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07/10/2021 | FRANCE | N°450317

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 07 octobre 2021, 450317


Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Versailles, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 22 octobre 2020 rejetant le compte de campagne de M. A... C..., candidat tête de liste aux élections municipales qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune de Longjumeau (Essonne).

Par un jugement n° 2007428 du 2 février 2021, ce tribunal a confirmé le bien-fondé du rejet du compte de campagne, déclaré M. C... inéligible pour une dur

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Par une requête, enregis...

Vu la procédure suivante :

La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a saisi le tribunal administratif de Versailles, sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, de sa décision du 22 octobre 2020 rejetant le compte de campagne de M. A... C..., candidat tête de liste aux élections municipales qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune de Longjumeau (Essonne).

Par un jugement n° 2007428 du 2 février 2021, ce tribunal a confirmé le bien-fondé du rejet du compte de campagne, déclaré M. C... inéligible pour une durée de six mois, et proclamé élu M. B... D....

Par une requête, enregistrée le 2 mars 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de juger qu'il n'y a pas lieu de le déclarer inéligible ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code électoral ;

- la loi n° 2019-1269 du 2 décembre 2019 ;

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sébastien Jeannard, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que, par une décision du 22 octobre 2020, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. C..., tête de la liste " Longjumeau initiatives citoyennes " ayant recueilli 14,20 % des suffrages exprimés et deux sièges au conseil municipal à l'issue des opérations électorales qui se sont tenues le 15 mars 2020 dans la commune de Longjumeau, au motif que ce compte n'avait pas été présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-12 du code électoral. Saisi par cette commission sur le fondement de l'article L. 52-15 du code électoral, le tribunal administratif de Versailles a, par un jugement du 2 février 2021, confirmé le rejet du compte de campagne de M. C..., déclaré ce dernier inéligible pour une durée de six mois en application des dispositions de l'article L. 118-3 du code électoral et a, par voie de conséquence, l'a déclaré démissionnaire d'office et a proclamé élu M. D..., suivant de liste. M. C... relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 52-12 du code électoral, dans sa rédaction applicable aux opérations en litige : " Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection (...). La même obligation incombe au candidat ou au candidat tête de liste dès lors qu'il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8 du présent code selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts. (...) / Au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin, chaque candidat ou candidat tête de liste présent au premier tour dépose à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques son compte de campagne et ses annexes accompagné des justificatifs de ses recettes (...). Le compte de campagne est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés ; celui-ci met le compte de campagne en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n'est pas nécessaire lorsque aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne. Dans ce cas, le mandataire établit une attestation d'absence de dépense et de recette. Cette présentation n'est pas non plus nécessaire lorsque le candidat ou la liste dont il est tête de liste a obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés et qu'il n'a pas bénéficié de dons de personnes physiques selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts (...) ".

3. Aux termes de l'article L. 118-3 du code électoral, dans sa rédaction applicable au litige, issue de la loi du 2 décembre 2019 visant à clarifier diverses dispositions du droit électoral : " Lorsqu'il relève une volonté de fraude ou un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible : / 1° Le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 ; / 2° Le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales ; / 3° Le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit. / L'inéligibilité mentionnée au présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. (...) ".

4. En application de ces dispositions, en dehors des cas de fraude, le juge de l'élection ne peut prononcer l'inéligibilité d'un candidat sur le fondement de ces dispositions que s'il constate un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Il lui incombe à cet effet de prendre en compte l'ensemble des circonstances de l'espèce et d'apprécier s'il s'agit d'un manquement caractérisé à une règle substantielle relative au financement des campagnes électorales et s'il présente un caractère délibéré.

5. En premier lieu, il résulte de l'instruction qu'alors même que la liste conduite par M. C... a obtenu plus de 1 % des suffrages exprimés, son compte de campagne n'a pas été présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés, en méconnaissance des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 52-12 du code électoral. Compte tenu de l'absence d'ambiguïté de la règle applicable et du caractère substantiel de la formalité ainsi méconnue, laquelle est destinée à assurer un contrôle effectif des comptes de campagne par la commission dans le délai limité qui lui est imparti, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté à bon droit le compte de campagne de M. C....

6. En second lieu, M. C... fait valoir sa méconnaissance de la formalité en cause, ses activités liées à son élection au conseil municipal et à l'hôpital local, la modicité des sommes inscrites sur son compte de campagne et l'absence d'autre irrégularité. Il résulte toutefois de l'instruction que la Commission des comptes de campagne et des financements politiques lui a, dans le cadre de la procédure contradictoire prévue à l'article L. 52-15, rappelé son obligation et l'a invité à régulariser la présentation de son compte par deux courriers des 23 juillet et 16 septembre 2020, en lui précisant qu'elle était susceptible de prononcer le rejet de son compte. Par suite, le manquement de M. C... à la règle substantielle posée à l'article L. 52-12 du code électoral présente un caractère délibéré constituant un manquement d'une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le tribunal administratif de Versailles l'a déclaré inéligible pour une durée de six mois, l'a en conséquence déclaré démissionnaire d'office de son mandat de conseiller municipal de Longjumeau et a proclamé élu, en application des dispositions de l'article L. 270 du code électoral, M. B... D..., suivant de liste.

7. Les conclusions présentées par M. C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent par suite qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... C... et à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et à M. B... D....


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 450317
Date de la décision : 07/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 oct. 2021, n° 450317
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien Jeannard
Rapporteur public ?: M. Vincent Villette

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2021:450317.20211007
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