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23/07/2014 | FRANCE | N°371460

France | France, Conseil d'État, 2ème / 7ème ssr, 23 juillet 2014, 371460


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 août et 20 novembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1103868 du 20 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 13 octobre 2011 par lequel le maire de Monteux l'a placé en congé de maladie ordinaire à compter du 2 novembre 2010, annulant et remplaçant les arrêtés pour accidents d

u travail du 3 novembre 2010 au 25 octobre 2011 ;

2°) réglant l'affaire ...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 août et 20 novembre 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. B...A..., demeurant ... ; M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le jugement n° 1103868 du 20 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 13 octobre 2011 par lequel le maire de Monteux l'a placé en congé de maladie ordinaire à compter du 2 novembre 2010, annulant et remplaçant les arrêtés pour accidents du travail du 3 novembre 2010 au 25 octobre 2011 ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Monteux la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes ;

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de M.A..., et à Me Ricard, avocat de la commune de Monteux ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., gardien de police municipale à Monteux (Vaucluse), a été placé par des arrêtés successifs du maire de Monteux en position d'arrêt de travail pour accident de service du 31 mai 2007 au 21 décembre 2007, du 22 février 2008 au 4 juillet 2008 et du 2 novembre 2010 au 25 octobre 2011, au titre d'une entorse du genou survenue en service le 31 mai 2007 ; que, toutefois, à la suite de l'avis défavorable émis le 6 octobre 2011 par la commission de réforme et relatif à l'imputabilité au service de l'état de santé de M.A..., le maire de Monteux a, par arrêté du 13 octobre 2011, placé ce dernier en congé de maladie ordinaire à compter du 2 novembre 2010 et a annulé les dix sept arrêtés relatifs à la période postérieure au 2 novembre 2010 ; que M. A... a demandé l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision devant le tribunal administratif de Nîmes ; qu'il se pourvoit en cassation contre le jugement du 20 juin 2013 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit :/ ...2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales... " ; que l'article 16 du décret du 30 juillet 1987 précise que : " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, la commission de réforme prévue par le décret n° 65-773 du 9 septembre 1965 susvisé est obligatoirement consultée dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 57 (2°, 2e alinéa) de la loi du 26 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui lui est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin du service de médecine professionnelle et préventive compétent à l'égard du fonctionnaire concerné. Lorsque l'administration est amenée à se prononcer sur l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident, elle peut, en tant que de besoin, consulter un médecin expert agréé. La commission de réforme n'est pas consultée lorsque l'imputabilité au service d'une maladie ou d'un accident est reconnue par l'administration. La commission de réforme peut, en tant que de besoin, demander à l'administration de lui communiquer les décisions reconnaissant l'imputabilité " ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées, d'une part, que la décision refusant à un fonctionnaire le bénéfice de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 doit être regardée comme refusant un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir, au sens de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; qu'elle est ainsi au nombre des décisions qui, en application de cet article, doivent être motivées ; que, d'autre part, l'administration, lorsqu'elle se prononce sur l'imputabilité au service de l'accident ou de la maladie du fonctionnaire dans le cas mentionné au 2° du 2ème alinéa de l'article 57 doit obligatoirement recueillir l'avis de la commission de réforme, sans être toutefois liée par cet avis ;

4. Considérant qu'il ressort des énonciations du jugement attaqué que, pour retenir que l'arrêté du 13 octobre 2011, fondé sur l'unique motif de la nécessité de " mettre en conformité la situation de M. A...au regard de l'avis émis par la commission de réforme " le 6 octobre 2011, devait être regardé comme suffisamment motivé, le tribunal administratif a considéré que le maire de la commune se trouvait en situation de compétence liée ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que, ce faisant, le tribunal administratif a commis une erreur de droit ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 juin 2013 doit être annulé ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu'il ressort de la motivation de l'arrêté litigieux du 13 octobre 2011 que le maire de Monteux s'est cru, à tort, lié par l'avis de la commission de réforme ; qu'il a ainsi méconnu l'étendue de ses pouvoirs ;

7. Considérant, au surplus, que les dix-sept arrêtés successifs par lesquels M. A... a été placé en congé pour accident de travail du 2 novembre 2010 au 18 octobre 2011 sont des décisions créatrices de droits à son profit ; que, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande du bénéficiaire, l'administration ne peut retirer une décision individuelle explicite créatrice de droits, si elle est illégale, que dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision ; que, par suite, l'arrêté litigieux, en tant qu'il procède au retrait des treize arrêtés du 3 novembre 2010, du 22 novembre 2010, du 25 novembre 2010, du 4 janvier 2011, du 7 février 2011, du 2 mars 2011, du 21 mars 2011, du 18 avril 2011, du 22 avril 2011, du 9 mai 2011, du 24 mai 2011, du 31 mai 2011 et du 7 juin 2011, antérieurs de plus de quatre mois à la décision litigieuse est, en tout état de cause et dans cette mesure, entaché d'illégalité ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la demande, que M. A...est fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté attaqué ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Monteux la somme de 3 000 euros à verser à M. A...au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 20 juin 2013 et l'arrêté du maire de Monteux du 13 octobre 2011 sont annulés.

Article 2 : La commune de Monteux versera à M. A...la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la commune de Monteux présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Monteux et à M. B...A....


Synthèse
Formation : 2ème / 7ème ssr
Numéro d'arrêt : 371460
Date de la décision : 23/07/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ACTES - ACTES ADMINISTRATIFS - CLASSIFICATION - ACTES INDIVIDUELS OU COLLECTIFS - ACTES CRÉATEURS DE DROITS - ARRÊTÉ PLAÇANT UN AGENT PUBLIC EN CONGÉ POUR ACCIDENT DE SERVICE.

01-01-06-02-01 L'arrêté plaçant un agent en congé pour accident de service est une décision créatrice de droits au profit de l'agent. Par suite, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande de l'agent, l'administration ne peut retirer un tel arrêté, s'il est illégal, que dans le délai de quatre mois suivant son adoption [RJ1].

ACTES LÉGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - DISPARITION DE L'ACTE - RETRAIT - RETRAIT DES ACTES CRÉATEURS DE DROITS - RÈGLES ISSUES DE LA JURISPRUDENCE TERNON [RJ1] - CHAMP - ARRÊTÉS PLAÇANT UN AGENT PUBLIC EN CONGÉ POUR ACCIDENT DE SERVICE - INCLUSION.

01-09-01-02 L'arrêté plaçant un agent en congé pour accident de service est une décision créatrice de droits au profit de l'agent. Par suite, sous réserve de dispositions législatives ou réglementaires contraires, et hors le cas où il est satisfait à une demande de l'agent, l'administration ne peut retirer un tel arrêté, s'il est illégal, que dans le délai de quatre mois suivant son adoption [RJ1].


Références :

[RJ1]

Cf. CE, Assemblée, 26 octobre 2001, Ternon, n° 197178, p. 497.


Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2014, n° 371460
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Paul Bernard
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : RICARD ; SCP BORE, SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2014:371460.20140723
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