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07/02/2020 | SUISSE | N°1B_44/2020

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral, Ire Cour de droit public  , Arrêt du 7 février 2020  , 1B 44/2020


 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_44/2020  
 
 
Arrêt du 7 février 2020  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président, 
Fonjallaz et Müller Th. 
Greffière : Mme Nasel. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Pierre-Alain Killias, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois, p.a. M

inistère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens. 
 
Objet 
Détention provisoire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Vaud, Chamb...

 
Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
                 
 
 
1B_44/2020  
 
 
Arrêt du 7 février 2020  
 
Ire Cour de droit public  
 
Composition 
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président, 
Fonjallaz et Müller Th. 
Greffière : Mme Nasel. 
 
Participants à la procédure 
A.________, représenté par Me Pierre-Alain Killias, avocat, 
recourant, 
 
contre  
 
Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois, p.a. Ministère public central du canton de Vaud, avenue de Longemalle 1, 1020 Renens. 
 
Objet 
Détention provisoire, 
 
recours contre l'arrêt du Tribunal cantonal du canton 
de Vaud, Chambre des recours pénale, du 12 décembre 2019 (1000 PE18.002726-DBT). 
 
 
Faits :  
 
A.   
Le Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois a ouvert une instruction pénale contre A.________ pour brigandage qualifié au moyen d'armes à feu, en bande et de façon particulièrement dangereuse. Il lui est en substance reproché d'avoir pris part, dans un rôle que l'instruction doit encore déterminer, le 8 février 2018 vers 20h15, à Chavornay, à l'attaque d'un fourgon de transport de fonds de la société B.________ SA, perpétrée par trois individus, dont C.________, et lors de laquelle deux convoyeurs de fonds, à savoir D.________, qui aurait été au volant et au courant du plan, et E.________, auraient été menacés au moyen de pistolets mitrailleurs. Les convoyeurs auraient ainsi été contraints de vider le fourgon de son contenu, soit environ 25 millions de francs, lequel a ensuite été déplacé dans un véhicule 4x4. Quelques minutes plus tard, les auteurs du braquage ont pris la fuite, étant précisé qu'un peu plus tôt, la fille de E.________ aurait été séquestrée et prise en otage en France par d'autres complices afin qu'elle contacte son père, sous la menace des ravisseurs, pour qu'il exécute les ordres donnés par les malfaiteurs. Celle-ci a été libérée le même jour vers 20h50. 
Selon des informations recueillies, le convoyeur D.________, qui aurait eu l'idée d'organiser ce braquage, en aurait parlé à l'une de ses relations, surnommée "A.F.________"; celui-ci aurait à son tour relayé l'information à une bonne connaissance prénommée "A.G.________" qui aurait fait part de ce projet à C.________, résidant dans la banlieue de Lyon. Ce dernier aurait montré son intérêt à réunir une bande pour commettre cette attaque. Les investigations menées, notamment les contrôles téléphoniques rétroactifs et en temps réel, ont permis de mettre en évidence des liens entre les différents protagonistes et ont amené à l'identification de "A.F.________" en la personne de B.F.________ et du prénommé "A.G.________" en la personne de B.G.________. 
 
B.   
A.________ a été appréhendé le 22 novembre 2019. 
Son casier judiciaire suisse fait mention d'une condamnation le 23 février 2016 par le Ministère public du canton de Genève pour recel à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à 30 fr. le jour, avec sursis pendant trois ans. 
 
C.   
Sur requête du Ministère public et après avoir procédé à l'audition de A.________, le Tribunal des mesures de contrainte a ordonné, le 24 novembre 2019, la détention provisoire du prénommé pour une durée de trois mois, soit jusqu'au 22 février 2020. 
La Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté le recours formé par A.________ contre cette décision par arrêt du 12 décembre 2019. 
 
D.   
A.________ interjette un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre cet arrêt, concluant, avec suite de frais et dépens, à sa modification en ce sens que la requête de mise en détention provisoire est rejetée et sa remise en liberté ordonnée, moyennant son engagement formel de n'évoquer l'affaire avec personne et de ne contacter, ni directement, ni indirectement, aucune personne prévenue dans cette affaire. Subsidiairement, il demande l'annulation de l'arrêt attaqué et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouvelle décision dans le sens des considérants. Il sollicite par ailleurs l'assistance judiciaire. 
Invités à se prononcer, tant la cour cantonale que le ministère public y ont renoncé, tout en se référant à la décision attaquée. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.   
Le recours en matière pénale ( art. 78 al. 1 LTF ) est ouvert contre une décision relative à la détention provisoire ou pour des motifs de sûreté au sens des art. 212 ss CPP . Selon l'art. 81 al. 1 let. a et b ch. 1 LTF, le recourant, prévenu détenu, a qualité pour recourir. Le recours a été formé en temps utile ( art. 100 al. 1 LTF ) contre une décision rendue par une autorité statuant en tant que dernière instance cantonale ( art. 80 LTF ) et les conclusions présentées sont recevables au regard de l' art. 107 al. 2 LTF . Il y a donc lieu d'entrer en matière. 
 
2.   
Une mesure de détention provisoire n'est compatible avec la liberté personnelle garantie aux art. 10 al. 2 Cst. et 5 CEDH que si elle repose sur une base légale ( art. 31 al. 1 et art. 36 al. 1 Cst. ), soit en l'espèce l' art. 221 CPP . Elle doit en outre correspondre à un intérêt public et respecter le principe de la proportionnalité ( art. 36 al. 2 et 3 Cst. ). Pour que tel soit le cas, la privation de liberté doit être justifiée par un risque de fuite ou par un danger de collusion ou de réitération (art. 221 al. 1 let. a, b et c CPP). Préalablement à ces conditions, il doit exister des charges suffisantes, soit de sérieux soupçons de culpabilité, à l'égard de l'intéressé ( art. 221 al. 1 CPP ). En tout état de cause, la détention avant jugement ne doit pas durer plus longtemps que la peine privative de liberté prévisible ( art. 212 al. 3 CPP ). 
 
3.  
 
3.1.   
Le recourant ne nie pas l'existence de charges suffisantes à son encontre. En revanche, il reproche à la cour cantonale d'avoir retenu l'existence d'un risque de collusion, dont il nie le caractère concret. 
 
3.2. Conformément à l' art. 221 al. 1 let. b CPP , la détention provisoire ne peut être ordonnée que lorsque le prévenu est fortement soupçonné d'avoir commis un crime ou un délit et qu'il y a sérieusement lieu de craindre qu'il compromette la recherche de la vérité en exerçant une influence sur des personnes ou en altérant des moyens de preuve.  
Pour retenir l'existence d'un risque de collusion, l'autorité doit démontrer que les circonstances particulières du cas d'espèce font apparaître un danger concret et sérieux de manoeuvres propres à entraver la manifestation de la vérité, en indiquant, au moins dans les grandes lignes et sous réserve des opérations à conserver secrètes, quels actes d'instruction elle doit encore effectuer et en quoi la libération du prévenu en compromettrait l'accomplissement. Dans cet examen, entrent en ligne de compte les caractéristiques personnelles du détenu, son rôle dans l'infraction ainsi que ses relations avec les personnes qui l'accusent. Entrent aussi en considération la nature et l'importance des déclarations, respectivement des moyens de preuve susceptibles d'être menacés, la gravité des infractions en cause et le stade de la procédure (ATF 137 IV 122 consid. 4.2 p. 127 s.; 132 I 21 consid. 3.2 p. 23 s. et les références citées; cf. également arrêt 1B_560/2019 du 5 décembre 2019 consid. 2.1). 
Plus l'instruction se trouve à un stade avancé et les faits sont établis avec précision, plus les exigences relatives à la preuve de l'existence d'un risque de collusion sont élevées (ATF 137 IV 122 consid. 4.2 p. 128; 132 I 21 consid. 3.2.2 p. 24; plus récemment arrêt 1B_560/2019 du 5 décembre 2019 consid. 2.1). 
 
3.3. Le recourant reproche à la cour cantonale de s'être référée à D.________ et B.G.________, deux des principaux protagonistes mis en détention préventive, pour retenir le risque de collusion. Il soutient qu'au vu de leur détention, il paraîtrait difficile d'admettre qu'il soit en mesure de les contacter. Cette argumentation n'est pas pertinente. En effet, il résulte de l'arrêt attaqué, qui reprend l'ordonnance du 24 novembre 2019 du Tribunal des mesures de contrainte, que diverses nouvelles mesures d'instruction sont en cours afin d'établir l'entier de l'activité délictueuse du recourant - qui n'a été appréhendé que récemment (le 22 novembre 2019) - et d'identifier ses comparses. Il existe dès lors un risque de collusion, non pas seulement avec D.________ et B.G.________, lequel met en cause le recourant, mais également avec d'autres personnes susceptibles d'avoir participé à l'attaque du fourgon. De plus, selon la cour cantonale, le recourant semble être proche de D.________, détenu en France, lequel doit encore être entendu au sujet du rôle du recourant joué dans l'attaque. Dès lors, à ce stade de l'enquête, et compte tenu de la gravité des faits reprochés au recourant - lesquels suggèrent l'existence d'une bande criminelle organisée - il apparaît opportun de se montrer particulièrement prudent afin de préserver autant que possible les prochaines déclarations du convoyeur D.________, de même que les témoignages des personnes ayant participé au braquage qui n'ont pas encore pu être identifiées, de toute ingérence, même indirecte, du recourant. Dans ces circonstances, la cour cantonale pouvait admettre sans violation du droit l'existence d'un risque sérieux et concret de collusion.  
Le maintien de la détention du recourant jusqu'au 22 février 2020 étant justifié par un risque de collusion, il n'y a pas lieu d'examiner si cette mesure s'imposait aussi en raison d'un risque de fuite ou de récidive au sens de l'art. 221 al. 1 let. a et c CPP. 
 
4.  
 
4.1.   
Le recourant fait encore valoir une violation de l' art. 237 al. 1 et 2 CPP et de son droit d'être entendu, en ce sens que l'arrêt attaqué ne se prononcerait que sur l'une des mesures de substitution proposées. 
 
4.2. Conformément au principe de la proportionnalité ( art. 36 al. 3 Cst. ), il convient d'examiner les possibilités de mettre en oeuvre d'autres solutions moins dommageables que la détention (règle de la nécessité). Cette exigence est concrétisée par l' art. 237 al. 1 CPP , qui prévoit que le tribunal compétent ordonne une ou plusieurs mesures moins sévères en lieu et place de la détention provisoire ou de la détention pour des motifs de sûreté si ces mesures permettent d'atteindre le même but que la détention. Selon l' art. 237 al. 2 CPP , font notamment partie des mesures de substitution la saisie des documents d'identité (let. b), l'assignation à résidence (let. c), et l'interdiction d'entretenir des relations avec certaines personnes (let. g).  
Tel qu'il est garanti par l' art. 29 al. 2 Cst. , le droit d'être entendu comprend notamment le devoir, pour l'autorité, de motiver sa décision, afin que le justiciable puisse la comprendre, la contester utilement s'il y a lieu et exercer son droit de recours à bon escient. Pour répondre à ces exigences, l'autorité doit mentionner, au moins brièvement, les motifs qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l'attaquer en connaissance de cause (ATF 143 III 65 consid. 5.2 p. 70; 141 IV 244 consid. 1.2.1 p. 246). La motivation peut être implicite et résulter des différents considérants de la décision (ATF 141 V 557 consid. 3.2.1 p. 565; arrêt 1B_335/2019 du 16 janvier 2020 consid. 3.1.1). L'autorité ne doit toutefois pas se prononcer sur tous les moyens des parties; elle peut se limiter aux questions décisives (ATF 143 III 65 consid. 5.2 p. 70; 142 II 154 consid. 4.2 p. 157). 
 
4.3. En tant que les critiques du recourant sont dirigées contre la décision de première instance, il n'en sera pas tenu compte. En effet, seuls les griefs à l'encontre de la motivation de la décision querellée sont recevables ( art. 80 al. 1 LTF ). Quoi qu'il en soit, les mesures de substitution proposées par le recourant durant la procédure cantonale - sous la forme d'une interdiction de prendre contact avec quiconque en lien avec l'affaire, d'un dépôt de ses papiers d'identité et d'une interdiction de se rendre en France voire de quitter le territoire suisse - sont insuffisantes au regard de la nature du risque de collusion constaté. Une éventuelle interdiction de contact paraît particulièrement difficile à contrôler dès lors que tous les comparses n'ont pas encore pu être identifiés et ne permet ainsi pas, en l'état, de pallier le risque d'atteinte à la recherche de la vérité. Le simple engagement de l'intéressé de n'évoquer l'affaire avec personne, ne permet pas de modifier cette appréciation. On ne voit au demeurant pas quelle autre mesure de substitution serait propre à éviter le risque de collusion retenu. Pour ces mêmes motifs, la motivation de la cour cantonale à ce propos est suffisante du point de vue des exigences du droit d'être entendu.  
Enfin, du point de vue temporel, au vu de la gravité des infractions (brigandage qualifié, art. 140 ch. 2 et 3 CP ) pour lesquelles le recourant a été mis en prévention et de la durée de la détention provisoire déjà subie, le principe de la proportionnalité demeure respecté. 
 
5.   
Le recours doit par conséquent être rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
Les conditions posées à l' art. 64 al. 1 LTF étant réunies, il convient de mettre le recourant au bénéfice de l'assistance judiciaire, de lui désigner Me Pierre-Alain Killias comme avocat d'office et d'allouer à celui-ci une indemnité à titre d'honoraires, qui sera fixée forfaitairement et supportée par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires ( art. 64 al. 1 et 2 LTF ). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.   
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.   
La demande d'assistance judiciaire est admise; Me Pierre-Alain Killias est désigné comme avocat d'office du recourant et une indemnité de 1500 fr. lui est allouée à titre d'honoraires, à payer par la caisse du Tribunal fédéral. Il n'est pas perçu de frais judiciaires. 
 
3.   
Le présent arrêt est communiqué au recourant, au Ministère public de l'arrondissement du Nord vaudois et au Tribunal cantonal du canton de Vaud, Chambre des recours pénale. 
 
 
Lausanne, le 7 février 2020 
Au nom de la Ire Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
Le Président : Chaix 
 
La Greffière : Nasel 



Références :

Origine de la décision
Formation : Ire cour de droit public  
Date de la décision : 07/02/2020
Date de l'import : 26/02/2023

Fonds documentaire ?: www.bger.ch


Numérotation
Numéro d'arrêt : 1B_44/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2020-02-07;1b.44.2020 ?

Source

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