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13/05/2024 | FRANCE | N°23NC01807

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 2ème chambre, 13 mai 2024, 23NC01807


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... D... et Mme A... C... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 3 décembre 2021 par lesquelles le préfet de la Moselle a refusé de renouveler leur titre de séjour.



Par un jugement n° 2200710, 2200711 du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.



Procédure devant la cour :



I.) Par une requête, enregistrée le 5 juin 20

23 sous le n° 23NC01807, Mme D..., représentée par Me Ceviz, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement en ta...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D... et Mme A... C... épouse D... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions du 3 décembre 2021 par lesquelles le préfet de la Moselle a refusé de renouveler leur titre de séjour.

Par un jugement n° 2200710, 2200711 du 18 avril 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

I.) Par une requête, enregistrée le 5 juin 2023 sous le n° 23NC01807, Mme D..., représentée par Me Ceviz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il la concerne ;

2°) d'annuler la décision du 3 décembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois, subsidiairement, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision en litige est entachée d'insuffisance de motivation ;

- elle est entachée d'erreur de droit, dès lors que son mari remplit toutes les conditions prévues à l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 juin 2023.

II.) Par une requête, enregistrée le 5 juin 2023 sous le n° 23NC01809, M. D..., représenté par Me Ceviz, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il le concerne ;

2°) d'annuler la décision du 3 décembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai d'un mois, subsidiairement, de réexaminer sa situation et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision en litige est entachée d'insuffisance de motivation ;

- elle est entachée d'erreur de droit, dès lors qu'il remplit toutes les conditions prévues à l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 juin 2023.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Brodier, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., ressortissants turcs nés respectivement en 1984 et en 1990, sont entrés régulièrement en France le 28 octobre 2017 et ont bénéficié de titres de séjour portant la mention " visiteur ", valables jusqu'au 23 février 2020. Ils en ont sollicité le renouvellement. Par des décisions du 3 décembre 2021, le préfet de la Moselle a refusé de faire droit à leurs demandes. Par leurs requêtes, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, M. et Mme D... relèvent appel du jugement du 18 avril 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. Il ressort des décisions en litige que, pour refuser de renouveler les titres de séjour " visiteur " dont M. et Mme D... bénéficiaient, le préfet de la Moselle a visé les dispositions de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a indiqué que les intéressés ne justifiaient plus de la condition de ressources prévue à cet article, le détachement de M. en qualité d'imam, accordé par le consulat général de Turquie à Strasbourg pour une durée de quatre ans ayant pris fin le 28 octobre 2021 et n'ayant fait l'objet, à ce jour, d'aucune prolongation. Les décisions en litige comportent ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré d'une insuffisante motivation des décisions en litige ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui apporte la preuve qu'il peut vivre de ses seules ressources, dont le montant doit être au moins égal au salaire minimum de croissance net annuel, indépendamment de l'allocation aux adultes handicapés mentionnée à l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale et de l'allocation supplémentaire mentionnée à l'article L. 815-24 du même code, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " visiteur " d'une durée d'un an. / Il doit en outre justifier de la possession d'une assurance maladie couvrant la durée de son séjour et prendre l'engagement de n'exercer en France aucune activité professionnelle. / Par dérogation à l'article L. 414-10, cette carte n'autorise pas l'exercice d'une activité professionnelle. (...) ".

5. D'une part, M. et Mme D... ne produisent aucune pièce pour établir qu'ils disposeraient de ressources au moins égales au salaire minimum de croissance net annuel, tel qu'exigé par les dispositions applicables. D'autre part, il n'est pas contesté que le détachement de M. D... en qualité d'imam, dans les conditions qui avaient permis la délivrance de titres de séjour " visiteur ", n'a pas été renouvelé. Si les requérants soutiennent que ce dernier demeure au service de la communauté islamique de Moselle dans l'attente de la désignation d'un nouvel imam, les conditions de cette poursuite d'activité ne sont pas établies par les pièces du dossier. Enfin, la seule circonstance que la famille continue d'être hébergée, à titre gratuit, dans le logement de fonction qui était mis à sa disposition, ne suffit pas à justifier que M. et Mme D... remplissent la condition de ressource prévue à l'article L. 426-20 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré d'une erreur de droit doit être écarté.

6. En troisième lieu, les décisions en litige portent uniquement refus de renouvellement de titres de séjour " visiteur ". Il ne ressort pas des pièces du dossier que les requérants auraient sollicité la délivrance de titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont ils ne remplissent au demeurant pas les conditions, aucun de leurs enfants n'étant de nationalité française. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté comme inopérant.

7. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. et Mme D... résidaient sur le territoire français, avec leurs trois enfants mineurs, depuis quatre ans à la date des décisions en litige. Leur séjour, sous couvert de titres de séjour " visiteur ", était lié au détachement de M. D..., par le consulat turc, en qualité d'imam au sein de la mosquée de Farébersviller, et n'avait pas vocation à être prolongé au-delà de la durée de l'affectation de celui-ci. La circonstance que la famille s'est bien intégrée et que les enfants sont scolarisés ne suffit pas, dans ces conditions, à établir qu'ils auraient définitivement ancré en France l'essentiel de leur vie privée et familiale. Les refus de titres de séjour contestés, qui ne sont pas assortis de mesures d'éloignement, ne font par ailleurs pas obstacle à la poursuite de la scolarité des trois enfants jusqu'à la fin de l'année scolaire 2021/2022. Par suite, et alors que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne garantit pas à l'étranger le droit de choisir le lieu le plus approprié pour poursuivre sa vie familiale, M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions en litige méconnaissent ces stipulations.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 3 décembre 2021. Par suite, leurs requêtes doivent être rejetées en toutes leurs conclusions, y compris celles tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme D... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., à Mme A... C... épouse D..., à Me Ceviz et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Martinez, président,

M. Agnel, président-assesseur,

Mme Brodier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 mai 2024.

La rapporteure,

Signé : H. Brodier Le président,

Signé : J. Martinez

La greffière,

Signé : C. Schramm

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

C. Schramm

2

N° 23NC01807, 23NC01809


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01807
Date de la décision : 13/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MARTINEZ
Rapporteur ?: Mme Hélène BRODIER
Rapporteur public ?: Mme STENGER
Avocat(s) : CABINET CEVIZ AVOCATS & CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-13;23nc01807 ?
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