La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/11/2022 | FRANCE | N°444902

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 15 novembre 2022, 444902


Vu la procédure suivante :

La société Kimmolux a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droit et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012. Par un jugement n° 1608055 du 22 décembre 2017, le tribunal administratif de Montreuil, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la société Kimmolux à hauteur du dégrèvement accordé en cours d'instance, a rejeté le surplus de ses demandes.


Par un arrêt n° 18VE00674 du 30 juin 2020, la cour administrative d'appel de Ve...

Vu la procédure suivante :

La société Kimmolux a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droit et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010, 2011 et 2012. Par un jugement n° 1608055 du 22 décembre 2017, le tribunal administratif de Montreuil, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de la société Kimmolux à hauteur du dégrèvement accordé en cours d'instance, a rejeté le surplus de ses demandes.

Par un arrêt n° 18VE00674 du 30 juin 2020, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par la société Kimmolux contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 septembre et 28 décembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Kimmolux demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention entre la 'France et le grand-duché de Luxembourg tendant à éviter les doubles impositions et à établir des règles 'd'assistance administrative réciproque en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune du 1er avril ''1958 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Christelle Thomas, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Didier-Pinet, avocat de la société Kimmolux ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 31 octobre 2022, présentée par la société Kimmolux ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Kimmolux, qui exerce une activité de location de biens immobiliers, est notamment propriétaire, à Thionville, d'immeubles à usage d'habitation et commercial au titre desquels elle a été assujettie à l'impôt sur les sociétés en France à compter du 1er janvier 2008. Elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 30 juin 2020 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre le jugement du tribunal administratif de Montreuil en date du 22 décembre 2017 en ce qu'il n'a pas fait droit à sa demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2010 et 2011.

2. En vertu du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige, pour la détermination du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés, le déficit subi et constaté fiscalement pendant un exercice peut être considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit, à ce titre, du bénéfice réalisé lors de cet exercice.

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'activité de location de biens immobiliers exercée en France par la société Kimmolux, société de droit luxembourgeois créée en 2004, est devenue imposable en France à partir du 1er janvier 2008, date d'entrée en vigueur de la nouvelle rédaction de l'article 3 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise, issue de l'avenant du 24 novembre 2006, dont le paragraphe 2 stipule désormais que le principe de l'imposition des biens immobiliers dans le seul Etat où sont situés les biens concernés s'applique également aux " revenus provenant de l'exploitation et de l'aliénation des biens immobiliers d'une entreprise ". Pour établir sa première déclaration au titre de l'exercice 2008, la société requérante a procédé au retraitement de ses écritures comptables afin d'isoler l'actif net relatif à ses opérations imposables en France ainsi que les charges et produits qui s'y rapportent. A ce titre, elle a inscrit à son bilan de clôture de l'exercice 2008 un report à nouveau déficitaire correspondant à des pertes comptables calculées au titre de son activité française pour les exercices antérieurs à 2008. Toutefois, dès lors que son activité n'est devenue imposable en France qu'à partir du 1er janvier 2008 et que le report à nouveau déficitaire dont la société entendait se prévaloir ne pouvait, par suite, correspondre à un déficit fiscal constaté au sens du troisième alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts précité, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la société ne pouvait déduire ce report à nouveau de son premier résultat imposable.

4. En second lieu, aux termes de l'article 38 quinquies de l'annexe III au code général des impôts : " Les immobilisations sont inscrites au bilan pour leur valeur d'origine. / Cette valeur d'origine s'entend : Pour les immobilisations acquises à titre onéreux par l'entreprise, du coût d'acquisition, c'est-à-dire du prix d'achat majoré des frais accessoires nécessaires à la mise en état d'utilisation du bien (...) ". Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la société Kimmolux n'avait pas inscrit au premier bilan communiqué à l'administration fiscale, au titre de l'exercice clos en 2008, le terrain qu'elle avait acquis en 2007 à Thionville. Si elle faisait valoir dans ses écritures devant la cour que cette omission était sans incidence sur le montant de son actif net à raison des opérations de retraitement de sa comptabilité luxembourgeoise, elle n'apportait aucun élément à l'appui de cette allégation. Par suite, en jugeant que ce défaut d'inscription entraînait une variation de la valeur de l'actif net de la société autorisant l'administration fiscale à procéder à la correction de cet actif au bilan de clôture de l'exercice clos en 2010, premier exercice non prescrit, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Kimmolux n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Kimmolux est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Kimmolux et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 17 octobre 2022 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta, Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; Mme Nathalie Escaut, M. Thomas Andrieu, M. Alexandre Lallet, M. Nicolas Polge, M. Alain Seban, conseillers d'Etat et Mme Christelle Thomas, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 15 novembre 2022.

Le président :

Signé : M. Jacques-Henri Stahl

La rapporteure :

Signé : Mme Christelle Thomas

La secrétaire :

Signé : Mme Claudine Ramalahanoharana


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 444902
Date de la décision : 15/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. - RÈGLES GÉNÉRALES. - IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES. - DÉTERMINATION DU BÉNÉFICE IMPOSABLE. - REPORT À NOUVEAU DE DÉFICIT (ART. 209 DU CGI) – POSSIBILITÉ DE REPORTER DES PERTES NÉES AU COURS D’EXERCICES CLOS AVANT QUE LA SOCIÉTÉ NE DEVIENNE IMPOSABLE EN FRANCE – ABSENCE.

19-04-01-04-03 En vertu du troisième alinéa du I de l’article 209 du code général des impôts (CGI), pour la détermination du bénéfice imposable à l’impôt sur les sociétés, le déficit subi et constaté fiscalement pendant un exercice peut être considéré comme une charge de l’exercice suivant et déduit, à ce titre, du bénéfice réalisé lors de cet exercice....Activité exercée en France par une société de droit luxembourgeois devenue imposable en France à partir du 1er janvier 2008, date d’entrée en vigueur de la nouvelle rédaction de l’article 3 de la convention fiscale franco-luxembourgeoise, issue de l’avenant du 24 novembre 2006. Pour établir sa première déclaration au titre de l’exercice 2008, société ayant procédé au retraitement de ses écritures comptables afin d’isoler l’actif net relatif à ses opérations imposables en France ainsi que les charges et produits qui s’y rapportent. A ce titre, société ayant inscrit à son bilan de clôture de l’exercice 2008 un report à nouveau déficitaire correspondant à des pertes comptables calculées au titre de son activité française pour les exercices antérieurs à 2008. ...Toutefois, dès lors que son activité n’est devenue imposable en France qu’à partir du 1er janvier 2008 et que le report à nouveau déficitaire dont la société entendait se prévaloir ne pouvait, par suite, correspondre à un déficit fiscal constaté au sens du troisième alinéa du I de l’article 209 du CGI, la société ne pouvait déduire ce report à nouveau de son premier résultat imposable.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 nov. 2022, n° 444902
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Christelle Thomas
Rapporteur public ?: M. Laurent Domingo
Avocat(s) : SARL DIDIER-PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:444902.20221115
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award