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26/11/2002 | SUISSE | N°5P.322/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 26 novembre 2002, 5P.322/2002


{T 0/2}
5P.322/2002 /frs

Arrêt du 26 novembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Raselli, Nordmann,
greffière Mairot.

H. ________,
recourant, représenté par Me Christine Gaitzsch, avocate,
3, place de la Taconnerie, 1204 Genève,

contre

V.________,
intimée, représentée par Me Yves Nidegger, avocat,
9, rue de Marignac, 1206 Genève,
Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève, place du
Bourg-de-Four 1, case postale 3108, 1211 Genève 3.


Convention de la Haye sur les aspects civils de l'enlèvement
international
d'enfants (reddition d'un enfant),

re...

{T 0/2}
5P.322/2002 /frs

Arrêt du 26 novembre 2002
IIe Cour civile

Les juges fédéraux Bianchi, président,
Raselli, Nordmann,
greffière Mairot.

H. ________,
recourant, représenté par Me Christine Gaitzsch, avocate,
3, place de la Taconnerie, 1204 Genève,

contre

V.________,
intimée, représentée par Me Yves Nidegger, avocat,
9, rue de Marignac, 1206 Genève,
Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève, place du
Bourg-de-Four 1, case postale 3108, 1211 Genève 3.

Convention de la Haye sur les aspects civils de l'enlèvement
international
d'enfants (reddition d'un enfant),

recours de droit public contre la décision de l'Autorité de
surveillance des
tutelles du canton de Genève du 26 juillet 2002.

Faits:

A.
Le divorce des époux H.________ et V.________ a été prononcé le 28
juin 1994
par le Juge aux affaires matrimoniales du Tribunal de Grande Instance
d'Evry
(France). Ce jugement a ratifié la convention conclue entre les
conjoints,
prévoyant que l'autorité parentale sur M.________, née le 10 janvier
1985, et
J.________, née le 15 avril 1988, serait exercée conjointement par
les deux
parents et la résidence habituelle des enfants fixée chez leur père.

Durant plusieurs années, la mère a largement contribué à la prise en
charge
de ses deux filles, en louant un appartement situé à proximité du
domicile du
père et en organisant son travail de manière à pouvoir s'absenter
régulièrement pendant quelques jours.

En 1996, le père s'est mis en ménage avec une femme mère de trois
enfants,
qu'il a par la suite épousée.

Au cours de l'année 2001, M.________ a rencontré de sérieuses
difficultés
relationnelles avec sa belle-mère. Le 5 juillet de cette même année,
elle a
demandé à être reçue dans un centre de protection maternelle et
infantile, où
elle a expliqué à quel point cette situation conflictuelle lui
pesait. Elle
voulait en outre s'informer sur les moyens de "recours" dont elle
disposait
pour aller vivre chez sa mère, désormais installée en Suisse. Il lui
a été
suggéré d'écrire au Juge aux affaires familiales et matrimoniales
d'Evry, ce
qu'elle a fait le lendemain. Dans sa lettre, elle se plaignait du
fait que sa
belle-mère ne cessait de dévaloriser sa mère, ce qui donnait lieu à
des
disputes. Elle reprochait par ailleurs à son père d'être de plus en
plus
absent pour son travail et de ne pas l'écouter. Enfin, elle
rapportait qu'en
janvier 2001, sa belle-mère avait battu J.________ parce que celle-ci
n'avait
pas rangé sa chambre et que, depuis lors, sa volonté s'était affirmée
d'aller
vivre, avec sa soeur, chez leur mère.

Le 23 novembre 2001, les deux jeunes filles ont quitté le domicile
paternel
et se sont rendues seules, en train, à Genève. A leur arrivée, elles
étaient
fortement perturbées et s'étaient plaintes - selon un certificat
médical
établi le 4 juin 2002 - de subir des violences verbales et physiques
de la
part de leur belle-mère. L'aînée souffrait profondément de cette
situation
conflictuelle, ainsi que du refus de son père de prendre position par
rapport
à cette violence familiale. Le médecin a diagnostiqué chez elle une
dépression réactionnelle, une anorexie grave, une hypothyroïdie et une
alopécie; quant à la cadette, elle lui était apparue instable et
fortement
agitée. Un suivi psychologique et psychiatrique a été instauré pour
chacune
d'elles.

A la suite de cette fugue, le père a déposé plainte pénale contre la
mère
pour non représentation d'enfants. Au début de janvier 2002, il a de
plus
saisi l'Autorité centrale française compétente d'une demande de
retour dans
le cadre de la Convention sur les aspects civils de l'enlèvement
international d'enfants, conclue à la Haye le 25 octobre 1980 (RS
0.211.230.02; ci-après: la Convention).

De son côté, la mère a déposé une demande de modification du jugement
de
divorce des époux devant les autorités judiciaires genevoises. Sa
requête en
attribution de la garde des enfants, acceptée en mesures
préprovisoires, a
été rejetée après audition des parties, au vu des démarches
entreprises par
le père.

Durant plusieurs semaines, les parents ont tenté en vain de trouver
une
solution amiable à ce conflit avec l'aide du Service de protection de
la
jeunesse.

B.
Le 22 mai 2002, le père a saisi le Tribunal tutélaire du canton de
Genève
d'une requête visant au retour de sa fille cadette à son domicile,
requête
qui a été admise le 26 juin suivant.

Après avoir entendu les deux jeunes filles séparément, l'Autorité de
surveillance des tutelles du canton de Genève a, par décision du 26
juillet
2002, annulé l'ordonnance rendue en première instance. Statuant à
nouveau,
elle a débouté le père des fins de sa requête et les parties, de
toutes
autres conclusions.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral,
le
requérant conclut à l'annulation de la décision du 26 juillet 2002.

Des observations n'ont pas été requises.

D.
Par ordonnance du 19 septembre 2002, le président de la cour de céans
a
rejeté la demande d'effet suspensif.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des
recours
qui lui sont soumis (ATF 128 II 13 consid. 1a p. 16, 46 consid. 2a p.
47; 127
I 92 consid. 1 p. 93 et les arrêts cités).

1.1 La décision attaquée n'a pas été rendue dans une contestation
civile
selon les art. 44 ss OJ, ni dans une affaire civile au sens de l'art.
68 al.
1 OJ, de sorte qu'elle ne peut être déférée au Tribunal fédéral par
la voie
du recours en réforme ou en nullité (ATF 123 II 419 consid. 1a p. 421
et les
références). Seul le recours de droit public étant ouvert, la
condition de
subsidiarité absolue de l'art. 84 al. 2 OJ est par conséquent
satisfaite.
Formé en temps utile contre une décision prise en dernière instance
cantonale, le présent recours est également recevable au regard des
art. 86
al. 1 et 89 al. 1 OJ.

1.2 Selon la jurisprudence relative à l'art. 88 OJ, le recourant doit
avoir,
en principe, un intérêt actuel et pratique à l'annulation de la
décision
attaquée, respectivement à l'examen des griefs soulevés (ATF 127 III
41
consid. 2b p. 42 et les arrêts cités). Il importe peu que la qualité
de
partie lui ait été reconnue dans la procédure cantonale (ATF 125 I 71
consid.
1b/aa p. 75). L'intérêt au recours doit encore exister au moment où le
Tribunal fédéral est appelé à trancher (ATF 120 Ia 165 consid. 1 p.
166).
Inspiré du souci de l'économie de la procédure, cette exigence vise à
garantir que celui-ci se prononce sur des questions concrètes et non
pas
simplement théoriques; aussi l'intérêt actuel requis fera-t-il
défaut, en
général, lorsque la décision attaquée a été exécutée ou est devenue
sans
objet (ATF 125 II 86 consid. 5b p. 97; 120 Ia 165 précité). Le
Tribunal
fédéral renonce à l'exigence d'un intérêt actuel lorsque cette
condition de
recours fait obstacle au contrôle de la constitutionnalité d'un acte
qui peut
se reproduire en tout temps, dans des circonstances semblables et
qui, en
raison de sa brève durée, échapperait toujours à sa censure (ATF 127
I 164
consid. 1a p. 166 et les arrêts cités).

1.2.1 En l'espèce, le Tribunal tutélaire a, le 26 juin 2002, ordonné
le
retour immédiat de J.________ en France auprès de son père. Par
décision du
26 juillet suivant, l'Autorité de surveillance des tutelles a annulé
cette
ordonnance et a rejeté la requête du recourant, pour le motif qu'un
retour au
domicile paternel comportait de sérieux risques pour la santé
psychique de la
jeune fille. Or, dans son mémoire adressé au Tribunal fédéral, le
recourant
affirme que depuis la reddition de la décision attaquée, sa fille
cadette a
regagné le domicile paternel en France, où elle poursuit actuellement
sa
scolarité. A l'appui de ses dires, il cite notamment une lettre de
J.________
du 16 août 2002, adressée au Tribunal tutélaire et à l'Autorité de
surveillance des tutelles, exprimant le désir de la jeune fille de
rester
chez son père et de reprendre l'école en France à la rentrée. Il
invoque en
outre un certificat de scolarité du 16 septembre 2002, émanant d'un
établissement de T.________ (France) et attestant de l'inscription de
J.________ sur les registres de l'établissement, ainsi que de sa
fréquentation régulière de la classe de 3e. Il fait aussi valoir le
rapport
d'un neuropsychiatre, témoignant de la volonté de celle-ci de rester
désormais chez son père, cette décision ne comportant, de l'avis de ce
médecin, aucun risque psychologique pour elle.

On ne parvient donc pas à discerner quel pourrait encore être
l'intérêt
pratique au recours. Le recourant soutient qu'il conserve un intérêt
à ce
qu'il soit définitivement statué sur sa requête, pour le motif que le
statut
de J.________ serait aléatoire et qu'elle risquerait d'être l'objet
d'une
"procédure de rapatriement", l'intimée n'acceptant pas la décision de
sa
fille de rester vivre auprès de lui. Il prétend en outre que le sort
réservé
à ladite requête aurait une incidence sur la validité du for de
l'action en
modification du droit de garde intentée par l'intimée. Une issue
favorable au
présent recours ne serait toutefois pas susceptible d'apporter au
recourant
l'avantage escompté. En effet, selon l'art. 12 al. 3 de la Convention,
lorsque l'autorité judiciaire ou administrative de l'Etat requis a des
raisons de croire que l'enfant a été emmené dans un autre Etat, elle
peut
suspendre la procédure ou rejeter la demande de retour de l'enfant.
L'autorité cantonale appelée, le cas échéant, à statuer à nouveau ne
pourrait
ainsi que rejeter la requête, puisqu'il n'est pas douteux que
J.________ a
désormais quitté la Suisse (cf. Jörg Pirrug, in Julius von Staudinger,
Kommentar zum Bürgerlichen Gesetzbuch mit Einführungsgesetz und
Nebengesetzen, 13e éd., Berlin 1994, Vorbemerkungen zu Artikel 19
EGBBG, n.
679 ad art. 12 de la Convention). Le recourant n'a donc plus d'intérêt
pratique à l'annulation de la décision attaquée (cf. ATF 127 III 41
précité
et l'arrêt mentionné). On ne saurait par ailleurs déroger au principe
et
admettre l'existence d'un intérêt virtuel au recours, dès lors qu'il
est peu
probable que la violation attaquée de droit constitutionnel se
reproduise
dans des conditions identiques. Par conséquent, force est de
constater que le
recourant n'a pas qualité pour recourir au sens de l'art. 88 OJ.

2.
En conclusion, le recours se révèle irrecevable. Vu l'issue de la
procédure,
les frais judiciaires seront mis à la charge du recourant, qui
succombe (art.
156 al. 1 OJ). Il n'y a en revanche pas lieu d'allouer des dépens, des
observations n'ayant pas été requises.

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties
et à
l'Autorité de surveillance des tutelles du canton de Genève.

Lausanne, le 26 novembre 2002

Au nom de la IIe Cour civile
du Tribunal fédéral suisse

Le président: La greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5P.322/2002
Date de la décision : 26/11/2002
2e cour civile

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-11-26;5p.322.2002 ?
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