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28/10/2004 | LUXEMBOURG | N°17876

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 28 octobre 2004, 17876


Tribunal administratif N° 17876 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 avril 2004 Audience publique du 28 octobre 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre des Classes Moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17876 du rôle et déposée le 8 avril 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Alex KRIEPS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des av

ocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à F-…, tendant à l’annulation de la déci...

Tribunal administratif N° 17876 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 8 avril 2004 Audience publique du 28 octobre 2004 Recours formé par Monsieur …, …, contre une décision du ministre des Classes Moyennes, du Tourisme et du Logement en matière d’autorisation d’établissement

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17876 du rôle et déposée le 8 avril 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître Alex KRIEPS, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, demeurant à F-…, tendant à l’annulation de la décision du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement du 30 septembre 2003 lui refusant l’autorisation d’établissement en vue de l’exercice des métiers d’installateur et de dépanneur de chauffage-sanitaire et de ventilation, ainsi que de vente des articles de la branche, ainsi que de la décision de refus implicite du même ministre résultant du silence observé par ce dernier pendant plus de trois mois suite à l’introduction d’un recours gracieux par le demandeur en date du 14 octobre 2003 ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement en date du 13 juillet 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé au greffe du tribunal administratif par Maître Alex KRIEPS au nom et pour le compte de Monsieur … en date du 17 septembre 2004 ;

Vu les pièces versées au dossier et la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Alex KRIEPS et Monsieur le délégué Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives.

En date du 4 octobre 2002, Monsieur … sollicita, par l’intermédiaire de la société fiduciaire S. S.àr.l., l’autorisation en vue de l’exercice de l’activité d’installateur de chauffage-sanitaire et de dépannage de ces installations, avec vente des articles de la branche, auprès du ministre des Classes moyennes, du Tourisme et du Logement, ci-après désigné par le « ministre ».

Le dossier fut transmis à la commission prévue à l’article 2 de la loi du 28 décembre 1988 réglementant l’accès aux professions d’artisan, de commerçant, d’industriel ainsi qu’à certaines professions libérales, ci-après dénommée « la loi d’établissement », laquelle commission sollicita l’avis de la Chambre des métiers du Grand-Duché de Luxembourg et du ministère de l’Education nationale.

Le 2 janvier 2003, la Chambre des métiers rendit un avis défavorable en estimant que Monsieur … « n’a pas accompli des fonctions dirigeantes pendant une période continue d’au moins 6 ans ».

Conformément à l’avis rendu par la Chambre des métiers, le ministère de l’Education nationale fut saisi pour vérifier la formation théorique de Monsieur … et reconnut, suivant avis daté du 30 janvier 2003, le diplôme du baccalauréat technologique de celui-ci comme équivalent au certificat de fin d’études secondaires techniques et le brevet de technicien supérieur au niveau BAC + 2, tout en précisant que les deux diplômes ne sont pas assimilables ni à un certificat d’aptitude technique et professionnelle ni à un brevet de maîtrise.

Le 11 septembre 2003, la commission prévue à l’article 2 de la loi d’établissement, émit un avis défavorable suite à la demande présentée par Monsieur … en estimant qu’il ne remplissait pas les critères requis pour la qualification professionnelle.

Par une décision du 30 septembre 2003, le ministre refusa de faire droit à cette demande dans les termes suivants :

« Par la présente, j’ai l’honneur de me référer à votre demande sous rubrique qui a fait entre-temps l’objet de l’instruction administrative prévue à l’article 2 de la loi d’établissement du 28 décembre 1988, modifiée le 4 novembre 1997.

Le résultat m’amène à vous informer qu’au vu du diplôme de Monsieur …, il lui reste à prouver une pratique professionnelle de six ans dans une fonction de dirigeant dans les métiers sollicités, conformément à l’article 4 du règlement grand-ducal du 15 septembre 1989.

Cette pratique peut être remplacée par la réussite aux épreuves complémentaires organisées par la Chambre des Métiers et portant sur les connaissances techniques de l’activité professionnelle visée conformément aux dispositions de l’article 7 du règlement grand-ducal précité.

La présente décision peut faire l’objet d’un recours par voie d’avocat endéans trois mois auprès du Tribunal Administratif.

Veuillez agréer … ».

Le 14 octobre 2003, Monsieur … fit introduire par l’intermédiaire de son mandataire un recours gracieux à l’encontre de cette décision de refus auquel il joignit un certificat patronal attestant qu’il disposerait d’une pratique de plus de six années comme dirigeant et en faisant valoir qu’il serait titulaire du brevet de technicien supérieur en électrotechnique délivré par l’Académie de Nancy-Metz, ce qui entraînerait une réduction de la pratique professionnelle.

A défaut de décision du ministre quant à son recours gracieux, Monsieur … a fait introduire le 8 avril 2004 un recours en annulation à l’encontre de la décision précitée du 30 septembre 2003, ainsi que de la décision confirmative implicite du ministre suite au silence par lui observé quant au recours gracieux introduit en date du 14 octobre 2003.

L’article 2, alinéa 6 de la loi d’établissement prévoit que le tribunal administratif statue comme juge d’annulation en matière d’autorisations d’établissement. Le recours en annulation est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

Il convient en premier lieu d’examiner le moyen de tardiveté soulevé par le demandeur dans son mémoire en réplique par rapport au mémoire en réponse déposé par le délégué du gouvernement le 13 juillet 2004 au greffe du tribunal.

L’article 5 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives prévoit en ses paragraphes (1) et (6) que « (1) (…) le défendeur et le tiers intéressé sont tenus (…) de fournir leur réponse dans le délai de trois mois à dater de la signification de la requête introductive.

(6) Les délais prévus aux paragraphes 1 et 5 sont prévus à peine de forclusion. Ils ne sont pas susceptibles d’augmentation en raison de la distance. Ils sont suspendus entre le 16 juillet et le 15 septembre ».

Il convient encore de relever qu’aucune prorogation de délai n’a été demandée au président du tribunal conformément à l’article 5, paragraphe (7) ni, par la force des choses, accordée par ce dernier.

Il se dégage de l’article 5 de la loi précitée du 21 juin 1999 que la question de la communication des mémoires dans les délais prévus par la loi touche à l’organisation juridictionnelle, étant donné que le législateur a prévu les délais émargés sous peine de forclusion.

Conformément aux dispositions du paragraphe (1) de l’article 5 de la loi précitée du 21 juin 1999, le délégué du gouvernement est tenu de fournir son mémoire en réponse dans le délai de trois mois à partir de la signification de la requête introductive.

En l’espèce, la requête introductive d’instance a été déposée au greffe du tribunal administratif en date du 8 avril 2003. Conformément à l’article 4, paragraphe (3) de la loi précitée du 21 juin 1999, « le dépôt de la requête vaut signification à l’Etat (…) ». Partant, le délai de trois mois prévu par le paragraphe (1) de l’article 5 de la loi du 21 juin 1999 précitée, a commencé à courir à partir du 8 avril 2004 et a expiré en l’espèce le 8 juillet 2004, soit avant le dépôt du mémoire en question au greffe en date du 13 juillet 2004.

Il s’ensuit que le mémoire en réponse du délégué du gouvernement a été déposé en dehors du délai légal de trois mois et est à écarter comme ayant été fourni tardivement.

Le mémoire en réponse ayant été écarté, le même sort frappe le mémoire subséquent de la partie demanderesse, lequel ne constitue qu’une réplique à la réponse fournie.

A l’appui de son recours, Monsieur … fait valoir qu’il ne disposerait pas du brevet de maîtrise dans l’activité pour laquelle l’autorisation serait sollicitée, mais que son diplôme de fin d’études secondaires serait complété par une pratique professionnelle de six ans dans l’entreprise de son père, ainsi qu’il résulterait des certificats d’affiliation produits et d’un certificat patronal, de sorte qu’il répondrait aux conditions de qualification professionnelle pour les métiers d’installateur et de dépanneur de chauffage-sanitaire et de ventilation, ainsi que de vente des articles de la branche.

Il échet de préciser d’emblée que les activités d’installateur et de dépanneur de chauffage-sanitaire et de ventilation constituent tous des métiers principaux repris respectivement sous les numéros 403-00 et 404-00 de la classification établie par l’article 1er du règlement grand-ducal du 19 février 1990 ayant pour objet 1. d’établir la liste de métiers principaux et secondaires, prévue à l’article 13 (1) de la loi d’établissement du 28 décembre 1988, 2. de déterminer les conditions de qualification professionnelle requises pour l’exercice des métiers secondaires, conformément à l’article 13 (3) de la loi d’établissement du 28 décembre 1988.

L’article 13 (2) de la loi d’établissement dispose que « les artisans exerçant un métier principal et les entrepreneurs industriels de construction doivent être en possession du brevet de maîtrise ou du diplôme universitaire d’ingénieur de la branche. Le ministre ayant dans ses attributions les autorisations d’établissement, sur avis de la commission prévue à l’article 2 et après consultation de la Chambre des Métiers, peut reconnaître à un postulant, démuni des diplômes précités, une qualification professionnelle suffisante soit pour l’ensemble, soit pour une partie d’un métier repris sur la liste établie par règlement grand-ducal sur la base de pièces justificatives reconnues comme équivalentes, conformément aux critères à déterminer par règlement grand-ducal ».

En l’espèce, il est constant en cause, que le demandeur n’est titulaire ni d’un brevet de maîtrise dans la branche dans laquelle il souhaite exercer ses activités ni d’un diplôme universitaire d’ingénieur de la branche en question.

En l’absence des diplômes précités, le ministre peut toutefois décider de reconnaître à un postulant une qualification professionnelle équivalente, en se basant sur les critères déterminés par le règlement grand-ducal modifié du 15 septembre 1989 déterminant les critères d’équivalence prévus à l’article 13 (2) de la loi du 28 décembre 1988, qui dispose en son article 5 que « le diplôme de fin d’études secondaires ou un diplôme de scolaire de même niveau, accompagné de la preuve de l’accomplissement de fonctions dirigeantes dans une entreprise artisanale pendant une période continue d’au moins six années, est à considérer comme pièce équivalente au brevet de maîtrise dans le même métier ».

Afin de satisfaire à l’exigence de l’accomplissement de fonctions dirigeantes dans une entreprise artisanale pendant une période continue d’au moins six années posée par l’article 5 du règlement grand-ducal précité, le demandeur a soumis au ministre, à l’appui de sa demande en autorisation, un certificat du Centre commun de la Sécurité sociale du 26 septembre 2002 dont il ressort qu’il a été affilié comme ouvrier auprès de l’entreprise E.

S.àr.l., établie et ayant son siège social à L-3660 Kayl, 41, rue du Moulin, durant la période allant du 27 novembre 1995 au 31 mars 1999 et comme employé privé à partir du 1er avril 1999 jusqu’à la date du certificat auprès de la même entreprise.

Dans le cadre de son recours gracieux, le demandeur a encore versé un certificat établi par l’entreprise E. S.àr.l. en date du 10 décembre 2002 renseignant qu’il a exercé en tant qu’ouvrier du 27 novembre 1995 au 31 mars 1999 une « fonction de dirigeant du personnel de chantier dans l’entreprise vu que son père en est le gérant » et depuis le 1er avril jusqu’à la date du certificat en tant qu’employé privé « la fonction de dirigeant des services techniques ».

Il appartient partant au tribunal de vérifier si le ministre a valablement pu retenir que Monsieur … ne remplissait pas en l’espèce la condition de l’accomplissement de fonctions dirigeantes durant une période continue d’au moins six années en vue de la délivrance d’une autorisation d’établissement.

En l’espèce, au vu des pièces versées, s’il est établi que le demandeur peut avancer une ancienneté durant une période continue d’au moins huit années dans l’entreprise E. S.àr.l.

dont son père est l’un des deux associés-gérants, il n’empêche qu’il n’a pas apporté la preuve de l’accomplissement de fonctions dirigeantes pendant le temps requis.

En effet, au delà de la nature de l’affiliation au Centre commun de la sécurité sociale, il se dégage de l’article 5 du règlement grand-ducal modifié du 15 septembre 1989 précité, qui emploie la notion de fonction dirigeante au pluriel, que le demandeur doit avoir assuré à la fois une activité dirigeante dans les domaines techniques, administratifs et commerciaux de l’entreprise.

En l’espèce, le demandeur fait valoir qu’il aurait occupé une « fonction de dirigeant du personnel de chantier dans l’entreprise » ainsi qu’une « fonction de dirigeant des services techniques ».

Or, s’il est vrai qu’il découle du certificat établi en date du 10 décembre 2002 par la société E. S.àr.l que le demandeur a exercé « une fonction de dirigeant des services techniques de la société », il n’empêche qu’il reste en défaut de démontrer l’accomplissement d’une fonction dirigeante dans les domaines administratif et commercial, étant donné que la fonction de dirigeant du personnel de chantier ne saurait comprendre l’accomplissement d’une fonction dirigeante dans le domaine administratif et commercial.

En l’absence d’autres éléments de preuve permettant de conclure à l’accomplissement de fonctions dirigeantes dans les trois domaines pour les branches sollicitées, il y a lieu de conclure qu’il ne remplit pas les conditions prévues à l’article 5 du règlement grand-ducal modifié précité et qu’il ne dispose partant pas de la qualification professionnelle permettant l’exercice des métiers d’installateur et de dépanneur de chauffage-sanitaire et de ventilation, ainsi que de vente des articles de la branche. Le recours en annulation est partant à déclarer non fondé.

Eu égard aux développements qui précèdent, portant constat d’un défaut d’accomplissement de fonctions dirigeantes dans les domaines requis, le moyen subsidiaire tendant à la réduction de la durée de sa pratique professionnelle, abstraction faite de la question de savoir si le demandeur rentre dans le champ d’application de l’article 7, alinéa 2, du règlement grand-ducal du 15 septembre 1989 invoqué à l’appui de ce moyen, est à écarter.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

écarte le mémoire en réponse de l’Etat et le mémoire en réplique subséquent du demandeur ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Schroeder, premier juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 28 octobre 2004 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 6


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17876
Date de la décision : 28/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-10-28;17876 ?

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