Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 14 mai 2019 par laquelle le président du conseil régional de Normandie a rejeté sa demande d'aide au titre des mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) pour la campagne 2015.
Par un jugement n°1901607 du 15 octobre 2020, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 10 décembre 2020, M. B... A..., représenté par Me Galvez, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 octobre 2020 du tribunal administratif de Caen ;
2°) d'annuler la décision du président du conseil régional de Normandie du 14 mai 2019 ;
3°) d'enjoindre au président du conseil régional de Normandie de lui verser les aides sollicitées au titre des mesures agro-environnementales et climatiques ;
4°) de mettre à la charge de la Région Normandie la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision contestée est insuffisamment motivée ;
- l'instruction de sa demande d'aide est entachée d'irrégularité, dès lors que l'administration lui a appliqué un critère d'éligibilité qui a été défini par des arrêtés qui ont été publiés après la date limite fixée pour le dépôt des demandes d'engagements MAEC ;
- la décision contestée est entachée d'irrégularité, dès lors que l'instruction de sa demande, qui a duré quatre ans, méconnaissait les dispositions du règlement (UE)
n° 1305/2013 du 17 décembre 2013 qui prévoient un octroi annuel de l'aide en litige.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er juin 2021, la Région Normandie conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le règlement (UE) n° 1305/2013 du 17 décembre 2013 du Parlement européen et du conseil, relatif au fonds européen agricole pour le développement rural ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Catroux,
- les conclusions de M. Berthon, rapporteur public,
- et les observations de Me Roussel, représentant la Région Normandie.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., producteur légumier à Créances (Manche), a déposé, le 12 juin 2015, une demande d'engagement au titre des mesures d'aides agro-environnementales et climatiques (MAEC). En l'absence de réponse de l'administration à cette demande, il a confirmé ses engagements dans le cadre de ses déclarations au titre de la politique agricole commune, pour les années 2016, 2017 et 2018. Par une décision du 19 juillet 2018, le préfet de la Manche a rejeté sa demande d'engagement au titre de la mesure MAEC pour l'année 2015. M. A... a été, également, informé de la fin d'instruction de ses demandes MAEC au titre des années 2016 et 2018 au motif que sa demande au titre de l'année 2015 avait été rejetée pour inéligibilité.
La décision du 19 juillet 2018 ayant été retirée par le préfet, le président du conseil régional de Normandie a rejeté, par une décision du 14 mai 2019, la demande d'engagement du requérant au titre des mesures MAEC pour la campagne 2015. M. A... a demandé au tribunal administratif de Caen l'annulation de cette décision. Par un jugement n°1901607 du 15 octobre 2020, dont
M. A... relève appel, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Sur la légalité de la décision du 14 mai 2019 :
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Une décision qui doit être motivée en l'application de ces dispositions doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs.
3. Il ressort des pièces du dossier que pour rejeter la demande d'aide de M. A... au titre de la mesure MAEC " BN_VSCO_LG21 " pour l'année 2015, le président du conseil régional de Normandie a énoncé que cette demande ne comportait pas " la part minimale de surface en cultures spécialisées à engager. ". Toutefois, cette décision ne cite, ni ne vise l'arrêté du président du Conseil général de Basse Normandie du 1er décembre 2015 dont seule l'annexe intitulée " Mesure agroenvironnementale et climatique (MAEC)/Notice spécifique de la mesure Diversité de la succession culturale en culture spécialisée BN_VSCO-LG21 du territoire " légumier du Val-de-Saire et de la Côte-Ouest de la Manche "/ Campagne 2015 ", précise, à son point 3.2., au titre des conditions d'éligibilité tenant aux éléments engagés, que " vous devez engager au moins 70% des surfaces éligibles de votre exploitation déclarées en cultures spécialisées et situées sur le territoire l'année de la demande ". En outre, le seul rappel du codage de la mesure en cause se saurait tenir lieu de motivation en droit de la décision contestée. Ainsi, M. A... ne pouvait pas, à la seule lecture de la décision litigieuse, en connaître les motifs, dès lors qu'elle ne comportait pas, en dépit des textes normatifs qu'elle visait, les considérations de droit qui en constituaient le fondement. Par suite, cette décision est insuffisamment motivée.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 14 mai 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. L'exécution du présent arrêt implique nécessairement mais seulement que le président du conseil régional de Normandie réexamine les demandes d'aide sollicitées par
M. A... au titre de la mesure MAEC " BN_VSCO_LG21 " pour l'année 2015. Il y a lieu, par suite, de lui enjoindre de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais de l'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la Région Normandie demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
7. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la Région Normandie une somme de 1 500 euros à verser à M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 15 octobre 2020 du tribunal administratif de Caen et la décision du 14 mai 2019 sont annulés.
Article 2 : La Région Normandie versera à M. A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la Région Normandie au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la Région Normandie.
Délibéré après l'audience du 16 décembre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Salvi, président,
- M. L'hirondel, premier conseiller,
- M. Catroux, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe 7 janvier 2022.
Le rapporteur,
X. CATROUXLe président,
D. SALVI
La greffière,
A. MARTIN
La République mande et ordonne au préfet de la Région Normandie en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT03845