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25/07/2002 | SUISSE | N°U.287/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 25 juillet 2002, U.287/01


{T 7}
U 287/01 /Tn

Arrêt du 25 juillet 2002
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffière : Mme
Berset

R.________, recourante, représentée par Me Michel Bergmann, avocat,
rue de
Hesse 8-10, 1204 Genève,

contre

La Bâloise Compagnie d'Assurances, Aeschengraben 21, 4051 Basel,
intimée,
représentée par Me Christian Grosjean, avocat, rue Etienne-Dumont 1,
1211
Genève 3

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

(Ju

gement du 26 juin 2001)

Faits :

A.
R. ________, pharmacienne, a travaillé au service de la Pharmacie
X.________.
Le 5...

{T 7}
U 287/01 /Tn

Arrêt du 25 juillet 2002
IVe Chambre

Mme et MM. les Juges Leuzinger, Présidente, Rüedi et Ferrari.
Greffière : Mme
Berset

R.________, recourante, représentée par Me Michel Bergmann, avocat,
rue de
Hesse 8-10, 1204 Genève,

contre

La Bâloise Compagnie d'Assurances, Aeschengraben 21, 4051 Basel,
intimée,
représentée par Me Christian Grosjean, avocat, rue Etienne-Dumont 1,
1211
Genève 3

Tribunal administratif du canton de Genève, Genève

(Jugement du 26 juin 2001)

Faits :

A.
R. ________, pharmacienne, a travaillé au service de la Pharmacie
X.________.
Le 5 décembre 1989, elle a été victime d'un accident de la
circulation, qui
lui a causé une entorse cervicale et une commotion cérébrale. La
Bâloise
Assurances (ci-après : la Bâloise) a pris le cas en charge. Par
décision du
10 octobre 1995, elle lui a octroyé, notamment, une rente
d'invalidité de 50
%, à partir du 1er octobre 1995, en se fondant sur un rapport
d'expertise du
3 avril 1995 du docteur A.________, médecin au service de neurologie
du
Centre Hospitalier Y.________.

Le 28 octobre 1990, R.________ avait ouvert sa propre pharmacie.

Dès le 17 décembre 1997, la Bâloise a demandé à l'assurée de lui
fournir les
bilans, comptes d'exploitation et de pertes et profits des années
1990 à
1997, afin de déterminer dans quelle mesure sa capacité de gain était
encore
altérée. R.________ n'a pas transmis les documents demandés, en
expliquant
qu'elle n'avait pas tenu de comptabilité.

Par décision du 5 novembre 1998, confirmée sur opposition le 22 avril
1999,
la Bâloise a supprimé la demi-rente d'invalidité accordée à
l'assurée, avec
effet rétroactif au 1er juin 1998.

R. ________ a recouru contre la décision sur opposition devant le
Tribunal
administratif du canton de Genève.

Dans le cadre de la procédure cantonale, elle a versé au dossier les
taxations d'office 1993 à 1998 et produit un rapport d'expertise du 29
novembre 1999 du docteur A.________, dont il ressort qu'elle
présentait une
incapacité de travail de 50 %.

Par jugement du 20 juin 2000, le Tribunal administratif a annulé la
décision
sur opposition du 22 avril 1999. Il a imparti à l'assurée un délai à
fin
septembre 2000 pour produire la comptabilité relative à 1999.

Par la suite, la Bâloise a versé à R.________ la somme de 88 263 fr.
80 à
titre de rente d'invalidité pour la période du 1er juin 1998 au 31
août 2000.

Par décision du 25 octobre 2000, la Bâloise a supprimé, avec effet
immédiat,
la demi-rente d'invalidité. Statuant le 15 décembre 2000, elle a
rejeté
l'opposition formée par l'assurée.

B.
Par jugement du 26 juin 2001, constatant que le délai fixé dans son
jugement
précédent n'avait pas été respecté, le Tribunal administratif a
rejeté le
recours formé par l'assurée contre la décision sur opposition du 15
décembre
2000.

C.
R.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement dont
elle demande l'annulation, en concluant, sous suite de dépens, à
l'octroi
d'une rente d'invalidité de 50% et à la mise en oeuvre d'une expertise
comptable.

La Bâloise conclut au rejet du recours, sous suite de frais et dépens.

L'Office fédéral des assurances sociales ne s'est pas déterminé.

Considérant en droit :

1.
La contestation concerne la suppression, par voie de révision, du
droit de la
recourante à une rente d'invalidité fondée sur une incapacité de gain
de 50
%.

La juridiction cantonale a constaté, dans son premier jugement, d'une
part,
que l'état de santé de la recourante était resté inchangé (au regard
du
deuxième rapport d'expertise du docteur A.________), et, d'autre
part, que le
dossier ne permettait pas d'évaluer si la capacité de gain de la
recourante
s'était améliorée depuis lors, en dépit des demandes légitimes de
documents
comptables par l'intimée. Dans le jugement entrepris, les premier
juges ont
considéré que l'intimée était fondée à supprimer la demi-rente
d'invalidité
octroyée à la recourante, dès lors que cette dernière n'avait pas
respecté
l'ultime délai qu'ils lui avaient imparti pour s'exécuter, violant
ainsi son
devoir de collaborer à l'éclaircissement de sa situation économique.

2.
2.1Ainsi que l'a maintes fois exprimé le Tribunal fédéral des
assurances,
dans le domaine des assurances sociales, le juge fonde sa décision,
sauf
dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être
établis de
manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables,
c'est-à-dire
qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit
donc pas
qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse
possible.
Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge
doit, le
cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF
121 V 47
consid. 2a et 208 consid. 6b; VSI 1999 p. 230 consid. 4d).

En droit des assurances sociales, la procédure est régie par le
principe
inquisitoire, selon lequel les faits pertinents de la cause doivent
être
constatés d'office par le tribunal, lequel apprécie librement les
preuves
sans être lié par des règles formelles (dans l'assurance-accidents :
art. 108
al. 1 let. c LAA). Mais ce principe n'est pas absolu. Celui-ci
comprend en
particulier l'obligation de ces dernières d'apporter, dans la mesure
où cela
peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par
la nature
du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de
devoir
supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 195
consid. 2).
Car si le principe inquisitoire dispense les parties de l'obligation
de
prouver, il ne les libère pas du fardeau de la preuve: en cas
d'absence de
preuve, c'est à la partie qui voulait en déduire un droit d'en
supporter les
conséquences, sauf si l'impossibilité de prouver un fait peut être
imputée à
l'adverse partie (ATF 124 V 375 consid. 3; RAMA 1999 n° U 344, p. 418
consid.
3). Au demeurant, il n'existe pas, en droit des assurances sociales,
un
principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer,
dans le
doute, en faveur de l'assuré (RAMA 1999 n° U 349, p. 478 consid. 2b).

2.2 Malgré les nombreuses demandes et sommations dont elle a fait
l'objet de
1997 à 2000, non seulement de la part de l'intimée, mais également des
premiers juges, la recourante n'a pas fourni les documents comptables
nécessaires à l'évaluation de sa situation économique. Conformément à
la
jurisprudence précitée, elle doit supporter les conséquences de la
violation
de son devoir de collaborer. Le fait que ces documents n'existaient
pas ne
lui est d'aucun secours, dès lors qu'elle avait l'obligation de tenir
une
comptabilité commerciale (art. 957 CO) et de faire tout ce qui est
nécessaire
pour assurer une taxation complète et exacte (art. 126 al. 1 LIFD et
42 al. 2
LHID, ainsi que les dispositions cantonales correspondantes). Dans ces
circonstances la requête de la recourante tendant à la mise en oeuvre
d'une
expertise comptable - à la limite de la témérité - doit être rejetée
dès lors
qu'elle n'aurait d'autre but que de suppléer aux carences dont elle
fait
preuve dans la gestion de sa pharmacie
2.3Dans un arrêt E. du 8 avril 2002, U 173/01, la cour de céans a
jugé que,
en l'absence d'une disposition légale spécifique à cet effet, la
violation du
devoir de collaborer en matière d'assurance-accidents ne pouvait pas
être
sanctionnée par le refus de toute prestation, ce qui serait d'ailleurs
incompatible avec le principe de proportionnalité. L'étendue et les
conséquences du refus de collaborer sont réglées à l'art. 47 LAA. Aux
termes
de l'art. 47 al. 3 LAA, l'assuré doit, autant que possible,
collaborer à
l'enquête et donner gratuitement et avec exactitude tous les
renseignements
nécessaires. S'il complique notablement la reconstitution de
l'accident,
l'assureur peut renoncer à de plus amples investigations et statuer
en l'état
du dossier.

On ajoutera à ces considérations que les renseignements en question
comprennent, notamment, les pièces servant à fixer les prestations
d'assurance, en particulier les pièces permettant de déterminer le
gain de
l'assuré (art. 55 al. 1 OLAA en liaison avec l'art. 34 al. 2 OLAA).
Par
ailleurs, la faculté pour l'assurance-accidents de statuer en l'état
est
subordonnée à la condition que l'assuré ait été sommé préalablement
d'apporter son concours dans un délai raisonnable (art. 59 OLAA).

2.4 On peut se demander si les principes découlant de la jurisprudence
précitée sont applicables également lorsque, comme dans le cas
particulier,
l'assurée ne donne pas suite à une sommation judiciaire de s'exécuter,
faisant état du droit de l'intimée de supprimer la demi-rente
d'invalidité en
cas de défaillance. Cette question peut cependant rester ouverte au
regard de
l'issue du litige sur le plan matériel.

3.
3.1Une décision peut être révisée en raison d'un changement des
circonstances. C'est ainsi que selon l'art. 22 al. 1 première phrase
LAA, si
le degré d'invalidité du bénéficiaire de la rente subit une
modification
déterminante, la rente est, pour l'avenir, augmentée ou réduite
proportionnellement, ou supprimée (ATF 119 V 477 consid. 1a). La
rente n'est
susceptible d'être révisée, en vertu de l'art. 22 al. 1 LAA, qu'en
cas de
modification notable de l'état de santé de l'assuré ou lorsque les
conséquences économiques d'un état de santé demeuré inchangé se sont
modifiées (ATF 119 V 478 consid. 1b/aa et les références). Pour
déterminer si
l'on est en présence d'une telle modification des circonstances, il
faut
comparer l'état de fait tel qu'il existait à l'époque où la décision
de rente
a été rendue, dans l'hypothèse où celle-ci n'avait pas été attaquée,
ou en
cas d'opposition formée par l'assuré, au jour où l'assureur-accidents
a
statué sur celle-ci, avec celui qui se présentait lorsque la décision
sur
opposition litigieuse concernant la révision a été rendue (RAMA 1989
n° U 65
p. 70).

3.2 En l'espèce, la décision d'octroi de rente du 10 octobre 1995 se
fonde
sur un revenu annuel déterminant de 97 200 fr. et sur un taux
d'invalidité de
50 %. Selon les bordereaux de taxation d'office de 1993 à 1998, les
revenus
de la recourante ont passé de 51 300 fr. en 1993, à 91 200 fr. en
1997, puis
à 114 000 fr. en 1998. D'ailleurs, la recourante avait fait état du
bon
développement de sa pharmacie dans le cadre de la première procédure
cantonale, en indiquant, notamment, qu'elle avait six employés. C'est
dire
qu'au moins dès 1998, la recourante a réalisé, en travaillant à 50 %,
un
revenu pratiquement égal à celui qui était déterminant en 1995 pour
une
activité exercée à 100%.

Dans ces circonstances, on doit admettre que l'atteinte à la santé
n'a plus
eu d'incidence sur la capacité de gain de la recourante à partir de
cette
date, de sorte que celle-ci n'a plus droit à la demi-rente
d'invalidité qui
lui est versée par l'assurance-accidents. Il s'ensuit que les
conditions de
l'art. 22 LAA étaient réalisées au moins à partir de 1998, et que
l'intimée
était fondée, par décision du 25 octobre 2000, confirmée le 15
décembre 2000,
à supprimer cette prestation avec effet immédiat.

4.
Bien qu'elle obtienne gain de cause, l'intimée n'a pas droit à des
dépens,
car elle est assimilée, vu sa qualité d'assureur privé participant à
l'application de la LAA, à un organisme chargé de tâches de droit
public au
sens de l'art. 159 al. 2 OJ (ATF 112 V 49 consid. 3).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal
administratif du
canton de Genève et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 25 juillet 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

p. la Présidente de la IVe Chambre: La Greffière:


Synthèse
Numéro d'arrêt : U.287/01
Date de la décision : 25/07/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-07-25;u.287.01 ?
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