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09/07/2002 | SUISSE | N°I.483/01

Suisse | Suisse, Tribunal fédéral suisse, 09 juillet 2002, I.483/01


{T 7}
I 483/01 /Tn

Arrêt du 9 juillet 2002
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard.
Greffier : M. Wagner

S.________, recourant, représenté par Me Alexandre Bernel, avocat,
rue de
Bourg 33, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 23 mai 2001)

Faits :

A.
A.a S.________ travaillait en q

ualité de manoeuvre au service de
l'entreprise
X.________. Le 13 juin 1994, il a présenté une demande de prestations
de
l'as...

{T 7}
I 483/01 /Tn

Arrêt du 9 juillet 2002
IIe Chambre

MM. les Juges Schön, Président, Ursprung et Frésard.
Greffier : M. Wagner

S.________, recourant, représenté par Me Alexandre Bernel, avocat,
rue de
Bourg 33, 1003 Lausanne,

contre

Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, avenue
Général-Guisan 8, 1800 Vevey, intimé

Tribunal des assurances du canton de Vaud, Lausanne

(Jugement du 23 mai 2001)

Faits :

A.
A.a S.________ travaillait en qualité de manoeuvre au service de
l'entreprise
X.________. Le 13 juin 1994, il a présenté une demande de prestations
de
l'assurance-invalidité.

Dans un rapport médical du 14 juillet 1994, le docteur A.________,
spécialiste FMH en médecine générale et médecin traitant de l'assuré,
indiquait que l'incapacité de travail dans la profession d'ouvrier,
de 100 %
du 11 mai au 10 octobre 1993 et de 50 % du 11 au 13 octobre 1993,
était à
nouveau totale depuis le 14 octobre 1993.

Le 27 avril 1995, S.________ a repris à 50 % son activité
professionnelle
auprès de X.________. Dès le 29 mai 1995, il a travaillé derechef à
100 %.

L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud, dans un
prononcé
du 6 septembre 1995, a conclu à une invalidité de 100 % à partir du
11 mai
1994 et de 50 % dès le 1er mai 1995. Par décisions du 20 novembre
1996,
rendues en lieu et place de décisions du 14 décembre 1995, il a
alloué à
S.________ une rente entière d'invalidité du 1er mai 1994 au 30 avril
1995,
assortie d'une rente complémentaire pour son épouse et d'une rente
pour
enfant, ainsi qu'une demi-rente d'invalidité pour le mois de mai 1995,
assortie d'une demi-rente complémentaire pour son épouse et d'une
demi-rente
pour enfant.

A.b Totalement incapable de travailler à partir du 3 mars 1998,
S.________ a
tenté à deux reprises - soit du 25 mars au 25 mai 1998 et du 2 au 22
juin
1998 - de reprendre à 50 % son activité professionnelle, mais sans
succès.
Après que son employeur eut résilié son contrat de travail pour le 31
décembre 1998, il a demandé le 21 août 1998 un nouvel examen de son
droit aux
prestations de l'assurance-invalidité.

Dans un rapport médical du 16 décembre 1998, le docteur A.________ a
conclu à
une incapacité de travail de 100 % dès le 23 juin 1998, d'une durée
indéterminée.

S. ________ a effectué un stage à partir du 10 mai 1999 au Centre
d'Observation Professionnelle (C.O.P.) de l'assurance-invalidité à
Yverdon-les-Bains, lequel a pris fin le 2 juillet 1999. Dans son
appréciation
médicale, la doctoresse B.________, médecin-conseil, indiquait qu'une
activité très légère à 50 % pouvait être exigée du patient, ce qui lui
paraissait être le minimum exigible. Selon le rapport d'observation
professionnelle du C.O.P., du 6 juillet 1999, S.________ devrait
pouvoir
raisonnablement faire face à une activité légère en production
industrielle
ou à toute autre activité légère, avec des rendements proches de la
norme,
cela après une période de reconditionnement physique.

Dans un projet de décision du 2 février 2000, l'office AI a avisé
l'assuré
que dans une activité industrielle légère, sa capacité de travail et
donc de
gain était pratiquement entière. Il pourrait ainsi réaliser un revenu
annuel
moyen de l'ordre de 48 100 fr. Comparé au gain de 51 545 fr. par
année qui
serait le sien dans son ancienne activité, il en résultait une
invalidité de
6.6 %, taux qui ne lui donnait aucun droit à une rente.

Le 11 février 2000, le docteur A.________ a contesté ce qui précède.
Il
indiquait notamment que le patient souffrait d'une pathologie
gastrique
contre-indiquant la prise d'anti-inflammatoire qui lui serait bien
nécessaire. A tout le moins était-il donc justifié de procéder à une
évaluation par une expertise même psychiatrique s'il y avait lieu.

La doctoresse C.________, médecin de l'office AI, a confié une
expertise au
Centre Médical Y.________. Dans un rapport du 4 août 2000, lequel se
fonde
également sur un consilium avec le docteur A.________ du 4 juillet
2000, le
docteur D.________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie,
et la
psychologue-psychothérapeute E.________ ont retenu un trouble
somatoforme
indifférencié d'intensité légère, tout en relevant qu'il existe de
nombreux
arguments pour parler d'une exagération volontaire des symptômes,
voire de
simulation. Ils ont conclu qu'il n'y avait pas de justification
psychiatrique
expliquant une diminution de la capacité de travail.

Par décision du 15 septembre 2000, l'office AI, s'en tenant aux motifs
exposés dans le projet de décision, a rejeté la demande.

B.
Par jugement du 23 mai 2001, le Tribunal des assurances du canton de
Vaud a
rejeté le recours formé par S.________ contre cette décision.

C.
S.________ interjette recours de droit administratif contre ce
jugement, en
concluant, sous suite de dépens, à l'annulation de celui-ci, la cause
étant
renvoyée à la juridiction cantonale pour complément d'instruction et
nouveau
jugement. A titre subsidiaire, il conclut à l'allocation d'une rente
entière
d'invalidité depuis le 1er mars 1999 (recte: 1998).

L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud conclut au
rejet du
recours.

Considérant en droit :

1.
Les premiers juges ont retenu qu'il n'y a pas de motif psychiatrique
permettant de justifier une diminution de la capacité de travail du
recourant. Ce point n'est pas remis en cause.

Le litige porte sur le point de savoir si l'atteinte à la santé
physique du
recourant est invalidante. Celui-ci reproche à l'intimé et à la
juridiction
cantonale d'avoir repris telles quelles les conclusions du C.O.P.
selon
lesquelles il peut raisonnablement faire face à une activité légère en
production industrielle ou à toute autre activité légère. En effet,
relève-t-il, ces conclusions ne sont pas étayées par les médecins.
Dans son
rapport du 16 décembre 1998, le docteur A.________ a conclu à une
incapacité
de travail de 100 %. De son côté, la doctoresse B.________, dont
l'examen n'a
porté que sur l'atteinte du rachis, a fixé à 50 % sa capacité
résiduelle de
travail dans une activité très légère, sans pour autant envisager un
degré
d'activité supérieur. Selon le recourant, il est dès lors nécessaire
d'élu-cider la question de sa capacité résiduelle de travail sur le
plan
physique, ce qui justifie la mise en oeuvre d'une instruction
complé-mentaire, en particulier d'une expertise rhumatologique et
orthopédique portant non seulement sur le rachis, mais aussi sur les
genoux
et les orteils.

2.
2.1La plupart des éventualités assurées (par exemple la maladie,
l'accident,
l'incapacité de travail, l'invalidité, l'atteinte à l'intégrité
physique ou
mentale) supposent l'instruction de faits d'ordre médical. Or, pour
pouvoir
établir le droit de l'assuré à des prestations, l'administration ou
le juge a
besoin de documents que le médecin doit lui fournir. L'appréciation
des
données médicales revêt ainsi une importance d'autant plus grande
dans ce
contexte (Spira, La preuve en droit des assurances sociales, in
Mélanges en
l'honneur de Henri-Robert Schüpbach, Bâle 2000, p. 268). La
jurisprudence a
donc précisé les tâches du médecin, par exemple lors de l'évaluation
de
l'invalidité (ATF 122 V 158 sv. consid. 1b). La tâche du médecin
consiste à
porter un jugement sur l'état de santé et à indiquer dans quelle
mesure et
pour quelles activités l'assuré est incapable de travailler. En
outre, les
données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels
travaux
on peut encore, raisonnablement, exiger de l'assuré (ATF 125 V 261
consid. 4,
115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1).

2.2 Dans son rapport du 16 décembre 1998, le docteur A.________ a
posé le
diagnostic de cervicalgies et brachialgies bilatérales - status après
cure de
hernie discale cervicale C5-C6 (le 26 juillet 1993), de lombalgies
sur hernie
discale L4-L5 médiane et L5-S1, de gonalgies sur syndrome rotulien
bilatéral
- status après déchirure de la corne postérieure du ménisque interne
gauche
en mai 1990, de status après régularisation de la corne postérieure du
ménisque à droite en janvier 1992, d'allergie à la pénicilline et de
status
après correction chirurgicale d'orteils déformés. Mentionnant les
deux essais
de reprise du travail à 50 % qui se sont révélés infructueux, il
concluait à
une incapacité totale de travail dans la profession d'ouvrier depuis
le 23
juin 1998, d'une durée indéter-minée.

En sa qualité de médecin-consultant du Centre Médical Y.________, la
doctoresse B.________, dans son rapport du 2 juillet 1999, a retenu
un status
après cure de hernie discale C5-C6 en 1993, une discopathie L4-L5 et
L5-S1
avec canal lombaire étroit localisé en L4-L5, ces atteintes lombaires
s'étant
sensiblement péjorées ces dernières années, et, enfin, un syndrome
fémoropatellaire bilatéral et status après résection partielle du
ménisque
interne des deux côtés. Elle concluait que l'intolérance à la douleur
paraissait tout à fait disproportionnée par rapport à l'atteinte
rachidienne
qui est incontestable, mais insuffisante pour justifier une
incapacité de
travail totale dans des activités adaptées (à savoir des activités
épargnant
le port de charges lourdes, le port répété de charges modérément
lourdes, les
stations statiques prolongées, les mouvements de rotation et de
flexion
antérieure du tronc, le maintien prolongé de la flexion de la nuque
et le
travail avec les membres supérieurs surélevés). Tenant compte de
l'atteinte
rachidienne et des contre-indications inhérentes, malgré
l'amplification des
symptômes surajoutés, la doctoresse B.________ était d'avis qu'une
activité
légère à 50 % peut être exigée du patient. Ceci lui paraissait être le
minimum exigible. Si une telle activité ne pouvait être soutenue à
long terme
(à prendre en considération une période de réentraînement vu l'arrêt
de
travail qui durait depuis deux ans), une évaluation et une prise en
charge à
long terme d'ordre psycho-somatique/psychique étaient alors à
envisager,
surtout compte tenu du jeune âge du patient.

Cette appréciation de la doctoresse B.________, qui est un résumé du
pré-examen du 29 mars 1999 et du stage d'observation qui a suivi, ne
permet
pas de conclure, contrairement à ce qu'indique l'intimé dans la
décision
adminis-trative litigieuse du 15 septembre 2000, que dans une activité
industrielle légère la capacité de travail (ou de gain) du recourant
est
pratiquement entière. Le rapport d'observation professionnelle du 6
juillet
1999, selon lequel celui-ci devrait pouvoir raisonnablement faire
face à une
activité légère en production industrielle ou à toute autre activité
légère,
avec des rendements proches de la norme, n'est pas une appréciation
médicale
de la capacité de travail de l'assuré dans une activité adaptée à son
état de
santé physique.

Il résulte des documents médicaux produits par le docteur A.________
lors du
consilium du 4 juillet 2000 que les affections dont souffre le
recourant sont
de plusieurs ordres et qu'elles ont des conséquences quant à la
détermination
des activités exigibles. Selon un rapport du 27 avril 2000 du docteur
F.________, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique et
chirurgien-chef du
service d'orthopédie de l'Hôpital Z._______, le patient présente deux
problèmes. Au niveau du 3ème orteil droit, il persiste une douleur au
niveau
de l'inter-phalangienne proximale, avec une petite irrégularité de
surface,
une espèce de croutelle très douloureuse, et une douleur sur la tête
du 3ème
métatarsien. En plus, l'assuré est atteint d'une irritation du nerf
cubital
gauche dans l'entrée de la gouttière épitrochléo-olécrânienne. Il
devait voir
le docteur G.________ bientôt pour savoir quel est le degré
d'atteinte du
nerf. Selon un rapport du 8 mai 2000 du docteur G.________,
spécialiste FMH
en neurologie, le patient présente une irritation significative, mais
cliniquement essentiellement sensitive, du cubital gauche. Il présente
également une épicondylite gauche, des omalgies et panrachialgies,
sans
irradiation radiculaire cervicale à l'heure actuelle.

Dans leur rapport du 4 août 2000, le docteur D.________ et la
psychologue-psychothérapeute E.________ ont suggéré de procéder à une
expertise rhu-matologique neutre, pour pouvoir être fixé
définitivement sur
l'atteinte médicale objective, seule susceptible de justifier
éventuellement
une diminution de la capacité de travail.

Dès lors il est nécessaire de renvoyer la cause à l'intimé pour qu'il
procède
à une instruction complémentaire sur le point de savoir si et dans
quelle
mesure le recourant subit une diminution de sa capacité de travail en
raison
de problèmes orthopédiques et neurologiques. Il importera également de
déterminer si et, cas échéant, dans quelles activités il pourrait être
incapable de travailler sur le plan physique, subsidiairement quelles
sont
les activités exigibles.

3. Obtenant gain de cause, le recourant, représenté par un avocat, a
droit à
une indemnité de dépens pour l'instance fédérale (art. 159 al. 1 en
corrélation avec l'art. 135 OJ) et pour l'instance cantonale (art. 85
al. 2
let. f LAVS en corrélation avec l'art. 69 LAI).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :

1.
Le recours est admis en ce sens que le jugement du Tribunal
des
assurances du
canton de Vaud, du 23 mai 2001, et la décision administrative
litigieuse du
15 septembre 2000 sont annulés, la cause étant renvoyée à l'Office de
l'assu-rance-invalidité pour le canton de Vaud pour instruction
complémentaire au sens des considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.

3.
L'Office de l'assurance-invalidité pour le canton de Vaud versera au
recourant la somme de 2500 fr. (y compris la taxe à la valeur
ajoutée) à
titre de dépens pour l'instance fédérale.

4.
Le Tribunal des assurances du canton de Vaud statuera sur les dépens
pour la
procédure de première instance, au regard de l'issue du procès de
dernière
instance.

5.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, à la Caisse de
compensation
AVS/AI/APG de la Chambre vaudoise du commerce et de l'industrie -
Associations des industries vaudoises, au Tribunal des assurances du
canton
de Vaud et à l'Office fédéral des assurances sociales.

Lucerne, le 9 juillet 2002
Au nom du Tribunal fédéral des assurances

Le Président de la IIe Chambre: Le Greffier:


Synthèse
Numéro d'arrêt : I.483/01
Date de la décision : 09/07/2002
Cour des assurances sociales

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ch;tribunal.federal.suisse;arret;2002-07-09;i.483.01 ?
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