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13/10/2003 | SUISSE | N°B.61/03

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 octobre 2003, B.61/03


{T 7}
B 61/03

Arrêt du 13 octobre 2003
IIe Chambre

Mme et MM. les Juges Widmer, Ursprung et Frésard. Greffière : Mme von
Zwehl

Servisa Fondation collective des Banques Cantonales, St. Alban-Anlage
26,
4052 Bâle, recourante,

contre

M.________, 1967, intimée, représentée par Me Daniel Meyer, avocat,
7, rue
Ferdinand-Hodler, 1207 Genève

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 15 avril 2003)

Faits:

A.
M.______

__, née en 1967, était employée auprès du Foyer X.________ en
qualité
de femme de chambre du 6 mai 1988 au 31 juillet 1998, date à l...

{T 7}
B 61/03

Arrêt du 13 octobre 2003
IIe Chambre

Mme et MM. les Juges Widmer, Ursprung et Frésard. Greffière : Mme von
Zwehl

Servisa Fondation collective des Banques Cantonales, St. Alban-Anlage
26,
4052 Bâle, recourante,

contre

M.________, 1967, intimée, représentée par Me Daniel Meyer, avocat,
7, rue
Ferdinand-Hodler, 1207 Genève

Tribunal administratif de la République et canton de Genève, Genève

(Jugement du 15 avril 2003)

Faits:

A.
M.________, née en 1967, était employée auprès du Foyer X.________ en
qualité
de femme de chambre du 6 mai 1988 au 31 juillet 1998, date à laquelle
ses
rapports de service ont été résiliés pour cause d'incapacité de
travail
prolongée. Saisi d'une demande de prestations déposée le 2 avril 1998,
l'Office AI du canton de Genève (ci-après : l'office AI) a chargé le
Centre
d'observation médicale de l'AI (COMAI) de procéder à une expertise
médicale.
Les experts du COMAI ont posé le diagnostic de trouble somatoforme
douloureux
dans le cadre d'un trouble dépressif récurrent; ils ont estimé la
capacité de
travail de M.________ à 50 % dès le 1er mars 1997 et à 30 % dès le 1er
juillet 1999, en raison d'une aggravation du trouble. Sur cette base,
l'office AI a alloué à la prénommée une demi-rente d'invalidité avec
effet au
1er avril 1997, puis une rente entière à partir du 1er novembre 1999,
assorties des rentes complémentaires pour sa famille (décision du 8
novembre
2001).

Le 25 octobre 2001, Servisa, Fondation collective des Banques
cantonales,
(ci-après : Servisa) - à laquelle M.________ avait été affiliée par
son
ancien employeur - a informé cette dernière qu'elle lui reconnaissait
un
degré d'invalidité de 100 % dès le 1er novembre 1999, et qu'elle
allait lui
verser des prestations d'invalidité en conséquence, au titre de la
prévoyance
professionnelle obligatoire selon la LPP.

B.
Par écriture du 30 octobre 2002, M.________ a ouvert action devant le
Tribunal administratif du canton de Genève (aujourd'hui en matière
d'assurances sociales : Tribunal cantonal des assurances sociales), en
concluant au versement, dès le 1er novembre 1999, d'une rente calculée
conformément au certificat de prévoyance valable en 1997, soit une
rente
annuelle de 21'680 fr. et une rente pour enfant de 4'336 fr., montants
correspondant aux prestations dues en cas d'invalidité (rente
entière) dans
le cadre de la prévoyance surobligatoire.

Par jugement du 15 avril 2003, le tribunal a admis la demande et
condamné la
défenderesse à verser à la demanderesse «une rente d'invalidité
d'adulte et
une rente d'invalidité d'enfant au sens des considérants». En bref,
les
premiers juges ont considéré que Servisa était tenue de répondre de
l'aggravation de l'invalidité de l'assurée également au titre de la
prévoyance surobligatoire.

C.
Servisa interjette recours de droit administratif contre ce jugement,
dont
elle requiert l'annulation, sous suite de dépens. Elle invite le
Tribunal
fédéral des assurances à constater que son règlement «exclut des
prestations
surobligatoires en cas d'augmentation du degré d'invalidité après la
résiliation des rapports de travail et que le montant des prestations
versées
par la plaignante à l'intimée a été calculé correctement».

M.________ conclut au rejet du recours, ce que propose également
l'Office
fédéral des assurances sociales.

Considérant en droit:

1.
Le litige porte sur le point de savoir si l'institution de prévoyance
doit ou
non verser des prestations du régime surobligatoire en raison de
l'aggravation de l'état de santé de l'assurée.

2.
Les rapports de travail entre M.________ et le Foyer X.________ ont
pris fin
le 31 juillet 1998. Selon l'art. 10 al. 2 LPP, l'obligation d'être
assuré
cesse, entre autres éventualités, en cas de dissolution des rapports
de
travail. Durant un mois après la fin des rapports avec l'institution
de
prévoyance, le salarié demeure assuré auprès de l'ancienne
institution de
prévoyance pour les risques de décès et d'invalidité (art. 10 al. 3
LPP; pour
la prévoyance surobligatoire, voir l'art. 331a al. 2 CO, qui a un même
contenu). Le rapport de prévoyance prend normalement fin avec la
dissolution
des rapports de travail (ATF 120 V 20 consid. 2a).

Il n'est pas contesté que l'aggravation de l'état de santé de
l'intimée est
survenue en juillet 1999, ce qui a conduit au versement d'une rente
entière
de l'assurance-invalidité dès le 1er novembre 1999 (art. 88a al. 2
RAI). Ce
moment se situe largement après le délai de la couverture d'assurance
prolongée selon l'art. 10 al. 3 LPP.

3.
D'après la jurisprudence, si l'institution de prévoyance verse une
prestation
d'invalidité pour une incapacité de travail qui est survenue pendant
la
période d'assurance, elle reste tenue de fournir - et d'augmenter -
ses
prestations si l'invalidité s'aggrave après la dissolution du rapport
de
prévoyance (ATF 123 V 264 consid. 1a, 118 V 45 consid. 5). Cette
jurisprudence se fonde sur le texte de l'art. 23 LPP qui fait
référence à
«l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de
l'invalidité». Par
cette notion, l'on entend aussi une augmentation sensible du degré de
l'incapacité de travail postérieurement à la fin des rapports de
travail et à
la période d'assurance prolongée.
Ces principes ne valent cependant que pour la prévoyance obligatoire.
Dans le
domaine de la prévoyance plus étendue, les institutions de prévoyance
sont
libres, dans le cadre de l'art. 49 al. 2 LPP, de retenir une
définition de
l'événement assuré qui diffère de celle de l'art. 23 LPP. Toutefois,
même
dans leur sphère de compétences propres, les institutions de
prévoyance ne
jouissent pas d'un pouvoir discrétionnaire. Si elles définissent,
dans leurs
statuts ou leurs règlements, l'événement assuré ou l'invalidité de
manière
autonome, elles doivent, dans l'interprétation de ces notions,
prendre en
compte le sens retenu dans les autres branches du droit des assurances
sociales ou selon les principes généraux du droit. Les institutions de
prévoyance sont ainsi libres dans le choix de la notion de
l'invalidité (ATF
120 V 108 consid. 3c) et de l'événement assuré (RSAS 1997 p. 560
consid. 4a),
mais elles doivent les appliquer de manière uniforme.

4.
4.1Selon l'art. 17.1.1 du règlement de la recourante, en cas
d'incapacité de
gain d'une personne assurée avant la retraite, il y a droit à une
rente
d'invalidité. D'après l'art. 17.4.1, l'assuré a droit à une rente
entière
d'invalidité lorsque l'incapacité de gain atteint 66 2/3 pour cent et
plus;
si l'incapacité est inférieure à 66 2/3 pour cent, le montant de la
rente est
déterminé en fonction de l'incapacité de gain; une incapacité de gain
de
moins de 25 pour cent ne donne pas droit à la rente.

4.2 Le règlement fait ainsi dépendre le droit à la rente d'une
incapacité de
gain et non d'une incapacité de travail. Le risque assuré diffère de
celui
qui est assuré dans la prévoyance professionnelle obligatoire. La
survenance
d'une incapacité de gain de 70 pour cent est postérieure au moment où
l'assurance prolongée a pris fin, de sorte qu'elle n'ouvre pas droit
à des
prestations d'invalidité de la prévoyance plus étendue. Le Tribunal
fédéral
des assurances est arrivé à la même conclusion dans des affaires où le
règlement de prévoyance de l'institution concernée contenait des
dispositions
semblables ou analogues aux dispositions réglementaires citées plus
haut
(RSAS 1997 p. 557, 1995 p. 467; arrêt non publié D. du 6 mai 1997 [B
55/95];
pour un aperçu, voir Meyer-Blaser, 1995-1999 die Rechtsprechung von
Eidgenössischem Versicherungsgericht und Bundesgericht zum BVG : eine
Sichtung der Ergebnisse [und einige Anmerkungen], RSAS 2000 p. 300
sv.). Il
n'y a pas de motif de revenir sur cette jurisprudence.

4.3 Le parallèle qu'entend tirer l'Office fédéral des assurances
sociales
entre la présente cause et l'arrêt B 57/02 n'est pas pertinent. Dans
cette
affaire, le Tribunal fédéral des assurances a constaté que
l'institution de
prévoyance ne s'était pas écartée de la LPP dans la définition de
l'événement
assuré (survenance de l'incapacité de travail). Le TFA a clairement
indiqué
que ce cas était différent de ceux précédemment jugés, dans lesquels
l'invalidité, respectivement l'incapacité de gain, constituaient -
comme en
l'espèce - l'événement assuré. N'est pas pertinente non plus la
référence des
premiers juges aux dispositions réglementaires sur la rechute. Ces
dispositions (art. 17.5. ss) concernent au contraire le début du
droit à la
rente et le délai d'attente. Elles ne disent rien sur l'aggravation de
l'invalidité d'un bénéficiaire de rente après la dissolution du
rapport de
prévoyance.

5.
Vu la nature du litige, il est statué sans frais (art. 134 OJ).

Bien qu'elle obtienne gain de cause, Servisa n'a pas droit,
contrairement à
ses conclusions, à une indemnité de dépens. En règle ordinaire, une
telle
indemnité n'est pas allouée aux institutions de prévoyance, qu'elles
soient
ou non représentées par un avocat (art. 159 al. 2 in fine OJ; ATF 122
V 330
consid. 6 et la jurisprudence citée).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce:

1.
Le recours est admis et le jugement du Tribunal administratif du
canton de
Genève du 15 avril 2003 est annulé.

2.
La demande est rejetée.

3.
Il n'est pas perçu de frais de justice, ni alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal
genevois
des assurances sociales et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 13 octobre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Juge présidant la IIe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : B.61/03
Date de la décision : 13/10/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-10-13;b.61.03 ?
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