissant en qualité de représentante légale de sa fille mineure, E... D..., et par Mme A... D... tendant à l'annulation des décisions implicites par lesquelles la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé le 19 juin 2018 contre les décisions du 16 avril 2018 de l'autorité consulaire française à Annaba (Algérie) refusant de délivrer à E... D... et à Mme A... D... des visas de long séjour. Mme B... D... et Mme A... D... relèvent appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutiennent les requérantes, les premiers juges ont écarté comme inopérant, aux points 3 et 4 de leur jugement, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions consulaires au motif que la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prise sur recours préalable obligatoire s'était substituée aux décisions initiales de refus prises par les autorités consulaires. Par suite, les premiers juges n'ont pas omis de répondre à ce moyen. Le jugement attaqué n'est donc pas entaché d'irrégularité sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Il ressort des écritures produites par le ministre de l'intérieur en première instance que la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France est fondée sur ce que la convention d'accueil d'un chercheur étranger dont bénéficiait Mme B... D... expirait le 31 août 2018 de sorte que les demandes de visas déposées en qualité de " famille de scientifique " n'avaient plus d'objet.

4. En premier lieu, en vertu des dispositions de l'article D. 211-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur, la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France prise sur recours préalable obligatoire se substitue à la décision initiale de refus prise par les autorités consulaires. Il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions de l'autorité consulaire est inopérant à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de la commission de recours et doit, dès lors, être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Pour entrer en France, tout étranger doit être muni : / 1° Des documents et visas exigés par les conventions internationales (...) ". Aux termes des stipulations du deuxième alinéa de l'article 9 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles : " Pour être admis à entrer et séjourner plus de trois mois sur le territoire français (...), les ressortissants algériens doivent présenter un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises ".

6. En l'absence de toute disposition conventionnelle, législative ou réglementaire déterminant les cas où le visa peut être refusé à un étranger désirant se rendre en France, et eu égard à la nature d'une telle décision, les autorités françaises disposent d'un large pouvoir d'appréciation à cet égard, et peuvent se fonder non seulement sur des motifs tenant à l'ordre public, mais sur toute considération d'intérêt général.

7. Il ressort des pièces du dossier que si Mme B... D... a conclu avec l'université Paris 8 une convention d'accueil d'un chercheur étranger, cette convention portait sur la période du 29 janvier 2018 au 31 août 2018 et n'a pas été renouvelée. La circonstance qu'en décembre 2018, postérieurement à la décision contestée, Mme D... a signé un contrat de travail avec la société Uniontrad Company en qualité de " traductrice / relectrice ", à compter du 2 janvier 2019, est sans incidence sur la légalité de cette décision qui s'apprécie à la date à laquelle est édictée. Par suite, la commission de recours n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant la délivrance des visas demandés en qualité de " famille de scientifique " au motif que cette convention n'était valable que jusqu'au 31 août 2018.

8. En troisième lieu, la convention d'accueil de sept mois dont bénéficiait Mme D... étant arrivée à son terme et n'ayant pas été renouvelée, l'intéressée n'avait pas vocation à se maintenir sur le territoire français. En outre, il ressort des pièces du dossier que ses filles, âgées de 19 ans et 14 ans à la date de la décision litigieuse, sont demeurées scolarisées en Algérie durant le séjour de leur mère en France. Par suite, les moyens tirés de ce que la décision litigieuse serait contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à celles du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant et de ce qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur leur vie privée et familiale ne peuvent qu'être écartés.

9. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Il suit de là que leurs conclusions à fin d'annulation doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mmes D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D..., à Mme A... D... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Buffet, présidente de la formation de jugement,

- M. Frank, premier conseiller,

- Mme Ody, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 janvier 2022.

Le rapporteure,

C. ODYLa présidente de la formation de jugement,

C. BUFFET

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 20NT03204


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20NT03204
Date de la décision : 05/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUFFET
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. MAS
Avocat(s) : HUARD

Origine de la décision
Date de l'import : 11/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2022-01-05;20nt03204 ?
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