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10/10/2003 | SUISSE | N°U.278/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 10 octobre 2003, U.278/02


{T 7}
U 278/02

Arrêt du 10 octobre 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M.
Berthoud

C.________, recourante, représentée par Me Paul-Arthur Treyvaud,
avocat, rue
du Casino 1, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

SWICA Assurances SA, Römerstrasse 37, 8401 Winterthur, intimée

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 25 juillet 2002)

Faits :

A.
C. ________ était assurée contre le risque

d'accidents professionnels
et non
professionnels par SWICA Assurances SA (ci-après : SWICA). Le 25
septembre
1998, elle a é...

{T 7}
U 278/02

Arrêt du 10 octobre 2003
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffier : M.
Berthoud

C.________, recourante, représentée par Me Paul-Arthur Treyvaud,
avocat, rue
du Casino 1, 1400 Yverdon-les-Bains,

contre

SWICA Assurances SA, Römerstrasse 37, 8401 Winterthur, intimée

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 25 juillet 2002)

Faits :

A.
C. ________ était assurée contre le risque d'accidents professionnels
et non
professionnels par SWICA Assurances SA (ci-après : SWICA). Le 25
septembre
1998, elle a été victime d'un accident de la circulation, au cours
duquel son
véhicule a été percuté latéralement, entraînant une contusion
cervicale (coup
du lapin). SWICA a pris les suites de cet événement à sa charge (frais
médicaux et indemnités journalières).

A la demande du docteur A.________, une IRM cervicale a été pratiquée
le 2
octobre 1998 par le docteur B.________; cet examen a révélé de
discrètes
protrusions discales C4-C5, C5-C6 et C6-C7, vraisemblablement sans
signification pathologique, la colonne cervicale étant par ailleurs
normale.
Le docteur A.________ a attesté que l'assurée pouvait reprendre le
travail à
plein temps à partir du 19 novembre 1998, tout en recommandant un
soutien
psychologique (rapport du 3 décembre 1998). C.________ a consulté le
docteur
C.________, qui a attesté que sa patiente présentait un état de stress
post-traumatique (rapport du 13 janvier 1999); les docteurs
D.________ et
E.________, médecins à la Clinique X.________, ont partagé cette
opinion
(rapport du 2 mars 1999).

Avec l'assentiment de l'assurée, SWICA a confié un mandat d'expertise
au
docteur F.________, spécialiste en psychiatrie et psychothérapie.
Dans son
rapport du 4 juin 1999, l'expert a fait état de troubles
psychosomatiques
chez une personnalité faux-self (borderline). Il a précisé que
l'assurée
fonctionne dans l'agir, qu'elle est projective et théâtrale et
rationalise à
outrance et qu'elle se montre manipulatrice dans la relation. A son
avis, il
est possible que l'expertisée ait présenté un syndrome de stress
post-traumatique à la suite de l'accident du 25 septembre 1998, ainsi
que son
médecin traitant et elle-même le soutiennent. L'expert n'est
cependant pas en
mesure d'en vérifier l'authenticité. Par ailleurs, il a indiqué que
l'assurée
ne se montrait ni déprimée ni angoissée, et qu'elle ne présentait
actuellement ni éléments psychotiques ni stress post-traumatique. En
conclusion, l'expert a retenu qu'un syndrome post-traumatique, s'il
avait
existé, pouvait être considéré comme étant résolu. Quant aux troubles
psychosomatiques, il a exposé que leur relation de causalité avec
l'accident
apparaissait douteuse, d'autant que les symptômes décrits sont flous,
imprécis et contradictoires.

Par décision du 13 juillet 1999, SWICA a nié que les affections
psychiques de
l'assurée fussent en relation de causalité avec l'accident du 25
septembre
1998. Elle a dès lors refusé de prendre en charge le traitement
psychiatrique
et l'incapacité de travail existant à compter du mois de décembre
1998.
Saisie d'une opposition, SWICA a confirmé sa position, par décision
sur
opposition du 27 janvier 2000.

B.
C.________ a déféré cette décision au Tribunal des assurances du
canton de
Vaud, en concluant à ce que SWICA fût condamnée à allouer ses
prestations
pour les suites de l'accident du 25 septembre 1998. A l'appui de ses
conclusions, elle a produit des attestations émanant des docteurs
C.________
(du 21 juillet 2000), G.________ (du 2 février 2001) et H.________
(du 10
avril 2001).

Interrogé par le Juge instructeur, le docteur F.________ a précisé,
notamment, que le diagnostic de troubles psychosomatiques n'était pas
incompatible avec celui de personnalité borderline (faux-self). Selon
ce
psychiatre, les troubles psychiques de l'assurée n'avaient aucun lien
avec
l'accident du 25 septembre 1998 ni avec un autre événement, car ils se
développent dès l'enfance ou l'adolescence et s'établissent
clairement au
début de l'âge adulte. Sa personnalité préexistait à l'accident du 25
septembre 1998 (rapport du 6 février 2002).

Par jugement du 25 juillet 2002, le Tribunal cantonal a rejeté le
recours.

C.
C.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
elle demande l'annulation, avec suite de dépens. Elle conclut
principalement
à ce que SWICA soit condamnée à lui allouer ses prestations,
subsidiairement
au renvoi de la cause au Tribunal cantonal afin qu'il mette une
expertise en
oeuvre.

L'intimée conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurances
sociales a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.
Il s'agit de déterminer si les affections psychiques dont souffre la
recourante sont consécutives à l'accident survenu le 25 septembre
1998 et si
l'intimée doit en répondre.

2.
2.1La juridiction cantonale de recours a exposé correctement les
conditions
auxquelles l'assureur-accidents est tenu d'allouer ses prestations,
de sorte
qu'il suffit de renvoyer au consid. 3 du jugement attaqué.

2.2 Dans un arrêt du 14 juin 1999 (ATF 125 V 351), le Tribunal
fédéral des
assurances a précisé sa jurisprudence relative à l'appréciation des
preuves
notamment dans le domaine médical. Il convient de rappeler ici que
selon le
principe de la libre appréciation des preuves, qui s'applique aussi
bien en
procédure administrative qu'en procédure de recours de droit
administratif
(art. 40 PCF en corrélation avec l'art. 19 PA; art. 95 al. 2 OJ en
liaison
avec les art. 113 et 132 OJ), l'administration ou le juge apprécie
librement
les preuves, sans être lié par des règles formelles, en procédant à
une
appréciation complète et rigoureuse des preuves. Dès lors, le juge
doit
examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en
soit la
provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de
porter
un jugement valable sur le droit litigieux. Si les rapports médicaux
sont
contradictoires, il ne peut trancher l'affaire sans apprécier
l'ensemble des
preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur
une
opinion médicale et non pas sur une autre.

L'élément déterminant pour la valeur probante d'un certificat médical
n'est
ni son origine ni sa désignation sous la forme d'un rapport ou d'une
expertise, mais bel et bien son contenu. A cet égard, il importe que
les
points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée,
que le
rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en
considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine
connaissance du dossier (anamnèse), que la description des
interférences
médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient
bien
motivées.

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des
preuves, la
jurisprudence a posé des lignes directrices en ce qui concerne la
manière
d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux.

Lorsque, au stade de la procédure administrative, une expertise
confiée à un
médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la
base
d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi
qu'en pleine
connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats
convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun
indice
concret ne permet de douter de leur bien-fondé.

En outre, au sujet des rapports établis par les médecins traitants,
le juge
peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin
traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti
pour son
patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier.

Toutefois, le simple fait qu'un certificat médical est établi à la
demande
d'une partie et produit pendant la procédure ne justifie pas, en soi,
des
doutes quant à sa valeur probante. Une expertise présentée par une
partie
peut donc également valoir comme moyen de preuve. En vertu des
principes
énoncés par la jurisprudence concernant l'appréciation des preuves,
le juge
est toutefois tenu d'examiner si elle est propre à mettre en doute,
sur les
points litigieux importants, l'opinion et les conclusions de l'expert
mandaté
par le tribunal. Cette jurisprudence s'applique aussi bien lorsqu'un
assuré
entend remettre en cause, au moyen d'une expertise privée, les
conclusions
d'une expertise aménagée par l'assureur-accidents ou par un office AI.

2.3 Il convient encore de compléter cet exposé en précisant que la loi
fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales
(LPGA), du 6
octobre 2000, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, n'est pas
applicable en
l'espèce, le juge des assurances sociales n'ayant pas à tenir compte
des
modifications du droit ou de l'état de fait survenues après que la
décision
litigieuse (in casu du 27 janvier 2000) a été rendue (cf. ATF 127 V
467
consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).

3.
En procédure administrative, l'intimée n'a pas respecté le droit de la
recourante d'être entendue, car elle a omis de lui communiquer le
rapport du
docteur F.________ du 4 juin 1999 avant de rendre sa décision du 13
juillet
1999 (cf. RAMA 2000 n° U 369 p. 103).

Aussi bien dans la procédure sur opposition que devant le Tribunal
cantonal
des assurances, les parties ont pu s'exprimer sur ce rapport et sur le
rapport complémentaire du docteur F.________ du 6 février 2002, dans
lequel
l'expert donnait diverses précisions. Dans de telles circonstances,
on peut
considérer que le vice de procédure a été réparé, de sorte qu'il est
inutile
de renvoyer la cause à l'intimée pour ce seul motif (cf. ATF 127 V 437
consid. 3d/aa, 126 I 72, 126 V 132 consid. 2b et les références).

4.
La recourante reproche au premier juge d'avoir nié à tort l'existence
d'un
lien de causalité naturelle entre l'accident du 25 septembre 1998 et
les
troubles psychiques qu'elle présente actuellement. A cet égard, elle
soutient
que le rapport d'expertise du docteur F.________ est en contradiction
manifeste avec les constatations de ses médecins traitants, qui sont
tous
parvenus à la conclusion qu'elle avait été victime d'un coup du
lapin. A son
avis, l'expert est parti de fausses prémisses, retenant d'emblée que
l'accident dont elle a été victime n'était pas de gravité moyenne.

5.
5.1Le docteur F.________ a été invité à s'exprimer en qualité
d'expert en
psychiatrie, selon un choix commun des parties, en raison de ses
connaissances particulières dans ce domaine. Ses deux rapports des 4
juin
1999 et 6 février 2002 se fondent sur des examens complets, prennent
en
considération les plaintes de la recourante et ont été établis en
pleine
connaissance de l'anamnèse. La description du contexte médical et
l'appréciation de la situation médicale sont claires et enfin les
conclusions
de l'expert sont dûment motivées. En particulier, la question du lien
de
causalité naturelle entre l'accident du 25 septembre 1998, d'une
part, et
l'état de stress post-traumatique ainsi que les troubles
psychosomatiques,
d'autre part, y a fait l'objet d'une étude circonstanciée. Ses deux
rapports
ont donc pleine valeur probante (cf. ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V
160
consid. 1c et les références).

Par ailleurs, il importe peu que l'expert F.________, qui était
informé de
l'existence d'un coup du lapin, ait porté une appréciation sur le
degré de
gravité de l'accident, car ce point n'entrait pas dans le cadre de son
mandat. De toute manière, le critère de la gravité d'un accident,
invoqué par
la recourante, n'entre en considération que lorsque l'administration
ou le
juge sont appelés à trancher la question de la causalité adéquate (à
propos
de la division tripartite des accidents, voir ATF 115 V 407 consid.
5), dans
l'éventualité où un médecin a préalablement admis l'existence d'un
rapport de
causalité naturelle entre un accident et des troubles psychiques (cf.
ATF 119
V 337 consid. 1, 118 V 289 consid. 1b et les références).

En l'espèce, le docteur F.________ a admis qu'il était possible que
l'expertisée ait présenté un stress post-traumatique, ainsi que ses
confrères
l'avaient attesté. Eu égard aux réponses plus qu'évasives que la
recourante
avait apportées à ses questions, le psychiatre n'a toutefois pas pu en
vérifier l'authenticité; il a précisé que le mode de fonctionnement
psychique
antérieur de la patiente (absence d'insight, traits manipulatoires et
projectifs) permettait de douter d'une causalité d'un tel stress avec
l'accident, car les symptômes décrits étaient flous, imprécis et
contradictoires. Quoi qu'il en soit, le docteur F.________ a
clairement
attesté que la recourante ne présentait pas de syndrome de stress
post-traumatique d'après le CIM-10 (ou qu'il devrait être considéré
comme
étant résolu s'il avait existé) lorsqu'il l'a examinée, les 29 avril
et 4
juin 1999.

Quant aux troubles psychosomatiques de la recourante, le docteur
F.________ a
exposé de façon convaincante, dans son rapport complémentaire du 6
février
2002, qu'un trouble de la personnalité se développe dès l'enfance ou
l'adolescence et qu'il s'établit clairement au début de l'âge adulte.
Il en a
déduit que l'accident du 25 septembre 1998 ne saurait être à
l'origine de ces

troubles psychosomatiques, puisqu'ils préexistaient à cet événement.

5.2 Le docteur C.________, qui n'est pas spécialiste en psychiatrie,
s'est
exprimé de façon fort succincte dans ses rapports des 13 janvier 1999
et 21
juillet 2000. Singulièrement, dans ce dernier avis médical, il n'a
pas exposé
les raisons qui l'ont conduit à maintenir un diagnostic différent de
celui de
l'expert F.________ et n'a pas non plus discuté le rapport de
l'expert. Quant
au docteur G.________, qui suit la recourante depuis le début de
l'année
2001, il n'a pas motivé le diagnostic d'état de stress
post-traumatique qu'il
a posé dans son rapport du 2 février 2001, ni commenté les
conclusions de son
confrère F.________.

De leur côté, les docteurs D.________ et E.________, qui ne sont pas
davantage spécialisés en psychiatrie, ont certes donné une
justification à
leur diagnostic d'état de stress post-traumatique dans leur rapport
du 2 mars
1999. L'existence des troubles psychosomatiques attestés par le
psychiatre
F.________ leur a toutefois échappé, si bien que leur appréciation
globale de
l'état de santé psychique de la recourante n'est pas convaincante à
l'instar
de celle de leur confrère F.________.

Il s'ensuit que les écritures des quatre médecins prénommés ne
permettent pas
d'infirmer les conclusions de l'expert F.________, ni de jeter le
doute sur
leur pertinence de façon à justifier un complément d'instruction (cf.
ATF 125
V 352 consid. 3b/aa et les références).

6.
Vu ce qui précède, on doit admettre que les affections psychiques de
la
recourante ne sont pas en relation de causalité naturelle avec
l'accident
survenu le 25 septembre 1998. L'intimée n'en répond pas et a donc
refusé à
juste titre d'allouer ses prestations à partir du mois de décembre
1998. Le
recours est mal fondé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal des
assurances du
canton de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 10 octobre 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

La Présidente de la IVe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.278/02
Date de la décision : 10/10/2003
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-10-10;u.278.02 ?
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