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26/11/2002 | SUISSE | N°6P.94/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 novembre 2002, 6P.94/2002


{T 0/2}
6P.94/2002 /rod

Arrêt du 26 novembre 2002
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schubarth, président de la Cour,
Schneider, Kolly,
greffière Angéloz.

X. ________,
recourant, représenté par Me Denis Merz, avocat,
rue de Bourg 33, case postale 3290, 1002 Lausanne,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24,
case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale,
1014 Lausanne.

art. 9 et 29 al. 2 Cst. (procédure

pénale; arbitraire; droit d'être
entendu),

(recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois,
C...

{T 0/2}
6P.94/2002 /rod

Arrêt du 26 novembre 2002
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schubarth, président de la Cour,
Schneider, Kolly,
greffière Angéloz.

X. ________,
recourant, représenté par Me Denis Merz, avocat,
rue de Bourg 33, case postale 3290, 1002 Lausanne,

contre

Ministère public du canton de Vaud, rue de l'Université 24,
case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal cantonal vaudois, Cour de cassation pénale,
1014 Lausanne.

art. 9 et 29 al. 2 Cst. (procédure pénale; arbitraire; droit d'être
entendu),

(recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal cantonal vaudois,
Cour de
cassation pénale, du 20 décembre 2001).

Faits:

A.
Par jugement du 27 mars 2001, le Tribunal correctionnel de
l'arrondissement
de Lausanne a notamment condamné X.________, pour prise d'otage
qualifiée
(art. 185 ch. 2 CP), extorsion qualifiée (art. 156 ch. 3 CP),
utilisation
frauduleuse d'un ordinateur (art. 147 CP), abus de confiance (art.
138 ch.1
CP) et vol (art. 139 ch. 1 CP), à la peine de 9 ans de réclusion, sous
déduction de 800 jours de détention préventive, ordonnant en sa
faveur un
traitement ambulatoire en détention. Le tribunal a par ailleurs
condamné
plusieurs coaccusés et statué sur des conclusions civiles.

Saisie d'un recours en nullité et en réforme de X.________, la Cour de
cassation pénale du Tribunal cantonal vaudois l'a écarté par arrêt du
20
décembre 2001.

B.
S'agissant des faits pertinents pour le jugement de la présente
cause, cet
arrêt retient, en résumé, ce qui suit.

B.a Dans le courant de l'année 1998, X.________ a eu l'idée d'enlever
le fils
d'amis de ses parents, en vue d'obtenir de la famille de celui-ci une
rançon
de 5 millions de francs. A cette fin, il a imaginé un plan
d'exécution et
décidé de recourir à des hommes de main. A la mi-décembre 1998, une
première
équipe, recrutée dans les semaines précédentes, a tenté à cinq
reprises mais
sans succès d'enlever la victime. Une seconde équipe a alors été
recrutée,
qui, après plusieurs tentatives infructueuses entre le soir du 19
décembre et
l'après-midi du 21 décembre 1998, est parvenue à ses fins. C'est
ainsi que,
le 21 décembre 1998, vers 19 heures, la victime a été assaillie près
de son
véhicule, à la rue de Genève, à Lausanne, par trois hommes cagoulés,
dont
deux brandissaient une arme à feu chargée; elle a ensuite été jetée
sur la
banquette arrière d'un véhicule, conduit par un quatrième homme, puis
cagoulée et menottée, avant d'être emmenée dans une grange abandonnée
au
lieu-dit La Rasse, dans la région d'Evionnaz, en Valais. Sur place,
elle a
été dépouillée de son portefeuille et de sa montre, puis contrainte,
sous
menaces de mort, de fournir les numéros de code de ses cartes
bancaires,
postale et de crédit, au moyen desquelles des prélèvements de
plusieurs
milliers de francs ont été effectués par la suite, notamment par
X.________.

La victime a été séquestrée durant 45 heures, sous la surveillance de
deux
des quatre hommes, avant d'être libérée par la police vaudoise le 23
décembre
1998, vers 16 heures 20, à Aclens. Durant ces deux jours, la mère de
la
victime a été contactée à plusieurs reprises afin qu'une rançon de 5
millions
de francs soit versée en échange de la libération de l'otage. La
famille de
la victime s'est exécutée en versant une somme de 500.000 francs,
exigée à
titre de premier acompte.

B.b Dans le cadre de précédentes affaires pénales, X.________ avait
été
soumis à deux expertises psychiatriques, qui faisaient état d'un
trouble de
la santé mentale (trouble de la personnalité) et d'un développement
mental
incomplet (immaturité affective) et concluaient que ces troubles
n'étaient
pas de nature à atténuer la faculté de l'expertisé d'apprécier le
caractère
illicite de ses actes, mais diminuaient en revanche sa capacité de se
déterminer d'après cette appréciation correcte dans une mesure
moyenne à
importante (expertise du 23 juillet 1992), respectivement dans une
mesure
moyenne (expertise du 25 février 1994).

Une nouvelle expertise a été effectuée dans le cadre de la présente
procédure. Selon l'expert, qui a déposé son rapport le 21 juillet
2000,
l'expertisé souffre d'un grave trouble narcissique de la
personnalité, avec
tendance antisociale et fonctionnement prépsychotique; à raison de ce
trouble, l'expertisé, au moment d'agir, n'était pas privé, fût-ce
partiellement, de sa capacité d'apprécier le caractère illicite de
ses actes,
mais sa capacité de se déterminer d'après cette appréciation était
diminuée
dans une mesure moyenne.

B.c A raison des faits décrits sous lettre B.a ci-dessus, X.________
a été
reconnu coupable de prise d'otage qualifiée au sens de l'art. 185 ch.
2 CP,
d'extorsion qualifiée au sens de l'art. 156 ch. 3 CP et d'utilisation
frauduleuse d'un ordinateur au sens de l'art. 147 al. 1 CP. Les
infractions
d'abus de confiance et de vol également retenues à son encontre l'ont
été à
raison de faits sans rapport direct avec le rapt.

Au stade de la fixation de la peine, les juges cantonaux ont
notamment tenu
compte d'une diminution moyenne de la responsabilité de l'accusé,
faisant
application des art. 11 et 66 CP. A cet égard, la cour de cassation
cantonale
a estimé que la diminution de responsabilité retenue justifiait une
réduction
de la peine d'environ 40 %. Compte tenu de cet élément et des autres,
à
charge et à décharge, à prendre en considération, elle a jugé que la
peine de
9 ans de réclusion infligée en première instance à l'accusé, bien que
sévère,
n'était pas excessive.

C.
X.________ forme un recours de droit public au Tribunal fédéral.
Invoquant
une application arbitraire de l'art. 373 al. 2 du code de procédure
pénale
vaudois (CPP/VD) et, dans ce contexte, une violation des art. 29 al.
2 Cst.
et 6 ch. 3 let. d CEDH, ainsi qu'une application arbitraire des art.
11, 13,
63 et 66 CP, il conclut à l'annulation de l'arrêt attaqué.

La cour cantonale se réfère aux considérants de son arrêt. Le
Ministère
public conclut à l'irrecevabilité du recours, subsidiairement à son
rejet.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le recours de droit public au Tribunal fédéral est ouvert contre une
décision
cantonale pour violation des droits constitutionnels des citoyens
(art. 84
al. 1 let. a OJ). Il n'est en revanche pas ouvert pour se plaindre
d'une
violation du droit fédéral, qui peut donner lieu à un pourvoi en
nullité
(art. 269 al. 1 PPF) et ne peut donc être invoquée dans le cadre d'un
recours
de droit public, qui est subsidiaire (art. 84 al. 2 OJ; art. 269 al.
2 PPF).

2.
Le recourant reproche à la cour cantonale d'avoir nié que le jugement
de
première instance était insuffisamment motivé quant à la peine qui
lui a été
infligée, en violation arbitraire de l'art. 373 al. 2 let. a CPP/VD.
Il
ajoute que l'obligation du juge de motiver sa décision découle aussi
directement des art. 29 al. 2 Cst. et 6 ch. 3 let. d CEDH.

2.1 L'art. 373 al. 2 let. a CPP/VD dispose que le jugement contient
les
considérants de fait, en indiquant brièvement les motifs de la
conviction du
tribunal sur les faits importants pour le jugement de la cause.

Il résulte du chiffre I.4 let. b de l'arrêt attaqué (p. 97 ss) que le
droit à
une décision motivée pouvant être déduit de cette disposition n'a pas
une
portée plus étendue que celle du même droit découlant du droit d'être
entendu
garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. (cf. également
Bovay/Dupuis/Moreillon/Piguet, Procédure pénale vaudoise, Code
annoté, art.
373, ch. 3.1). Le recourant ne le conteste nullement, mais précise au
contraire lui-même que le droit que lui confère la disposition de
droit
cantonal invoquée peut aussi être déduit directement de l'art. 29 al.
2 Cst..
Quant à l'art. 6 ch. 3 let. d CEDH, que le recourant se borne à citer
en sus,
il garantit à tout accusé le droit d'interroger ou de faire
interroger les
témoins à charge et d'obtenir la convocation et l'interrogatoire des
témoins
à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge; il est
donc
sans relation avec le droit à une décision motivée invoqué par le
recourant.
Il suffit donc d'examiner le grief sous l'angle de l'art. 29 al. 2
Cst.

2.2 Le droit à une décision motivée découlant du droit d'être entendu
garanti
par l'art. 29 al. 2 Cst. correspond à l'obligation du juge de motiver
sa
décision de manière à ce que son destinataire puisse la comprendre et
l'attaquer utilement s'il y a lieu et à ce que l'autorité de recours
puisse
exercer son contrôle (ATF 126 I 97 consid. 2b p. 102). Il suffit, pour
répondre à ces exigences, que le juge mentionne, au moins brièvement,
les
motifs qui l'ont guidé et sur lesquels il a fondé sa décision, de
sorte que
l'intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et
l'attaquer en
connaissance de cause; il n'a pas l'obligation d'exposer et de
discuter tous
les arguments invoqués par les parties et il peut passer sous silence
ce qui,
sans arbitraire, lui paraît à l'évidence non établi ou sans
pertinence (ATF
126 I 97 consid. 2b p. 102 s.; 124 II 146 consid. 2a p. 149; 124 V 180
consid. 1a p. 181; 123 I 31 consid. 2c p. 34; 123 II 175 consid. 6c
p. 183
s.; 122 IV 8 consid. 2c p. 14 s.).
2.3 Il résulte des pages 217 ss du jugement de première instance que
le
Tribunal correctionnel a dûment motivé sa décision quant à la peine
infligée
au recourant, exposant sur près d'une page et demie de quels
éléments, tant
favorables que défavorables, il tenait compte pour la fixer. Le
prononcé sur
la peine a donc été motivé et cette motivation était suffisante pour
que le
recourant puisse comprendre comment la peine avait été arrêtée et
exercer son
droit de recours à bon escient; preuve en est d'ailleurs que le
recourant a
parfaitement été à même de critiquer dans son recours cantonal la
peine qui
lui avait été infligée en première instance. La cour de cassation
cantonale
pouvait dès lors admettre, sans violer le droit d'être entendu du
recourant,
que la peine avait été suffisamment motivée.

En réalité, le recourant, comme le montre son argumentation, se plaint
essentiellement, si ce n'est exclusivement, de ce que la peine n'ait
pas été
motivée de manière suffisante pour que l'on puisse discerner si et
dans
quelle mesure il a été tenu compte des éléments pertinents à prendre
en
considération dans la fixation de la peine, donc si l'art. 63 CP a été
correctement appliqué. La question relève toutefois de l'application
du droit
fédéral (ATF 120 IV 136 consid. 3a p. 143; 118 IV 14 consid. 2 p.
15), dont
une éventuelle violation ne peut être invoquée dans un recours de
droit
public, qui est par conséquent irrecevable sur ce point (cf. supra,
consid.
1).

Le grief ne peut dès lors qu'être rejeté dans la mesure où il est
recevable.

3.
Le recourant se plaint d'une "application arbitraire des art. 11, 13,
63 et
66 CP". Il reproche d'abord à la cour cantonale d'avoir déduit
arbitrairement
de l'expertise du 21 juillet 2000 que la diminution de sa
responsabilité
pénale pouvait être évaluée à 40 %. Il soutient en outre que la peine
qui lui
a été infligée est excessive au regard des éléments à prendre en
considération dans le cas d'espèce et qu'elle l'est également en
comparaison
de celles qui sont prononcées dans des cas similaires.
Il ressort clairement de l'arrêt attaqué que la cour cantonale ne
s'est pas
écartée de l'expertise, admettant au contraire expressément avec
celle-ci une
"diminution moyenne de la responsabilité du recourant". Statuant sur
un grief
de réforme du recourant, qui se plaignait notamment de ce que les
premiers
juges n'avaient pas indiqué dans quelle mesure ils diminuaient la
peine à
raison de sa responsabilité restreinte et observant qu'une diminution
moyenne
de la responsabilité ne signifie pas nécessairement que la peine
doive être
réduite de moitié, elle a considéré que, dans le cas particulier,
cette
diminution impliquait une réduction de la peine d'environ 40 %. Or, la
question de savoir si la peine a été réduite dans une mesure
suffisante au
regard de la diminution de responsabilité retenue relève de
l'application du
droit fédéral (cf. ATF 123 IV 1 consid. 2 et 3 p. 4-6; 49 consid. 2
p. 50
ss). C'est au reste également une question d'application du droit
fédéral que
de savoir si la peine prononcée doit être considérée comme excessive
au
regard des éléments à prendre en considération (ATF 127 IV 101
consid. 2c p.
104 et les arrêts cités) ou par rapport à des peines qui sont
infligées dans
des cas similaires (ATF 120 IV 136 consid. 3a p. 144 et les arrêts
cités).

Les griefs ainsi formulés, qui sont d'ailleurs également soulevés par
le
recourant dans le pourvoi en nullité qu'il a déposé parallèlement,
sont par
conséquent irrecevables dans un recours de droit public (cf. supra,
consid.
1).

4.
Le recours doit ainsi être rejeté dans la faible mesure où il est
recevable
et le recourant, qui succombe, supportera les frais (art. 156 al. 1
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2000 francs est mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire du recourant,
au
Ministère public
du canton de Vaud et au Tribunal cantonal vaudois,
Cour de
cassation pénale.

Lausanne, le 26 novembre 2002

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6P.94/2002
Date de la décision : 26/11/2002
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-11-26;6p.94.2002 ?
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