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12/06/2020 | FRANCE | N°19MA01918

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre, 12 juin 2020, 19MA01918


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 mars 2017 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer l'autorisation unique d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent de huit aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Villeneuve-les-Corbières.

Par un jugement n° 1702254 du 26 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a a

nnulé l'arrêté du 17 mars 2017 et a enjoint au préfet de l'Aude de reprendre l'instructi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 17 mars 2017 par lequel le préfet de l'Aude a refusé de lui délivrer l'autorisation unique d'exploiter une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent de huit aérogénérateurs sur le territoire de la commune de Villeneuve-les-Corbières.

Par un jugement n° 1702254 du 26 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 17 mars 2017 et a enjoint au préfet de l'Aude de reprendre l'instruction de la demande de la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve dans le délai d'un mois à compter de sa notification.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 avril 2019 et le 28 mai 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 février 2019 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve devant le tribunal administratif de Montpellier.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- le tribunal administratif a fait une interprétation erronée des dispositions du premier alinéa de l'article 4.2.1. de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 en ne donnant pas à l'interdiction qu'elles énoncent la portée qui est la leur et s'est fondé à tort sur les dispositions des deuxième et troisième alinéa du même arrêté qui n'étaient pas applicables en l'espèce ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que l'impact du projet sur la radiodétection n'était pas établi et que Météo France n'en apportait pas la preuve ;

- le projet porte atteinte au patrimoine et au paysage contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2019, la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre de la transition écologique et solidaire ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;

- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;

- le décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement ;

- l'arrêté du 26 août 2011 du ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de M. D..., représentant la société Parc éolien de la Vallée [0]du Paradis Villeneuve.

Une note en délibéré présentée pour la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve a été enregistrée le 3 juin 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Sur le fondement des dispositions de l'ordonnance du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement, le préfet de l'Aude a, par un arrêté du 17 mars 2017, refusé de délivrer à la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve l'autorisation unique d'exploiter, sur le territoire de la commune de Villeneuve-les-Corbières, une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent de huit aérogénérateurs. Par un jugement du 26 février 2019, le tribunal administratif de Montpellier a, à la demande de la société, annulé cet arrêté et enjoint au préfet de l'Aude de reprendre l'instruction de la demande dans le délai d'un mois. Le ministre de la transition écologique et solidaire relève appel de ce jugement.

Sur le cadre juridique du litige :

2. L'ordonnance du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement a prévu que, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, plusieurs types de projets, notamment les projets d'installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumises à l'autorisation au titre de l'article L. 512-1 du code de l'environnement sont autorisés par un arrêté préfectoral unique, dénommé " autorisation unique ". Elle vaut autorisation au titre de l'article L. 512-1 du code de l'environnement et, le cas échéant, permis de construire au titre de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, autorisation de défrichement au titre des articles L. 214-13 et L. 341-3 du code forestier, autorisation d'exploiter au titre de l'article L. 311-1 du code de l'énergie, approbation au titre de l'article L. 323-11 du même code et dérogation au titre du 4° de l'article L. 411-2 du code de l'environnement. En application de ces dispositions, le décret du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement a fixé le contenu du dossier de demande d'autorisation unique et les modalités de son instruction ainsi que de sa délivrance par le préfet.

3. Les dispositions de l'ordonnance du 26 janvier 2017, codifiées aux articles L. 181-1 et suivants du code de l'environnement, instituent une autorisation environnementale dont l'objet est de permettre qu'une décision unique tienne lieu de plusieurs décisions auparavant distinctes dans les conditions qu'elles précisent. L'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 précise les conditions d'entrée en vigueur de ces dispositions : " Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : / 1° Les autorisations délivrées au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement dans leur rédaction antérieure à la présente ordonnance, ou au titre de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014, avant le 1er mars 2017, sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d'opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l'article L. 181-2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ; / 2° Les demandes d'autorisation au titre du chapitre IV du titre Ier du livre II ou du chapitre II du titre Ier du livre V du code de l'environnement, ou de l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ou de l'ordonnance n° 2014-619 du 12 juin 2014 régulièrement déposées avant le 1er mars 2017 sont instruites et délivrées selon les dispositions législatives et réglementaires dans leur rédaction antérieure à l'entrée en vigueur de la présente ordonnance ; après leur délivrance, le régime prévu par le 1° leur est applicable ; / (...) ". Sous réserve des dispositions de son article 15 précité, l'article 16 de la même ordonnance abroge les dispositions de l'ordonnance du 20 mars 2014 relatives à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement.

4. En vertu de l'article L. 181-17 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017 et applicable depuis le 1er mars 2017, l'autorisation environnementale est soumise, comme l'autorisation l'unique l'était avant elle ainsi que les autres autorisations mentionnées au 1° de l'article 15 de cette même ordonnance, à un contentieux de pleine juridiction. Il appartient, dès lors, au juge du plein contentieux d'apprécier le respect des règles de procédure régissant la demande d'autorisation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle l'autorité administrative statue sur cette demande et celui des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce.

Sur les motifs d'annulation retenus par le tribunal administratif :

5. Pour annuler l'autorisation en litige, le tribunal administratif s'est fondé sur trois motifs tirés, d'une part, de ce qu'il n'était pas établi que les éoliennes projetées perturberaient de manière significative le fonctionnement du radar d'Opoul-Périllos, d'autre part de ce que le préfet avait commis une erreur d'appréciation en estimant que l'atteinte aux paysages et au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants pouvait justifier le refus contesté et enfin de ce qu'il avait commis une erreur de droit en se fondant sur l'absence d'un dispositif de découplage des installations du pétitionnaire.

6. D'une part, le I de l'article L. 181-3 du code l'environnement, dans sa version en vigueur à la date du présent arrêt, dispose que : " L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1, selon les cas (...) ". Aux termes de l'article L. 511-1 de ce code " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. (...) ". Selon l'article L. 511-2 du même code : " Sont soumises à autorisation les installations qui présentent de graves dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 (...) ". En vertu de l'article L. 515-44 dudit code, les installations terrestres de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent dont la hauteur des mâts dépasse 50 mètres sont soumises à autorisation au titre de l'article L. 511-2. Enfin aux termes de l'article L. 512-5 du code : " Pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, le ministre chargé des installations classées peut fixer par arrêté, après consultation des ministres intéressés et du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques, les règles générales et prescriptions techniques applicables aux installations soumises aux dispositions de la présente section. (...) ".

7. D'autre part, aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 26 août 2011 du ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, mentionné ci-dessus, dans sa rédaction issue d'un arrêté du 6 novembre 2014 : " L'installation est implantée de façon à ne pas perturber de manière significative le fonctionnement des radars et des aides à la navigation utilisés dans le cadre des missions de sécurité de la navigation aérienne et de sécurité météorologique des personnes et des biens (...) / 4-2-1. Afin de satisfaire au premier alinéa du présent article, l'implantation des aérogénérateurs est interdite à l'intérieur de la surface définie par la distance de protection précisée au tableau II de l'article 4 sauf avis favorable délivré par l'établissement public chargé des missions de l'Etat en matière de sécurité météorologique des personnes et des biens. / Afin de satisfaire au premier alinéa du présent article, les aérogénérateurs sont implantés dans le respect des distances minimales d'éloignement indiquées dans le tableau II ci-dessous, sauf si l'exploitant fournit une étude des impacts cumulés sur les risques de perturbations des radars météorologiques par les aérogénérateurs implantés en deçà des distances minimales d'éloignement indiquées dans le tableau II ci-dessous (...) ".

8. Il résulte de ces dispositions et du tableau II auquel elles renvoient, que l'implantation d'aérogénérateurs en-deçà de la distance de protection d'un radar météorologique de bande fréquence S, fixée à 10 kilomètres, est en principe interdite, sauf avis favorable donné à titre dérogatoire par l'établissement public chargé des missions de l'Etat en matière de sécurité météorologique des personnes et des biens, en l'espèce Météo France. En revanche, lorsqu'une telle implantation est envisagée au-delà de cette distance de protection, mais en deçà de la distance minimale d'éloignement, fixée à 30 kilomètres, le demandeur de l'autorisation d'exploiter doit fournir au préfet compétent une étude d'impact. Dans ce dernier cas, la saisine pour avis de Météo France n'est prévue que dans l'hypothèse où l'étude d'impact n'a pas été réalisée selon une méthode reconnue par le ministre chargé des installations classées pour la protection de l'environnement dans les conditions définies à l'article 4-2-2 de l'arrêté.

9. Enfin, selon l'article 8 du décret du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement, applicable à la date du refus de délivrance de l'autorisation sollicitée : " Le cas échéant, le dossier de demande (...) est complété par les pièces suivantes, lorsque le demandeur les détient : 5° Pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, l'accord des opérateurs radars et de VOR lorsqu'il est requis, au titre de la sécurité de la navigation aérienne et de la sécurité météorologique, par les prescriptions fixées par l'arrêté ministériel pris en application de l'article L. 512-5 du code de l'environnement ". Le 3° du II de l'article 10 du même décret dispose que : " Le représentant de l'Etat dans le département (...) sollicite les accords mentionnés à l'article 8, lorsque le dossier ne les comporte pas. Ces accords sont délivrés dans les deux mois. Ils sont réputés donnés au-delà de ce délai. Les désaccords sont motivés ". Aux termes du I de l'article 12 de ce décret : " Le représentant de l'Etat dans le département rejette la demande d'autorisation unique en cas de désaccord consécutif aux consultations menées conformément aux 2° et 3° du II de l'article 10. Ce rejet est motivé par l'indication des éléments mentionnés dans ce ou ces désaccords ".

10. Il résulte de ces dispositions que le préfet compétent pour délivrer l'autorisation unique relative à une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent dont la hauteur des mâts dépasse 50 mètres doit, lorsque que l'implantation d'aérogénérateurs est envisagée en-deçà de la distance de protection d'un radar météorologique, saisir de la demande Météo France, afin de recueillir, le cas échéant, son accord. A défaut d'accord, le préfet compétent est tenu de refuser de délivrer l'autorisation unique.

11. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport du 15 mars 2017 de l'inspection des installations classées, que quatre des huit aérogénérateurs que la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve envisage d'implanter, référencés VC3, VC4, VC5 et VC8, sont situés à moins de 10 kilomètres du radar météorologique de bande de fréquence S d'Opoul-Périllos, soit en deçà de la distance minimale de protection fixée par l'article 4 de l'arrêté du 26 août 2011. En application des dispositions rappelées au point précédent, l'implantation des aérogénérateurs dans cette zone est en principe interdite, sauf accord de Météo France. Saisi dans le cadre de l'instruction de la demande présentée par la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve, l'établissement public a fait part de son désaccord sur ce projet par lettre du 11 février 2017.

12. Lorsque, comme en l'espèce, la délivrance d'une autorisation administrative est subordonnée à l'accord préalable d'une autre autorité, des moyens tirés de la régularité et du bien-fondé d'un tel accord, qui s'impose à l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation, peuvent être invoqués devant le juge saisi de cette décision, quel que soit le sens de la décision prise par l'autorité compétente pour statuer sur la demande d'autorisation.

13. L'interdiction d'implantation des aérogénérateurs en-deçà de la distance de protection d'un radar météorologique résultant du premier alinéa du paragraphe 4.2.1. de l'article 4 précité de l'arrêté du 26 août 2011 est justifiée par les perturbations radioélectriques que ceux-ci entraînent, celles-ci étant elles-mêmes déterminées, outre par la nature et le fonctionnement des ouvrages en cause, par leur hauteur et leur emplacement par rapport aux radars existants. Si selon ces même dispositions, Météo France a la faculté de déroger à cette interdiction, il résulte de la note d'analyse jointe à son avis émis le 11 février 2017 sur le projet en litige, que l'établissement public est favorable aux projets situés dans les zones de protection des radars météorologiques seulement dans le cas où les aérogénérateurs ne produisent pas d'échos radars d'intensité supérieure au bruit de mesure, ce qui suppose qu'aucune des éoliennes projetées ne soit en visibilité radioélectrique du radar. Ce faisant, et sans ajouter à la loi, Météo France s'est borné à édicter des lignes directrices par lesquelles l'établissement public a fixé, sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, des critères pour définir les conditions dans lesquelles il entend mettre en oeuvre les prérogatives dont il est investi. L'implantation d'éoliennes en zone de protection d'un radar n'est accordée que dans le cadre d'un régime d'exception, qui doit dès lors être d'interprétation stricte. En prévoyant qu'il sera favorable aux projets éoliens situés dans une zone de protection au regard du seul critère de visibilité radioélectrique du radar, ainsi que le recommande d'ailleurs un rapport du 19 septembre 2005 de l'agence nationale des fréquences (ANFR), Météo France n'a commis ni erreur de droit ni erreur d'appréciation.

14. En l'espèce, Météo France a refusé son accord au projet au motif que les quatre aérogénérateurs référencés VC3, VC4, VC5 et VC8 situés dans la zone de protection du radar de Opoul-Périllos étaient en visibilité radioélectrique de ce radar et donc susceptibles de perturber de manière significative la capacité de mesure de l'instrument.

15. Si la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve soutient qu'elle envisage de recourir à des éoliennes dites furtives, dont le caractère réfléchissant aux ondes radars sera réduit à un point tel que l'impact final pourra être considéré comme négligeable, d'une part, cette allégation n'est pas corroborée par les évaluations en cours de cette technologie qui ne démontrent au mieux qu'une réduction partielle de l'impact sur les observations radar, laquelle n'intervient en outre que dans des conditions spécifiques fortement influencées par le contexte géographique du lieu d'implantation des aérogénérateurs, ainsi que le relève d'ailleurs Météo France dans un nouvel avis émis le 13 mai 2019 sur le projet en cause. D'autre part, il résulte de l'instruction que l'étude d'impact produite par la société repose sur l'application à un parc d'éoliennes dite furtives, de la modélisation utilisée pour des éoliennes conventionnelles selon une méthode agréée par l'administration. Toutefois l'application d'une telle méthode à des aérogénérateurs d'une technologie et d'un comportement différents de ceux pour laquelle elle a été conçue prive de caractère pertinent les résultats de cette étude et ne remettent pas sérieusement en cause les analyses de Météo France. Le projet envisagé est ainsi de nature à perturber de manière significative le fonctionnement du radar de Opoul-Périllos. Par suite, c'est par une exacte application des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 26 août 2011 que Météo France a refusé de donner son accord à ce projet.

16. Il résulte de ce qui a été dit au point 10, qu'en l'absence d'accord de Météo France, le préfet de l'Aude était tenu de refuser de délivrer l'autorisation sollicitée. A cet égard, est sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige la circonstance que les éoliennes référencées VC1, VC2, VC6 et VC7, à la différence de celles référencées VC3, VC4, VC5 et VC8, ne sont pas situées en zone de protection, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas soutenu que le projet serait divisible. Par suite, si le préfet s'est également fondé, pour refuser l'autorisation sollicitée, sur le motif tiré de ce " que l'installation projetée présente un impact significatif sur les enjeux paysagers et patrimoniaux " ainsi que sur l'absence d'un dispositif de découplage des installations du pétitionnaire, le bien-fondé de ces motifs est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de sa décision de refus.

17. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur les motifs mentionnés au point 5 pour annuler l'arrêté du 17 mars 2017 du préfet de l'Aude.

18. Il appartient toutefois à la Cour, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens présentés par la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve devant le tribunal administratif.

Sur les autres moyens invoqués par la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve :

19. Comme il a été dit plus haut, le préfet de l'Aude était tenu de refuser l'autorisation sollicitée. Par suite, les moyens tirés de ce que l'auteur de l'arrêté en litige n'aurait pas reçu régulièrement délégation de signature, que l'étude d'impact ne présentait aucune insuffisance dans son volet " étude paysagère ", qu'aucune demande tendant à compléter cette étude ne lui a été adressée, que l'avis de l'autorité environnementale n'a pas été régulièrement sollicitée, que le caractère contradictoire de la procédure n'a pas été respecté, que cet arrêté est entaché d'un défaut de motivation sont, en tout état de cause, inopérants.

20. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 17 mars 2017 du préfet de l'Aude.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier n° 1702254 du 26 février 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.

Article 3 : Les conclusions de la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre de la transition écologique et solidaire et à la société Parc éolien de la Vallée du Paradis Villeneuve.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2020, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. B..., président assesseur,

- Mme C..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 juin 2020.

2

N° 19MA01918

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA01918
Date de la décision : 12/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - motifs - Pouvoirs et obligations de l'administration - Compétence liée.

Energie.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SELAS LPA-CGR AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-06-12;19ma01918 ?
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