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13/08/2002 | SUISSE | N°6S.266/2002

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 13 août 2002, 6S.266/2002


{T 0/2}
6S.266/2002 /rod

Arrêt du 13 août 2002
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schubarth, président,
Wiprächtiger et Kolly,
greffier Denys.

X. ________, représenté par Me Pascal Zbinden, avocat,
Bahnhofstrasse 15,
Postfach 300, 3250 Lyss,

contre

Procureur général du canton de Berne, Case postale,
3001 Berne.

violation des règles de la circulation

pourvoi en nullité contre le jugement de la IIème Chambre pénale de
la Cour
suprême du canton de Bern

e du 24 avril 2002.

Faits:

A.
Le 31 janvier 2001, X.________, né en 1976, circulait en voiture à La
Neuveville sur un ...

{T 0/2}
6S.266/2002 /rod

Arrêt du 13 août 2002
Cour de cassation pénale

Les juges fédéraux Schubarth, président,
Wiprächtiger et Kolly,
greffier Denys.

X. ________, représenté par Me Pascal Zbinden, avocat,
Bahnhofstrasse 15,
Postfach 300, 3250 Lyss,

contre

Procureur général du canton de Berne, Case postale,
3001 Berne.

violation des règles de la circulation

pourvoi en nullité contre le jugement de la IIème Chambre pénale de
la Cour
suprême du canton de Berne du 24 avril 2002.

Faits:

A.
Le 31 janvier 2001, X.________, né en 1976, circulait en voiture à La
Neuveville sur un tronçon hors localité limité à 80 km/h. Sa vitesse
a été
mesurée à 120 km/h. Marge de sécurité déduite, il a dépassé de 34
km/h la
vitesse maximale autorisée. La route était bordée des deux côtés
d'une piste
cyclable, faisait une courbe à gauche et comprenait une bifurcation.
X.________ se rendait à Genève avec des membres de sa famille, à la
suite
d'un téléphone qui l'informait que son oncle était mourant et qu'il
souhaitait le voir une dernière fois. En outre, le compteur de
vitesse de la
voiture de X.________ était défectueux, ce qui ne lui permettait pas
de lire
la vitesse à laquelle il roulait.

Chauffeur professionnel, X.________ a en particulier déjà été
condamné le 17
novembre 1999, pour violation grave des règles de la circulation en
raison
d'un excès de vitesse, à dix jours d'emprisonnement avec sursis
durant deux
ans et à 1'200 francs d'amende. Il est connu de la police régionale
pour
conduire rapidement ("PW-Schnellfahrer").

B.
Par jugement du 7 novembre 2001, le Président 3 de l'arrondissement
judiciaire I Courtelary-Moutier-La Neuveville a condamné X.________,
pour
violation grave des règles de la circulation (art. 90 ch. 2 LCR), à
dix jours
d'emprisonnement avec sursis durant trois ans et à 1'000 francs
d'amende.

Par jugement du 24 avril 2002, la IIème Chambre pénale de la Cour
suprême
bernoise a partiellement admis l'appel de X.________. Elle l'a
condamné, pour
violation grave des règles de la circulation (art. 90 ch. 2 LCR), à
cinq
jours d'emprisonnement avec sursis durant trois ans et à 1'000 francs
d'amende.

C.
X.________ se pourvoit en nullité au Tribunal fédéral contre ce
jugement. Il
conclut à son annulation.

Le Tribunal fédéral considère en droit:

1.
Conformément à la règle générale de l'art. 37 al. 3 OJ, le présent
arrêt est
rédigé dans la langue de la décision attaquée, nonobstant le fait que
le
recours soit rédigé dans une autre langue officielle. Le recourant n'a
d'ailleurs pas présenté de requête pour qu'une autre langue que celle
de la
décision attaquée soit adoptée.

2.
Saisi d'un pourvoi en nullité, le Tribunal fédéral contrôle
l'application du
droit fédéral (art. 269 PPF) sur la base d'un état de fait
définitivement
arrêté par l'autorité cantonale (cf. art. 273 al. 1 let. b et 277bis
al. 1
PPF). Le raisonnement juridique doit donc être mené sur la base des
faits
retenus dans la décision attaquée, dont le recourant est irrecevable à
s'écarter (ATF 126 IV 65 consid. 1 p. 66/67).

3.
Le recourant conteste avoir commis une violation grave des règles de
la
circulation au sens de l'art. 90 ch. 2 LCR. Il relève qu'il se
trouvait dans
une situation particulière en raison du souhait de son oncle de le
voir
encore une fois avant son décès. Selon lui, son état émotionnel au
moment des
faits exclut qu'il ait pu commettre le dépassement de vitesse
incriminé
intentionnellement, du moins par dol éventuel.

3.1 Il est établi que le recourant a dépassé la vitesse maximale
autorisée
hors d'une localité de 34 km/h. Selon la jurisprudence, celui qui
dépasse de
30 km/h ou plus la vitesse maximale générale de 80 km/h autorisée
hors des
localités commet objectivement, c'est-à-dire sans égard aux
circonstances
concrètes, une infraction grave aux règles de la circulation (ATF 124
II 259
consid. 2c p. 263). La qualification du cas grave est la même en
vertu de
l'art. 90 ch. 2 LCR sur le plan pénal que selon l'art. 16 al. 3 let.
a LCR en
matière de retrait du permis de conduire (ATF 121 IV 230 consid.
2b/aa p.
232).

Il n'est donc pas contestable que le dépassement reproché au
recourant tombe
objectivement sous le coup de l'art. 90 ch. 2 LCR, qui punit de
l'emprisonnement ou de l'amende celui qui, par une violation grave
d'une
règle de la circulation, aura créé un sérieux danger pour la sécurité
d'autrui ou en aura pris le risque. Le recourant s'en prend à l'aspect
subjectif de l'infraction en niant avoir agi par dol éventuel.

3.2 Subjectivement, l'art. 90 ch. 2 LCR exige un comportement sans
scrupules
ou gravement contraire aux règles de la circulation. Cette disposition
requiert donc la commission d'une faute grave. Cette condition est
toujours
réalisée lorsque l'auteur est conscient du danger que représente sa
manière
de conduire. Lorsqu'il agit par négligence, celle-ci doit être
grossière (ATF
123 IV 88 consid. 4a et c p. 93/94; 123 II 106 consid. 2a p. 109, 37
consid.
1b p. 39). Celui qui dépasse dans une notable mesure la vitesse
autorisée
agit en principe intentionnellement, ou du moins commet une négligence
grossière (ATF 126 II 202 consid. 1b p. 205; 122 IV 173 consid. 2e p.
178;
121 IV 230 consid. 2c p. 234).

En instance cantonale de recours, le recourant a prétendu qu'en
raison de la
panne de son compteur de vitesse, il ne pouvait se rendre compte de
son
allure excessive. La Chambre pénale a écarté cet argument en relevant
que le
recourant avait admis aussi bien devant la police que le premier juge
avoir
commis un excès de vitesse et que l'on pouvait attendre d'un chauffeur
professionnel tel que lui qu'il fasse la différence entre une vitesse
de 80
km/h et une vitesse de l'ordre de 120 km/h. La Chambre pénale a encore
précisé que la défectuosité du compteur de vitesse aurait dû inciter
le
recourant à une prudence accrue, laquelle était également commandée
par la
configuration des lieux; que celui-ci avait donné la priorité à son
désir
d'arriver le plus vite possible à Genève pour voir son oncle mourant
et avait
en conséquence accepté le risque de mettre sérieusement en danger les
autres
usagers de la route ainsi que ceux qui se trouvaient dans son
véhicule; qu'il
avait dans ces conditions agi par dol éventuel (cf. jugement attaqué,
p.
7/8).

Il ne ressort nullement des constatations cantonales que le recourant
se
serait trouvé, en particulier en raison de son état émotionnel, dans
l'incapacité de réaliser qu'il dépassait la vitesse autorisée. Au
contraire,
il résulte de l'appréciation de la situation par la Chambre pénale
que le
recourant était en mesure d'apprécier qu'il commettait un excès de
vitesse et
qu'il a agi ainsi pour arriver au plus vite auprès de son oncle. En
laissant
entendre que son trouble lié à son oncle et la panne de son compteur
de
vitesse l'ont empêché de saisir qu'il commettait un important excès de
vitesse, le recourant s'écarte des faits retenus dans le jugement
attaqué, ce
qui n'est pas admissible dans un pourvoi (cf. supra, consid. 2).

Une défectuosité du compteur de vitesse oblige le conducteur à régler
son
allure de façon à être certain de respecter la loi (ATF 102 IV 42
consid. 1
p. 44). En l'espèce, le recourant s'est affranchi de cette règle sans
que son
état l'empêche de la respecter et a consciemment adopté une vitesse
plus
élevée que celle autorisée dans l'optique d'arriver au plus vite
auprès de
son oncle. Dans ces conditions, c'est à bon escient que la Chambre
pénale a
admis que l'élément subjectif de l'art. 90 ch. 2 LCR était réalisé. La
pression affective qui a poussé le recourant à dépasser la vitesse
maximale
ne saurait le disculper du risque d'accident mortel qu'un important
excès de
vitesse fait courir aux autres usagers. En outre, il ne faut pas
oublier que
le gain de temps escompté par le comportement en cause est très
hypothétique
car le moindre incident occasionné par l'excès de vitesse aurait au
contraire
pour effet de compromettre plus encore le but recherché.

3.3 Pour contester l'application de l'art. 90 ch. 2 LCR, le recourant
invoque encore une décision allemande (rendue le 10 septembre 1999
par le
Amtsgericht de Grevesmühlen). Selon celle-ci, lorsqu'un compteur de
vitesse
est défectueux, un automobiliste expérimenté doit en principe pouvoir
apprécier sa vitesse, sous réserve d'une marge d'erreur de 15 %. Le
recourant
se prévaut d'une telle marge de la manière suivante: sa vitesse a été
mesurée
à 120 km/h avant déduction d'une marge de sécurité de 6 km/h; en
retranchant
15 % aux 120 km/h mesurés, soit 18 km/h, on parvient à 102 km/h (120
- 18);
compte tenu d'un tronçon limité à 80 km/h, le dépassement de la
vitesse
autorisée s'élève alors à 22 km/h; un dépassement de cet ordre ne
constitue
pas une violation grave des règles de la circulation.

Sans résoudre ici cette question, on pourrait le cas échéant se
demander si
celui qui circule avec un compteur en panne mais qui s'efforce
véritablement
de respecter la vitesse autorisée ne devrait pas bénéficier d'une
certaine
marge d'erreur pour le cas où il ne commettrait qu'un faible excès de
vitesse. Quoi qu'il en soit, le problème ne se pose pas dans les
mêmes termes
avec le recourant puisqu'il savait qu'il roulait à une allure
excessive et
s'est satisfait de cette situation. Rien ne justifie en pareil cas de
le
mettre au bénéfice d'une marge d'erreur.

3.4 En conclusion, la Chambre pénale n'a pas violé le droit fédéral
en
faisant tomber le recourant sous le coup de l'art. 90 ch. 2 LCR. Pour
le
reste, le recourant ne remet pas en cause la durée de la peine
infligée.

4.
Les frais de la cause sont mis à la charge du recourant, qui succombe
(art.
278 al. 1 PPF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le pourvoi est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Un émolument judiciaire de 2'000 francs est mis à la charge du
recourant.

3.
Le présent arrêt est communiquée en copie au mandataire du recourant,
au
Procureur général du canton de Berne et à la IIème Chambre pénale de
la Cour
suprême du Canton de Berne.

Lausanne, le 13 août 2002

Au nom de la Cour de cassation pénale
du Tribunal fédéral suisse

Le président: Le greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : 6S.266/2002
Date de la décision : 13/08/2002
Cour de cassation pénale

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-08-13;6s.266.2002 ?
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