Tribunal administratif Numéro 25411 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 17 février 2009 2e chambre Audience publique du 10 juin 2010 Recours formé par la société à responsabilité limitée … , contre un bulletin de cotisation émis par la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg en matière de cotisations professionnelles
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JUGEMENT
Vu la requête inscrite sous le numéro 25411 du rôle et déposée le 17 février 2009 au greffe du tribunal administratif par Maître Jean-Pierre Winandy, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société à responsabilité limitée … établie et ayant son siège social à L-… représentée par ses gérants en fonctions, tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation d’un bulletin de cotisation émis par la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg en date du 11 décembre 2008 portant fixation respectivement rappel des cotisations à lui verser au titre des années 2007 et 2008 ;
Vu l’exploit de l’huissier de justice Guy Engel, demeurant à Luxembourg, du 18 février 2009, portant signification de ce recours à la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, établie à L-1615 Luxembourg, 7, rue Alcide de Gasperi ;
Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;
Le juge-rapporteur entendu en son rapport et Maître Jean-Pierre Winandy en sa plaidoirie.
En date du 11 décembre 2008, la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg, ci-après dénommée la « Chambre de Commerce », émit à l’égard de la société à responsabilité limitée …, ci-après dénommée la « …», un bulletin de cotisation portant fixation de la cotisation pour l’année 2008 d’un montant de 70 € et rappel des cotisations antérieurement dues pour l’année 2007 d’un montant de 24.255,14 €.
Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 17 février 2009, la …a fait introduire un recours tendant principalement à la réformation et subsidiairement à l’annulation du bulletin de cotisation précité du 11 décembre 2008 en ce qu’il porte tant sur la cotisation à payer pour l’année 2008 que sur celle à payer pour l’année 2007.
Malgré la signification de la requête précitée à la Chambre de Commerce, par acte d’huissier de justice du 18 février 2009, la Chambre de Commerce n’a pas constitué avocat ni déposé de mémoire en réponse. Il s’ensuit qu’alors même que la Chambre de Commerce n’a pas comparu à l’instance, le tribunal est néanmoins amené à statuer à l’égard de toutes les parties, conformément à l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives.
Bien que la demanderesse ne se trouve pas confrontée à un contradicteur, il n’en reste pas moins que le tribunal doit examiner la recevabilité du recours ainsi que les mérites des différents moyens soulevés, cet examen comportant, entre autres, le cas échéant, un contrôle de l’applicabilité de la disposition légale invoquée par la demanderesse aux données factuelles apparentes de l’espèce, c'est-à -dire que le tribunal doit qualifier la situation de fait telle qu’elle apparaît à travers les informations qui lui ont été soumises par rapport à la règle légale applicable1.
A défaut de l’existence d’un recours au fond en matière de décisions prises par une chambre professionnelle et portant sur les cotisations qui lui sont dues de la part de ses membres, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit à titre principal contre la décision litigieuse du 11 décembre 2008. Partant, seul un recours en annulation a pu être introduit contre ladite décision.
1. Quant au bulletin critiqué du 11 décembre 2008 en ce qu’il porte sur la cotisation à payer pour l’année 2007 Le recours en annulation, dans la mesure où il est dirigé contre le volet du bulletin critiqué du 11 décembre 2008 portant fixation de la cotisation à payer pour l’année 2007, est à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.
La partie demanderesse, en se référant à un jugement du tribunal administratif du 24 octobre 2007 (n° 22636 du rôle), ainsi qu’à un arrêt de la Cour administrative du 17 avril 2008 (n° 23755C du rôle), conclut à l’annulation du volet du bulletin litigieux du 11 décembre 2008 portant sur l’année 2007 au vu des conclusions retenues dans ces deux décisions juridictionnelles.
Alors même que la cotisation dont le paiement est réclamé vise l’année 2007 et que cette cotisation est partant venue à échéance avant l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal du 21 décembre 2007 relatif aux modalités d’affiliation à la Chambre de Commerce, aux modes et à la procédure d’établissement du rôle des cotisations de la Chambre de Commerce et fixant la procédure de perception des cotisations de la Chambre de Commerce, il n’en reste pas moins que dans la mesure où le volet actuellement sous examen de la décision critiquée du 11 décembre 2008 a été décidé postérieurement à la prise d’effet dudit règlement grand-ducal du 21 décembre 2007, se pose la question de savoir si le règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 doit trouver application quant à ce volet de la décision.
1 trib. adm. 2 mai 2002, n° 13912 du rôle, Pas. adm. 2009, V° Procédure contentieuse, n°654 Il échet tout d’abord de constater à la lecture du règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 qu’il ne contient lui-même aucune indication ni quant à sa date d’entrée en vigueur ni quant aux années de cotisation auxquelles il s’applique.
En l’absence d’indication figurant audit règlement grand-ducal, il échet partant de se référer à un premier stade à l’article 2 du Code civil suivant lequel « la loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif ».
Ce principe tel que consacré à l’égard des lois doit également s’appliquer aux actes administratifs qui ne sauraient régir des situations constituées antérieurement à leur entrée en vigueur, sous peine d’être entachés de rétroactivité. Ainsi, le principe de la non-rétroactivité des actes administratifs, qu’ils constituent des actes individuels ou des actes à caractère réglementaire, s’impose aux autorités administratives2.
Il y a encore lieu de veiller à faire une distinction entre la rétroactivité des actes administratifs et leur application immédiate. Ainsi, au cas où une situation présente a été définitivement constituée dans le passé, l’application de mesures nouvelles à la situation passée ne constitue pas une application immédiate, mais comporte rétroactivité3.
Il échet encore de rappeler que le juge ne saurait faire une application rétroactive ni d’une loi ni d’un règlement pris en application de la loi en dehors des cas où le législateur en a décidé ainsi. Il s’ensuit que même au cas où un règlement grand-ducal d’application d’une loi contiendrait une disposition ayant un effet rétroactif, une telle disposition réglementaire ne saurait être reconnue comme étant légale qu’à partir du moment où cette rétroactivité a été expressément voulue par le législateur. Cette hypothèse n’est toutefois pas remplie en l’espèce, étant donné que ni le législateur ni même le pouvoir réglementaire n’ont prévu une disposition rétroactive au sujet de la fixation des cotisations de la Chambre de Commerce.
En l’espèce, c’est la cotisation que la partie demanderesse a, le cas échéant, dû payer à la Chambre de Commerce au titre de son éventuelle affiliation à celle-ci pour l’année 2007 qui est litigieuse. Il s’ensuit que tant le principe que le taux de ladite cotisation ont dû être fixés avant le début de l’année de calendrier 2007 afin que notamment la demanderesse soit en mesure de connaître le montant, au moins quant à son principe, avant le 1er janvier 2007, conformément à l’article 37bis de la loi modifiée du 4 avril 1924 portant création de chambres professionnelles à base élective décidant que la cotisation est déterminée sur la base du bénéfice réalisé pendant « l’avant-dernier exercice ». Ainsi, l’exigibilité de la cotisation à payer à la Chambre de Commerce constitue une situation qui s’est constituée antérieurement à l’entrée en vigueur du règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007. Cette situation ne saurait partant être régie que par la réglementation applicable au moment de l’exigibilité de ladite cotisation, à savoir avant le 1er janvier 2007. Le règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 ne saurait partant contenir des règles, le cas échéant nouvelles par rapport à celles préexistantes, applicables aux cotisations échues pour l’année 2007, étant donné que les règles y contenues ne sauraient trouver application qu’à partir de son entrée en vigueur, à savoir pour l’année 2008.
2 cf. Jurisclasseur, Administratif, V° Acte administratif, n° 26 3 cf. Jurisclasseur, Administratif, V° Acte administratif, n° 36 Il s’ensuit que la Chambre de Commerce, en ce qui concerne le volet sous examen du bulletin précité du 11 décembre 2008 portant fixation de la cotisation à payer pour l’année 2007, a nécessairement dû faire application de la législation ainsi que de la réglementation applicables pour l’année 2007 quant à la fixation du principe et du montant des cotisations à lui payer.
Il suit partant de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de faire abstraction du règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 et d’examiner la législation et la réglementation applicables antérieurement audit règlement grand-ducal.
En ce qui concerne ainsi plus précisément la législation ou la règlementation applicables avant la prise d’effet du règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007, c’est à bon droit que la partie demanderesse s’est référé à l’arrêt de la Cour administrative du 17 avril 2008 (n° 23755C du rôle), qui a retenu qu’il ressort clairement du libellé même de l’article 3, alinéa 2 de la loi précitée du 4 avril 1924 qu’un règlement d’administration publique déterminera le mode et la procédure d’établissement des rôles des cotisations, taxes, droits et primes. Pareillement, la Cour administrative a retenu dans ledit arrêt que l’alinéa 3 du même article 3 dispose que la perception des cotisations, taxes, droits ou primes mis à charge des ressortissants d’une chambre professionnelle sera opérée par la chambre elle-même d’après une procédure à fixer par règlement d’administration publique.
Il y a partant lieu de retenir qu’il se dégage de ces textes que le législateur, comme l’a déjà retenu la Cour administrative dans l’arrêt précité, a subordonné l’application de la législation prévoyant le droit des chambres professionnelles à percevoir des cotisations, taxes, droits et primes, dont l’établissement et la perception doivent se faire selon un certain mode et selon une certaine procédure, à l’entrée en vigueur de textes réglementant ces opérations. Le caractère clair et non équivoque de la volonté du législateur de soumettre le droit à la perception de ces cotisations, taxes, droits ou primes à l’entrée en vigueur de textes en prévoyant le mode d’établissement et la procédure de perception se dégage encore a contrario, comme l’a retenu également la Cour administrative, de l’alinéa 4 du même article 3 de la loi précitée du 4 avril 1924 qui prévoit que le règlement d’administration publique prévu à l’article 3 peut prévoir que la perception peut se faire par voie de retenue sur les traitements ou salaires à opérer par l’employeur.
Il se dégage partant des développements qui précèdent ensemble la conclusion ci-avant retenue suivant laquelle le règlement grand-ducal précité du 21 décembre 2007 ne saurait avoir un quelconque effet rétroactif, qu’au moment de la constitution de la situation de fait portant échéance de la cotisation à payer pour l’année 2007 à la Chambre de Commerce par la demanderesse, les règlements grand-ducaux prévus par l’article 3, alinéas 2 et 3 de la loi précitée du 4 avril 1924 n’existaient pas, de sorte qu’un bulletin de cotisation fixant la cotisation pour l’année 2007 n’a pas pu reposer sur une base légale suffisante.
Il échet partant de conclure que le volet du bulletin litigieux du 11 décembre 2008, en ce qu’il porte sur la fixation de la cotisation à payer pour l’année 2007, est à annuler.
2. Quant au bulletin critiqué du 11 décembre 2008 en ce qu’il porte sur la cotisation à payer pour l’année 2008 Le recours en annulation, dans la mesure où il est dirigé contre le volet du bulletin litigieux du 11 décembre 2008 portant fixation de la cotisation à payer pour l’année 2008, est à déclarer recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévus par la loi.
La partie demanderesse conclut tout d’abord à une violation des dispositions protectrices du secret fiscal en ce que, pour pouvoir procéder au calcul des cotisations pour l’année 2008, les données concernant le bénéfice commercial de l’année 2006 ont dû être prises en considération, ceci en conformité avec l’article 37bis de la loi précitée du 4 avril 1924. Or, la partie demanderesse fait soutenir que dans la mesure où la loi du 21 décembre 2007 portant notamment modification de la loi du 4 avril 1924 ne prévoirait pas de dispositions rétroactives, il n’existerait partant aucune base légale autorisant l’administration des Contributions directes à communiquer à la Chambre de Commerce des informations détenues par elle au sujet de l’année 2006 par rapport auxquelles sont à calculer les cotisations litigieuses de l’année 2008, conformément à l’article 37bis précité.
Or, l’article 7 de la loi précitée du 21 décembre 2007 figurant sous le titre IIIbis de ladite loi prévoit une base légale suffisante de nature à permettre la transmission des données détenues par l’administration des Contributions directes à la Chambre de Commerce dans le cadre de la fixation des cotisations à percevoir par cette dernière. En effet, il a simplement pu être fait application avec effet immédiat de ladite disposition légale contenue à l’article 7, ayant eu pour objet d’ajouter un nouvel alinéa à la fin de l’article 3 de la loi du 4 avril 1924 de la teneur suivante : « L’Administration des Contributions directes est autorisée à transmettre à la Chambre de Commerce les données nécessaires à l’établissement et la tenue à jour de ses fichiers de ressortissants, ainsi qu’à la fixation et la perception des cotisations de ses ressortissants. Ces données ne peuvent être utilisées qu’à ces fins exclusives ». Cette interprétation de cette disposition légale est d’ailleurs confirmée par le commentaire des articles tel qu’il ressort des amendements gouvernementaux émis à la base de la loi précitée du 21 décembre 2007 (doc. parl. 5801, page 3) suivant lequel « la référence à l’année d’imposition n’est pas adéquate à l’endroit de la fixation et de la perception des cotisations de la Chambre de Commerce (…) ». S’il est vrai que ce commentaire est plus que succinct, il n’en demeure pas moins que le gouvernement avait pour objectif de ne pas limiter le champ d’application de la loi du 21 décembre 2007 à l’année d’imposition 2008 et aux années subséquentes, ce qui veut dire qu’il a entendu rendre cette loi applicable à toutes les années d’imposition sans distinction. Il s’ensuit encore que notamment l’article 7 de la loi précitée du 21 décembre 2007 s’applique à toutes les années d’imposition, qu’elles soient antérieures ou postérieures à l’année d’imposition 2008, voire concerne celle-ci, ce qui veut dire que par la loi en question l’administration des Contributions directes est autorisée à procéder à un échange d’informations avec la Chambre de Commerce même en ce qui concerne les données antérieures à l’entrée en vigueur de la loi précitée du 21 décembre 2007.
Il suit des développements qui précèdent que dans la mesure où le bulletin litigieux, en ce qu’il porte notamment sur la cotisation à payer au titre de l’année 2008 a été émis en date du 11 décembre 2008, partant postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi précitée du 21 décembre 2007, de sorte à tomber dans le champ d’application de cette dernière, l’administration des Contributions directes a été autorisée à transmettre à la Chambre de Commerce les données fiscales de la demanderesse relatives notamment à l’année 2006 en vue du calcul de la cotisation à payer pour l’année 2008. Le moyen afférent présenté par la partie demanderesse est partant à rejeter comme n’étant pas fondé, sans qu’il y ait lieu de prendre en outre position sur les développements faits par la demanderesse au sujet de l’éventuelle applicabilité des dispositions de la loi générale des impôts, un tel examen se révélant être superfétatoire par rapport aux conclusions tirées ci-avant.
En deuxième lieu, la partie demanderesse reproche en substance à la Chambre de Commerce de collecter des cotisations qu’elle qualifie d’« excessives » pour financer notamment des projets qui dépasseraient le rôle qui lui serait attribué par le législateur. La partie demanderesse estime ainsi que la Chambre de Commerce collecterait des recettes au-delà des dépenses qui devraient lui incomber en conformité avec l’article 3 de la loi précitée du 4 avril 1924.
Ce moyen est toutefois à rejeter comme n’étant pas pertinent, étant donné que le moyen ainsi développé par la partie demanderesse, même si son argumentation devait s’avérer être exacte, n’est pas de nature à entraîner l’annulation d’un bulletin portant fixation de la cotisation à verser à la Chambre de Commerce. En effet, la partie demanderesse n’a pas établi, dans le cadre de ses développements, que la décision sous examen en ce qu’elle fixe la cotisation pour l’année 2008 viole une quelconque disposition légale ou réglementaire, le simple fait de prétendre, sans d’ailleurs l’établir, que l’argent ainsi collecté par la Chambre de Commerce servirait à financer des « projets somptuaires » ne saurait à lui seul suffire pour établir l’illégalité d’un bulletin de cotisation.
La partie demanderesse reproche en troisième lieu à la Chambre de Commerce d’avoir prévu dans « le règlement de cotisation [précité] du 31 janvier 2008 » un barème dégressif en ce qui concerne la fixation des cotisations, en l’absence d’une autorisation législative quant à la possibilité de prévoir des taux de cotisation différenciés pour différentes catégories de ressortissants de la Chambre de Commerce. A l’appui de ce moyen, la partie demanderesse se pose la question de savoir si la fixation de barèmes qu’elle qualifie de dégressifs est conforme « à nos conceptions prévalant en matière de prélèvements obligatoires ». Elle estime dans ce contexte que le fait d’admettre que certains ressortissants se voient appliquer un taux de cotisation plus réduit que d’autres permettrait d’aboutir à la conclusion que les dépenses de la Chambre de Commerce ne seraient pas telles que tous les ressortissants doivent payer le même taux de cotisation. On pourrait partant en tirer encore la conclusion qu’un taux de cotisation unique plus bas, uniforme pour tous les ressortissants, suffirait pour financer les dépenses de la Chambre de Commerce. Elle sollicite partant l’application d’un taux moins élevé que celui qui lui aurait été appliqué dans le cadre du bulletin de cotisation litigieux.
Le tribunal constate, au vu du libellé de l’argumentation développée par la partie demanderesse, qu’au cas où ces développements devraient être considérés comme constituant un moyen de droit, ce moyen se dirigerait contre le règlement de cotisation précité du 31 janvier 2008 de la Chambre de Commerce du Grand-Duché de Luxembourg auquel la partie demanderesse a expressément fait référence, mais non pas contre le volet sous examen du bulletin critiqué. Or, le recours sous examen n’est pas dirigé contre ledit règlement de cotisation et la demanderesse n’a pas soumis au tribunal une quelconque argumentation de nature à pouvoir retenir une exception d’illégalité, de sorte qu’il y a lieu d’écarter ces développements comme n’étant pas pertinents dans le cadre de la présente instance.
Le même sort doivent d’ailleurs suivre les développements de la partie demanderesse ayant trait à « la rectification des cotisations », étant donné que ces développements contiennent des critiques d’ordre général du système mis en place par la Chambre de Commerce pour collecter les cotisations qui lui reviennent en application de la loi précitée du 4 avril 1924, sans que ces développements, qui ne peuvent même pas être considérés comme constituant un moyen de droit, soient de nature à établir ou tentent d’établir l’illégalité du volet incriminé du bulletin sous examen. Ils sont partant à écarter comme n’étant pas pertinents.
En dernier lieu, la partie demanderesse soumet au tribunal administratif des développements théoriques, contenant des critiques d’ordre général du système mis en place par le législateur pour collecter les cotisations qui reviennent à la Chambre de Commerce en application de la loi du 4 avril 1924, en ce qui concerne plus particulièrement la question du « report de pertes », sans exposer concrètement en quoi ledit système ainsi critiqué est de nature à lui porter un préjudice au titre de l’année de cotisation 2008. S’il est vrai qu’à la lecture desdits développements théoriques, un reproche tiré de ce que les pertes reportables ne pourraient pas être prises en considération lors du calcul de la cotisation pour une année déterminée peut en être dégagé, il n’en demeure pas moins qu’il ne ressort d’aucun élément et d’aucune pièce du dossier que la partie demanderesse a pu, pour l’année fiscale 2006, se trouvant à la base du calcul de la cotisation pour l’année 2008, conformément à l’article 37bis de la loi du 4 avril 1924, porter en déduction du bénéfice commercial de l’année 2006 des pertes reportées d’années antérieures. Il s’ensuit que les développements de la partie demanderesse portant sur le problème du « report de pertes » ne contiennent que des critiques d’ordre général, sans que ces développements, qui ne peuvent même pas être considérés comme constituant un moyen de droit, soient de nature à établir ou tentent d’établir l’illégalité de la décision sous examen. Ils sont partant à écarter comme n’étant pas pertinents, étant rappelé pour le surplus que les cotisations perçues par la Chambre de Commerce ne constituent pas des impôts, puisqu’alors même que lesdites cotisations constituent des prélèvements obligatoires, elles ne sont collectées ni par l’Etat ni par les communes afin de financer les dépenses de ceux-ci. En effet, les cotisations à verser à une chambre professionnelle, dont la Chambre de Commerce, sont à considérer comme constituant des taxes parafiscales, dans la mesure où elles constituent des prélèvements obligatoires effectués dans un intérêt économique ou social déterminé au profit d’une personne morale autre que l’Etat et les communes4. Il s’ensuit ainsi notamment que le système mis en place par le législateur en vue de la collecte des cotisations à verser à la Chambre de Commerce ne doit pas obligatoirement être identique à celui mis en place par le législateur en vue de la collecte des impôts de l’Etat, de sorte que si, en matière fiscale, le législateur a pris l’option politique de permettre le report pour une durée illimitée des pertes subies, il a valablement pu faire abstraction de cette possibilité lors de la mise en place du système permettant la collecte des cotisations en faveur d’une chambre professionnelle, telle la Chambre de Commerce, ce dernier système ne relevant pas du droit fiscal.
A la suite des conclusions retenues ci-avant, il y a également lieu d’écarter pour ne pas être pertinente la proposition faite par la partie demanderesse de poser une question préjudicielle 4 A.Steichen, Manuel de droit fiscal, 4e éd. 2006, t.1, n°24 à la Cour constitutionnelle afin de savoir si l’article 37bis de la loi du 4 avril 1924 est conforme au principe d’égalité devant la loi, tel que prévu aux articles 10bis et 101 de la Constitution, cette question s’insérant dans les développements faits par la partie demanderesse quant au problème du report des pertes, lesdits développements ayant été déclarés non pertinents suivant ce qui précède en ce qu’ils n’ont pas trait à l’analyse de la légalité de la décision sous examen.
Il suit de l’ensemble des considérations qui précèdent que le recours en annulation dirigé contre le volet du bulletin litigieux du 11 décembre 2008 portant fixation de la cotisation à payer pour l’année 2008 est à rejeter comme n’étant pas fondé.
Au vu de l’issue du litige, il y a lieu de faire masse des frais et de les partager à moitié entre la partie demanderesse et la Chambre de Commerce.
Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;
se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;
reçoit le recours en annulation en la forme ;
au fond, le déclare partiellement justifié et annule en conséquence le volet du bulletin litigieux du 11 décembre 2008 portant fixation des cotisations à verser à la Chambre de Commerce pour l’année 2007 ;
rejette ledit recours pour le surplus comme n’étant pas fondé ;
fait masse des frais et les impute pour moitié à chacune des parties à l’instance.
Ainsi jugé par:
Carlo Schockweiler, premier vice-président, Martine Gillardin, vice-président, Annick Braun, juge, et lu à l’audience publique du 10 juin 2010 par le premier vice-président, en présence du greffier assumé Patricia Rego.
s.Rego s.Schockweiler Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 11 juin 2010 Le Greffier du Tribunal administratif 8