Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 4
ARRET DU 10 JUIN 2011
(n° ,5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 10/18289
Sur renvoi après cassation d'un Arrêt du 27 Mars 2009 -Cour d'Appel de PARIS - RG n° 08/18747 rendu sur appel d'une ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de commerce de PARIS en date du 2 octobre 2008
DEMANDEUR A LA SAISINE
APPELANT PRINCIPAL
SA SOCIETE FRANCAISE DE FOURNITURES POUR INSTALLATIONS ET MAINTENANCES - SOFFIMAT
représentée par son Directeur Général
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par la SCP BASKAL CHALUT-NATAL, avoués à la Cour
assistée de Me Désirée SCOZZARO, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1802
DEFENDEUR A LA SAISINE
INTIME PRINCIPAL
SOCIETE SEC
Prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 1]
[Localité 4]
représentée par la SCP GRAPPOTTE-BENETREAU ET PELIT-JUMEL, avoués près la Cour
assistée de Me Bruno THORRIGNAC, avocat au barreau de PARIS, toque : D0125
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 Mai 2011, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Jacques LAYLAVOIX, Président de chambre
Madame Catherine BOUSCANT, Conseillère
Madame Françoise DESSET, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mlle Véronique COUVET
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Monsieur Jacques LAYLAVOIX, président et par Mlle Fatia HENNI, greffier auquel la minute du présent arrêt a été remise.
Vu l'ordonnance de référé prononcée le 2 octobre 2008 par le juge des référés du tribunal de commerce de Paris, qui a :
- ordonné à la SA Soffimat d'exécuter ses obligations et, plus particulièrement, de réaliser les travaux de maintenance prévus contractuellement, notamment, la visite des 30 000 heures des moteurs, d'en justifier, ce sous astreinte de 20 000 euros par jour de retard,
- dit que les prestations requises devraient être terminées au plus tard le 31 octobre 2008, ce sous astreinte de 50 000 euros par jour de retard,
- autorisé, en cas de refus exprès de la société Soffimat ou de constat de défaillance de sa part à compter du 5 octobre 2008, la société SEC à faire intervenir la société de son choix aux fins de faire réaliser les prestations de maintenance et dit que dans ce cas la société Soffimat devrait supporter le coût des prestations facturées par la société tierce,
- condamné la société Soffimat aux dépens et au paiement de la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;
Vu l'appel interjeté par la société de cette ordonnance ;
Vu l'arrêt rendu le 29 juin 2010, sur le pourvoi formé par la société Soffimat, par la Cour de Cassation, qui a cassé et annulé dans toutes ses dispositions l'arrêt confirmatif rendu le 27 mars 2009 et a renvoyé les parties devant cette cour autrement composée ;
Vu la déclaration de saisine après renvoi déposée devant la cour le 23 juillet 2010 à la requête de la société Soffimat ;
Vu les conclusions, signifiées le 31 mars 2011 par la société Soffimat, appelante, qui, poursuivant l'infirmation de l'ordonnance de référé du 2 octobre 2008, prie la cour de :
- déclarer irrecevable la société SEC en ses demandes formées contre elle sur le fondement de l'article 14 du contrat et des articles 122, 123 et 124 du CPC,
- à titre subsidiaire, dire que les conditions des articles 872 et 873 du CPC ne sont pas réunies, qu'il existe des contestations sérieuses faisant obstacle à la compétence du juge des référés, dire n'y avoir lieu à référé et débouter la société SEC de ses prétentions,
- à titre reconventionnel, au cas où la société SEC ne serait pas déclarée irrecevable en ses demandes et déboutée de ses prétentions, ordonner une expertise,
- en tout état de cause, condamner la société SEC aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à lui payer la somme de 3000 euros pour ses frais de procédure non compris dans les dépens ;
Vu les conclusions signifiées le 28 avril 2011 par la société SEC, intimée, qui demande à la cour de confirmer l'ordonnance du 2 octobre 2008 en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne la date du constat de sa défaillance, de confirmer l'ordonnance du 28 janvier 2008 en ce qu'elle a condamné la société Soffimat au paiement du coût des prestations et à celle de la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC, de débouter la société Soffimat de ses prétentions et de la condamner, outre aux dépens, à lui régler les sommes de 415 638,44 euros correspondant au coût actualisé de la visite des 30 000 heures, 226 085,38 euros correspondant à la perte financière éprouvée, 779,01 euros de frais d'huissier et 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC ;
Considérant que le 24 décembre 1998, la société d'Exploitation de Chauffage (ci-après SEC) et la société Soffimat ont conclu un contrat d'une durée de douze ans ou 43 488 heures de fonctionnement portant sur la maintenance des deux moteurs Jenbacher JMS 612 de la centrale de production de cogénération de [Localité 5] exploitées par la société SEC moyennant une redevance forfaitaire annuelle de 21 150 euros HT par moteur ;
Que, selon un avenant signé le 5 mars 2007, le montant de la redevance annuelle a été réduit à la somme de 21 150 euros HT en contrepartie de la renonciation de la société SEC à l'exécution des opérations de maintenance relatives à la visite des 40 000 heures ;
Que les moteurs comptant plus de 30 000 heures de fonctionnement, le 27 mai 2008 la société SEC a demandé à la société Soffimat d'entreprendre une campagne de vérification, ce à quoi celle-ci lui a opposé qu'elle était contrainte, pour sauvegarder un équilibre économique au contrat, de revoir les bases de calcul de sa rémunération et d'appliquer une augmentation ;
Que c'est dans ces circonstances que le litige s'est noué entre les parties et que la société SEC a saisi le juge des référés, qui a rendu la décision déférée à la cour ;
Considérant, à titre liminaire, que la cour n'étant saisie que par la déclaration de saisine du
23 juillet 2010, après cassation de l'arrêt confirmant l'ordonnance du 2 octobre 2008, l'ordonnance du 28 janvier 2009 ne lui est pas déférée, de sorte qu'il n'y a pas lieu d'examiner les demandes formées par la société SEC relatives aux dispositions de cette ordonnance ;
Considérant que la société Soffimat soulève l'irrecevabilité des demandes de la société SEC en se fondant sur l'article 14 du contrat conclu entre les parties le 24 décembre 1998 ;
Considérant que l'article 14 de ce contrat stipule :
'En cas de litige les contestations relatives à l'exécution ou à l'interprétation du présent contrat seront soumises à l'avis d'un expert.
Dans ce cas, une réclamation est présentée par lettre recommandée, déclarant recourir à l'expertise. Si les parties ne peuvent se mettre d'accord, dans le mois suivant, sur la désignation d'un expert unique, chacune d'elles nomme un expert dans les quinze jours suivant l'expiration du premier délai.
Les experts nommés doivent rendre leur avis dans les deux mois suivant leur désignation.
Si l'expertise amiable ne conduit pas à un accord ou si l'un des délais de cette procédure n'était pas respecté par l'une des parties, chacune d'elles pourra, si elle persiste dans sa réclamation, saisir le tribunal de commerce de Paris, seul compétent.'
Considérant que cette clause de recours à l'expertise préalable avant toute action en justice aux fins de faciliter la résolution amiable du différend né entre les parties est applicable au litige, qui porte bien sur l'exécution du contrat ;
Que l'irrecevabilité soulevée sur le fondement de cette clause s'analyse bien en une fin de non recevoir, qui peut être proposée en tout état de cause en application de l'article 123 du CPC ; qu'il importe donc peu que la société Soffimat n'ait pas soulevé l'application de la clause devant le premier juge ;
Considérant que la société SEC ne démontre pas la réalité de l'urgence, dont elle fait état dans ses conclusions sans l'expliciter, qui justifierait de s'affranchir de l'application de cette clause en saisissant directement le juge des référés d'une demande tendant à voir ordonner à la société Soffimat d'exécuter des prestation contractuelles contestées par celle-ci, observation faite qu'elle ne peut se borner à se référer aux motifs de l'arrêt cassé et annulé ;
Qu'il convient à cet égard se relever qu'elle indique elle-même dans ses écritures que :
- au premier avril 2008, les moteurs de la cogénération comptaient plus de 30 000 heures de fonctionnement,
- elle a interrogé la société Soffimat sur les dates de son intervention de 27 mai 2008, soit près de deux mois plus tard,
- la société Soffimat, invoquant un déséquilibre financier, par lettre recommandée du 12 juin 2008, lui a demandé de supporter 12,8% d'augmentation,
- elle même a adressé le 3 septembre 2008, soit à nouveau près de deux mois plus tard, à la société Soffimat une contreproposition que celle-ci n'a pas acceptée,
- elle a mis en demeure la société Soffimat d'exécuter ses obligation contractuelles par lettre recommandée du 18 septembre 2008, puis à l'a assignée devant le juge des référés ;
Que, dans ces conditions, la société SEC disposait de délais suffisants, qu'elle n'a pas mis à profit, et compatibles avec la mise en oeuvre de la clause de recours à l'expertise, laquelle prévoyait des délais précis pour la désignation de l'expert et pour que celui-ci rende son avis, avant la période butoir du mois d'octobre 2008 pour exécuter les travaux de maintenance des cogénérateurs ;
Considérant qu'en s'abstenant de mettre en oeuvre la clause contractuelle de recours à l'expertise contenue à l'article 14 du contrat avant d'introduire le 22 octobre 2008 devant le juge du fond une action en nullité du contrat conclu entre les parties, la société Soffimat n'a pas manifesté de façon certaine et non équivoque sa volonté de renoncer à se prévaloir de l'application de la clause contractuelle de recours à l'expertise préalablement à toute action en justice, contrairement à ce qui est prétendu par la société SEC, en l'absence d'acte positif de la part de la société Soffimat manifestant une telle volonté ;
Considérant dés lors que la clause de recours à l'expertise préalable à toute action en justice, qui ne réserve pas le cas de l'action en référé et sur lesquelles les parties se sont mises d'accord en concluant le contrat, doit s'appliquer, dés lorsqu'elle est invoquée ;
Qu'en conséquence, la fin de non recevoir est fondée ;
Considérant qu'eu égard au sens du présent arrêt, la société SEC supportera les dépens de première et d'appel, y compris ceux de l'arrêt cassé, sera déboutée de sa demande d'indemnité de procédure formée sur le fondement de l'article 700 du CPC et condamnée sur le même fondement à payer à la société Soffimat la somme de 3000 euros pour compenser les frais hors dépens exposés par celle-ci ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme l'ordonnance déférée,
Déclare irrecevable l'action en référé de la société SEC,
Condamne la société Sec à payer à la société Soffimat la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du CPC,
Déboute les parties de toute autre demande,
Condamne la société SEC aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris ceux de l'arrêt cassé, et admet la SCP Baskal Chalut-Natal au bénéfice de l'article 699 du CPC.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT