La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2023 | FRANCE | N°437248

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 14 avril 2023, 437248


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 437248, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 décembre 2019 et 20 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Betclic enterprises limited demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2019-1105 du 30 octobre 2019 décidant le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société anonyme La Française des jeux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1

du code de justice administrative.

2° Sous le n° 437430, par une requête sommaire et un ...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 437248, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 décembre 2019 et 20 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Betclic enterprises limited demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2019-1105 du 30 octobre 2019 décidant le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société anonyme La Française des jeux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 437430, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 janvier et 20 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Betclic enterprises limited demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 novembre 2019 fixant les modalités de transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société La Française des jeux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

3° Sous le n° 437827, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 janvier et 20 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Betclic enterprises limited demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 20 novembre 2019 fixant le prix et les modalités d'attribution d'actions de la société La Française des jeux ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution ;

- la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 ;

- l'ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Joachim Bendavid, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Betclic enterprises limited et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la SCP Spinosi, avocat de la société La Française des jeux.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 34 de la Constitution : " La loi fixe les règles concernant (...) les transferts de propriété d'entreprises du secteur public au secteur privé ". Aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique : " I. - Les opérations par lesquelles l'Etat transfère au secteur privé la majorité du capital d'une société ne peuvent être décidées par décret qu'après avoir été autorisées par la loi : / 1° Lorsque l'Etat détient directement, depuis plus de cinq ans, plus de la moitié du capital social de la société et si l'une des deux conditions suivantes est remplie : / a) Ses effectifs (...) sont supérieurs à cinq cents personnes au 31 décembre de l'année précédant le transfert ; / b) Son chiffre d'affaires (...) est supérieur à 75 millions d'euros à la date de clôture de l'exercice précédant le transfert ; / (...) ". En application de ces dispositions, le décret du 30 octobre 2019 a décidé le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société La Française des jeux, qui a été autorisé par le III de l'article 137 de la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises. Les conditions de mise en œuvre de cette opération de privatisation ont été précisées par l'arrêté du 6 novembre 2019, à la suite duquel l'arrêté du 20 novembre 2019 a fixé le prix des actions de la société La Française des jeux ainsi que les modalités d'attribution de celles-ci.

2. La société Betclic enterprises limited demande l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 30 octobre 2019 et des deux arrêtés des 6 et 20 novembre 2019.

3. Afin de justifier de son intérêt pour agir, la société requérante, qui est un opérateur de jeux en ligne agréé concurrent de la société La Française des jeux sur certaines de ses activités, se prévaut de ce que les actes attaqués seraient de nature à porter atteinte à ses intérêts " compte tenu de la modification des moyens financiers résultant de ce changement d'actionnariat et de la rénovation concomitante des conditions d'exploitation de la société La Française des jeux de ses droits exclusifs ". Toutefois les actes attaqués, qui ont pour seul objet de permettre la cession au secteur privé de la majorité du capital détenu par l'Etat, n'emportent, par eux-mêmes, pas de conséquence directe sur la concurrence qui s'exerce sur les marchés concernés par cette opération, ni sur les conditions d'exploitation par La Française des jeux du monopole que le I de l'article 137 de la loi du 22 mai 2019 lui a attribué sur les jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne ainsi que sur les jeux de pronostics sportifs commercialisés en réseau physique de distribution. Par suite, le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que la requérante ne justifie pas d'un intérêt suffisamment direct et certain lui donnant qualité pour demander l'annulation des actes qu'elle attaque.

4. Il résulte de ce qui précède que les requêtes de la société Betclic enterprises limited doivent être rejetées, y compris, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Betclic enterprises limited la somme de 3 000 euros à verser à la société La Française des jeux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : : Les requêtes n° 437248, 437430 et 437827 de la société Betclic enterprises limited sont rejetées.

Article 2 : La société Betclic enterprises limited versera à la société La Française des jeux une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Betclic enterprises limited, à la société La Française des jeux, à la Première ministre et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 17 mars 2023 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre ; M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Sophie-Caroline de Margerie, Mme Suzanne von Coester, Mme Fabienne Lambolez, conseillères d'Etat ; M. Olivier Yeznikian, M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat et M. Joachim Bendavid, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 14 avril 2023.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Joachim Bendavid

La secrétaire :

Signé : Mme Anne-Lise Calvaire


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 437248
Date de la décision : 14/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

NATIONALISATIONS ET ENTREPRISES NATIONALISÉES - PRIVATISATIONS - CONTESTATION DES ACTES RÉGLEMENTAIRES RELATIFS À LA PRIVATISATION DE LA FRANÇAISE DES JEUX PAR UN OPÉRATEUR DE JEUX EN LIGNE CONCURRENT SUR CERTAINES ACTIVITÉS - INTÉRÊT POUR AGIR - ABSENCE.

43-02 Société opératrice de jeux en ligne, concurrente de la société La Française des jeux sur certaines de ses activités, demandant l’annulation du décret n° 2019-1105 du 30 octobre 2019 décidant le transfert au secteur privé de la majorité du capital de cette dernière ainsi que des arrêtés des 6 et 20 novembre 2019 fixant, respectivement, les modalités de mise en œuvre de cette opération, et le prix et les modalités d’attribution d’actions de la société. Société qui, pour justifier de son intérêt à agir à l’encontre de ces actes réglementaires, se prévaut de ce qu’ils seraient de nature à porter atteinte à ses intérêts « compte tenu de la modification des moyens financiers résultant de ce changement d’actionnariat et de la rénovation concomitante des conditions d’exploitation de la société La Française des jeux de ses droits exclusifs »....Toutefois, les actes attaqués, qui ont pour seul objet de permettre la cession au secteur privé de la majorité du capital détenu par l’Etat, n’emportent, par eux-mêmes, pas de conséquence directe sur la concurrence qui s’exerce sur les marchés concernés par cette opération, ni sur les conditions d’exploitation par La Française des jeux du monopole que le I de l’article 137 de la loi du 22 mai 2019 lui a attribué sur les jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne ainsi que sur les jeux de pronostics sportifs commercialisés en réseau physique de distribution. ...Par suite, la société requérante ne justifie pas d’un intérêt suffisamment direct et certain lui donnant qualité pour demander l’annulation des actes qu’elle attaque.

PROCÉDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - INTÉRÊT POUR AGIR - ABSENCE D'INTÉRÊT - CONTESTATION DES ACTES RÉGLEMENTAIRES RELATIFS À LA PRIVATISATION DE LA FRANÇAISE DES JEUX PAR UN OPÉRATEUR DE JEUX EN LIGNE CONCURRENT SUR CERTAINES ACTIVITÉS [RJ1].

54-01-04-01 Société opératrice de jeux en ligne, concurrente de la société La Française des jeux sur certaines de ses activités, demandant l’annulation du décret n° 2019-1105 du 30 octobre 2019 décidant le transfert au secteur privé de la majorité du capital de cette dernière ainsi que des arrêtés des 6 et 20 novembre 2019 fixant, respectivement, les modalités de mise en œuvre de cette opération, et le prix et les modalités d’attribution d’actions de la société. Société qui, pour justifier de son intérêt à agir à l’encontre de ces actes réglementaires, se prévaut de ce qu’ils seraient de nature à porter atteinte à ses intérêts « compte tenu de la modification des moyens financiers résultant de ce changement d’actionnariat et de la rénovation concomitante des conditions d’exploitation de la société La Française des jeux de ses droits exclusifs »....Toutefois, les actes attaqués, qui ont pour seul objet de permettre la cession au secteur privé de la majorité du capital détenu par l’Etat, n’emportent, par eux-mêmes, pas de conséquence directe sur la concurrence qui s’exerce sur les marchés concernés par cette opération, ni sur les conditions d’exploitation par La Française des jeux du monopole que le I de l’article 137 de la loi du 22 mai 2019 lui a attribué sur les jeux de loterie commercialisés en réseau physique de distribution et en ligne ainsi que sur les jeux de pronostics sportifs commercialisés en réseau physique de distribution. ...Par suite, la société requérante ne justifie pas d’un intérêt suffisamment direct et certain lui donnant qualité pour demander l’annulation des actes qu’elle attaque.


Références :

[RJ1]

Rappr., s’agissant de l’approbation des statuts de La Française des jeux, CE, décision du même jour, Société Betclic Entreprises Limited, n° 439237, à mentionner aux Tables.


Publications
Proposition de citation : CE, 14 avr. 2023, n° 437248
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Joachim Bendavid
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER ; SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP SPINOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 21/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:437248.20230414
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award