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19/08/2002 | SUISSE | N°2P.227/2001

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 19 août 2002, 2P.227/2001


{T 0/2}
2P.227/2001 /dxc

Arrêt du 19 août 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler et Merkli,
greffier Langone.

X. ________,
requérante, représentée par Me Peter Schaufelberger, avocat, place
Benjamin-Constant 2, case postale 3673, 1002 Lausanne,

contre

Chef du Département des finances du canton de Vaud,
rue de la Paix 6, 1014 Lausanne,
Conseil d'Etat du canton de Vaud,
Château cantonal, 1014 Lausanne.

Demande de révision de l'ar

rêt du Tribunal fédéral
du 6 mars 2001 (2P.189/2000)

Faits:

A.
X. ________ a été engagée en 1987 au service ...

{T 0/2}
2P.227/2001 /dxc

Arrêt du 19 août 2002
IIe Cour de droit public

Les juges fédéraux Wurzburger, président,
Hungerbühler et Merkli,
greffier Langone.

X. ________,
requérante, représentée par Me Peter Schaufelberger, avocat, place
Benjamin-Constant 2, case postale 3673, 1002 Lausanne,

contre

Chef du Département des finances du canton de Vaud,
rue de la Paix 6, 1014 Lausanne,
Conseil d'Etat du canton de Vaud,
Château cantonal, 1014 Lausanne.

Demande de révision de l'arrêt du Tribunal fédéral
du 6 mars 2001 (2P.189/2000)

Faits:

A.
X. ________ a été engagée en 1987 au service de l'Etat de Vaud comme
contrôleur d'impôt A auprès de l'Administration cantonale des impôts.
En
1995, elle a été promue à la fonction d'inspecteur fiscal A. La même
année,
elle a été chargée d'ouvrir une enquête fiscale à l'encontre de la
société
A.________ SA, qui s'est soldée le 19 décembre 1996 par un
redressement
fiscal. Dès décembre 1996, X.________ a noué une relation intime avec
Y.________, alors directeur de cette société. Elle a encore proposé un
redressement fiscal à l'encontre de Y.________.

Le 25 juin 1998, le Chef du Département des finances du canton de Vaud
(ci-après: le Chef du département) a infligé à X.________ un
avertissement
pour avoir tenu, auprès de l'Administration fédérale des
contributions, des
propos (fausses accusations de corruption à l'encontre de ses
supérieurs) de
nature à ternir l'image, notamment, du canton. Cette décision a fait
l'objet
d'un recours auprès du Conseil d'Etat vaudois, et la cause a été
suspendue
dans l'attente du prononcé de la Commission paritaire saisie par
X.________.
Dans une lettre du 22 juin 1999, B.________ - l'un des dirigeants de
C.________ SA, contre laquelle X.________ menait une procédure de
redressement fiscal - s'est plaint de ce que X.________ avait
faussement
prétendu au cours d'un entretien téléphonique avec une secrétaire de
l'entreprise qu'il l'avait frappée. Le 24 juin 1999, B.________
ajoutait que,
lors d'une audience du Tribunal correctionnel de Lausanne devant
lequel il
comparaissait pour infraction à la législation fiscale, X.________
avait
porté contre lui des accusations mensongères en déclarant qu'il avait
été
violent, voire très violent avec elle; il demandait que X.________
soit
dessaisie du dossier, dans la mesure où les garanties d'objectivité et
d'impartialité n'étaient plus assurées. B.________ a déposé contre
X.________
une plainte pénale pour atteinte à l'honneur. Un non-lieu a
finalement été
prononcé.
Dans un rapport établi le 27 mai 1999 à l'attention du Chef du
département,
le Chef de l'inspection fiscale a déclaré avoir appris en avril 1999
que
X.________ avait entretenu des rapports intimes avec le directeur de
A.________ SA, Y.________, pendant qu'elle procédait au contrôle
fiscal de
ladite société et que, vu la gravité de ces faits, il se justifiait,
à son
avis, d'ouvrir à l'encontre de l'intéressée une éventuelle procédure
de
renvoi pour justes motifs.
Le 30 juin 1999, le Chef du département a décidé d'ordonner la
suspension
provisoire de X.________ pour une durée indéterminée, sans
suppression de
traitement, et d'ouvrir une enquête administrative contre elle pour
examiner
le bien-fondé des allégations contenues dans la lettre précitée du 24
juin
1999 de B.________. Cette mesure était également motivée par les
faits qui
avaient entraîné l'avertissement du 25 juin 1998. Cette décision de
suspension a été confirmée sur recours le 22 septembre 1999 par le
Conseil
d'Etat. Par arrêt du 24 janvier 2000, le Tribunal fédéral a déclaré
irrecevable le recours dirigé contre ce dernier prononcé.
Le 20 juillet 1999, le Chef de l'Administration cantonale des impôts,
se
fondant sur une délégation de compétence du Chef du département, a
ouvert
contre X.________ une enquête administrative, laquelle a été confiée à
Z.________, Substitut du Procureur général du canton de Vaud. Le
mandat
d'enquête a été défini plus précisément dans une note du 26 juillet
1999
émise par le Chef de l'Administration cantonale des impôts en ce sens
que
l'enquête administrative devait porter aussi sur "l'affaire
A.________ SA".
Au cours de son enquête, Z.________ a entendu X.________ et
différentes
personnes, dont D.________, ancien supérieur direct de l'intéressée.

Dans son rapport du 30 novembre 1999, Z.________ est arrivé à la
conclusion
que la décision de suspension du 30 juin 1999 était entièrement
justifiée et
qu'une procédure de renvoi devait être engagée.

Le 21 février 2000, le Chef du département a adressé à X.________ un
rapport
du 15 février 2000 du Chef de l'Administration cantonale des impôts
proposant
l'ouverture d'une procédure de renvoi pour justes motifs.

B.
Le 7 août 2000, le Conseil d'Etat a prononcé, avec effet immédiat, le
renvoi
de X.________ pour justes motifs. Il a retenu que le rapport de
confiance qui
la liait à l'Etat de Vaud était définitivement rompu. Il lui était
notamment
reproché de ne pas s'être dessaisie de tous les dossiers fiscaux
concernant
de près ou de loin A.________ SA, dont Y.________ était le directeur à
l'époque des faits, dès le premier jour de sa liaison amoureuse avec
ce
dernier. X.________ n'était donc plus en mesure d'agir avec toute
l'indépendance et l'impartialité nécessaires à l'exercice de ses
fonctions
d'inspecteur fiscal impliquant des responsabilités importantes dans
des
enquêtes fiscales délicates aux termes desquelles l'inspecteur
propose des
mesures, voire des sanctions.

Par arrêt du 6 mars 2001 (2P.189/2000), le Tribunal fédéral a rejeté
dans la
mesure où il était recevable le recours formé contre la décision
précitée du
7 août 2000.

C.
Le 3 septembre 2001, X.________ a demandé la révision de l'arrêt
Tribunal
fédéral du 6 mars 2001 en invoquant le motif tiré de l'art. 136 let.
d OJ.
Elle conclut principalement à l'annulation de l'arrêt précité et de la
décision du 7 août 2000 du Conseil d'Etat.
Celui-ci conclut au rejet de la demande de révision.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
La demande de révision est fondée sur le motif indiqué à l'art. 136
let. d
OJ. Elle a été formée dans le délai de trente jours fixé à l'art. 141
al. 1
let. a OJ, compte tenu des féries (art. 34 al. 1 lettre b OJ). La
demande a
en effet été adressée au Tribunal fédéral le lundi 3 septembre 2001,
l'arrêt
du 6 mars 2001 ayant été notifié le 2 juillet 2001. Elle indique,
conformément à l'art. 140 OJ, en quoi consiste la modification de
l'arrêt
demandée. Il y a donc lieu d'entrer en matière sur la présente
demande.

2.
Aux termes de l'art. 136 let. d OJ, il y a lieu à révision "lorsque,
par
inadvertance, le tribunal n'a pas apprécié des faits importants qui
ressortent du dossier". Le verbe "apprécier", utilisé dans le texte
français,
est ambigu et doit être compris - conformément au texte allemand -
dans le
sens de "prendre en considération"; l'inadvertance, au sens de l'art.
136
let. d OJ, suppose que le juge ait omis de prendre en considération
une pièce
déterminée, versée au dossier, ou l'ait mal lue, s'écartant par
mégarde de sa
teneur exacte; elle se distingue de la fausse appréciation soit des
preuves
administrées devant le Tribunal fédéral, soit de la portée juridique
des
faits établis. L'inadvertance doit se rapporter au contenu même du
fait, à sa
perception par le tribunal, mais non pas à son appréciation
juridique; elle
consiste soit à méconnaître, soit à déformer un fait ou une pièce. La
révision n'entre donc pas en considération lorsque c'est sciemment
que le
juge a refusé de tenir compte d'un certain fait, parce qu'il le
tenait pour
non décisif, car un tel refus relève du droit. Enfin, le motif de
révision de
l'art. 136 let. d OJ ne peut être invoqué que si les faits qui n'ont
pas été
pris en considération sont "importants"; il doit s'agir de faits
pertinents,
susceptibles d'entraîner une décision différente de celle qui a été
prise et
favorable au requérant (ATF 122 II 17 consid. 3 p. 18 s. et les
références
citées).

3.
3.1Dans l'arrêt dont la révision est demandée, le Tribunal fédéral a
considéré notamment qu'il n'était pas établi que les supérieurs de
X.________
étaient au courant depuis le 17 avril 1998 de la relation intime qui
liait
l'intéressée à Y.________, mais qu'il ressortait du dossier que le
Chef du
département en tout cas n'avait été informé de cette relation que
durant le
printemps 1999. Peu de temps après, soit le 20 juillet 1999 déjà, une
enquête
administrative a été ordonnée par le Chef du département à l'encontre
de
l'intéressée, enquête qui a finalement abouti au licenciement pour
justes
motifs. On ne pouvait donc affirmer que le Conseil d'Etat avait
tellement
tardé à ouvrir une procédure de renvoi pour justes motifs qu'il avait
renoncé
à se prévaloir de ce moyen. Compte tenu de l'ensemble de ces
circonstances et
plus particulièrement des règles de procédure particulières
applicables aux
fonctionnaires, il n'était pour le moins pas insoutenable de
considérer que
le Conseil d'Etat n'était pas forclos au moment où il a prononcé le
renvoi
pour justes motifs.

3.2 La requérante soutient que le Tribunal fédéral a méconnu un fait
pertinent résultant d'une pièce figurant au dossier de la cause.
Selon elle,
le Chef du département aurait été informé de sa relation intime avec
Y.________ déjà par lettre du 17 avril 1998, de telle sorte que le
Conseil
d'Etat était forclos pour ordonner le renvoi pour justes motifs en se
fondant
sur ces faits, puisque plus d'une année s'était écoulée entre la
réception de
cette lettre et l'ouverture d'une procédure administrative survenue
en été
1999. A l'appui de ses dires, la requérante cite un passage de la
lettre
adressée le 17 avril 1998 par son mandataire au Chef du département
ainsi
libellé: " [...] la relation entre M. Y.________ et Mme X.________
dure
depuis plus d'une année maintenant et M. D.________ la connaît depuis
plusieurs mois déjà, en tous les cas avant l'été 1997. Cela n'a
jamais été
considéré comme un motif de récusation, mais cela semble soudainement
être le
cas aujourd'hui! [...] (X.________) n'a donc pas dû se récuser quand
bien
même cette société (E.________ SA) était intégralement détenue par M.
A.________, unique actionnaire, et que M. Y.________ était directeur
de
l'entreprise A.________ SA à cette époque [...]" (p.8).
3.3 Or, contrairement à ce qu'affirme la requérante, c'est sciemment
que le
Tribunal fédéral n'a pas tenu compte dans son arrêt du 6 mars 2001 de
cette
lettre. Tout en soulignant que le Tribunal fédéral n'a pas à se
justifier
chaque fois qu'il écarte une pièce qu'il tient pour non probante ni à
s'exprimer sur tous les griefs soulevés par les recourants, il sied de
constater qu'en l'espèce, il a estimé que la lettre en cause n'était
pas de
nature à établir que le Chef du département savait, dès avril 1998,
que la
requérante avait eu des relations sexuelles avec le directeur d'une
société
pendant qu'elle procédait au contrôle fiscal de celle-ci. Le Chef du
département - si tant est qu'il ait été au courant à ce moment-là
déjà du
contrôle fiscal exercé sur A.________ SA - ne pouvait en tout cas se
rendre
compte à la seule lecture de cette lettre de la gravité des faits et
par
conséquent prendre en connaissance de cause toutes les mesures qui
s'imposaient. La requérante ne peut donc pas tirer argument de cette
lettre
qui a été écrite dans un tout autre contexte que celui qui a
finalement
conduit au renvoi pour justes motifs. En effet, dans cette (longue)
missive
du 17 avril 1998, la requérante sollicitait l'intervention du Chef du
département: elle demandait à ne plus être confrontée à son supérieur
direct
D.________ avec qui elle entretenait des relations tendues et,
surtout, que
le dossier fiscal de H.________ SA (qui était une société concurrente
de
A.________ SA) ne lui soit pas retiré afin qu'elle puisse terminer les
contrôles, ceux-ci étant trop avancés pour transmettre le dossier à un
collègue. A cela s'ajoute que le passage précité de cette lettre est
ambigu:
s'il fait état d'une "relation" entre la requérante et Y.________, il
n'en
précise pas la nature. En tout cas, il n'est pas question
explicitement d'une
"relation intime" dans cette lettre. On ne saurait donc reprocher au
destinataire de cette lettre, soit le Chef du département, de ne pas
avoir
immédiatement déclenché une enquête administrative afin d'éclaircir le
comportement de l'intéressée dans l'affaire A.________ SA. En
réalité, ce
n'est qu'à la réception d'un rapport établi le 27 mai 1999 par le
Chef de
l'inspection fiscale que le Chef du département a pris connaissance
des
graves faits reprochés à X.________ et qu'il a pu prendre les mesures
commandées par les circonstances. Le simple fait que certains
supérieurs
directs de celle-ci, dont D.________, aient pu être au courant des
relations
intimes incriminées avant le 27 mai 1999 n'y change rien, dans la
mesure où
le Conseil d'Etat, soit l'autorité compétente pour la nomination et
le renvoi
des fonctionnaires, ignorait avant cette date les tenants et les
aboutissants
de cette affaire.

3.4 La requérante affirme en outre que l'ouverture de l'enquête
administrative intervenue au cours de l'été 1999 ne saurait tenir lieu
d'ouverture d'une procédure de renvoi pour justes motifs au sens de
l'art.
58a de
l'arrêté du 22 décembre 1950 d'application du StF/VD, si bien
qu'en
réalité ce sont près de deux ans qui se sont écoulés entre le moment
où le
Chef du département a été informé de la relation intime et le moment
où une
procédure de renvoi pour justes motifs a été valablement engagée,
soit, à son
avis, le 21 février 2000. Sur ce point, l'intéressée n'invoque aucune
contradiction entre les faits retenus par l'arrêt du Tribunal fédéral
et une
pièce du dossier, mais se plaint d'une motivation insuffisante. Point
n'est
donc besoin d'examiner de tels arguments, car la voie de la révision
n'est
pas ouverte pour contester l'appréciation juridique contenue dans un
arrêt du
Tribunal fédéral. On peut simplement relever que l'ouverture de
l'enquête
administrative en été 1999 paraissait justifiée, puisque c'est à la
même
époque qu'a éclaté l'incident relatif au traitement du dossier
B.________ et
l'annonce du dépôt d'une plainte pénale contre la requérante. Il
s'agissait
donc de mener une enquête administrative approfondie sur toutes les
affaires
dans lesquelles la requérante avait été impliquée.

3.5 La requérante reproche en outre au Tribunal fédéral de ne pas
avoir tenu
compte du fait qu'il s'est écoulé plus de deux mois entre le dépôt du
rapport
d'enquête administrative le 30 novembre 1999 et le 21 février 2000,
date de
l'ouverture formelle de la procédure de renvoi pour justes motifs. Là
encore,
il ne s'agit pas d'un motif de révision. Il n'y pas donc pas lieu
d'entrer en
matière sur un tel moyen, tout en relevant au passage que le délai de
deux
mois n'apparaît pas critiquable compte tenu du temps nécessaire à
l'étude du
rapport du 30 novembre 1999 et la préparation d'un préavis à
l'attention du
Chef du département.

3.6 Enfin, la requérante relève que, contrairement à ce que retient
l'arrêt
du Tribunal fédéral du 6 mars 2001, elle n'avait pas renoncé à son
droit
d'être entendue dans le cadre de la procédure de renvoi pour justes
motifs.
On ne voit pas très bien ce qu'elle entend déduire d'une telle
affirmation.
Quoi qu'il en soit, il n'y a pas lieu d'examiner une telle critique
de la
motivation de l'arrêt, qui ne constitue pas un motif de révision.

4.
Vu ce qui précède, la demande de révision, mal fondée, doit être
rejetée dans
la mesure où elle est recevable, sans délibération publique (art. 143
al. 1
OJ) et sous suite de frais à la charge de la requérante (art. 156 al.
1 OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
La demande de révision est rejetée dans la mesure où elle est
recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 fr. est mis à la charge de la
requérante.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au mandataire de la
requérante, au
Chef du Département des finances du canton de Vaud et au Conseil
d'Etat du
canton de Vaud.

Lausanne, le 19 août 2002

Au nom de la IIe Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 2P.227/2001
Date de la décision : 19/08/2002
2e cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-08-19;2p.227.2001 ?
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