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12/04/1995 | FRANCE | N°CETATEXT000007609670

France | France, Cour de discipline budgétaire et financière, 12 avril 1995, CETATEXT000007609670


Vu la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948 modifiée tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat et de diverses collectivités et portant création d'une Cour de discipline budgétaire et financière ;

Sur le déféré :
Considérant que M. Z... a fait valoir que des vices de forme auraient affecté la décision prise par la deuxième chambre de la Cour des comptes dans sa séance du 15 février 1984 de saisir la Cour de discipline budgétaire et financière des conditions de réalisation du Centre culturel français d'Abou Y... ; que la décision de

déféré ne serait ni signée ni datée ; qu'elle ne mentionnerait ni le nom des me...

Vu la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948 modifiée tendant à sanctionner les fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat et de diverses collectivités et portant création d'une Cour de discipline budgétaire et financière ;

Sur le déféré :
Considérant que M. Z... a fait valoir que des vices de forme auraient affecté la décision prise par la deuxième chambre de la Cour des comptes dans sa séance du 15 février 1984 de saisir la Cour de discipline budgétaire et financière des conditions de réalisation du Centre culturel français d'Abou Y... ; que la décision de déféré ne serait ni signée ni datée ; qu'elle ne mentionnerait ni le nom des membres de la deuxième chambre qui ont rendu la décision, ni la procédure suivie devant elle ; que le procès-verbal intégral de la séance de la deuxième chambre n'aurait pas été communiqué ;
Considérant que le président de la deuxième chambre de la Cour des comptes a, par lettre signée de lui le 13 juillet 1984, adressé le déféré décidé le 15 février 1984 au Premier président de la Cour des comptes, et que ce dernier, le 9 août 1984, l'a transmis sous sa signature au Procureur général, exerçant le ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière ; que le déféré est une décision de saisine et non un arrêt de la Cour des comptes, et qu'en conséquence aucune disposition législative ou réglementaire n'oblige à faire figurer sur cette décision la liste nominative des magistrats ayant participé à la délibération ; qu'enfin aucun procès-verbal intégral des séances de chambre n'est prévu dans les règles de fonctionnement de la Cour des comptes et qu'il n'en est pas tenu ;
Considérant enfin qu'aucun des membres de la Cour de discipline budgétaire et financière présents à l'audience du 12 avril 1995 n'a participé au délibéré de la deuxième chambre dans sa séance du 15 février 1984 ;

Sur les auditions et interrogatoires de M. Z... :
Considérant que M. Z... invoque le fait qu'il a été entendu le 25 juin 1987 par le magistrat instructeur sans communication préalable de la décision de déféré ni du réquisitoire du Parquet du 11 février 1987, en l'absence de convocation écrite et sans avoir été informé qu'il pouvait être assisté d'un conseil ; qu'enfin, aucun procès-verbal n'aurait été dressé à la suite de cet entretien ;
Considérant que, conformément à l'article 18 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée, M. Z... a bien été avisé, par lettre recommandée du 10 juin 1987 dont il a accusé réception, qu'une instruction était ouverte à son encontre, qu'il était autorisé à se faire assister soit par un mandataire, soit par un avocat ou un avoué, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation et qu'il serait convoqué en vue de son audition ; que procès-verbal a été dressé contradictoirement à la fin de son audition, le 3 juillet 1987, en présence du greffier de la Cour ; qu'au demeurant l'entretien accordé le 25 juin 1987 avait pour unique but d'informer à l'avance M. Z... de faits reprochés dont il serait précisément question lors de son audition prochaine ;
Considérant que M. Z..., lors de l'entretien préalable du 25 juin 1987, a remis au magistrat instructeur 81 pièces, effectivement répertoriées et portées au dossier ; qu'il fait valoir qu'une pièce serait manquante, en l'occurrence une lettre du 23 mars 1983 qu'il avait adressée au secrétaire général du ministère des Relations extérieures ;
Considérant que si ladite pièce ne figure pas dans la liste des documents remis le 25 juin 1987, elle a été jointe par la suite au mémoire en défense présenté le 24 mars 1989 pour M. Z... ;

Sur la procédure suivie devant la commission administrative paritaire :
Considérant que, selon les mémoires en défense, l'avis de la Commission administrative des conseillers et secrétaires des Affaires étrangères du 25 janvier 1989 serait irrégulier, aux motifs qu'il ne précise ni sa composition ni la procédure suivie devant elle ; que les délais accordés auraient été particulièrement courts, M. Z... ayant été informé de cette réunion par lettre du 22 décembre 1988 qui ne lui serait parvenue que le 6 janvier 1989 ; que l'intéressé aurait demandé le 10 janvier au directeur du personnel du ministère des Affaires étrangères de reporter la date de la séance afin de disposer d'un délai suffisant pour prendre connaissance d'un dossier volumineux et que cette demande aurait été refusée le 16 janvier 1989 sans que la Commission se soit prononcée sur la demande de renvoi ;
Considérant que l'article 22 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée se limite à prescrire la communication du dossier à la commission administrative paritaire siégeant en formation disciplinaire, sans préciser la manière dont l'avis doit être rendu, ni la forme qu'il doit revêtir ; qu'en l'occurrence, un avis a bien été rendu le 25 janvier 1989, comportant les noms et signatures du président, du secrétaire et du secrétaire-adjoint de la commission compétente dans cette affaire ;
Considérant que ni l'audition de M. Z..., ni la consultation de la commission administrative paritaire n'ont méconnu les droits de la défense ; que par suite, et en tout état de cause, la procédure devant la commission administrative paritaire n'est pas entachée d'irrégularités ;

Sur la demande de supplément d'information et la communication de pièces :
Considérant que M. Z... a demandé à la Cour d'ordonner un supplément d'information pour obtenir en premier lieu de la Cour des comptes la transmission des rapports à la suite desquels le déféré avait été décidé, en second lieu du ministère des Affaires étrangères divers renseignements et documents complémentaires concernant notamment l'utilisation et le remboursement des emprunts, ainsi qu'un rapport d'inspection résultant d'une mission de février 1982 et un rapport d'audit sur les comptes de l'association France-Emirats arabes unis ;
Considérant toutefois que la Cour a été exclusivement saisie, au cas d'espèce, des conditions dans lesquelles ont été conclus les deux emprunts à long terme que l'ambassadeur avait contractés ;
Considérant que si la deuxième chambre de la Cour des comptes a consacré sa séance du 15 février 1984 à l'examen des comptes et de la gestion de la Mission laïque française et de la Fondation scolaire et culturelle à vocation internationale, il n'y a pas lieu de produire des documents concernant le contrôle de ces deux organismes autres que ceux qui sont relatifs à l'espèce pendante et qui ont été repris au déféré du 13 juillet 1984 ; que ces autres documents sont en effet sans rapport avec la conclusion des emprunts contractés par M. Z... ;
Considérant que les pièces complémentaires dont la défense souhaitait la communication par le ministère des Affaires étrangères devaient, par leur nature même, porter sur l'évolution, après le départ de M. Z... d'Abou Y..., de l'opération qu'il avait engagée ; que ces pièces étaient donc étrangères à l'objet du déféré ;

Sur la demande de sursis à statuer :
Considérant que M. Z... a demandé à la Cour de surseoir à statuer jusqu'à ce qu'il ait été statué définitivement sur la plainte contre X déposée le 11 avril 1989 auprès du Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Paris ; que cette plainte visait le retrait de fonds de l'association culturelle France-Emirats arabes unis après la départ de M. Z... d'Abou Y... ;
Considérant que la Cour n'est jamais tenue d'attendre, pour statuer, la décision du juge pénal ; qu'au surplus la plainte dont le tribunal de grande instance de Paris a été saisi en l'espèce porte sur des événements postérieurs aux faits ayant motivé la saisine de la Cour ;

Sur l'applicabilité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Considérant que la défense se réfère à la convention précitée, notamment à son article 6 paragraphe 1, dans la mesure où la Cour serait appelée à décider soit des contestations sur des droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale ; qu'à ce titre, M. Z... aurait droit à ce que sa cause soit entendue publiquement et dans un délai raisonnable ; qu'en l'occurrence la procédure aurait dépassé le délai raisonnable, plus de dix ans s'étant écoulés entre la décision de déféré enregistrée au Parquet de la Cour le 9 août 1984 et la lettre, en date du 21 mars 1995, de Mme le Procureur général de la République, citant M. Z... à comparaître le 12 avril 1995 ; que dès lors, en raison de la durée excessive de la procédure, l'action serait prescrite et la procédure nulle tant en application de la convention européenne susvisée que de l'article 30 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée ;
Considérant que les amendes prononcées en application de la loi du 25 septembre 1948 par la Cour de discipline budgétaire et financière n'interviennent pas dans le cadre d'une contestation sur des droits et obligations de caractère civil ni dans celui d'une accusation en matière pénale ; qu'elles sont ainsi en dehors du champ d'application des dispositions du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le requérant ne peut donc utilement se prévaloir de ces dispositions de la convention pour soutenir que la procédure aurait été irrégulière faute, pour la décision attaquée, d'avoir été prise à la suite d'une audience publique ; qu'en conséquence, la Cour se doit d'appliquer le dernier alinéa de l'article 23 de la loi 25 septembre 1948 modifiée, en vertu duquel les audiences de la Cour ne sont pas publiques ;
Considérant que le délai de prescription de cinq années révolues, institué par l'article 30 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée, se compte du jour où a été commis le fait de nature à donner lieu à l'application des sanctions prévues par ladite loi - soit le 21 juin 1980 - jusqu'à la saisine de la Cour, en l'espèce par déféré de la Cour des comptes, du 9 août 1984 ; qu'ainsi la prescription instituée par l'article 30 de la loi du 25 septembre 1948 n'est pas acquise ;

Sur l'amnistie :
Considérant que les agissements qui ont motivé le renvoi de M. Z... devant la Cour de discipline budgétaire et financière étaient susceptibles d'entraîner la condamnation de leur auteur aux amendes prévues aux articles 2 à 8 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée susvisée ; que l'article 29 de ladite loi assimile ces amendes à celles prononcées par la Cour des comptes en cas de gestion de fait ; que ces amendes ne sont ni des sanctions disciplinaires ni des sanctions professionnelles au sens de l'article 13 de la loi n° 81-736 du 4 août 1981 portant amnistie et de l'article 14 de la loi n° 88-828 du 20 juillet 1988 portant amnistie, qui sont ainsi sans effet sur le renvoi de M. Z... devant la Cour de discipline budgétaire et financière ;

Sur la méconnaissance de l'article 5 de la loi du 25 septembre 1948 :
Considérant que, sur un terrain donné à l'Etat français par l'émirat d'Abou Y... en échange d'un autre terrain sur lequel était implantée depuis 1974 une école française, l'association de droit local France-Emirats arabes unis a fait édifier un établissement scolaire, dénommé aujourd'hui lycée Louis B..., qui a été ouvert à compter de la rentrée scolaire 1981-1982, et devait prendre place dans un ensemble plus vaste appelé maison de la culture franco-arabe X... Khalifa ;
Que les travaux correspondants ont été financés par deux emprunts à long terme contractés les 21 juin 1980 et 11 mai 1981, d'un montant de 15 millions de dirhams (environ 17 millions de francs français) chacun, au taux de 4 %, qui ont été fusionnés pour constituer un prêt global de 30 millions de dirhams, d'une durée de 20 ans avec un différé d'amortissement de deux ans, remboursable en 18 annuités inégales entre 1982 et 1999 ; que les fonds ont été versés au compte bancaire de l'association France-Emirats arabes unis pour les relations culturelles ;
Considérant que les prêts ont été conclus entre le gouvernement de l'émirat d'Abou Y..., membre de la fédération des Emirats arabes unis, et l'ambassade de France ; que les contrats ont été signés pour le gouvernement de l'émirat par M. A..., responsable du département des Finances, et pour l'ambassade de France par l'ambassadeur, M. Z... ;
Que celui-ci n'a pas agi en sa qualité de représentant de l'association France-Emirats arabes unis dont il était un membre dirigeant, cet organisme n'étant pas même mentionné dans les contrats ;

Que la personne morale désignée par l'expression "ambassade de France" ne saurait être une personne privée, et que l'ambassadeur de France dans les Emirats arabes unis apparaissait comme ayant signé les deux contrats en cette qualité ;
Considérant que la municipalité d'Abou Y... voulait dès 1979 reprendre le terrain donné en 1974 à l'Etat français sur lequel étaient édifiés les bâtiments de l'école française et de l'Alliance française et donner un autre terrain ;
Que M. Z..., ambassadeur de France dans les Emirats arabes unis de décembre 1977 à mars 1982, en demandant par une lettre du 26 mai 1980 au ministère des Affaires étrangères, direction des immeubles et des affaires générales, que fût accepté l'échange de l'ancien terrain contre le nouveau, dont la remise avait d'ailleurs eu lieu dès le 22 mai, faisait mention du projet de construction sur ce nouveau terrain non seulement d'une école française mais aussi d'un centre culturel, d'un centre de loisirs et d'une Alliance française ; qu'il avait déjà évoqué ce projet dans un dossier élaboré en février 1980 en vue de la visite du Président de la République, dans une lettre du 23 mars 1980 au ministre des Affaires étrangères et dans une lettre du 31 mars 1980 à un membre du cabinet de ce dernier ; que l'ambassadeur ne demandait cependant dans ses correspondances ni avis, ni instructions sur ce vaste projet et son financement ;
Que la réponse du Département sur l'échange de terrains ne sera donnée que le 4 décembre 1980 par le chef du service des immeubles et des affaires générales, ouvrant une procédure qui aboutira à l'acceptation du don du nouveau terrain ;
Que la teneur du projet, son financement et les problèmes juridiques que posait sa mise en oeuvre n'ont été présentés avec une relative précision au Département par l'ambassadeur que dans une dépêche adressée le 22 novembre 1980, soit cinq mois après la conclusion du premier emprunt, au directeur général des relations culturelles, scientifiques et techniques et complétée par l'envoi du dossier technique de construction au service des immeubles le 29 décembre suivant ; que la direction générale, saisie pour la première fois d'une opération qui relève de sa compétence, a en réponse, par une dépêche du 22 décembre 1980, fait connaître ses réserves sur le projet, réserves confirmées dans un télégramme du directeur général du 26 février 1981 demandant à l'ambassadeur de surseoir à toute initiative à ce sujet jusqu'à nouvel ordre ;

Que l'ambassadeur a exposé, pour la première fois de manière précise, dans sa lettre du 4 mars 1981 au directeur de cabinet du ministre des Affaires étrangères, le mode de financement qu'il avait retenu, à savoir des prêts de l'émirat à hauteur de 30 millions de dirhams - dont quinze avait fait l'objet du contrat de juin 1980 et une seconde tranche de quinze était en cours de négociation - pour un coût de l'ensemble du projet de l'ordre de 23 millions de dirhams, le placement de l'excédent de financement, complété par des contributions très limitées des sociétés françaises opérant à Abou Y..., assurant le remboursement des prêts ;
Considérant que les instructions données par le directeur général des relations culturelles, scientifiques et techniques à l'ambassadeur dans un télégramme du 6 mars 1981 excluaient toute participation du Département, autre que symbolique, à la construction du Centre culturel ; que le Secrétaire général du ministère, dans sa dépêche du 31 mars 1981, indiquait explicitement que l'ambassadeur avait pris des décisions engageant le Département sans avoir préalablement recueilli son accord et envisageait que le financement soit assuré, pour l'essentiel, par un emprunt que l'association des parents d'élèves de l'école d'Abou Y... contracterait par l'intermédiaire de l'association nationale des écoles françaises à l'étranger (ANEFE) ;
Que, dans sa réponse du 8 avril 1981, l'ambassadeur indiquait que l'émirat allait verser à l'association "France-Emirats arabes unis pour les relations culturelles" le nouveau prêt de 15 millions de dirhams, que le financement de tout le projet de la maison Cheikh Khalifa serait donc assuré sans que le Département n'ait à financer quoi que ce soit ; qu'il prenait bonne note de la décision du Département de demander à l'association de parents d'élèves gestionnaire de l'école d'Abou Y... de contracter un emprunt auprès de l'ANEFE ;

Que par télégramme du 29 avril 1981, le directeur général des relations culturelles, scientifiques et techniques, estimant que les modalités que l'ambassadeur préconisait pour la construction, la gestion et le fonctionnement de la nouvelle école s'écartaient sensiblement des critères sur lesquels le Département fonde ses relations avec les écoles françaises à l'étranger, prenait acte de la situation et annonçait que la direction générale s'abstiendrait désormais d'intervenir dans ce domaine tout en apportant son aide pour assurer aux enfants des ressortissants expatriés une scolarité selon les normes françaises ;
Considérant que la conclusion du second contrat de prêt le 11 mai 1981 ne répond pas aux instructions reçues ;
Qu'ainsi M. Z... a signé successivement deux contrats de prêt en tant qu'ambassadeur de France sans avoir préalablement reçu d'instruction à cet effet du ministère des Affaires étrangères ; qu'au demeurant il n'avait aucune compétence pour ce faire, seul le ministre des Finances étant habilité, aux termes de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, à exécuter les opérations d'emprunt conformément aux autorisations générales données chaque année par les lois de finances ; mais qu'agissant apparemment dans le cadre de ses attributions, l'ambassadeur, par l'engagement qu'il avait contracté, imposait à l'Etat français le risque d'avoir à en supporter les éventuelles conséquences dommageables ;
Considérant que M. Z... a ainsi enfreint les règles relatives à l'exécution des recettes de l'Etat et qu'il tombe sous le coup des sanctions prévues par l'article 5 de la loi du 25 septembre 1948 modifiée ;

Sur les responsabilités :
Considérant que le montage financier imaginé par M. Z... et décrit par lui dans une note du 4 mars 1981 consistait à obtenir de l'émirat des prêts à faible taux d'intérêt d'un montant sensiblement supérieur au coût de la construction des différentes composantes de la maison de la culture X... Khalifa et à financer le remboursement des prêts grâce au produit des intérêts provenant du placement au taux du marché d'un excédent de fonds estimé entre 7 et 10 millions de dirhams ; qu'en effet, le taux d'intérêt créditeur attendu était à l'époque de l'ordre de 14 %, alors que le taux contractuel dû à l'émirat n'était que de 4 % ;
Que ce montage financier avantageux mais peu orthodoxe n'était pas exempt de risques ; qu'il supposait en effet que tout au long de la période d'amortissement des emprunts (1982 à 1999), les revenus des fonds placés, les droits de scolarité et les loyers du centre soient suffisants pour permettre de rembourser les annuités en capital qui varient entre un et trois millions de dirhams, et de payer les intérêts ; que les risques étaient notamment une baisse du taux d'intérêt du marché et une réduction de l'activité de la Maison de la culture, en particulier du lycée Louis B... ;
Considérant cependant que M. Z... a dû faire face avec urgence à la situation créée par la volonté de la municipalité et de l'émirat d'Abou Y... de reprendre le terrain sur lequel était édifiée l'école française dont, au demeurant, les capacités d'accueil étaient reconnues insuffisantes ; que les initiatives de l'ambassadeur ont permis, dans de bonnes conditions, l'ouverture tenue pour nécessaire du lycée B... à la rentrée scolaire de septembre 1981 ; que l'administration centrale du ministère des Affaires étrangères n'a réagi qu'avec lenteur à ses correspondances et sans que ses différents services agissent de façon coordonnée ; que tout au long du montage de l'opération, l'ambassadeur a reçu les encouragements du ministre et de son cabinet ;
Considérant que l'ensemble des circonstances rappelées ci-dessus sont de nature à exonérer M. Z... de la condamnation à une amende ;

Sur la demande de condamnation de l'Etat :
Considérant que, se référant à l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel reprenant la rédaction de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, ainsi qu'à l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la défense demande que l'Etat soit condamné à verser à M. Z... la somme de cinquante mille francs (50.000 F) en dédommagement des frais qu'il a dû exposer ;
Considérant qu'il y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner l'Etat à payer à M. Z... la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
relaxe de M. Jean-Claude Z..., rejet de ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.


Synthèse
Numéro d'arrêt : CETATEXT000007609670
Date de la décision : 12/04/1995
Sens de l'arrêt : Relaxe
Type d'affaire : Administrative

Analyses

18-01-05-01 COMPTABILITE PUBLIQUE - REGIME JURIDIQUE DES ORDONNATEURS ET DES COMPTABLES - JUGEMENT DES ORDONNATEURS - COUR DE DISCIPLINE BUDGETAIRE ET FINANCIERE -Gestion d'un service extérieur de l'Etat - Souscription d'emprunts sans autorisation.

18-01-05-01 Signature de deux contrats de prêts sans autorisation de l'administration centrale. Opérations d'emprunt exécutées sans y être habilité. Infractions aux règles d'exécution des recettes de l'Etat. Circonstances atténuantes. Relaxe.


Composition du Tribunal
Président : M. Joxe
Rapporteur ?: M. Pierre
Avocat(s) : Me Delvolvé, Avocat

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CDBF:1995:CETATEXT000007609670
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