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22/11/2002 | SUISSE | N°C.218/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 novembre 2002, C.218/02


{T 7}
C 218/02

Arrêt du 22 novembre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Meyer et Kernen. Greffier : M.
Vallat

R.________ SA, recourante, représentée par Me Marc-Olivier Buffat,
avocat,
avenue Juste-Olivier 9, 1006 Lausanne,

contre

Service de l'emploi du canton de Vaud, première instance cantonale de
recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lausanne Adm
cant VD,
intimé

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du

7 août 2002)

Faits :

A.
La société R.________ SA exploite le café-bar-restaurant «X.________»
à
Y.________....

{T 7}
C 218/02

Arrêt du 22 novembre 2002
IIIe Chambre

MM. les Juges Borella, Président, Meyer et Kernen. Greffier : M.
Vallat

R.________ SA, recourante, représentée par Me Marc-Olivier Buffat,
avocat,
avenue Juste-Olivier 9, 1006 Lausanne,

contre

Service de l'emploi du canton de Vaud, première instance cantonale de
recours
en matière d'assurance-chômage, rue Marterey 5, 1014 Lausanne Adm
cant VD,
intimé

Tribunal administratif du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 7 août 2002)

Faits :

A.
La société R.________ SA exploite le café-bar-restaurant «X.________»
à
Y.________. Le 13 mars 2002, elle a déposé un préavis de réduction de
l'horaire de travail de 30 à 40 %, touchant l'ensemble de son
personnel, pour
la période du 15 mars au 31 mai 2002. Elle invoquait une baisse
importante de
la clientèle en raison de travaux effectués à proximité de
l'établissement et
de mesures de régulation du trafic; le chantier avait débuté le 8
mars 2002
et devait se prolonger jusqu'au 31 mai 2002.

Par décision du 28 mars 2002, le Service de l'emploi du canton de
Vaud a
formé opposition à ce préavis, considérant que la perte de travail
n'était
pas inévitable; en outre, trois employés au bénéfice d'un contrat de
durée
déterminée ne pouvaient prétendre les indemnités en cas de réduction
de
l'horaire de travail.

B.
Par jugement du 7 août 2002, le Tribunal administratif du canton de
Vaud a
rejeté le recours formé contre cette décision par l'intéressée.

C.
R.________ SA forme recours de droit administratif contre ce
jugement, dont
elle demande l'annulation, en concluant à l'octroi des indemnités
sollicitées, subsidiairement au renvoi du dossier à l'autorité
judiciaire
cantonale.

Considérant en droit :

1.
L'objet du litige porte sur le droit aux indemnités en cas de
réduction de
l'horaire de travail du personnel de la recourante pour la période du
15 mars
au 31 mai 2002. Au-delà de cette date, les prétentions de la
recourante, en
raison de la prolongation des travaux - qui ne sont pas visées par le
préavis
du 13 mars 2002 et la décision du 28 mars suivant et dont il n'est
pas établi
qu'elles aient fait l'objet d'un nouveau préavis (cf. arrêt non
publié D. du
19 mars 1986 [C 158/85]) - échappent à l'examen de la Cour de céans.

2.
Les travailleurs dont la durée de travail est réduite ou l'activité
suspendue
ont droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail
si, entre
autres conditions, la perte de travail doit être prise en
considération, si
la réduction de l'horaire de travail est vraisemblablement
temporaire, et que
l'on puisse admettre qu'elle permettra de maintenir les emplois en
question
(art. 31 al. 1 let. b et d LACI).

La perte de travail n'est prise en considération que si elle est due
à des
facteurs d'ordre économique et qu'elle est inévitable (art. 32 al. 1
let. a
LACI). Pour les cas de rigueur, le Conseil fédéral règle la prise en
considération de pertes de travail consécutives à des mesures prises
par les
autorités, à des pertes de clientèle dues aux conditions
météorologiques ou à
d'autres circonstances non imputables à l'employeur (art. 32 al. 3
LACI). De
telles pertes de travail - auxquelles les restrictions ressortant de
l'art.
33 LACI sont, par ailleurs, également applicables (arrêt X. GmbH du
28 juin
2002 destiné à la publication au Recueil officiel; ATF 121 V 374
consid. 2;
DTA 2002 p. 60 consid. 1) -, causées notamment par des restrictions de
transport ou la fermeture de voies d'accès, sont prises en
considération
lorsque l'employeur ne peut les éviter par des mesures appropriées et
économiquement supportables ou faire répondre un tiers du dommage
(art. 51
al. 1 et 2 let. c OACI). Le refus de l'indemnité en raison du
caractère
évitable de la perte de travail doit se fonder sur des motifs
suffisamment
concrets et indiquer les mesures appropriées que l'employeur a omis de
prendre, violant ainsi son obligation de diminuer le dommage; la
réduction de
l'horaire de travail n'est cependant pas évitable, par le simple fait
que
l'employeur aurait pu l'empêcher en congédiant les salariés (ATF 111
V 382
consid. 2a). La perte de travail n'est pas prise en considération
lorsqu'elle
touche des personnes qui ont un emploi d'une durée déterminée, sont en
apprentissage ou au service d'une organisation de travail temporaire
(art. 33
al. 1 let. e LACI).

L'examen des conditions donnant droit à l'indemnité selon l'art. 31
al. 1
LACI s'effectue de manière séparée pour chaque travailleur, car c'est
lui et
non l'employeur qui peut prétendre l'indemnité (ATF 111 V 389; arrêt
non
publié P. du 28 septembre 1994 [C 104/94]).

3.
R.________ SA a requis l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de
travail pour la période du 15 mars au 31 mai 2002, pour tous les
membres de
son personnel, sous contrat de durée indéterminée ou sous contrat de
durée
déterminée.

Les premiers juges ont considéré que la perte de travail, consécutive
au
chantier et aux restrictions de trafic, était prévisible et aurait pu
être
évitée si la société avait renoncé à engager trois nouveaux
collaborateurs
après l'annonce des travaux.

La recourante invoque le caractère imprévisible de la baisse
d'activité et
l'impossibilité de prendre des mesures pour réduire le dommage sans
procéder
à des licenciements ou renoncer à engager du personnel qualifié.

3.1 La perte de travail qui touche des personnes qui ont un emploi de
durée
déterminée n'est pas prise en considération (art. 33 al. 1 let. e
LACI). En
tant qu'il porte sur le droit à l'indemnité en cas de réduction de
l'horaire
de travail des employés saisonniers, le recours est mal fondé.

3.2 Par sa localisation, le «X.________» dépend financièrement du
trafic
automobile passant devant l'établissement. Dès le mois d'août 2001, la
recourante savait que de gros travaux seraient effectués pendant
trois mois à
côté du restaurant et que ceux-ci entraîneraient durant cette période
la
fermeture au trafic automobile du pont reliant l'exploitation à la
route
cantonale. Le chantier et les problèmes importants de circulation qui
lui
seraient liés jusqu'au mois de juin 2002 ont été évoqués par la
presse; les
travaux ont été mis à l'enquête publique. Aussi, même en l'absence
d'informations complémentaires de la part de la municipalité ou du
service
des routes, la baisse de fréquentation de l'établissement et la
perte de
travail importante encourue entre mars et juin 2002 était prévisible.
Le
refus de l'indemnité, pour la période sollicitée, repose sur un motif
suffisamment concret.

R. ________ SA a engagé trois employées supplémentaires,
saisonnières, pour
le service : la première, par contrat du 2 janvier 2002 pour le 23
mars 2002;
la deuxième, par contrat du 1er mars 2002 pour le 1er mai 2002; la
dernière,
à une date inconnue, pour le 4 mai 2002. Les travaux devaient durer
trois
mois et s'étendre jusqu'en juin 2002. La recourante a ainsi augmenté
de
manière conséquente, peu avant le début des travaux dûment annoncés,
l'effectif affecté au service, pour une date s'inscrivant dans la
période -
limitée - durant laquelle la baisse d'activité devait intervenir.
Compte tenu
du caractère prévisible de la perte de travail importante jusqu'au 31
mai
2002, il appartenait à la recourante de différer la prise d'emploi de
ces
trois personnes au-delà de cette date. Le report de ces engagements
était
sans autre supportable au plan économique. En ne concluant pas pour
une date
postérieure au 31 mai 2002 les contrats des employés supplémentaires
affectés
au service, la recourante a omis de prendre des mesures appropriées
en vue de
diminuer la perte d'emploi prévisible encourue par cette catégorie de
personnel pendant la durée des travaux.

La perte de travail du personnel, sous contrats de duré indéterminée,
affecté
au service, entre le 15 mars et le 31 mai 2002, n'était pas
inévitable; le
droit à l'indemnité pour ces travailleurs n'est pas donné.

3.3 L'activité des trois employées supplémentaires est cependant sans
incidence sur le travail des membres du personnel affectés à d'autres
tâches
que le service. Le report de l'engagement de ces collaboratrices ne
constitue
dès lors pas une mesure appropriée que la recourante a omise de
prendre en
vue diminuer la perte de travail de cette autre catégorie de personnel
pendant la durée des travaux.

Pour ces travailleurs, sous contrats de durée indéterminée, le refus
de
l'indemnité, au motif que la perte de travail était évitable, n'est
pas
fondé.

3.4 En l'état, le dossier de la cause ne permet pas de trancher la
question
du droit à l'indemnité en cas de réduction de l'horaire de travail des
différents employés de la recourante. Il doit en conséquence être
retourné à
l'intimé pour instruction complémentaire au sens de ce qui précède,
ainsi que
sur les autres conditions du droit, et nouvelle décision.

4.
La recourante, qui s'est fait assister d'un avocat, peut prétendre
l'allocation d'une indemnité de dépens (art. 159 al. 1 en corrélation
avec
l'art. 135 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis partiellement en ce sens que le jugement du
Tribunal
administratif du canton de Vaud du 7 août 2002, ainsi que la décision
du
Service de l'emploi du 28 mars 2002 sont annulés, la cause étant
renvoyée au
Service de l'emploi pour instruction complémentaire au sens des
considérants
et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le Service de l'emploi versera à la recourante la somme de 1500 fr. (y
compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens pour l'instance
fédérale.

4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif du
canton de Vaud et au Secrétariat d'Etat à l'économie.

Lucerne, le 22 novembre 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : C.218/02
Date de la décision : 22/11/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-11-22;c.218.02 ?
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