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15/08/2002 | SUISSE | N°1P.321/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 15 août 2002, 1P.321/2002


{T 0/2}
1P.321/2002/col

Arrêt du 15 août 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Reeb, Fonjallaz,
greffier Kurz.

G. ________,
recourant,

contre

Conseil supérieur de la magistrature du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

classement d'une dénonciation

recours de droit public contre la décision du Conseil supérieur de la
magistrature du canton de Genève du 15 ma

i 2002.

Faits:

A.
Le 29 avril 2002, G.________ a adressé au Conseil supérieur de la
magistrature du canton de Genève (ci...

{T 0/2}
1P.321/2002/col

Arrêt du 15 août 2002
Ire Cour de droit public

Les juges fédéraux Aemisegger, président de la Cour et vice-président
du
Tribunal fédéral,
Reeb, Fonjallaz,
greffier Kurz.

G. ________,
recourant,

contre

Conseil supérieur de la magistrature du canton de Genève, case
postale 3108,
1211 Genève 3.

classement d'une dénonciation

recours de droit public contre la décision du Conseil supérieur de la
magistrature du canton de Genève du 15 mai 2002.

Faits:

A.
Le 29 avril 2002, G.________ a adressé au Conseil supérieur de la
magistrature du canton de Genève (ci-après: le CSM) une dénonciation
contre
Bernard Bertossa, alors Procureur général, ainsi que contre un avocat
et un
huissier judiciaire. Il reprochait notamment au premier cité d'avoir
"violé
ses archives personnelles et subtilisé une partie de leur contenu". Il
ressort en substance des annexes à cet envoi que trois enveloppes
scellées,
remises en 1995 au Procureur général, auraient été rendues ouvertes
en mai
2000, une partie de leur contenu ayant disparu. G.________ désirait
présenter
personnellement ses arguments et documents au CSM, et déclarait
persister
d'ores et déjà dans sa démarche.

Relancé le 6 mai 2002, le CSM fit savoir, par sa présidente, qu'il
statuerait
lors d'une prochaine séance.

Par lettre du 15 mai 2002, le CSM informa G.________ que sa
dénonciation
avait été classée. En tant que celle-ci visait un avocat et un
huissier, le
CSM n'était pas compétent. Les faits reprochés au Procureur général
n'étaient
établis ni dans la plainte, ni par les documents annexés, ni par la
correspondance échangée avec le parquet. Le dénonciateur n'avait pas
produit
d'inventaire des pièces qu'il avait remises au Procureur et de celles
qui lui
avaient été restituées.

Le 23 mai 2002, G.________ demanda à être personnellement entendu par
le CSM.
Il fournissait quelques précisions sur le sens de sa démarche.

Le 29 mai suivant, le CSM confirma sa décision, ajoutant que celle-ci
pouvait
faire l'objet d'un recours de droit public.

B.
G.________ agit par cette voie auprès du Tribunal fédéral. Il demande
l'annulation de la décision du CSM et le renvoi de la cause à cette
autorité,
sous suite de frais et dépens. Le CSM n'a pas formulé d'observations
particulières.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité du
recours
de droit public (ATF 128 I 46 consid. 1a p. 48).

1.1 Formé en temps utile contre une décision finale rendue en instance
cantonale unique (art. 8 al. 2 de la loi genevoise instituant un
conseil
supérieur de la magistrature, du 25 septembre 1997, RS/GE: E 2 20,
ci-après:
LCSM), le recours est recevable au regard des art. 86, 87 et 89 OJ.

1.2 Selon l'art. 88 OJ, le recours de droit public n'est ouvert qu'au
particulier qui se trouve lésé par la décision attaquée. Cela signifie
notamment que le recourant doit être atteint dans ses intérêts
juridiques, et
que les normes dont il se prévaut doivent aussi tendre à la
protection de ses
propres intérêts (ATF 127 I 44 consid. 2c in fine p. 46). Or, selon la
jurisprudence constante, le refus d'entrer en matière sur une
dénonciation -
ou le rejet de celle-ci sur le fond - ne constitue pas une décision
au sens
de l'art. 84 OJ, réglant de manière obligatoire les rapports entre le
citoyen
et l'Etat (ATF 121 I 42 consid. 2a p. 45 et les arrêts cités). En
outre, les
règles relatives, comme en l'espèce, à la surveillance des magistrats,
tendent uniquement à assurer le bon fonctionnement des institutions
(ATF 125
I consid. 1b p. 254 et les arrêts cités), sans pour autant conférer
de droits
aux particuliers. Cela est d'ailleurs rappelé à l'art. 1 LCSM. Les
griefs
soulevés sur le fond relativement à l'appréciation des preuves sont,
par
conséquent, irrecevables.

1.3 Même s'il n'a pas qualité pour agir sur le fond, le dénonciateur
peut se
plaindre d'une violation des droits de partie qui lui sont reconnus
par la
procédure cantonale. Dans ce cas en effet, la qualité pour recourir
découle
non pas du droit matériel, mais du droit de participer à la procédure
(ATF
121 I 218 consid. 4a p. 223 et les arrêts cités). En l'espèce, la
procédure
cantonale accorde certains droits de partie au dénonciateur, tel le
droit
d'obtenir une décision du conseil (art. 5 al. 2 LCSM), d'être entendu
et
assisté d'un avocat (art. 5 al. 4 LCSM), ainsi que de se voir
notifier la
décision (art. 8 al. 3 LCSM). Par ailleurs, le dénonciateur peut
faire valoir
son droit d'être entendu, tel qu'il découle directement de l'art. 29
al. 2
Cst. Les griefs formels du recourant sont par conséquent recevables,
sous
réserve toutefois de leur motivation.

1.4 En dehors d'exceptions non réalisées en l'espèce, le recours de
droit
public n'a qu'une nature cassatoire; le recourant ne peut donc
conclure à
autre chose qu'à l'annulation de la décision attaquée.

2.
Le recourant se plaint d'une violation de l'art. 5 al. 2 et 4 LCSM. Il
reproche à l'autorité intimée de ne pas l'avoir entendu
personnellement, en
dépit des requêtes formulées dans ce sens, et de ne pas lui avoir
permis
d'exposer les arguments et moyens de preuve supplémentaires qu'il
évoquait
dans sa dénonciation. Par ailleurs, la décision attaquée
n'indiquerait pas
clairement si elle émane du conseil ou de sa seule présidente, ce qui
serait
inadmissible au regard de l'art. 5 al. 2 LCSM puisque que le
recourant avait
d'emblée déclaré persister dans sa démarche.

2.1 Selon l'art. 5 al. 4 LCSM, le CSM ne peut prendre aucune décision
sans
avoir "entendu ou dûment appelé le magistrat mis en cause et le
plaignant".
Le recourant en déduit qu'il avait un droit à être convoqué
personnellement
afin de faire valoir ses arguments et moyens de preuve
"additionnels". On ne
saurait toutefois voir dans le refus de convoquer le recourant une
application arbitraire de la disposition précitée. Celle-ci impose
certes
clairement au CSM d'entendre le dénonciateur, mais n'en précise pas
les
modalités. En particulier, elle n'exige nullement une audition
personnelle
puisque l'autorité peut choisir entre "entendre" les intéressés ou
les faire
"appeler". Seule la seconde possibilité semble impliquer une audition
personnelle, alors que la première, plus générale, impose simplement
de
permettre à l'intéressé de s'exprimer avant le prononcé, ce qu'il peut
également faire par écrit. La loi n'indiquant pas à quelles
conditions une
audition personnelle doit être ordonnée, le recourant ne saurait se
plaindre
d'une application arbitraire de celle-ci.

Cette solution est par ailleurs conforme au droit d'être entendu, tel
qu'il
découle de l'art. 29 al. 2 Cst. Celui-ci comprend notamment le droit
pour le
justiciable de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son
détriment, celui de fournir des preuves quant aux faits de nature à
influer
sur le sort de la décision, celui d'avoir accès au dossier, celui de
participer à l'administration des preuves, d'en prendre connaissance
et de se
déterminer à leur propos (ATF 124 I 51 consid. 3a, 242 consid. 2, 124
II 137
consid. 2b, 124 V 181 consid. 1a, 375 consid. 3b et les références).
En
revanche, l'art. 29 al. 2 Cst. ne garantit pas plus que l'art. 4 al.
1 aCst.
le droit de s'exprimer oralement devant l'autorité appelée à statuer
(ATF 125
I 209 consid. 9b p. 219; Auer/Malinverni/Hottelier, Droit
constitutionnel
suisse, vol. II n° 1300). Le recourant ne saurait forcer l'autorité à
l'entendre personnellement en prétendant se réserver, comme il l'a
fait,
certains moyens à faire valoir à cette occasion. On ne voit
d'ailleurs pas -
et le recourant ne l'explique pas non plus - pour quelles raisons
l'ensemble
de ses moyens ne pouvait figurer dans sa dénonciation initiale du 29
avril
2002. Le recourant n'a pas manqué de compléter à plusieurs reprises
cette
écriture, soit le 12 mai 2002 et - tardivement - le 23 mai suivant,
et ne
saurait par conséquent prétendre ne pas avoir eu d'occasions
suffisantes de
s'exprimer. Le grief doit par conséquent être écarté.

2.2 Selon l'art. 5 al. 2 LCSM, le président ne peut statuer seul,
mais doit
réunir le conseil si le plaignant persiste dans sa démarche. En
l'occurrence,
la présidente du CSM a fait savoir au recourant, le 7 mai 2002, que sa
dénonciation serait examinée "lors d'une prochaine séance du
conseil". Il ne
faisait dès lors guère de doute, à ce moment déjà, que la décision
serait
prise par le conseil dans son ensemble. Même si elle est signée par sa
présidente, la décision attaquée indique tout aussi clairement au
recourant
que "le Conseil de la magistrature a examiné [sa] plainte", ce qui
est encore
confirmé dans la lettre du 29 mai 2002. Le recourant prétend ignorer
la date
de la séance et la composition de l'autorité, mais celles-ci
ressortent du
procès verbal figurant au dossier, dont le recourant pouvait demander
la
consultation. Il aurait ainsi appris que la délibération avait eu
lieu le 13
mai 2002, et que dix des onze membres du CSM étaient présents.

2.3 Dans une ultime remarque, le recourant "ose espérer" que le
Procureur
général n'a pas pris part à la décision. On ne saurait toutefois y
voir un
grief répondant aux exigences de l'art. 90 al. 1 let. b OJ. Le
recourant
aurait dû, à tout le moins, consulter le dossier, voire interpeller
l'autorité intimée afin d'étayer ses soupçons. Pour sa part, le
Tribunal
fédéral ne saurait statuer sur la base de simples spéculations, de
sorte que
le grief est irrecevable. Cela étant, la lecture du procès-verbal
précité
fait apparaître que le Procureur général était effectivement présent
- le CSM
devant se prononcer sur d'autres questions - et qu'il a donné
certaines
explications à propos de la dénonciation du recourant, mais rien ne
permet
d'affirmer qu'il aurait pris part à la délibération. Au contraire, le
procès-verbal fait ressortir que le Procureur général s'est expliqué
en tant
que personne visée par la dénonciation, et non en sa qualité de
membre du
CSM.

3.
Sur le vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté, dans la
mesure où
il est recevable. Conformément à l'art. 156 al. 1 OJ, un émolument
judiciaire
est mis à la charge du recourant, qui succombe.

Par ces motifs, vu l'art. 36a OJ, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 1500 fr. est mis à la charge du recourant.

3.
Le présent arrêt est communiqué en copie au recourant et au Conseil
supérieur
de la magistrature du canton de Genève, par sa Présidente.

Lausanne, le 15 août 2002

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 1P.321/2002
Date de la décision : 15/08/2002
1re cour de droit public

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-08-15;1p.321.2002 ?
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