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07/03/2018 | LUXEMBOURG | N°39039

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 07 mars 2018, 39039


Tribunal administratif N° 39039 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2017 3e chambre Audience publique du 7 mars 2018 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39039 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2017 par Monsieur …, demeurant à L-…, tendant d’après le libellé de la requête introductive d’instance, à l’annulation d’une décision du dir

ecteur de l’administration des Contributions directes du 26 octobre 2016 ayant déclaré non fondée...

Tribunal administratif N° 39039 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2017 3e chambre Audience publique du 7 mars 2018 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôt sur le revenu

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 39039 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2017 par Monsieur …, demeurant à L-…, tendant d’après le libellé de la requête introductive d’instance, à l’annulation d’une décision du directeur de l’administration des Contributions directes du 26 octobre 2016 ayant déclaré non fondée une réclamation contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2012, 2013, et 2014, tous les trois émis en date du 9 mars 2016 ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 25 avril 2017 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision directoriale déférée ;

Le juge-rapporteur entendu en son rapport, ainsi que Monsieur … en ses explications et Monsieur le délégué du gouvernement Steve COLLART en sa plaidoirie à l’audience publique du 7 février 2018.

Suite au dépôt de ses déclarations d’impôt sur le revenu des années 2012, 2013 et 2014, les 3 janvier 2014, 19 janvier 2015 et 12 janvier 2016, le bureau d’imposition … de l’administration des Contributions directes, section des personnes physiques, ci-après désigné par le « bureau d’imposition », émit le 9 mars 2016 les bulletins de l’impôt sur le revenu des personnes physiques desdites années à l’égard de Monsieur ….

Le 8 juin 2016, Monsieur … adressa une réclamation contre lesdits bulletins d’imposition des années 2012 à 2014 auprès du directeur de l’administration des Contributions directes, ci-

après désigné par « le directeur », réclamation qui fut réceptionnée par ce dernier le 10 juin 2016.

Le 11 août 2016, le directeur procéda à une mise en état en invitant le réclamant à présenter : « les preuves de paiement des cotisations sociales au profit du … pour les années 2012, 2013 et 2014 » et à présenter « les preuves de paiement de la retenue d’impôt sur les 1salaires pour les années 2012, 2013 et 2014, retenues à verser par l’administrateur et le délégué à la gestion journalière de la société anonyme …, en l’espèce le sieur … […] ».

Faute de prise de position de Monsieur …, sa réclamation contre les bulletins d’impôts sur le revenu litigieux fut rejetée comme non fondée par le directeur par une décision du 26 octobre 2016, référencée sous le numéro … du rôle, qui est libellée comme suit :

« […] Vu la requête introduite en date du 10 juin 2016 par le sieur …, pour réclamer contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2012, 2013 et 2014, tous les trois émis en date du 9 mars 2016 ;

Vu le dossier fiscal ;

Vu les §§ 102, 107, 228, 238, 254, alinéa 2 et 301 de la loi générale des impôts (AO) ;

Vu la mise en état du directeur des contributions du 11 août 2016, en vertu des §§ 243, 244 et 171 AO, restée sans réponse ;

Considérant que les réclamations ont été introduites par qui de droit (§238 AO), dans les forme (§249 AO) et délai (§228 AO) de la loi, qu’elles sont partant recevables ;

Considérant que le réclamant fait grief au bureau d’imposition de ne pas avoir tenu « compte de mes cotisations sociales et de mes impôts retenus à la source, ainsi que des revenus de … dont je suis associé » ;

Considérant qu’en vertu du § 243 AO, une réclamation régulièrement introduite déclenche d’office un réexamen intégral de la cause, sans égard aux conclusions et moyens du réclamant, la loi d’impôt étant d’ordre public ;

qu’à cet égard le contrôle de la légalité externe de l’acte doit précéder celui du bien- fondé;

qu’en l’espèce la forme suivie par le bureau d’imposition ne prête pas à critique ;

En ce qui concerne le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2014 Considérant qu’aux termes du § 232, alinéa 1er AO, un bulletin d’impôt ne peut être attaqué qu’au cas où le contribuable se sent lésé par le montant de l’impôt fixé ou conteste son assujettissement à l’impôt ;

Considérant que le montant de l’impôt sur le revenu de l’année 2014 a été fixé à … euro et que le réclamant ne prétend pas à la fixation d’une cote d’impôt positive ;

Qu’il en découle que la réclamation contre le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2014 doit être déclarée irrecevable pour défaut d’intérêt ;

En ce qui concerne les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2012 et 2013 Quant à la quote-part dans le revenu de location de la copropriété 2 Considérant que le revenu provenant de la location de biens litigieux a été établi séparément et en commun conformément aux §§ 214 et 215, alinéa 2 AO par le bureau d’imposition … sous la désignation « … » (…) pour chaque année pour … euro ;

Considérant qu’au vœu du § 218, alinéa 2AO, les bases d’imposition fixées par un bulletin d’établissements séparé et en commun sont reprises dans le bulletin d’impôt individuel du contribuable concerné, en vue de la fixation de la cote d’impôt sur le revenu lui applicable ;

Considérant qu’une imposition qui est assise en tout ou en partie sur des bases fixées par établissement séparé ne peut être attaquée pour le motif que ces bases d’imposition seraient inexactes ;

Considérant qu’une telle réclamation ne peut être formée, en vertu du § 232, alinéa 2 AO, que contre les bulletins portant établissement séparé, en l’espèce notamment contre les bulletins de l’établissement en commun des revenus d’entreprises collectives et de copropriétés des années 2012 et 2013 de la copropriété « … », émis tous les deux en date du 24 février 2016 par le bureau d’imposition … ;

Considérant d’ailleurs que si un bulletin d’établissement séparé et en commun a fait l’objet d’une réclamation, sa réformation entraînera d’office un redressement du bulletin d’impôt établi sur base dudit bulletin d’établissement conformément au § 218, alinéa 4 AO (Conseil d’Etat du 13 juillet 1957, n° 5588 du rôle) ;

Considérant que les décisions litigieuses ont été notifiées le 29 février 2016, de sorte que le délai de réclamation a expiré le 31 mai 2016 ;

Quant au refus de déduction des cotisations sociales et d’imputation des impôts sur les salaires Considérant qu’en date du 4 mai 2009 le réclamant a été nommé pour une durée indéterminée administrateur et délégué à la gestion journalière de la société anonyme …, ayant son siège social au …; qu’il ressort du registre de commerce et des sociétés que « La société sera valablement engagée par la signature conjointe de 2 administrateurs, dont obligatoirement celle de l’administrateur-délégué. Dans le cadre de la gestion journalière, la société est valablement engagée par la seule signature de l’administrateur-délégué. » ;

Considérant que le bureau d’imposition n’a pas imputé l’impôt retenu à la source sur les salaires des années 2012 et 2013 ; que l’instruction du bureau d’imposition a révélé que seulement une partie de la retenue d’impôt sur les traitements et salaires due pour les années 2012 et 2013 a été payée au jour des impositions litigieuses et même à ce jour ; qu’il y a lieu de partir du principe qu’en premier lieu la retenue pour compte des salariés tiers a été opérée ;

que, partant, la partie de la retenue d’impôt sur salaires non payée à ce jour est présumée se rapporter au salaire de l’administrateur-délégué, i.e. du réclamant ;

Considérant que dès lors, si au mépris de son obligation, l’administrateur-délégué n’opère qu’une fraction de retenue d’impôt sur ses propres salaires, les certificats de salaire y 3relatifs, attestant que ces retenues auraient quand-même été opérées intégralement, sont inexacts et ne sauraient être à la base d’une imputation entière de retenue dans le chef de l’administrateur-délégué ; que pour le surplus, il y a lieu de préciser que le réclamant n’a pas déclaré d’impôt retenu à la source sur les salaires dans les déclarations de l’impôt sur le revenu des années litigieuses ;

qu’en l’espèce, c’est à juste titre que le bureau d’imposition n’a pas imputé de retenue d’impôt sur les salaires, à défaut de paiement le jour des impositions litigieuses et même à ce jour ;

Considérant, par ailleurs, que le bureau d’imposition compétent a refusé la déduction des cotisations sociales au titre de dépenses spéciales au motif qu’elles ont été payées par la société anonyme … et non par le réclamant ;

Considérant que le directeur a procédé en date du 11 août 2016 à une mesure d’instruction du dossier afin de se procurer de plus amples détails en ce qui concerne les impositions effectuées ;

que ladite mise en état est libellée comme suit :

- le réclamant est invité à présenter les preuves de paiement des cotisations sociales au profit du Centre commun de la sécurité sociale pour les années 2012, 2013 et 2014, à présenter les preuves de paiement de la retenue d’impôt sur les salaires pour les années 2012, 2013 et 2014, retenues à verser par l’administrateur et délégué à la gestion journalière de la société anonyme …, en l’espèce le sieur …, auteur de la présente requête.

Considérant que cette injonction est cependant restée sans réponse à ce jour ;

Considérant que, partant, le directeur se trouvant inhibé à poursuivre son instruction, se voit dans l’impossibilité de trancher, des éléments impérativement nécessaires à la base d’une perception claire et nette de la situation de fait et de droit faisant défaut ;

Quant au bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2012 Considérant que le réclamant a omis de remettre le certificat de rémunération et de retenue d’impôt de l’année 2012 lors du dépôt de sa déclaration pour l’impôt sur le revenu de la même année ; que le bureau d’imposition a demandé la fourniture dudit certificat en exécution des §§ 170 et 205 AO ; que le réclamant n’a pas fait suite à cette demande ; que seulement après réception des bulletins litigieux établis en sa défaveur, le réclamant a joint à sa requête, entre autres, le certificat de rémunération de l’année 2012 ; que l’instruction de l’instance contentieuse a révélé que le certificat de salaire renseigne un salaire brut de … euros, alors que le réclamant n’a déclaré qu’un salaire de … euros dans sa déclaration pour l’impôt sur le revenu de l’année 2012 ;

Considérant que le revenu provenant d’une occupation salariée de l’année 2012, se chiffre dès lors à … euros ;

4Considérant que le redressement de l’imposition litigieuse fait l’objet de l’annexe qui constitue une partie intégrante de la présente décision ;

Considérant que pour le surplus, les impositions sont conformes à la loi et aux faits de la cause et ne sont d’ailleurs pas autrement contestées ;

PAR CES MOTIFS dit la réclamation contre le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2014 irrecevable pour défaut d’intérêt, reçoit les réclamations contre les bulletins de l’impôt sur le revenu des années 2012 et 2013 en la forme, rejette la réclamation contre le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2013, comme non fondée, réformant in pejus en ce qui concerne le bulletin de l’impôt sur le revenu de l’année 2012, fixe l’impôt sur le revenu dû pour l’année 2012, y compris la contribution au fonds pour l’emploi, à … euros […] ».

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 30 janvier 2017, inscrite sous le numéro 39039 du rôle, Monsieur … a introduit un recours tendant, d’après le libellé de la requête introductive d’instance, à l’annulation de la décision directoriale précitée du 26 octobre 2016 portant rejet de sa réclamation introduite à l’encontre des bulletins d’impôt sur le revenu des années 2012 à 2014 émis à son encontre par le bureau d’imposition en date du 9 mars 2016.

En ce qui concerne la compétence du tribunal pour statuer sur le recours sous analyse, il y a lieu de rappeler qu’il résulte de la lecture combinée des dispositions du § 228 de la loi générale des impôts du 22 mai 1931, appelée « Abgabenordnung », en abrégé « AO », et de l’article 8, paragraphe (1) 1. de la loi modifiée du 7 novembre 1996 portant organisation des juridictions de l’ordre administratif que le tribunal statue comme juge du fond sur le recours dirigé par un contribuable contre une décision du directeur ayant statué sur le mérite d’une réclamation de sa part contre un bulletin de l’impôt sur le revenu.

En l’espèce, force est toutefois de constater, comme retenu ci-avant, que le demandeur a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision directoriale du 26 octobre 2016. Sur demande expresse du tribunal à l’audience des plaidoiries du 7 février 2018 quant à la portée du recours, le demandeur a précisé conclure à l’annulation dans le cadre du recours en réformation prévu par la loi, de sorte que le tribunal est compétent pour statuer sur le recours sous analyse, lequel est, par ailleurs, à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi, et ce, dans la limite des moyens de légalité invoqués, étant rappelé à cet égard que si, dans une matière dans laquelle la loi a institué un recours en réformation, le demandeur conclut à la 5seule annulation de la décision déférée, le recours est, néanmoins, recevable dans la mesure où le demandeur se borne à invoquer des moyens de légalité1.

A l’appui de son recours, le demandeur conteste le refus du directeur de déduire ses charges sociales personnelles pour les années 2012 et 2013, en expliquant que malgré le fait qu’il résulterait d’un certificat établi par le Centre commun de la sécurité sociale que son compte de cotisations sociales aurait été crédité des sommes de … euros, respectivement … euros pour les années 2012 et 2013, l’administration des Contributions directes refuserait la déductibilité de ces mêmes sommes au motif qu’elles auraient été payées par la société … et non pas par sa propre personne. Or, ces cotisations sociales n’auraient pas été comptabilisées en tant que charges par la société …, laquelle se serait en effet contentée de les payer par le débit de son compte-courant d’associé. Il ajoute qu’au titre de l’année 2013, il aurait également bénéficié du remboursement d’un montant de … euros de la part de la Mutualité des employeurs, montant que l’administration des Contributions directes aurait considéré comme revenu complémentaire dans son chef, bien qu’il n’aurait jamais bénéficié de cette somme qui aurait été créditée à son compte de cotisations sociales, et ce, en règlement de celles-ci.

Le demandeur réfute ensuite les conclusions du directeur en ce qui concerne le refus du bureau d’imposition d’imputer les impôts retenus à la source pour les mêmes années en précisant que la société … aurait connu des problèmes de trésorerie depuis quelques années et n’aurait pas été en mesure de régulariser ses impôts retenus à la source de l’année 2012. Etant donné que cette même société ne disposerait pas d’un relevé de compte détaillé susceptible d’établir la somme restant due au titre de son impôt retenu à la source pour l’année 2012, il serait impossible de déterminer le montant exact de l’impôt déductible à la source.

Le délégué du gouvernement quant à lui fait valoir que la décision directoriale serait à confirmer.

Avant tout progrès en cause, il convient de constater de concert avec la partie étatique que le demandeur limite son recours à la seule déductibilité des charges sociales personnelles au titre des années 2012 et 2013, respectivement des impôts retenus à la source pour l’année d’imposition 2012.

En ce qui concerne la déductibilité des charges sociales, il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 110 de la loi modifiée du 4 décembre 1967 concernant l’impôt sur le revenu, ci-après désignée par « LIR », « Sont déductibles les cotisations ou prélèvements suivants : 1. les prélèvements et cotisations versées en raison de l’affiliation obligatoire des salariés au titre de l’assurance maladie et de l’assurance pension. Il en est de même des cotisations payées à titre obligatoire par des salariés à un régime étranger visé par un instrument bi- ou multilatéral de sécurité sociale […] ».

Il résulte de ladite disposition légale que les cotisations payées par un salarié en raison de son affiliation obligatoire au titre de l’assurance maladie et de l’assurance pension sont en principe déductibles en tant que dépenses spéciales. Encore faut-il que ces cotisations aient été 1 Trib. adm., 3 mars 1997, n°9693 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Recours en réformation, n°2 et les autres références y citées.

6payées par le contribuable-même, circonstance qui est contestée en l’espèce, le bureau d’imposition, de même que le directeur, ayant refusé la déductibilité des charges sociales au titre de dépenses spéciales au motif qu’elles auraient été payées par la société … et non pas par Monsieur … .

A cet égard, il convient de rappeler que les dispositions légales applicables, dont surtout les paragraphes 166, 170, 171, 204 et 205 A.O., instaurent un régime qui ne fait bénéficier une déclaration d’impôt d’aucune présomption de véracité, mais qui impose au bureau d’imposition une mission de contrôle et d’examen objectif et impartial de la déclaration et d’investigations supplémentaires en cas de doute raisonnable sur le caractère véridique et complet de la déclaration, le contribuable étant corrélativement soumis à un devoir de collaboration avec le bureau d’imposition en éclairant les points douteux et en produisant des éléments de preuve qu’on peut raisonnablement attendre de sa part2.

En effet, en cas de contestations émises, comme en l’espèce, par l’administration des Contributions directes sur la déclaration faite par le contribuable, celui-ci est légalement tenu à lui faire parvenir les renseignements et explications demandés, étant donné que la charge de la preuve de l’exactitude des déclarations faites pèse désormais sur le contribuable3 et ce en vertu de l’article 59 de la loi du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, ci-après désignée par « la loi du 21 juin 1999 », aux termes duquel la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la côte d’impôt appartient au contribuable tenu d’établir que les frais dont il fait état répondent aux conditions posées en vue de la déductibilité fiscale. A ce titre, en ce qui concerne plus particulièrement la question de la déductibilité de dépenses, il appartient non seulement au contribuable de rapporter la preuve de l’existence matérielle de ces dépenses, c’est-à-dire que les dépenses alléguées ont causé une diminution effective du patrimoine du contribuable, mais encore la preuve de la relation économique de la dépense alléguée avec la catégorie de revenu choisie.

Force est de constater, qu’en l’espèce le demandeur, pour prouver ses affirmations selon lesquelles la société … aurait payé les cotisations sociales par le débit de son compte-courant d’associé, et prouver l’existence matérielle des dépenses y relatives, se prévaut d’une « attestation » de la fiduciaire … dans laquelle cette même fiduciaire certifie que « suivant les grands livres de la société … « … », avec siège social à L-…, les Cotisations Sociales privées de Monsieur … de 2012 jusqu’à 2014 n’ont pas été mis en charge dans les frais de la société susmentionnée. Les paiements effectués par les comptes bancaires de la société anonyme « … » ont été comptabilisés au débit du compte courant associé ». Or, et outre le fait que cette attestation n’est non seulement pas datée, mais a, par ailleurs, été établie par une personne non autrement identifiée, dont le lien avec ladite fiduciaire n’a pas été précisé, elle ne saurait en tout état de cause suffire, à défaut de toute pièce comptable et d’explication quant au fonctionnement exact du prétendu « compte courant associé », pour prouver que les dépenses litigeuses ont causé une diminution effective du patrimoine du demandeur.

2 Trib. adm., 30 mai 2016, n°35778 du rôle, Pas. adm. 2017, V° Impôts, n°727 et les autres références y citées.

3 Cour adm., 26 novembre 2015, n°36039C du rôle, Pas. adm. 2017, V° Impôts, n°728 et les autres références y citées.

7Ainsi, et à défaut pour le demandeur de rapporter la preuve de l’existence matérielle des dépenses relatives à ses propres cotisations sociales, la décision directoriale de refus de déductibilité de ces dépenses à titre de dépenses spéciales ne prête pas à critique.

En ce qui concerne le fait que le directeur a confirmé le bureau d’imposition de ne pas avoir imputé de retenue d’impôt sur les salaires du demandeur, il échet de souligner que conformément à l’article 136 LIR: « (1) Les rémunérations d’une occupation salariale au sens de l’article 95 sont passibles de la retenue à la source au titre de l’impôt sur le revenu, excepté certaines espèces de rémunérations qui ne se prêtent pas sans difficultés sérieuses à l’imposition par voie de retenue à la source et qui sont à déterminer par règlement grand-ducal.

(2) La retenue est à opérer par l’employeur pour compte et à décharge du salarié.

Lorsque la rémunération d’une occupation est allouée en tout ou en partie par des personnes autres que l’employeur ou lorsque la rémunération consiste en tout ou en partie en allocations ou avantages en nature et que la rémunération en espèces ne suffit pas pour régler l’impôt, le salarié est tenu de remettre à l’employeur le complément nécessaire. Lorsque, dans la seconde hypothèse, le salarié refuse de se conformer à cette prescription, l’employeur est en droit de réduire à due concurrence les allocations ou avantages en nature.

(3) Sauf les dérogations et dispositions spéciales à prévoir par règlement grand-ducal, la retenue est à opérer lors de chaque attribution de rémunération.

(4) L’employeur est personnellement responsable de l’impôt retenu ainsi que de l’impôt qu’il aurait dû retenir, à moins que, dans ce dernier cas, il ne soit établi que le défaut ou l’insuffisance de retenue ne lui est pas imputable. Le trésor a pour le recouvrement les mêmes droits d’exécution, privilège et hypothèques que pour le recouvrement de l’impôt sur le revenu qui serait dû par l’employeur à titre personnel.

(5) Le salarié est débiteur de l’impôt, mais il ne peut être contraint au payement de l’impôt que 1. si et pour autant qu’il est complice du non-paiement de la retenue ou 2. si et pour autant que la retenue n’a pas été dûment opérée.

(6) L’impôt retenu est à déclarer et à verser par l’employeur à l’administration des contributions. Un règlement grand-ducal déterminera les formes et les délais de la déclaration et du versement, et règlera le remboursement ou l’imputation de trop-perçus. Le même règlement prescrira les écritures à faire par l’employeur relativement aux opérations de retenue.

[…] (7) A défaut de déclaration ou en cas de détermination inexacte, l’impôt peut être fixé par l’administration.

[…] ».

8 L’article 136 LIR retient dès lors les principes suivants :

- les rémunérations d’une occupation salariale au sens de l’article 95 L.I.R. sont passibles de la retenue à la source au titre de l’impôt sur le revenu, - la retenue est à opérer par l’employeur pour compte et à décharge du salarié, - la retenue est à opérer lors de chaque attribution de rémunération, - l’employeur est personnellement responsable de l’impôt retenu ainsi que de l’impôt qu’il aurait dû retenir, - l’impôt retenu est à déclarer et à verser par l’employeur à l’administration des contributions, - à défaut de déclaration ou en cas de détermination inexacte, l’impôt peut être fixé par l’administration.

En l’espèce, force est de constater qu’il ressort des pièces versées en cause, et notamment d’un extrait du registre du commerce et des sociétés, que lors de l’assemblée générale extraordinaire du 3 avril 2009, Monsieur … a été nommé, à durée indéterminée, administrateur-

délégué de la société …, avec le pourvoir d’engager cette dernière par sa signature individuelle dans le cadre de la gestion journalière, Monsieur … ayant ainsi été responsable de veiller aux retenues à la source à opérer sur les salaires des divers salariés de la société …, y compris le sien.

Il échet encore de constater qu’il ne remet pas en cause la constatation du directeur selon laquelle seulement une partie de la retenue d’impôt sur les traitements et salaires des employés de la société …, due pour les années 2012 et 2013, a été payée au jour des impositions litigieuses, ni la conclusion y relative selon laquelle il y a lieu de partir du principe que la retenue pour compte des autres salariés a été opérée et que la retenue d’impôt sur salaires non payée est présumée se rapporter à son propre salaire en tant qu’administrateur délégué de ladite société. Bien au contraire, le demandeur, lequel n’a d’ailleurs pas déclaré d’impôt retenu à la source dans ses propres déclarations de l’impôt sur le revenu telles que figurant au dossier administratif, se contente d’affirmer que la société … n’aurait pas été en mesure, en raison de problèmes de trésorerie, de régulariser ses impôts retenus à la source de l’année 2012 et ne disposerait par ailleurs pas d’un relevé de compte détaillé, susceptible d’établir la somme restant due au titre de son impôt retenu à la source pour l’année 2012, en arrivant ainsi lui-même à la conclusion qu’il serait « impossible de déterminer le montant de l’impôt à la source déductible». Le demandeur est partant resté en défaut de rapporter la preuve que ses salaires, pour les années litigieuses, ont effectivement fait l’objet d’un impôt retenu à la source, lequel aurait dû être imputé par le bureau d’imposition, étant encore rappelé à cet égard, comme retenu ci-avant, qu’en vertu de l’article 59 de la loi du 21 juin 1999 la preuve des faits libérant de l’obligation fiscale ou réduisant la côte d’impôt appartient au seul contribuable.

Par voie de conséquence, c’est à bon droit que le directeur a refusé de faire droit à la réclamation lui soumise par Monsieur ….

Au vu des développements qui précèdent et en l’absence d’autres moyens soulevés par le demandeur, le recours en réformation est à rejeter pour ne pas être fondé.

Par ces motifs 9 le tribunal administratif, troisième chambre, statuant contradictoirement:

reçoit le recours en reformation en la forme dans la limite des moyens de légalité invoqués ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 7 mars 2018 par :

Thessy Kuborn, vice-président, Paul Nourissier, premier juge, Stéphanie Lommel, attaché de justice, en présence du greffier Judith Tagliaferri.

s. Judith Tagliaferri s. Thessy Kuborn Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 7 mars 2018 Le greffier du tribunal administratif 10


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : 39039
Date de la décision : 07/03/2018

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2018-03-07;39039 ?

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