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29/09/2003 | SUISSE | N°1A.21/2003

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 29 septembre 2003, 1A.21/2003


{T 0/2}
1A.21/2003 /col

Arrêt du 29 septembre 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Reeb et Féraud.
Greffier: M. Kurz.

les époux S.________ et 20 consorts,
recourants,
tous représentés par Me Efstratios Sideris, avocat, place des
Philosophes 8,
1205 Genève,

contre

A.________,
L.________,
intimés,
tous deux représentés par Me Soli Pardo, avocat, case postale 147,
1211
Genève 12,
Co

nseil d'Etat du canton de Genève, 1211 Genève 3,
agissant par le Département de l'aménagement,
de l'équipement et du logement du can...

{T 0/2}
1A.21/2003 /col

Arrêt du 29 septembre 2003
Ire Cour de droit public

MM. les Juges Aemisegger, Président de la Cour et Président du
Tribunal
fédéral, Reeb et Féraud.
Greffier: M. Kurz.

les époux S.________ et 20 consorts,
recourants,
tous représentés par Me Efstratios Sideris, avocat, place des
Philosophes 8,
1205 Genève,

contre

A.________,
L.________,
intimés,
tous deux représentés par Me Soli Pardo, avocat, case postale 147,
1211
Genève 12,
Conseil d'Etat du canton de Genève, 1211 Genève 3,
agissant par le Département de l'aménagement,
de l'équipement et du logement du canton de Genève, rue David-Dufour
5, case
postale 22, 1211 Genève 8,
Tribunal administratif du canton de Genève, rue du Mont-Blanc 18, case
postale 1256, 1211 Genève 1.

plan localisé de quartier,

recours de droit administratif contre l'arrêt du Tribunal
administratif du
canton de Genève du 10 décembre 2002.

Faits:

A.
Le 16 mai 2001, le Département de l'aménagement, de l'équipement et du
logement du canton de Genève (DAEL) a mis à l'enquête un plan
localisé de
quartier n° 29153-526 (PLQ) concernant l'aménagement de la parcelle
n° 10451
du cadastre de Meyrin, située au croisement du chemin de Joinville et
du
chemin des Sapins, en cinquième zone résidentielle de développement
3. Sur
cette parcelle de 1291 m2, propriété de A.________, le PLQ prévoit la
construction d'un immeuble de trois étages sur rez comprenant une
dizaine de
logements, avec un garage souterrain de 14 places. Ce plan a fait
l'objet
d'une opposition collective de la part des époux S.________ ainsi que
d'une
centaine de propriétaires ou locataires, habitants du quartier.
Ceux-ci se
plaignaient d'un gabarit excessif, des problèmes de circulation
(accroissement du trafic, nuisances sonores et pollution, parcage
sauvage,
insécurité), et d'une perte de qualité de vie dans ce quartier de
villas
(réverbération des nuisances sonores, abattage d'arbres).

B.
Par arrêtés du 10 avril 2002, le Conseil d'Etat genevois a, d'une
part,
adopté le PLQ et, d'autre part, rejeté les oppositions. Le plan
visait à
réaliser les objectifs de densification de la zone de développement 3,
conformément au plan directeur cantonal de 1990 et au concept de
l'aménagement cantonal de 2000, lequel préconise une densification
selon
l'indice de 1,2. Le taux d'occupation du PLQ, de 1, se situait en
retrait des
possibilités d'utilisation, de même que la hauteur du bâtiment, de 12
m pour
un maximum de 21 m en zone de développement 3. S'agissant des
nuisances
sonores, des suppressions de végétation, des accès et du trafic, les
services
concernés avaient préavisé favorablement le projet.

C.
Par arrêt du 10 décembre 2002, le Tribunal administratif genevois a
rejeté le
recours formé par les époux S.________, ainsi que par 29 autres
opposants.
Une partie au moins des recourants, domiciliée à proximité immédiate
du
périmètre du PLQ, avait qualité pour agir. L'indice d'utilisation et
le
gabarit restaient modestes, et il n'y avait pas de disproportion avec
les
villas existantes. Il était possible d'adopter un PLQ pour une seule
parcelle. Les valeurs limites d'immission applicables en cinquième
zone, soit
60 dB (A) le jour et 50 dB (A) la nuit, étaient respectées pour le
trafic
routier, selon les pronostics du service cantonal de protection
contre le
bruit. Les valeurs de planification étaient irrelevantes dans le
cadre d'une
zone à bâtir existante. Les pertes d'ensoleillement étaient
admissibles et
l'augmentation du trafic très modérée; les suppressions de plantations
avaient fait l'objet d'un préavis favorable et le projet n'était pas
soumis à
l'EIE.

D.
Les époux S.________, ainsi que vingt consorts, forment un recours de
droit
administratif contre ce dernier arrêt, dont ils requièrent
l'annulation. Les
recourants ont demandé l'effet suspensif, qui a été refusé par
ordonnance
présidentielle du 27 février 2003.
Le Tribunal administratif persiste dans les termes de son arrêt. Le
DAEL
conclut à l'irrecevabilité, subsidiairement au rejet du recours. Les
intimés
A.________ et L.________ concluent au rejet du recours dans la mesure
où il
est recevable. Invité à se déterminer l'Office fédéral de
l'environnement,
des forêts et du paysage (OFEFP) considère que la réglementation
fédérale sur
la protection contre le bruit est respectée. Les parties ont pu
répliquer,
puis dupliquer.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
En vertu de l'art. 34 al. 3 LAT, seule la voie du recours de droit
public
(art. 84 ss OJ) est en principe ouverte contre les décisions de
dernière
instance cantonale relatives à l'approbation d'un plan d'affectation,
comme
le PLQ litigieux. Une telle décision peut cependant faire l'objet d'un
recours de droit administratif (art. 97 ss OJ) lorsque l'application
du droit
fédéral de la protection de l'environnement est en jeu (ATF 125 II 10
consid.
2a p. 13; 123 II 88 consid. 1a p. 91, 231 consid. 2 p. 233; 121 II 72
consid.
1b p. 75). Tel est le grief principal soulevé par les recourants,
consacré au
respect des prescriptions fédérales relatives à la protection contre
le
bruit. Invoquant la loi fédérale sur la protection de l'environnement
(LPE;
RS 814.01), l'ordonnance sur la protection contre le bruit (OPB; RS
814.41)
et son annexe 5, en relation avec les nuisances de bruit de
l'Aéroport de
Genève-Cointrin, les recourants se plaignent d'un défaut de
motivation de
l'arrêt cantonal, ainsi que d'une constatation inexacte des faits à
ce sujet.
Ces griefs formels peuvent eux aussi être examinés dans le cadre du
recours
de droit administratif. En revanche, le grief d'arbitraire, qui
concerne la
surface minimale que devrait couvrir un plan localisé de quartier,
doit être
soulevé par la voie du recours de droit public. Les recourants
n'invoquent à
cet égard qu'une disposition de la loi cantonale sur les zones de
développement fixant le contenu d'un PLQ, sans se prévaloir d'aucun
principe
qui pourrait découler du droit fédéral. Il y a donc lieu de
s'interroger sur
la recevabilité de ces différents moyens de droit, au regard
notamment des
dispositions sur la qualité pour agir.

1.1 Aux termes de l'art. 103 let. a OJ, a qualité pour former un
recours de
droit administratif quiconque est atteint par la décision attaquée et
a un
intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée ou modifiée. Le
recourant doit être touché dans une mesure et avec une intensité plus
grandes
que la généralité des administrés, et l'intérêt invoqué - qui n'est
pas
nécessairement un intérêt juridiquement protégé, mais qui peut être un
intérêt de fait - doit se trouver, avec l'objet de la contestation,
dans un
rapport étroit, spécial et digne d'être pris en considération (ATF
121 II 39
consid. 2c/aa p. 43, 171 consid. 2b p. 174, 120 Ib 48 consid. 2a p.
51 et les
arrêts cités).
Ces conditions sont en principe remplies quand le recours émane du
propriétaire d'un terrain directement voisin du projet litigieux (ATF
121 II
171 consid. 2b p. 74), ou lorsqu'une distance relativement faible
sépare
l'immeuble du ou des recourants de l'installation litigieuse (cf. ATF
121 II
171 consid. 2b p. 74 et la jurisprudence citée). S'il est certain ou
très
vraisemblable que l'installation litigieuse serait à l'origine
d'immissions -
bruit, poussières, vibrations, lumières ou autres - touchant
spécialement les
voisins, même situés à quelque distance, ces derniers peuvent avoir
qualité
pour recourir (ATF 124 II 293 consid. 3a p. 303, 120 Ib 379 consid.
4c et les
arrêts cités).
En l'occurrence, les recourants sont tous situés dans un périmètre
relativement proche du PLQ. Certains d'entre eux sont voisins directs
de la
parcelle n° 10451, d'autres en sont plus éloignés (la parcelle n°
1525 est
distante d'environ 200 m). Même si, à ce stade, les inconvénients
liés au
trafic, à la perte d'ensoleillement, à la densification et à la
disparition
de la végétation ne sont plus évoqués, les recourants - ou du moins
certains
d'entre eux - disposent d'un intérêt de fait à s'opposer à la
construction,
dans leur voisinage immédiat, de l'immeuble prévu par le PLQ. Il
convient
donc de reconnaître aux recourants la qualité pour agir par la voie du
recours de droit administratif.

1.2 Comme cela est relevé ci-dessus, le grief relatif à la surface
minimale
d'un PLQ relève, lui, du recours de droit public. Ce dernier est
soumis,
s'agissant de la qualité pour recourir, aux exigences de l'art. 88 OJ,
disposition qui implique en particulier que la norme dont la
violation est
alléguée tende, au moins dans une certaine mesure, à la protection des
intérêts du voisin (ATF 127 I 44 consid. 2c p. 46). Le voisin doit en
outre
être touché par les effets prétendument illicites de la construction
ou de
l'installation litigieuse (ATF 121 I 267 consid. 2 p. 268 et les
arrêts
cités). Il ne peut ainsi se prévaloir des principes généraux de la
planification, des prescriptions sur la protection de la nature et du
paysage
(ATF 116 Ia 433 consid. 2a p. 437) et des clauses d'esthétique (ATF
118 Ia
232 consid. 1b p. 235; 112 Ia 88 consid. 1b p. 90), qui tendent
exclusivement
à préserver l'intérêt public. Il peut en revanche invoquer les
prescriptions
relatives aux distances, aux dimensions des bâtiments et à la densité
des
constructions, qui sont des règles mixtes (ATF 118 Ia 232 consid. 1b
p. 235).
La norme invoquée par les recourants est l'art. 3 LGZD, qui décrit le
contenu
d'un plan localisé de quartier. Les recourants en déduisent qu'un
plan ne
portant que sur une parcelle ne permettrait pas une transformation
satisfaisante du quartier. Ce faisant, même s'ils entendent en
déduire un
avantage pour eux-mêmes, les recourants invoquent les principes
d'aménagement
applicables, selon eux, à la zone de développement, ainsi que
l'exigence
générale d'une urbanisation cohérente. La qualité pour agir leur fait
défaut
sur ce point, et le recours est irrecevable en tant qu'il porte sur la
question de la surface minimale du PLQ.

2.
Les recourants soutiennent, à propos des nuisances sonores de
l'Aéroport, que
les valeurs de planification (et non les valeurs limites d'immission)
fixées
dans l'annexe 5 OPB, devraient être respectées s'agissant
d'installations
nouvelles. En effet, l'adoption du plan litigieux impliquerait un
passage de
la zone 5 de villas à la zone 3, et il s'agirait en outre de la
première
mesure de délimitation de la zone à bâtir conforme à la LAT. Les
calculs
effectués par l'EMPA (qui ne constitueraient pas un cadastre de bruit
contraignant) seraient fondés sur des données datant de 1998, et ne
tiendraient pas compte de l'évolution du trafic aérien; il n'y aurait
aucune
station de mesures dans le quartier. Pour sa part, le Tribunal
administratif
aurait examiné la question du trafic routier, mais aurait ignoré le
problème
du trafic aérien.

3.
Sur ce dernier point, les recourants se plaignent d'une violation de
leur
droit d'être entendus, la cour cantonale ayant omis d'examiner les
questions
relatives à l'annexe 5 de l'OPB (valeurs limites d'exposition au
bruit des
aérodromes civils). Ce grief, d'ordre formel, doit être examiné en
premier
lieu.

3.1 Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst.,
implique pour
l'autorité l'obligation de motiver sa décision, en prenant notamment
position
sur les arguments pertinents qui lui sont soumis. La motivation d'une
décision est suffisante lorsque l'intéressé est mis en mesure d'en
apprécier
la portée et de la déférer à une instance supérieure en pleine
connaissance
de cause. Il suffit que l'autorité mentionne au moins brièvement les
motifs
qui l'ont guidée et sur lesquels elle a fondé son prononcé, sans
qu'elle soit
tenue de répondre aux moindres assertions des parties (ATF 126 I 97
consid.
2b p. 102-103 et les arrêts cités).

3.2 La cour cantonale retient, au consid. 6 de l'arrêt attaqué, que
les
valeurs limites d'immissions fixées à l'annexe 3 de l'OPB (trafic
routier)
sont respectées, le projet n'engendrant, selon le préavis du service
d'écotoxicologie, qu'un accroissement négligeable du niveau sonore. Le
Tribunal administratif ajoute que l'argument tendant à tenir compte
des
valeurs de planification est irrelevant, s'agissant d'une
construction en
zone à bâtir existante. Bien que cela ne soit pas précisé, cette
dernière
considération vaut aussi pour l'argumentation développée par les
recourants
sous l'angle de l'annexe 5 à l'OPB. En réplique, les recourants
soutenaient
en effet que le service d'écotoxicologie n'avait tenu compte que des
valeurs
d'immission, alors que les valeurs de planification étaient
applicables aux
installations nouvelles. Le Tribunal administratif répond donc, de
manière
succincte mais suffisante à cette objection. La motivation retenue
permet aux
recourants de faire valoir leurs arguments en connaissance de cause,
ce dont
ils ne se privent d'ailleurs pas dans le recours de droit
administratif, en
soutenant que les valeurs de planification seraient applicables
lorsqu'il y
a, comme en l'espèce, un changement d'urbanisation. Pour le surplus,
les
recourants ne contestaient pas les données sur la base desquelles le
Service
d'écotoxicologie a considéré que les valeurs d'immissions étaient
respectées,
de sorte que le Tribunal administratif
n'avait pas à revoir cette
appréciation. L'exigence de motivation est par conséquent respectée.

4.
En réplique, les recourants soulèvent deux autres griefs d'ordre
formel: ils
reprochent au Tribunal administratif de n'avoir pas procédé à une
inspection
locale et d'avoir statué sans audience publique. Outre qu'ils
apparaissent
mal fondés (les recourants n'ont formulé aucune requête devant la cour
cantonale), ces griefs sont tardifs, car les recourants ne les ont
pas fait
valoir dans leur recours initial. La possibilité de répliquer aux
arguments
éventuellement nouveaux présentés par les parties adverses (art. 93
al. 2 et
110 al. 4 OJ) ne doit pas permettre aux recourants de faire valoir,
en dehors
du délai de recours, des griefs qui auraient pu être soulevés à temps.

5.
Les recourants relèvent que le degré de sensibilité mentionné dans le
PLQ est
de II, alors que, pour la zone de l'Aéroport de Genève, le système
d'information du territoire de Genève du DIAE indique un degré III.
Pour le
degré de sensibilité II, les valeurs de planification sont, pour le
bruit
causé par les petits aéronefs et les grands avions, de 57 dB le jour
et 47/50
dB la nuit (ch. 221 et 222 de l'annexe 5 de l'OPB). Pour les
recourants, le
Tribunal administratif aurait excédé son pouvoir d'appréciation en
niant
l'application des valeurs de planification. La région de Cointrin
serait
appelée à passer, au fur et à mesure de l'adoption des PLQ, de la
zone 5 de
villas à la zone 3. Il en résulterait une forte urbanisation,
assimilable à
un changement de zone, l'équipement du quartier n'étant au surplus pas
suffisant pour accueillir des immeubles tel que celui qui est prévu.
La zone
de développement 3 n'ayant pas été délimitée selon la LAT, le plan
litigieux
serait le premier plan d'affectation conforme à cette loi. Les
courbes de
bruit calculées par l'EMPA ne constitueraient pas un cadastre de
bruit au
sens de l'art. 37 OPB et ne seraient pas contraignantes.
L'établissement d'un
cadastre de bruit devrait avoir lieu préalablement aux mesures
d'aménagement.
L'installation d'une station de mesures dans le quartier serait
nécessaire
dans ce cadre.
Dans un grief distinct, les recourants se plaignent d'une mauvaise
constatation des faits pertinents: depuis 1998, le trafic aérien
aurait
augmenté linéairement, passant de 151'517 mouvements en 1998 à
164'053 en
2002, abstraction faite d'une baisse passagère en 2001. Les courbes
calculées
en 1998 ne seraient plus d'actualité, compte tenu en outre des survols
d'hélicoptères à basse altitude. Plusieurs riverains du chemin des
Sapins
bénéficieraient d'indemnisations pour les nuisances de l'aéroport. Les
recourants évoquent aussi les réflexions de bruit sur les façades de
l'immeuble projeté. Ils estiment que des mesures d'ordre architectural
devraient être prises afin d'éviter tant l'augmentation que les
réflexions de
ces nuisances sonores.

5.1 Pour le PLQ contesté, le degré de sensibilité est de II (zones où
aucune
entreprise gênante n'est autorisée, destinée notamment à
l'habitation). Comme
l'explique le Service cantonal de protection contre le bruit et les
rayonnements non ionisants (le service cantonal), le degré de
sensibilité III
est attribué a priori pour toutes les zones de développement 3, par
définition mixtes. Rien n'empêche toutefois, au fur et à mesure de
l'adoption
de PLQ destinés à la construction de logements, d'attribuer un degré
de
sensibilité correspondant aux critères de l'art. 43 OPB. Il n'y a là
aucune
contradiction.

5.2 Selon l'art. 23 LPE, les valeurs de planification, inférieures aux
valeurs limites d'immissions, sont établies afin d'assurer la
protection
contre le bruit en vue de la planification de nouvelles zones à
bâtir. Selon
l'art. 24 al. 1 LPE, les nouvelles zones à bâtir destinées à la
construction
de logements ou d'autres immeubles destinés au séjour prolongé de
personnes,
ne peuvent être prévues qu'en des endroits où les immissions causées
par le
bruit ne dépassent pas les valeurs de planification, ou en des
endroits dans
lesquels des mesures de planification, d'aménagement ou de
construction
permettent de respecter ces valeurs. Le changement d'affectation de
zones à
bâtir n'est pas réputé délimitation de nouvelles zones à bâtir.
Cette dernière précision répond aux arguments des recourants. Le
passage
progressif, par le biais de PLQ, d'une zone de villa à une zone de
densité
plus élevée, ne saurait être assimilé à la création d'une nouvelle
zone à
bâtir. En effet, même dans le cas où la planification précédente ne
satisferait pas aux exigences de la LAT, une zone à bâtir n'est pas
nouvelle
au sens de l'art. 24 LPE si le terrain concerné devait déjà être
considéré
comme zone à bâtir au sens des art. 15 et 36 al. 3 LAT, c'est-à-dire
lorsqu'il s'agissait de la "partie de l'agglomération qui est déjà
largement
bâtie"; en pareil cas, le premier classement formel en zone à bâtir
n'est pas
assimilé à la création d'une nouvelle zone à bâtir car il s'agit d'une
confirmation de l'affectation actuelle (consid. 8c non publié de
l'ATF 126 II
480). Tel est le cas du secteur dans lequel s'inscrit le PLQ,
largement bâti
de villas. Les recourants l'admettent d'ailleurs, puisqu'ils
affirment que le
quartier est déjà "fortement urbanisé". C'est dès lors à juste titre
que la
cour cantonale a refusé de tenir compte des valeurs de planification;
conformément à l'art. 22 al. 1 LPE, ce sont donc les valeurs limites
d'immissions qui sont déterminantes.

5.3 Les recourants soutiennent également à tort que l'absence d'un
cadastre
de bruit empêcherait toute mesure d'aménagement. Selon l'art. 37 OPB,
le
cadastre est un inventaire dans lequel l'autorité consigne, notamment
pour
les aérodromes, les expositions au bruit, l'affectation des secteurs
exposés
et les degrés de sensibilité. Ces données, qui lient certes
l'autorité, sont
établies selon les règles générales de la LPE et de l'OPB. Elles sont
déterminantes pour la délimitation et l'équipement des zones à bâtir,
ainsi
que pour l'octroi de permis de construire et pour les mesures
d'isolation des
bâtiments existants (art. 37 al. 2 OPB), mais, en leur absence, le
respect
des valeurs de planification ou d'immissions doit être assuré sur la
base de
l'art. 22 LPE. L'établissement du cadastre de bruit ne constitue donc
pas une
condition indispensable à l'adoption de mesures d'aménagement. Quant
aux
courbes de bruit calculées par l'EMPA, dont les recourants contestent
la
portée juridique, elles correspondent à la détermination obligatoire
exigée à
l'art. 36 OPB.

5.4 Les recourants réclament également en vain l'installation d'une
station
de mesures dans le quartier concerné. En effet, il découle de l'art.
38 al. 2
OPB que les immissions de bruit des avions sont en principe
déterminées non
pas sur la base de mesures, mais par calcul, selon l'état admis de la
technique (cf. ATF 126 II 522 consid. 48a p. 592).
Le préavis favorable du service cantonal, du 15 mars 2001, est fondé
sur le
rapport de l'EMPA de 1998. Selon les courbes de bruit calculées, les
valeurs
limites d'immissions seraient de 58 dB(A) de jour et de 46 dB(A) de
nuit sur
la parcelle n° 10451. Les recourants relèvent que ces calculs ont été
effectués sur la base de 151'517 mouvements en 1998, alors que le
trafic
aérien de l'Aéroport de Genève serait passé à 170'751 mouvements en
2000.
Après une baisse passagère due aux événements du 11 septembre 2001,
le trafic
serait de 164'053 mouvements en 2002. On constaterait ainsi une
hausse de
0,5% par an, qui ne serait qu'imparfaitement compensée par les progrès
techniques permettant la construction d'aéronefs moins bruyants.
Ces critiques doivent être écartées. Le dossier contient en effet le
rapport
établi le 26 juin 2002 par l'EMPA (Courbes de bruit, Aéroport de
Genève-Cointrin, Etat 2000), sur la base du trafic aérien en 2000;
celui-ci
totalise environ 170'000 mouvements (p. 16 du rapport), soit
davantage que
pour l'année 2002, compte tenu de la baisse intervenue en 2001. Selon
les
données résultant de ce dernier rapport, l'exposition au bruit,
calculée
selon le programme de simulation FLULA2, qui correspond à l'état
actuel de la
technique (cf. ATF 126 II 522 consid. 48a p. 592), serait, au niveau
de la
parcelle 10451, de 59-60 dB(A) pour la période 06-22h, de 52-53 dB(A)
pour la
période 22-23h, 48 dB(A) et moins de 45 dB(A) pour les période 23-00h
et
05-06h. Selon le ch. 221 de l'annexe 5 à l'OPB, les valeurs limites
d'exposition pour ces différentes périodes sont, pour le degré de
sensibilité
II, respectivement de 60, 55 et 50 dB(A). Les chiffres figurant dans
le
dernier rapport de l'EMPA, fondés sur les données les plus récentes,
sont
proches de ceux qui ont été retenus par le service cantonal dans son
préavis
du 15 mars 2001. Ils ne sont d'ailleurs pas contestés par les
recourants.
Dans une note du 21 mars 2003, le Service cantonal précise enfin que
les
calculs de l'EMPA sont "calés sur des mesures effectuées en 2000 par
le
réseau fixe MIABA, équipé de treize microphones, dont le plus proche
se
trouve à moins de 600 m de la parcelle en question". Les résultats
constatés
seraient très proches de ceux obtenus par calcul. Les critiques des
recourants, concernant l'actualité et la précision des données
relatives au
trafic aérien, doivent par conséquent être écartées.
Les recourants évoquent encore les réflexions de bruit sur la façade
de
l'immeuble projeté. Il ressort toutefois du dernier rapport de l'EMPA
que les
effets de réflexion et d'écran font partie, avec les conditions
météorologiques, des incertitudes inhérentes à la simulation (cf. ATF
126 II
522 consid. 48a p. 592); comparaison faite avec les valeurs
effectivement
mesurées, il est apparu que l'écart-moyen était relativement faible
(p. 22-23
du rapport). Cela tend à démontrer que, pour ce genre d'immissions,
compte
tenu de la taille réduite du bâtiment et du fait que l'on ne se
trouve pas en
présence d'une source localisée de nuisances sonores (telle par
exemple
qu'une route ou une installation déterminée, cf. ATF 129 I 238
consid. 4.2 et
la jurisprudence citée), l'effet de réverbération - de même
d'ailleurs que
l'effet d'écran - peut, à défaut d'indications contraires, être
considéré
comme négligeable. Le service cantonal aboutit à la même conclusion,
tout en
préconisant une utilisation restreinte du béton décoffré brut et des
surfaces
vitrées, recommandation dont il y aura lieu de tenir compte au
moment de
l'octroi de l'autorisation de construire.

6.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté en tant que
recours
de droit administratif, et déclaré irrecevable en tant que recours de
droit
public. Un émolument judiciaire est mis à la charge des recourants
(art. 156
al. 1 OJ), de même qu'une indemnité de dépens allouée aux intimés
(art 159
al. 1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté en tant que recours de droit administratif; il
est
irrecevable en tant que recours de droit public.

2.
Un émolument judiciaire de 3'000 fr. est mis à la charge des
recourants.

3.
Une indemnité de dépens de 2'000 fr. est allouée aux intimés
L.________ et
A.________, à la charge solidaire des recourants.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties,
au
Conseil d'Etat et au Tribunal administratif du canton de Genève ainsi
qu'à
l'Office fédéral de l'environnement, des forêts et du paysage.

Lausanne, le 29 septembre 2003

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1A.21/2003
Date de la décision : 29/09/2003
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2003-09-29;1a.21.2003 ?
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