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06/03/2024 | FRANCE | N°473838

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 06 mars 2024, 473838


Vu la procédure suivante :



M. A... B... a, par quatre demandes distinctes, demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler, d'une part, la décision du 15 mai 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a, sur recours préalable exercé devant la commission des recours des militaires à l'encontre de l'avis du 22 septembre 2017 de régularisation des charges du logement qu'il a occupé au sein de la caserne Damesme à Fontainebleau au titre de l'année 2012, en tant qu'il procède à la régularisation des charges sur le chauffage du logement, ramené la s

omme demandée, d'un montant de 2 746,15 euros à 1 681,25 euros et, d'autre...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a, par quatre demandes distinctes, demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler, d'une part, la décision du 15 mai 2019 par laquelle le ministre de l'intérieur a, sur recours préalable exercé devant la commission des recours des militaires à l'encontre de l'avis du 22 septembre 2017 de régularisation des charges du logement qu'il a occupé au sein de la caserne Damesme à Fontainebleau au titre de l'année 2012, en tant qu'il procède à la régularisation des charges sur le chauffage du logement, ramené la somme demandée, d'un montant de 2 746,15 euros à 1 681,25 euros et, d'autre part, la décision du 15 mai 2019 et les deux décisions du 29 octobre 2019 par lesquelles le ministre de l'intérieur a rejeté ses recours préalables exercés devant la commission des recours des militaires à l'encontre respectivement des avis des 2 février 2018, 7 août 2018 et 29 avril 2019 de régularisation des charges du logement qu'il a occupé à la caserne Damesme au titre des années 2013 à 2015, en tant qu'ils procèdent à la régularisation des charges sur le chauffage du logement. Par un jugement nos 1907792, 1907790, 1910659, 1910616 du 8 août 2022, le tribunal administratif de Melun a fait droit à ces demandes.

Par un arrêt n° 22PA04388 du 3 mars 2023, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le ministre de l'intérieur et des outre-mer contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 mai et 17 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de la défense ;

- le code l'énergie ;

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., colonel de gendarmerie, a bénéficié d'une concession de logement pour nécessité absolue de service au sein de la caserne à laquelle il était affecté entre le 29 novembre 2011 et le 18 février 2015. Par quatre avis de régularisation des charges d'occupation de logement au titre de cette concession des 22 septembre 2017, 2 février 2018, 7 août 2018 et 29 avril 2019, il a été reconnu débiteur des sommes de 2 746,15 euros, 1 812, 23 euros, 1 483,53 euros et 600,99 euros respectivement au titre des années 2012 à 2015, déterminées, s'agissant des frais de chauffage collectif au gaz, au prorata de la surface habitable du logement occupé par l'intéressé et du nombre de jours de présence. M. B... a formé un recours devant la commission des recours des militaires contre chacune de ces décisions. Par une décision du 15 mai 2019, le ministre de l'intérieur a réformé l'avis de régularisation des charges dues au titre de l'année 2012 en ramenant la somme à 1 681,25 euros et rejeté le surplus du recours de l'intéressé. Par une autre décision du 15 mai 2019 et deux décisions du 29 octobre 2019, le ministre de l'intérieur a rejeté les recours formés par l'intéressé contre les avis de régularisation des charges dues au titre des années 2013 à 2015. Par un jugement du 8 août 2022, le tribunal administratif de Melun a fait droit à la demande de M. B... tendant à l'annulation de ces quatre décisions des 15 mai et 29 octobre 2019 en tant qu'elles procèdent à la régularisation des charges sur le chauffage du logement occupé par M. B... au titre des années 2012 à 2015. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 mars 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté son appel formé contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 4145-2 du code de la défense : " Les officiers et sous-officiers de gendarmerie, du fait de la nature et des conditions d'exécution de leurs missions, sont soumis à des sujétions et des obligations particulières en matière d'emploi et de logement en caserne ". Aux termes de l'article D. 2124-75 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les personnels de tous grades de la gendarmerie nationale en activité de service et logés dans des casernements ou des locaux annexés aux casernements bénéficient d'une concession de logement par nécessité absolue de service ". Aux termes de l'article R. 2124-71 du même code : " Le bénéficiaire d'une concession de logement par nécessité absolue de service (...) supporte l'ensemble des réparations locatives et des charges locatives afférentes au logement qu'il occupe, déterminées conformément à la législation relative aux loyers des locaux à usage d'habitation (...) ". Enfin, aux termes de l'article D. 2124-75-1 de ce même code : " La gratuité du logement accordé en application de l'article D. 2124-75 s'étend à la fourniture de l'eau, à l'exclusion de toutes autres fournitures ".

3. Aux termes de l'article L. 241-9 du code de l'énergie, dans sa rédaction applicable au litige : " Tout immeuble collectif pourvu d'un chauffage commun doit comporter, quand la technique le permet, une installation permettant de déterminer la quantité de chaleur et d'eau chaude fournie à chaque local occupé à titre privatif./ Nonobstant toute disposition, convention ou usage contraires, les frais de chauffage et de fourniture d'eau chaude mis à la charge des occupants comprennent, en plus des frais fixes, le coût des quantités de chaleur calculées comme il est dit ci-dessus (...) ".

4. Aux termes de l'article R. 131-2 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au litige : " Tout immeuble collectif à usage principal d'habitation équipé d'un chauffage commun à tout ou partie des locaux occupés à titre privatif et fournissant à chacun de ces locaux une quantité de chaleur réglable par l'occupant doit être muni d'appareils permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif. / Ces appareils doivent permettre de mesurer la quantité de chaleur fournie ou une grandeur représentative de celle-ci ". Aux termes de l'article R. 131-7 de ce code, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - Dans les immeubles collectifs équipés des appareils prévus à l'article R. 131-2, les frais de chauffage afférents à l'installation commune sont divisés, d'une part, en frais de combustible ou d'énergie et, d'autre part, en autres frais de chauffage tels que les frais relatifs à la conduite et à l'entretien des installations de chauffage et les frais relatifs à l'utilisation d'énergie électrique (ou éventuellement d'autres formes d'énergie) pour le fonctionnement des appareillages, notamment les instruments de régulation, les pompes, les brûleurs et les ventilateurs./ II. - Les frais de combustible ou d'énergie sont répartis entre les locaux desservis en distinguant des frais communs et des frais individuels. / (...) Le total des frais individuels s'obtient par différence entre le total des frais de combustible ou d'énergie et les frais communs (...). Ce total est réparti en fonction des indications fournies par les appareils prévus à l'article R. 131-2 (...) ".

5. Pour juger que l'administration n'avait pu, sans méconnaitre les règles d'individualisation des charges de chauffage instituées par les dispositions du code de l'énergie et du code de la construction et de l'habitation citées aux points 3 et 4, se fonder sur les dispositions des circulaires du 3 janvier 2001 et du 28 décembre 2011 pour établir les avis de régularisation des charges notifiés à M. B..., la cour administrative d'appel de Paris a retenu qu'il était constant que le logement occupé par l'intéressé était, comme les autres logements de la caserne de gendarmerie, muni d'un appareil permettant d'individualiser les frais de chauffage collectif. En statuant ainsi, alors qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis que le logement de M. B... n'était pas doté d'un tel appareil, la cour a dénaturé les pièces du dossier.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 3 mars 2023 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 473838
Date de la décision : 06/03/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 mar. 2024, n° 473838
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Nicolas Labrune

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:473838.20240306
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