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16/10/2003 | SUISSE | N°4P.117/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 16 octobre 2003, 4P.117/2003


{T 0/2}
4P.117/2003 /ech

Arrêt du 16 octobre 2003
Ire Cour civile

MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Walter, Rottenberg
Liatowitsch,
Nyffeler et Favre.
Greffier: M. Carruzzo.

X. ________ S.A.L,
Y.________ S.A.L.,
A.________,
requérants,
tous les trois représentés par Me Caroline Ferrero Menut, avocate,
case
postale 59, 1211 Genève 29,

contre

Z.________ Sàrl,
intimée, représentée par Mes François Knoepfler et Philippe Schweizer,
avocats, rue de la Serre 4/av. d

e la Gare 10, case postale, 2001
Neuchâtel 1,
Tribunal arbitral CCI, à Genève,

arbitrage international; révision,

...

{T 0/2}
4P.117/2003 /ech

Arrêt du 16 octobre 2003
Ire Cour civile

MM. et Mme les Juges Corboz, Président, Walter, Rottenberg
Liatowitsch,
Nyffeler et Favre.
Greffier: M. Carruzzo.

X. ________ S.A.L,
Y.________ S.A.L.,
A.________,
requérants,
tous les trois représentés par Me Caroline Ferrero Menut, avocate,
case
postale 59, 1211 Genève 29,

contre

Z.________ Sàrl,
intimée, représentée par Mes François Knoepfler et Philippe Schweizer,
avocats, rue de la Serre 4/av. de la Gare 10, case postale, 2001
Neuchâtel 1,
Tribunal arbitral CCI, à Genève,

arbitrage international; révision,

demande de révision de la sentence du Tribunal arbitral CCI du 22
avril 2003.

Faits:

A.
A la suite d'un appel d'offres, Z.________ Sàrl (ci-après:
Z.________),
société de droit libanais, a conclu, le 15 octobre 1997, avec les
sociétés de
droit libanais Y.________ S.A.L. (ci-après: Y.________) et X.________
S.A.L
(ci-après: X.________), agissant respectivement en qualité de maître
de
l'ouvrage et de mandataire du maître de l'ouvrage, un contrat
d'entreprise
ayant pour objet la réalisation de travaux de construction dans le
cadre de
l'édification d'un grand complexe immobilier à U.________, au Liban.
Le droit
libanais était applicable à ce contrat. Les différends auxquels
l'exécution
de celui-ci pourrait donner matière devaient être résolus par voie
d'arbitrage, conformément à une clause compromissoire fixant le siège
de
l'arbitrage à Genève.

Par lettre du 27 octobre 2000, Z.________ a informé Y.________ et
X.________
de son intention de résilier le contrat en raison du défaut de
paiement d'une
facture pour des travaux exécutés par elle. Il en est résulté un
différend
que les parties n'ont pas pu régler à l'amiable.

B.
B.aLe 14 février 2001, Z.________, se fondant sur la clause
compromissoire
insérée dans le contrat d'entreprise, a adressé à la Chambre de
Commerce
Internationale (CCI) une requête d'arbitrage visant non seulement
Y.________
et X.________, mais encore le dénommé A.________, au motif que cet
homme
d'affaires libanais était intervenu de façon constante dans
l'exécution du
contrat d'entreprise. Tirant argument du fait que A.________ n'avait
pas
signé le contrat d'entreprise, les parties défenderesses ont
sollicité sa
mise hors de cause.

La demanderesse a proposé comme arbitre Me D.________. Quant aux
parties
défenderesses, elles ont avancé le nom de M. E.________. Les
coarbitres ont
désigné Me S.________ comme président du Tribunal arbitral. La CCI a
entériné
ces choix.

B.b En tant qu'il est pertinent pour l'examen de la demande de
révision, le
déroulement de la procédure probatoire peut être résumé comme il suit:
Le 3 décembre 2000, c'est-à-dire avant le dépôt de la requête
d'arbitrage, le
juge des référés du Metn, agissant sur requête de Y.________ et de
X.________, à laquelle s'était jointe Z.________, a chargé G.________
de
dresser un état des travaux exécutés par cette entreprise. Dans son
rapport
du 28 février 2001, l'expert est arrivé à la conclusion que les
travaux
avaient été achevés dans leur quasi-totalité et qu'ils ne devaient
faire
l'objet que de quelques réparations mineures. Au cours de son
audience des 8
et 9 octobre 2001, tenue en présence des parties et de leurs
conseils, le
Tribunal arbitral a procédé à l'audition de l'expert, entre autres
personnes.
A cette occasion, les parties défenderesses lui ont communiqué une
déclaration faite devant notaire par l'un des ouvriers de la
demanderesse -
C.________ - faisant état de vices cachés importants.

Entre-temps, les parties défenderesses avaient requis la désignation
d'un
nouvel expert en alléguant l'existence de vices graves affectant
l'ouvrage
livré par la demanderesse. Par ordonnance du 28 avril 2001, le juge
des
référés du Metn a fait droit à cette requête et confié au dénommé
B.________
le soin de faire toute la lumière à ce sujet. L'expert s'est rendu à
huit
reprises sur le site où il a procédé à un examen minutieux de
l'ouvrage. Dans
un rapport extrêmement détaillé et précis, l'homme de l'art a mis en
évidence
un certain nombre de défauts, en particulier des problèmes
d'étanchéité, et
il a évalué le coût total des travaux de remise en état à 28'902,37
US$.

Etant persuadée que toute la lumière n'avait pas été faite,
Y.________ a
sollicité du juge des référés du Metn la désignation d'un troisième
expert
dont la mission consisterait à dresser l'état des lieux de tout le
projet.
Par ordonnance du 5 juillet 2001, le magistrat saisi a nommé
F.________ à
cette fin. Le 21 décembre 2001, il a étendu la mission de l'expert,
qui ne
les visait pas spécifiquement, aux travaux effectués par la
demanderesse. Le
rapport d'expertise afférent à ces travaux, qui mentionne l'existence
d'un
certain nombre de défauts, mais ne fait état d'aucun vice caché
susceptible
de mettre en danger la stabilité ou la solidité de l'ouvrage, ni de
fautes de
nature frauduleuse, n'a été déposé qu'en date du 17 juin 2002. De ce
fait,
les parties défenderesses ont requis et obtenu, par ordonnance du 9
juillet
2002, que les débats dont la clôture avait été prononcée le 29 mars
2002
fussent réouverts.

Le 26 juillet 2002, le Tribunal arbitral a entendu F.________.
L'expert a
déclaré que sa mission était terminée, qu'il n'était toutefois pas en
mesure
de déterminer les responsabilités quant aux malfaçons alléguées par
les
parties défenderesses et qu'il conviendrait pour cela de procéder à de
nouvelles investigations. A l'issue de cette audience, un délai de
deux
semaines, expirant le 12 août 2002, a été accordé aux parties pour
déposer
une note de synthèse.

Les défenderesses ont produit leur note de synthèse relative au
témoignage de
l'expert F.________ le 17 août 2002, soit après l'expiration dudit
délai. Le
Tribunal arbitral a néanmoins accepté de la verser au dossier et il a
prononcé derechef la clôture des débats à cette dernière date.

Le 2 octobre 2002, les parties défenderesses ont présenté une seconde
demande
de réouverture des débats en produisant un rapport d'expertise
établi, à leur
demande, par l'ingénieur-conseil français H.________. Elles ont
également
pris une nouvelle conclusion aux fins d'obtenir que la demanderesse
soit
condamnée, à titre provisionnel, à leur payer un million de dollars
"à titre
de compensation pour les différentes fautes lourdes constatées par
l'expert
H.________", lequel avait notamment mis en évidence, sur la base de
relevés
effectués par la société W.________, une différence sensible entre les
quantités facturées par la demanderesse et celles résultant des
métrés. Par
ordonnance de procédure du 10 octobre 2002, le Tribunal arbitral a
rejeté la
demande de réouverture des débats, écarté de ceux-ci le rapport de
l'expert
H.________ et déclaré la nouvelle conclusion reconventionnelle
irrecevable.
S'agissant du premier point, il a considéré que les parties avaient
eu une
possibilité suffisante d'être entendues et qu'il ne se justifiait pas
de
rouvrir les débats sur la base d'un rapport établi de façon non
contradictoire, à la demande de l'une des parties, sans intervention
du
Tribunal arbitral ni d'un juge étatique.

Les parties défenderesses ont alors requis le juge des référés du Metn
d'ordonner l'extension de la mission de l'expert F.________ aux points
relevés par l'ingénieur-conseil H.________. En date du 8 janvier 2003,
l'expert a rendu un second rapport préliminaire confirmant les
conclusions de
l'ingénieur-conseil. Se basant sur ce document, les parties
défenderesses ont
présenté, en date du 13 janvier 2003, une nouvelle demande de
réouverture des
débats. Elles n'ont reçu aucune réponse du Tribunal arbitral et n'ont
pas eu
plus de succès en s'adressant directement à la Cour d'arbitrage de la
CCI.

B.c Par sentence finale du 22 avril 2003, rendue à la majorité de ses
membres, le Tribunal arbitral a dit que la résiliation du contrat
d'entreprise par Z.________ était justifiée. En conséquence, il a
condamné
solidairement Y.________ et X.________ à payer à la demanderesse un
total de
quelque 1'746'000 US$ à différents titres, intérêts en sus.
Considérant que
A.________ avait été attrait à bon droit dans la procédure
d'arbitrage, il
l'a déclaré conjointement responsable des condamnations prononcées à
l'encontre des deux sociétés défenderesses. Enfin, le Tribunal
arbitral,
admettant partiellement la demande reconventionnelle formée par
celles-ci, a
condamné Z.________ à leur verser la somme de 50'000 US$ et ses
accessoires à
titre de dommages-intérêts pour les malfaçons affectant l'ouvrage
livré.

C.
Y.________, X.________ et A.________ ont formé un recours de droit
public au
Tribunal fédéral aux fins d'obtenir l'annulation de la sentence
arbitrale.
Par arrêt séparé de ce jour, la Cour de céans a rejeté intégralement
ledit
recours.

D.
Simultanément, les recourants ont déposé, à titre subsidiaire, une
demande de
révision dans laquelle ils invitent le Tribunal fédéral à annuler la
sentence
attaquée, à condamner l'intimée à leur verser 1'000'000 US$ "en
restitution
du trop-perçu sur le quantitatif" et à renvoyer pour le surplus la
cause au
Tribunal arbitral afin qu'il instruise le dossier dans le sens des
considérants.

L'intimée conclut au rejet de la demande de révision dans la mesure
où elle
est recevable. Le Tribunal arbitral ne s'est pas déterminé sur cette
demande.

Par ordonnance du 19 juin 2003, le président de la Cour de céans a
rejeté la
requête d'effet suspensif dont était assortie la demande de révision.

En date du 22 septembre 2003, le conseil des recourants a communiqué
au
Tribunal fédéral une lettre de l'arbitre E.________, datée du 19 août
2002
(recte: 2003), et sa traduction française ainsi que le courrier
adressé le 16
avril 2003 par le président du Tribunal arbitral audit arbitre.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
1.1 La loi sur le droit international privé (LDIP; RS 291) ne
contient aucune
disposition relative à la révision des sentences arbitrales au sens
des art.
176 ss LDIP. Le Tribunal fédéral a comblé cette lacune par voie
jurisprudentielle. Les motifs de révision de ces sentences sont ceux
que
prévoit l'art. 137 OJ. Le Tribunal fédéral est l'autorité judiciaire
compétente pour connaître de la demande de révision de toute sentence
arbitrale internationale, qu'elle soit finale, partielle ou
préjudicielle;
cependant, s'il admet une telle demande, il ne se prononce pas
lui-même sur
le fond mais renvoie la cause au tribunal arbitral qui a statué ou à
un
nouveau tribunal arbitral à constituer. Quant à la procédure, elle
est régie
par les art. 140 ss OJ (ATF 122 III 492 consid. 1b/aa; 118 II 199;
pour un
examen critique de la jurisprudence fédérale en la matière, cf.
Antonio
Rigozzi/Michael Schöll, Die Revision von Schiedssprüchen nach dem 12.
Kapitel
des IPRG, in Bibliothek zur Zeitschrift für Schweizerisches Recht,
Beiheft
37).

Pour le reste, il convient de rappeler que la recevabilité d'une
demande de
révision fondée sur l'art. 137 OJ ne suppose pas que les conditions
posées
par cette disposition soient réalisées, car il s'agit d'une condition
d'admissibilité et non de recevabilité. Il suffit que le requérant
prétende
qu'une de ces conditions est remplie et que la re- quête satisfasse
aux
exigences formelles posées par la loi (cf. art. 140 et 141 OJ; ATF 96
I 279
consid. 1).

1.2 En vertu de l'art. 137 let. b OJ, la demande de révision d'un
arrêt du
Tribunal fédéral est recevable lorsque le requérant a connaissance
subséquemment de faits nouveaux importants ou trouve des preuves
concluantes
qu'il n'avait pas pu invoquer dans la procédure précédente.

Sont "nouveaux", au sens de cette disposition, les faits qui,
survenus à un
moment où ils pouvaient encore être allégués dans la procédure
principale,
n'étaient cependant pas connus du requérant malgré toute sa
diligence. Ces
faits nouveaux doivent en outre être importants, c'est-à-dire être de
nature
à modifier l'état de fait qui est à la base de la décision entreprise
et à
conduire à un jugement différent en fonction d'une appréciation
juridique
exacte (ATF 118 II 199 consid. 5; 110 V 138 consid. 2 et l'arrêt
cité; voir
aussi: Rigozzi/Schöll, op. cit., p. 41 s.; Jean-François Poudret,
COJ, n.
2.2.2 ad art. 137; Thomas Rüede/Reimer Hadenfeldt, Schweizerisches
Schiedsgerichtsrecht, 2e éd., p. 361; Pierre Lalive/Jean-François
Poudret/Claude Reymond, Le droit de l'arbitrage interne et
international en
Suisse, n. 2 ad art. 41 CIA). En tant qu'autorité judiciaire
compétente pour
connaître de la demande de révision d'une sentence rendue dans le
cadre d'un
arbitrage international, le Tribunal fédéral n'a pas à déterminer
quelle sera
l'incidence concrète du fait nouveau invoqué par le requérant sur le
dispositif de la sentence à rendre en cas d'admission de la demande de
révision. C'est au tribunal arbitral auquel la cause est renvoyée,
voire à un
tribunal arbitral spécialement constitué dans ce but, qu'il incombe
de le
faire. Le rôle de l'autorité de révision consiste uniquement dans
l'examen
hypothétique de la pertinence du fait nouveau au regard des
considérations
juridiques sur lesquelles les arbitres ont fondé la sentence dont la
révision
est requise. En d'autres
termes, le Tribunal fédéral, lorsqu'il
statue sur
une demande de révision d'une sentence au sens des art. 176 ss LDIP,
doit
simplement vérifier, en se basant sur les motifs de droit exposés
dans la
sentence attaquée, si le fait nouveau, à le supposer connu des
arbitres, eût
conduit ceux-ci, selon toute vraisemblance, à rendre une sentence
différente.

Les preuves, quant à elles, doivent servir à établir soit les faits
nouveaux
importants qui motivent la révision, soit des faits qui certes
étaient connus
lors de la procédure précédente, mais n'ont pu être prouvés, au
détriment du
requérant. Si les moyens nouveaux sont destinés à prouver des faits
déjà
allégués, celui-ci doit démontrer également qu'il était dans
l'impossibilité
de les faire valoir dans la procédure précédente. Une preuve est
considérée
comme concluante lorsqu'on doit admettre qu'elle aurait conduit le
juge à
statuer différemment s'il en avait eu connaissance dans la procédure
principale (ATF 118 II 199 consid. 5; 110 V 138 consid. 2 et l'arrêt
cité;
cf. également: Rigozzi/Schöll, op. cit., p. 42 s).

1.3 Il convient d'examiner successivement la recevabilité et le
mérite de la
présente demande de révision à la lumière de ces principes.

2.
2.1Les requérants n'ont déposé ladite demande qu'à titre subsidiaire,
soit
dans l'éventualité où leur recours de droit public connexe serait
rejeté
intégralement. L'un d'entre eux - A.________ - a effectué cette
démarche pour
le cas où, dans la procédure parallèle, le Tribunal fédéral ne
casserait pas
la sentence en tant qu'elle l'a impliqué contre son gré dans la
procédure
arbitrale. Comme le recours de droit public a été entièrement rejeté
par
arrêt séparé de ce jour, la demande de révision est toujours
d'actualité et
chacun des trois requérants peut faire valoir un intérêt juridiquement
protégé à son admission. Toutefois, ainsi que l'intimée le remarque à
juste
titre, cette demande apparaît d'emblée vouée à l'échec dans la mesure
où ses
auteurs y articulent les mêmes griefs que ceux qu'ils ont formulés à
l'appui
du recours de droit public connexe. En effet, ces deux moyens de droit
extraordinaires sont ouverts pour des motifs qui ne se recoupent pas.

2.2 La demande de révision a été présentée dans les formes requises
(art. 140
OJ) et avant l'expiration du délai de déchéance fixé à l'art. 141 al.
1 let.
b OJ. Sous cet angle, elle est donc recevable. Tel n'est pas le cas,
en
revanche, de la conclusion par laquelle les requérants invitent la
Cour de
céans à prononcer elle-même une condamnation pécuniaire à l'encontre
de
l'intimée. Aussi bien, comme on l'a indiqué plus haut (cf. consid.
1.1), le
Tribunal fédéral, lorsqu'il statue sur une demande de révision d'une
sentence
arbitrale internationale, ne s'occupe que du rescindant et pas du
rescisoire,
contrairement à ce qui est le cas lorsqu'il est requis de réviser ses
propres
arrêts (cf. art. 144 al. 1 OJ).

2.3 Les pièces produites le 22 septembre 2003 par le conseil des
requérants
n'ont aucun rapport avec les motifs de révision invoqués par ceux-ci.
Il n'y
a donc pas lieu de les prendre en considération.

3.
A titre de faits nouveaux, les requérants invoquent, d'une part, la
découverte de vices cachés importants affectant la qualité de
l'ouvrage et,
d'autre part, des tromperies de l'intimée sur les quantités de
matériaux
facturées.

3.1 Le premier motif a trait à des faits qui étaient connus des
requérants,
puisque ces faits ont été allégués en procédure. C'est ainsi que, sous
chiffre 23 de l'acte de mission du 12 août 2001, dans un passage de
cet acte
relatant la position des parties défenderesses, il est indiqué que
celles-ci
invoquent des "vices de construction", les prestations de l'intimée
n'ayant
au demeurant pas atteint la qualité et le niveau d'exécution requis
par le
maître de l'ouvrage, à leur avis. En outre, il ressort de la sentence
attaquée que, lors de l'audience des 8 et 9 octobre 2001, les
requérants ont
communiqué au Tribunal arbitral une déclaration faite devant notaire
par l'un
des ouvriers de l'intimée - C.________ - faisant état de vices cachés
importants (sentence, n. 16, p. 6, avant-dernier §).
Le fait allégué n'est donc pas nouveau, au sens de la jurisprudence
rappelée
plus haut.

3.2 La même conclusion s'impose en ce qui concerne la nouveauté
prétendue du
second fait allégué à l'appui de la demande de révision. Il ressort,
en
effet, des passages du rapport d'expertise établi le 9 janvier 2003
par
l'expert F.________, auxquels il est fait référence dans la réponse à
la
demande de révision, qu'un employé de Y.________ - I.________ - avait
réalisé, à l'époque, pour le compte de cette société, les métrés des
travaux
exécutés par les entreprises, y compris l'intimée, sur le chantier en
cause.
Or, au dire de l'expert, les quantités vérifiées ultérieurement par la
société W.________ étaient identiques à celles mesurées par cet
employé,
alors que les quantités facturées par l'intimée représentaient
"approximativement le double". Les explications de l'expert
autorisent une
double conclusion: premièrement, les requérants ne pouvaient pas
ignorer les
quantités calculées par un employé commis par l'un d'entre eux à
cette fin
dès avant le début de la procédure d'arbitrage; secondement, s'ils ne
se sont
pas interrogés plus tôt sur l'origine de l'énorme différence
constatée entre
le montant des travaux figurant au budget et celui qui leur a été
finalement
facturé, ils doivent se laisser opposer leur manque de curiosité, et
ce
défaut de diligence les empêche de fonder leur demande de révision
sur le
fait allégué par eux.

3.3 Il n'y a donc pas, dans les circonstances prétendument nouvelles
invoquées par les requérants, un fait nouveau, juridiquement parlant,
susceptible de justifier la demande de révision de la sentence
attaquée.

4.
Au titre des preuves nouvelles, les requérants mentionnent les
rapports de la
société W.________ ainsi que les expertises faites par H.________ et
F.________, qui mettraient au jour la tromperie intervenue dans le
calcul des
métrés et l'existence de défauts cachés.

4.1 Relativement à ces pièces, les requérants prient le Tribunal
fédéral de
se rapporter à leurs développements sur les faits nouveaux, ceux-ci
s'appliquant selon eux, mutatis mutandis, aux preuves nouvelles. Il
est
douteux que ce renvoi global satisfasse à l'exigence de motivation de
la
demande de révision dans la mesure où l'on ne saurait assimiler sans
autre
les preuves nouvelles aux faits nouveaux. Il n'est toutefois pas
nécessaire
d'examiner plus avant ce problème de recevabilité dès lors que la
demande de
révision doit de toute façon être rejetée sur ce point également pour
les
motifs indiqués ci-après.

4.2 Doit d'emblée être dénié tout caractère de nouveauté au rapport
établi
par l'ingénieur-conseil H.________. En effet, le Tribunal arbitral a
pris
connaissance du document avant de rendre sa sentence et il a refusé
expressément d'en tenir compte par une appréciation anticipée de la
force
probante de ce moyen de preuve, ainsi que cela ressort des motifs
énoncés
dans l'ordonnance de procédure n° 4 du 10 octobre 2002. La décision du
Tribunal arbitral d'écarter cette expertise privée aurait pu
constituer, tout
au plus, une violation du droit à la preuve de la partie qui avait
produit la
pièce en question; les requérants s'en sont du reste plaints à ce
titre dans
leur recours de droit public connexe, mais sans succès. Elle ne
saurait en
aucun cas justifier la révision requise.

Quant au rapport de la société W.________, il n'a fait que confirmer
une
circonstance qui était déjà avérée - l'existence d'une nette
différence entre
les quantités facturées et les quantités mesurées - et que les
requérants
auraient pu aisément découvrir en temps utile s'ils avaient fait
preuve d'un
minimum de diligence.

Enfin, le rapport complémentaire de l'expert F.________, daté du 9
janvier
2003, a certes été établi après la clôture de la procédure arbitrale.
Force
est toutefois de constater que les requérants n'ont pas réussi à
établir
qu'ils se seraient trouvés dans l'impossibilité de faire valoir la
preuve
prétendument nouvelle dans la procédure précédente. C'est le lieu de
rappeler
que, lors de son audition du 26 juillet 2002, cet expert avait
indiqué au
Tribunal arbitral que la détermination des responsabilités quant aux
malfaçons constatées par lui nécessitait de nouvelles investigations.
Il
appartenait donc aux requérants de solliciter sur-le-champ un
complément
d'instruction portant sur les points laissés en suspens par
F.________, tout
en invitant le Tribunal arbitral à ne pas prononcer la clôture des
débats
avant que cet expert ait déposé son rapport complémentaire. Ils
assurent
l'avoir fait expressément, mais s'abstiennent toutefois d'indiquer
où, quand
et comment ils ont formulé une requête dans ce sens. En tout cas, le
procès-verbal de l'audience arbitrale en question ne relate pas le
dépôt
d'une telle requête. En préférant mandater de leur propre initiative
un
expert privé, en la personne de l'ingénieur-conseil H.________, sans
en
référer au Tribunal arbitral, les requérants ont ainsi effectué une
démarche
qui a eu pour effet de retarder la mise en oeuvre de l'expertise
complémentaire confiée ultérieurement à F.________. Et la surcharge de
l'homme de l'art, qu'ils invoquent pour justifier cette démarche, non
seulement ne ressort pas des constatations des arbitres, mais est
plutôt
infirmée par l'intéressé lui-même, lequel précise, dans le passage de
son
expertise complémentaire cité sous chiffre 53 de la demande de
révision, que,
durant le mois d'août 2002, il a procédé à un sondage pour déterminer
l'origine du principal vice (ruissellement) affectant l'ouvrage
litigieux.
Dans ces conditions, les requérants ne peuvent s'en prendre qu'à
eux-mêmes
s'ils n'ont pas été en mesure de produire le rapport complémentaire de
l'expert F.________ avant que le Tribunal arbitral ne mette un terme
à la
procédure probatoire.

Au demeurant, les explications fournies par les requérants dans leur
demande
de révision sont tout à fait impropres à établir le caractère
concluant de ce
rapport complémentaire qui prend essentiellement appui sur
l'expertise privée
de H.________, aux conclusions de laquelle le Tribunal arbitral a
dénié toute
force probante.

4.3 Il suit de là que les preuves mentionnées dans la demande de
révision ne
peuvent pas être qualifiées de nouvelles, dans l'acception
jurisprudentielle
de ce terme.

5.
Cela étant, la demande de révision ne peut qu'être rejetée.
Conformément aux
art. 156 al. 1 et 7 OJ et 159 al. 1 et 5 OJ, les requérants, qui
succombent,
devront supporter solidairement les frais et dépens afférents à la
présente
procédure.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
La demande de révision est rejetée.

2.
Un émolument judiciaire de 17'000 fr. est mis à la charge des
requérants,
solidairement entre eux.

3.
Les requérants sont condamnés solidairement à verser à l'intimée une
indemnité de 19'000 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et au
Président du Tribunal arbitral.

Lausanne, le 16 octobre 2003

Au nom de la Ire Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 4P.117/2003
Date de la décision : 16/10/2003
1re cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-10-16;4p.117.2003 ?
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