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14/10/2021 | FRANCE | N°19BX02192

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 14 octobre 2021, 19BX02192


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 23 février 2018 par laquelle le président du syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique a procédé à des retenues sur salaire à son encontre pour un montant total de 4 628,09 euros pour absence de service fait.

Par un jugement n° 1800726 du 13 mai 2019, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 ju

in 2019, M. B..., représenté par Me Germany, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 23 février 2018 par laquelle le président du syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique a procédé à des retenues sur salaire à son encontre pour un montant total de 4 628,09 euros pour absence de service fait.

Par un jugement n° 1800726 du 13 mai 2019, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juin 2019, M. B..., représenté par Me Germany, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Martinique du 13 mai 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 23 février 2018 par laquelle le président du syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique a procédé à des retenues sur salaire à son encontre pour un montant total de 4 628,09 euros pour absence de service fait ;

3°) d'enjoindre au syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique de procéder au remboursement de la somme de 4 628,09 euros correspondant au montant des retenues sur salaire, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

4°) de mettre à la charge du parc naturel régional de la Martinique une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il avait produit la décision attaquée du 23 février 2018 ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée en méconnaissance de la loi du 11 juillet 1979 et du décret du 7 novembre 2012 ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle ;

- elle est constitutive d'une sanction pécuniaire et d'une discrimination pour faits de grève ;

- elle est entachée d'une erreur de droit aux motifs que le protocole de fin de conflit signé le 27 décembre 2017 prévoit qu'aucune sanction directe ou indirecte ne sera infligée aux agents du fait de leur participation au conflit ;

- l'absence de service fait n'est pas établie alors qu'il apporte la preuve de la continuité de son activité professionnelle au sein du parc naturel régional de la Martinique malgré le mouvement de grève.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2020, le syndicat mixte du parc naturel régional de Martinique, représenté par Me Mbouhou, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que la requête était irrecevable et aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Fabienne Zuccarello,

- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un mouvement de grève des agents du syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique qui a débuté en octobre 2017 et auquel a mis fin un protocole d'accord signé le 27 décembre 2017, M. B... a été informé, par une lettre du président du syndicat du 23 février 2018, qu'il serait pratiqué une " retenue sur salaire " correspondant à 52 jours de grève. Par un courrier du 26 mars 2018, il a été informé qu'il serait pratiqué une retenue d'un montant de 4 628,09 euros sur sa rémunération et que des prélèvements étaient opérés sur ses traitements de février 2018 à octobre 2018. M. B... a saisi le tribunal administratif de la Martinique d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 23 février 2018. Il relève appel du jugement du 13 mai 2019 rejetant sa demande.

Sur la régularité du jugement contesté :

2. Le tribunal administratif de la Martinique a rejeté comme irrecevable la demande présentée par M. B... au motif que le requérant n'avait pas accompagné sa requête de la décision attaquée du 23 février 2018. Cependant, il ressort des pièces du dossier de première instance, que la décision en cause figurait dans les pièces jointes à la requête de M. B.... Par suite, c'est à tort que le tribunal a rejeté comme irrecevable la demande dont il était saisi. Son jugement du 13 mai 2019 doit, dès lors, être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de la Martinique.

Sur la légalité de la décision du 23 février 2018 :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrer indique les bases de la liquidation ".

5. D'une part la décision contestée du 23 février 2018 n'entre pas dans le champ d'application de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, devenue l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors qu'elle ne constitue ni le refus d'un avantage dont l'attribution constituerait un droit pour M. B..., ni une sanction. D'autre part, cette décision rappelle la règle du " service fait " en matière de rémunérations, mentionne le nombre de jours de grève retenus par l'administration et le montant de 1/30ème de la rémunération de l'intéressé qui sera multiplié par le nombre de jours de grève. Aussi, cette décision comporte les bases de liquidation exigées par l'article 24 du décret précité. Par suite, le moyen tiré de son insuffisante motivation doit être écarté.

6. En deuxième lieu, la décision par laquelle l'administration porte à la connaissance de l'agent le montant des retenues sur traitement qu'elle opèrera du fait de l'absence de service fait ne présente pas le caractère d'une sanction. Par suite, M. B... ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer les stipulations du protocole d'accord de fin de conflit signé le 27 décembre 2017 qui prévoient qu'aucune sanction directe ou indirecte ne sera infligée aux agents du fait de leur participation au conflit.

7. Enfin, en dernier lieu, en vertu de l'article 87 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, les fonctionnaires territoriaux ont droit, après service fait, à une rémunération fixée conformément aux dispositions de l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Cet article prévoit que cette rémunération comprend notamment un traitement auquel est attribuée, selon l'article 3 du décret du 24 octobre 1985 relatif à la rémunération des personnels territoriaux, une valeur annuelle. L'absence de service fait par un fonctionnaire territorial, due en particulier à sa participation à une grève, donne lieu à une retenue sur son traitement. Dans le cas d'un agent qui assure son service selon le régime de droit commun applicable aux fonctionnaires territoriaux, et dont le traitement est liquidé mensuellement, il y a lieu, lorsque l'agent n'a pas accompli une ou plusieurs journées de service auxquelles il était astreint, de procéder à une retenue calculée par trentième de la part mensuelle de son traitement.

8. M. B... fait valoir que sa situation personnelle n'a pas été examinée, qu'il fait l'objet d'une discrimination et que le nombre de jours de grève qui lui est imputé est erroné. Toutefois, il résulte des pièces du dossier, que M. B... s'est déclaré gréviste depuis le 11 octobre 2017, début du conflit, lequel s'est achevé le 26 décembre 2017 et a en outre déclaré dans un courrier du 16 décembre 2017, être gréviste depuis l'origine du conflit. S'il soutient qu'il était en congé pour certaines périodes et que ces 19 journées ne devaient pas être prises en compte dans les jours de grève qui lui ont été imputés, il ressort des éléments produits tant par le syndicat que par M. B..., que les jours de congés et de RTT pris par M. B... ont été déduits des 77 jours de grève et que seuls 52 jours ont été retenus sur le traitement de M. B.... Enfin, la circonstance à la supposer établie que d'autres agents n'auraient pas subi de retenues sur traitement pour la totalité de la période de conflit, est sans incidence sur l'absence de service fait par M. B..., qui fonde la décision attaquée. Par suite, ces moyens seront écartés.

9. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées en défense, que les conclusions à fin d'annulation de la décision du 23 février 2018 présentées par M. B..., doivent être rejetées.

Sur les autres conclusions :

10. Le présent arrêt qui rejette les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 23 février 2018 n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme demandée par le syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Martinique du 13 mai 2019 est annulé.

Article 2 : La demande de première instance de M. B... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par le syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au syndicat mixte du parc naturel régional de la Martinique.

Délibéré après l'audience du 16 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 octobre 2021.

La rapporteure,

Fabienne Zuccarello La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au préfet de la Martinique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 19BX02192


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX02192
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-02-01 Fonctionnaires et agents publics. - Rémunération. - Traitement. - Retenues sur traitement.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Fabienne ZUCCARELLO
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : MBOUHOU

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-14;19bx02192 ?
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