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22/08/2002 | SUISSE | N°I.187/02

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 22 août 2002, I.187/02


«AZA 7»
I 187/02 Bh

IIe Chambre

Mme et MM. les juges Widmer, Kernen et Frésard.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 22 août 2002

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
Avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

S.________, 1969, intimée, représentée par Me Jean Lob,
avocat, Rue du Lion d'Or 2, 1002 Lausanne,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- S.________, née en 1969, souffre d'une dy

strophie
cornéenne bilatérale de type maladie de Groenouw, soit
d'une affection congénitale et héréditaire des cornées,
d'orig...

«AZA 7»
I 187/02 Bh

IIe Chambre

Mme et MM. les juges Widmer, Kernen et Frésard.
Greffière : Mme Moser-Szeless

Arrêt du 22 août 2002

dans la cause

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud,
Avenue Général-Guisan 8, 1800 Vevey, recourant,

contre

S.________, 1969, intimée, représentée par Me Jean Lob,
avocat, Rue du Lion d'Or 2, 1002 Lausanne,

et

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

A.- S.________, née en 1969, souffre d'une dystrophie
cornéenne bilatérale de type maladie de Groenouw, soit
d'une affection congénitale et héréditaire des cornées,
d'origine génétique. Le 15 novembre 2000, elle a demandé à
l'assurance-invalidité le remboursement d'une paire de
lentilles de contact. Selon un rapport médical du docteur
Z.________, spécialiste FMH en ophtalmologie, du 22 février
2001, l'affection va s'aggravant, entraîne une incapacité
de travail de 40 % depuis 1996 et justifie le port de

lentilles de contact, à défaut duquel «une invalidité de
100 % est potentiellement possible»; le pronostic est
réservé en l'absence de port de lentilles et de traitement
médical.
Par décision du 12 juillet 2001, l'Office de
l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud (ci-après :
l'office AI) a refusé le remboursement requis par
l'assurée.

B.- Par jugement du 27 décembre 2001, le Tribunal des
assurances du canton de Vaud a admis le recours formé par
l'assurée contre cette décision, considérant qu'elle était
menacée d'une invalidité imminente et que les verres de
contact constituaient un moyen auxiliaire simple et adéquat
qui lui permettait d'exercer son activité de secrétaire.

C.- L'office AI interjette recours de droit adminis-
tratif contre ce jugement dont il demande l'annulation. Il
conclut à ce que le bien-fondé de sa décision du 12 juillet
2001 soit constaté.
S.________ conclut, sous suite de frais et dépens,
principalement, au rejet du recours et, subsidiairement, à
l'annulation du jugement et au renvoi de la cause à
l'office AI pour qu'il détermine si elle a droit à des
mesures médicales de réadaptation.
L'Office fédéral des assurances sociales conclut à
l'admission du recours.

Considérant en droit :

1.- Le litige porte sur le droit de l'intimée à la
prise en charge de verres de contact par l'assurance-
invalidité.

2.- a) Selon l'art. 21 al. 1 LAI, l'assuré a droit,
d'après une liste que dressera le Conseil fédéral, aux

moyens auxiliaires dont il a besoin pour exercer une
activité lucrative ou accomplir ses travaux habituels, pour
étudier ou apprendre un métier ou à des fins d'accoutumance
fonctionnelle. Les frais de prothèses dentaires, de
lunettes et de supports plantaires ne sont pris en charge
par l'assurance que si ces moyens auxiliaires sont le
complément important de mesures médicales de réadaptation.
D'après la jurisprudence, il importe peu qu'il s'agisse ou
non d'une mesure exécutée aux frais de l'assurance-
invalidité; ce qui est déterminant, c'est que les condi-
tions de prise en charge en tant que mesure médicale de
l'assurance-invalidité aient été remplies (ATF 105 V 148
consid. 1 et les arrêts cités).
A l'art. 14 RAI, le Conseil fédéral a délégué au
Département fédéral de l'intérieur la compétence de dresser
la liste des moyens auxiliaires et d'édicter des prescrip-
tions complémentaires au sens de l'art. 21 al. 4 LAI. Ce
département a édicté l'ordonnance concernant la remise des
moyens auxiliaires par l'assurance-invalidité (OMAI) avec
en annexe la liste des moyens auxiliaires. En vertu de
l'art. 2 OMAI, ont droit aux moyens auxiliaires, dans les
limites fixées par la liste en annexe, les assurés qui en
ont besoin pour se déplacer, établir des contacts avec leur
entourage ou développer leur autonomie personnelle (al. 1);
l'assuré n'a droit aux moyens auxiliaires désignés dans
cette liste par un astérisque (*), que s'il en a besoin
pour exercer une activité lucrative ou accomplir ses
travaux habituels, pour étudier ou apprendre un métier ou à
des fins d'accoutumance fonctionnelle ou encore pour
exercer l'activité nommément désignée au chiffre corres-
pondant de l'annexe (al. 2).

b) Selon le ch. 7.02* de l'annexe à l'OMAI, dans sa
teneur - applicable en l'espèce - en vigueur depuis le
1er mars 1996, l'assuré a droit à la remise de verres de
contact s'ils doivent nécessairement remplacer des lunettes
et constituent le complément important de mesures médicales
de réadaptation.

Le Tribunal fédéral des assurances a jugé cette dispo-
sition conforme à la loi dans la mesure où, à la différence
de l'ancienne réglementation, et même dans le cas de grave
kératocône et d'astigmatisme irrégulier très prononcé, elle
ne prévoit un droit à des verres de contact à la charge de
l'assurance-invalidité que si ce moyen auxiliaire constitue
le complément important de mesures médicales (ATF 124 V 8
consid. 5). Par ailleurs, on ne peut vraiment parler de
«complément important» qu'en présence d'un rapport qualifié
entre la mesure médicale et la nécessité de fournir un
moyen auxiliaire. Cela est vérifié lorsque l'efficacité
d'une mesure médicale requiert la remise d'un moyen
auxiliaire (consid. 2d non publié de l'arrêt ATF 124 V 7;
Pra 1992 n° 45 p. 165 c. 4).

c) Selon l'art. 12 al. 1 LAI, un assuré a droit à des
mesures médicales qui n'ont pas pour objet le traitement de
l'affection comme telle, mais sont directement nécessaires
à la réadaptation professionnelle et sont de nature à
améliorer de façon durable et importante la capacité de
gain ou à la préserver d'une diminution notable. En règle
générale, on entend par traitement de l'affection comme
telle la guérison ou l'amélioration d'un phénomène patho-
logique labile. L'assurance-invalidité ne prend en charge,
en principe, que les mesures médicales qui visent directe-
ment à éliminer ou à corriger des états défectueux stables,
ou du moins relativement stables, ou des pertes de fonc-
tion, si ces mesures permettent de prévoir un succès dura-
ble et important au sens de l'art. 12 LAI (ATF 120 V 279
consid. 3a et les références).

3.- Il suit de là que l'assurance-invalidité sera
tenue de prendre en charge les nouvelles lentilles de
contact de l'intimée si les conditions suivantes sont
remplies: l'assurée doit avoir besoin du moyen auxiliaire
litigieux pour exercer une activité lucrative; les verres
de contact doivent constituer le complément important de

mesures médicales de réadaptation et enfin, ceux-ci doivent
nécessairement remplacer les lunettes.

a) Si le premier juge a admis la réalisation de la
première condition, il n'a pas examiné si les lentilles de
contact constituaient en l'espèce le complément important
de mesures médicales pour admettre leur prise en charge par
l'assurance-invalidité, ce que conteste le recourant.

b) En l'occurrence, il ne ressort pas du dossier que
l'intimée a bénéficié de mesures médicales dont des verres
de contact pourraient constituer le complément au sens de
la jurisprudence citée.
L'intimée est atteinte d'une affection congénitale et
héréditaire des cornées, d'origine génétique, qui provoque
des crises douloureuses par érosion cornéenne. Les verres
de contact sont nécessaires, selon le docteur Z.________
(rapport du 10 novembre 1999), pour éviter les crises
douloureuses. Si l'intimée a certes subi en 1996 un traite-
ment de son affection par laser Excimer qui a entraîné une
amélioration de la situation, cette intervention n'a toute-
fois pas été prise en charge par l'assurance-invalidité. En
effet, elle ne constituait pas une mesure médicale de
réadaptation au sens de l'art. 12 LAI, mais un traitement
de l'affection comme telle (décision de refus non formelle
de l'office AI du 31 janvier 1996). Depuis lors, l'intimée
a subi de nouvelles crises douloureuses, le port de verres
de contact s'avérant une nouvelle fois indispensable pour
éviter une aggravation de la situation (attestation
médicale du docteur Z.________ du 13 novembre 2000). Le
22 février 2002, l'ophtalmologue a confirmé que si les
lentilles ne sont pas portées, une invalidité à 100 % est
«potentiellement possible» (rapport du 22 février 2001),
mais n'a pas indiqué qu'un traitement médical serait
envisageable ou envisagé dans l'immédiat. Selon le docteur
Y.________, spécialiste FMH en ophtalmologie, la patiente
nécessite une adaptation de verres de contact, malgré
laquelle l'acuité visuelle à gauche a chuté de 1.0 à 0.5.

Il résulte de ce qui précède qu'à la date de la
décision litigieuse, du 12 juillet 2001, une correction de
l'affection oculaire de l'intimée était encore possible
grâce à des moyens optiques. La dystrophie cornéenne dont
elle souffre n'avait par conséquent pas encore atteint un
stade final fonctionnel stable. Par ailleurs, aucune mesure
médicale de réadaptation au sens de l'art. 12 LAI n'était
ou n'est, au regard des pièces médicales au dossier,
envisagée. Dans ces conditions, en l'absence d'une mesure
médicale de réadaptation dont les verres de contact
pouvaient constituer le complément important, l'intéressée
n'avait pas droit à la remise de moyens auxiliaires sous
cette forme.
Le recours s'avère par conséquent bien fondé.

4.- Il n'y a pas lieu de se prononcer sur la conclu-
sion subsidiaire de l'intimée qui, en sus du rejet du
recours, demande le renvoi de la cause à l'office pour
qu'il examine son droit à des mesures médicales de réadap-
tation, dès lors que cette conclusion excède l'objet du
présent litige. Le tribunal n'a pas, pour des motifs
d'économie de procédure, à étendre son examen à cette
question, ce d'autant moins que l'intimée ne précise pas à
quelle mesure de réadaptation elle prétend.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances

p r o n o n c e :

I. Le recours est admis et le jugement du Tribunal des
assurances du canton de Vaud du 27 décembre 2001 est
annulé.

II. La conclusion de S.________ tendant au renvoi de la
cause à l'administration est irrecevable.

III. Il n'est pas perçu de frais de justice.

IV. Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tri-
bunal des assurances du canton de Vaud et à l'Office
fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 22 août 2002

Au nom du
Tribunal fédéral des assurances
La juge présidant la IIe Chambre :

p. la Greffière :


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.187/02
Date de la décision : 22/08/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-08-22;i.187.02 ?
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