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21/08/2002 | SUISSE | N°1P.288/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 21 août 2002, 1P.288/2002


{T 0/2}
1P.288/2002 /dxc

Arrêt du 21 août 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Reeb, Féraud,
greffier Thélin.

Y. ________,
recourante, représentée par Me Paolo Bernasconi, avocat,
via Somaini 10, case postale 3406, 6901 Lugano,

contre

A.________,
B.________,
C.________,
tous trois représentés par Me Christian Fischer, avocat,
avenue Juste-Olivier 9, 1006 Lausanne,
D.________,repr

ésenté par Me François Chaudet, avocat,
place Benjamin-Constant 2, case postale 3673,
1002 Lausanne,
intimés;
X.________, ...

{T 0/2}
1P.288/2002 /dxc

Arrêt du 21 août 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Reeb, Féraud,
greffier Thélin.

Y. ________,
recourante, représentée par Me Paolo Bernasconi, avocat,
via Somaini 10, case postale 3406, 6901 Lugano,

contre

A.________,
B.________,
C.________,
tous trois représentés par Me Christian Fischer, avocat,
avenue Juste-Olivier 9, 1006 Lausanne,
D.________,représenté par Me François Chaudet, avocat,
place Benjamin-Constant 2, case postale 3673,
1002 Lausanne,
intimés;
X.________, représenté par Me Laurent Moreillon, avocat,
place St-François 5, case
postale 3860, 1002 Lausanne,

Juge d'instruction du canton de Vaud,
rue du Valentin 34, 1014 Lausanne,
Procureur général du canton de Vaud,
rue de l'Université 24, case postale, 1014 Lausanne,
Tribunal d'accusation du Tribunal cantonal vaudois,
route du Signal 8, 1014 Lausanne.

procédure pénale; constitution de partie civile

(recours de droit public contre l'arrêt du Tribunal
d'accusation n° 163 du 4 mars 2002)
Faits:

A.
A la suite d'une plainte de X.________, le Juge d'instruction
cantonal du
canton de Vaud a ouvert une enquête pénale contre A.________,
B.________,
C.________ et D.________, prévenus notamment d'escroquerie et de
contrainte
commises dans leur activité au service de Crédit Suisse Group SA. Le
plaignant leur reproche de l'avoir privé d'une rémunération qui lui
était
due, à son avis, par l'établissement bancaire, à la suite de
prestations
d'intermédiaire qu'il prétend avoir fournies et qui auraient abouti à
une
importante prise de participation de cet établissement au capital
d'un groupe
industriel à l'étranger; il leur reproche également d'avoir résilié
le crédit
hypothécaire dont il bénéficiait.

B.
Par mémoire du 22 novembre 2001, Y.________, épouse du plaignant, a
déclaré
intervenir dans la cause pénale et se constituer partie civile. Elle
exposait
être codébitrice solidaire du montant de dix millions de francs
réclamé par
la banque en remboursement de son prêt, et propriétaire en main
commune des
immeubles grevés par le droit de gage; elle se disait inquiète au
sujet de sa
propre situation financière et de celle de son mari, compte tenu
qu'ils ne
trouvaient aucun bailleur de fonds disposé à leur accorder un crédit
semblable; elle estimait donc subir un préjudice à raison des
infractions en
cause. Le mémoire était accompagné des documents concernant ce prêt
hypothécaire.

Le Juge d'instruction a admis la constitution de partie civile par une
ordonnance du 30 novembre 2001. Les prévenus A.________ et B.________
ont
cependant déféré ce prononcé au Tribunal d'accusation du Tribunal
cantonal
vaudois. Statuant le 4 mars 2002, cette juridiction a admis leur
recours et
annulé l'ordonnance; elle a retenu que le préjudice allégué par
l'intervenante ne constituait pas une atteinte résultant directement
du
comportement dénoncé dans la plainte pénale.

C.
Agissant par la voie du recours de droit public, Y.________ requiert
le
Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt du Tribunal d'accusation; elle se
plaint
d'une application prétendument arbitraire des dispositions de droit
cantonal
concernant l'intervention en qualité de partie civile, et elle met en
doute
l'impartialité du Président du Tribunal d'accusation.

Invités à répondre, les prévenus intimés proposent l'irrecevabilité
ou le
rejet du recours; X.________ et les autorités judiciaires ont renoncé
à
déposer des observations.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Les critiques concernant le Président du Tribunal d'accusation se
rattachent,
par simple redondance, à celles déjà élevées par X.________ dans un
recours
de droit public distinct, sur lequel la recourante a pu prendre
position. Le
Tribunal fédéral ayant statué sur ce recours (arrêt 1P.138/2002 du 17
juin
2002), lesdites critiques n'ont plus d'objet.

2.
Le prononcé par lequel l'autorité compétente refuse une autorisation
d'intervenir dans le procès pénal, en qualité de partie civile, est
une
décision finale pour le tiers ainsi éconduit; le recours de droit
public de
ce plaideur est donc recevable au regard de l'art. 87 OJ (arrêt
1P.276/2002
du 12 août 2002, consid. 2, destiné à la publication).

3.
Une décision est arbitraire, donc contraire à l'art. 9 Cst.,
lorsqu'elle
viole gravement une norme ou un principe juridique clair et
indiscuté, ou
contredit de manière choquante le sentiment de la justice et de
l'équité. Le
Tribunal fédéral ne s'écarte de la solution retenue par l'autorité
cantonale
de dernière instance que si sa décision apparaît insoutenable, en
contradiction manifeste avec la situation effective, adoptée sans
motifs
objectifs ou en violation d'un droit certain. En outre, il ne suffit
pas que
les motifs de la décision soient insoutenables; encore faut-il que
celle-ci
soit arbitraire dans son résultat. A cet égard, il ne suffit pas non
plus
qu'une solution différente de celle retenue par l'autorité cantonale
puisse
être tenue pour également concevable, ou apparaisse même préférable
(ATF 127
I 54 consid. 2b p. 56; 126 I 168 consid. 3a p. 170; 125 I 166 consid.
2a p.
168; 125 II 10 consid. 3a p. 15).

3.1 Selon la jurisprudence cantonale relative à l'art. 93 CPP vaud.,
le droit
de se constituer partie civile dans le procès pénal est, en principe,
réservé
à la personne physique ou morale lésée de façon immédiate dans son
honneur,
ses biens ou son corps; l'intervenant doit ainsi rendre vraisemblable
un lien
de causalité directe entre l'infraction en cause et un dommage dont il
demande réparation (JdT 2000 III 60). Cette interprétation de la loi
est
confirmée par l'arrêt présentement attaqué, et c'est en vain que la
recourante tente de la contester, car le Tribunal fédéral a déjà
admis sa
validité au regard de l'art. 9 Cst. (arrêt 1P.620/2001 du 21 décembre
2001,
consid. 2.1).
3.2 La dette de la recourante envers l'établissement bancaire a son
origine
dans le contrat de prêt hypothécaire souscrit par elle et son époux.
Les
accusations dirigées contre les prévenus ne se rapportent pas à la
conclusion
de ce contrat, mais seulement à sa résiliation par la banque, qui a
pour
effet de rendre le remboursement exigible. A supposer que la
résiliation
puisse constituer par elle-même une infraction, elle pourrait
éventuellement
être la cause immédiate d'un préjudice subi par la recourante, alors
même que
l'obligation a une cause juridique antérieure. Toutefois, d'après la
plainte
pénale, la résiliation n'est tenue pour punissable qu'en raison de son
contexte: la banque se serait ainsi vengée des prétentions élevées par
X.________, consécutives aux services prétendument rendus par lui.
Or, nul ne
prétend que la recourante fût d'une quelconque façon impliquée dans
les
rapports d'affaires de son mari avec cet établissement, hormis le fait
qu'elle a elle aussi souscrit le contrat de prêt hypothécaire. Dans
ces
conditions, on peut sans arbitraire admettre que le préjudice allégué
par la
recourante est une conséquence seulement médiate, ou indirecte, de
l'infraction censément commise par les prévenus dans le cadre desdits
rapports d'affaires, auxquels la recourante était étrangère. Certes,
une
appréciation différente de la situation décrite dans la plainte, qui
conduirait à accepter l'intervention de la recourante dans le procès
pénal,
pourrait aussi être envisagée; cela n'autorise toutefois pas le
Tribunal
fédéral à considérer la solution effectivement retenue, consacrée par
l'arrêt
attaqué, comme contraire à l'art. 9 Cst.

4.
Le recours de droit public se révèle mal fondé, ce qui entraîne son
rejet. La
recourante, qui succombe, doit acquitter l'émolument judiciaire et
les dépens
à allouer aux intimés.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La recourante acquittera un émolument judiciaire de 3'000 fr.

3.
La recourante acquittera les sommes suivantes à titre de dépens:
a) 2'000 fr. à l'intimé D.________;
b) 2'000 fr. aux intimés C.________, B.________ et A.________,
créanciers solidaires.

4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties,
au Juge
d'instruction, au Procureur général et au Tribunal cantonal du canton
de
Vaud.

Lausanne, le 21 août 2002

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.288/2002
Date de la décision : 21/08/2002
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-08-21;1p.288.2002 ?
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