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27/10/2004 | LUXEMBOURG | N°18009

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 27 octobre 2004, 18009


Tribunal administratif Numéro 18009 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 mai 2004 Audience publique du 27 octobre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18009 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 mai 20004 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, de nationalité et de citoyenneté biélorusses, né le … (Biélorussie)

, demeurant à… , tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre ...

Tribunal administratif Numéro 18009 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 3 mai 2004 Audience publique du 27 octobre 2004 Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18009 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 3 mai 20004 par Maître Nicky STOFFEL, avocat à la Cour, inscrite au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, de nationalité et de citoyenneté biélorusses, né le … (Biélorussie), demeurant à… , tendant à la réformation sinon à l’annulation d’une décision du ministre de la Justice du 30 mars 2004 portant rejet de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 21 juillet 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision entreprise ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport ainsi que Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en ses plaidoiries à l’audience publique du 11 octobre 2004.

Le 31 janvier 2003, Monsieur … introduisit une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Le même jour il fut entendu par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et sur l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Le 10 février 2004, il fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur leur situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 30 mars 2004, lui notifiée en mains propres le 1er avril 2004, le ministre de la Justice informa Monsieur … de ce que sa demande avait été refusée comme non fondée au motif qu’il n’invoquerait aucune crainte justifiée de persécution en raison de son opinion politique, de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de son appartenance à un certain groupe social.

Le 3 mai 2004, Monsieur … a fait déposer au greffe du tribunal administratif un recours en réformation sinon en annulation contre la décision ministérielle de refus du 30 mars 2004.

L’article 12 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1. d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées, de sorte que le tribunal est compétent pour l’analyser. Le recours en réformation ayant été introduit, par ailleurs, dans les formes et délai de la loi est recevable. Le recours en annulation est dès lors irrecevable.

En premier lieu le demandeur fait valoir que la décision du ministre de la Justice du 30 mars 2004 violerait l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme du fait qu’elle est rédigée en langue française et qu’elle aurait dû lui être traduite.

En ce qui concerne ce moyen, il échet de constater qu’un demandeur d’asile ne saurait se plaindre de ce que la décision ministérielle est rédigée en français, langue qui est incompréhensible pour lui, étant donné que le français est l’une des trois langues officielles du Grand-Duché en matière administrative, contentieuse ou non contentieuse ainsi qu’en matière judiciaire, et qu’il n’existe aucun texte de loi obligeant le ministre de la Justice à faire traduire ses décisions dans une langue compréhensible par le destinataire, de sorte que le moyen soulevé est à déclarer non fondé (cf. Cour adm. 20 décembre 2001, n° 14302C du rôle, Pas.

adm. 2003, V° Etrangers, I. Réfugiés, n° 19, p. 182). D’autant plus les droits de la défense de Monsieur … n’ont été en aucune façon violés, dans la mesure où il a été assisté d’un avocat lequel a introduit en son nom un recours à l’encontre de la décision litigieuse devant le tribunal administratif.

Quant au fond, il fait valoir qu’il remplirait les conditions pour bénéficier du statut de réfugié, étant donné qu’il aurait exercé des activités politiques dans un parti minoritaire et qu’il aurait participé à des manifestations.

Le délégué du Gouvernement soutient que le ministre de la Justice aurait fait une saine appréciation de la situation de la demanderesse et que le recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne. Dans ce contexte, il convient encore de préciser que le tribunal est appelé, dans le cadre d'un recours en réformation, à apprécier le bien-fondé et l'opportunité d'une décision entreprise en tenant compte de la situation existant au moment où il statue.

L’examen des déclarations faites par Monsieur … ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que la demanderesse reste en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans son chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Force est de constater que le demandeur, avant de venir au Luxembourg, a séjourné et travaillé au Portugal. Il a précisé lors de son audition qu’il a « quitté le Portugal pour le Luxembourg parce que les conditions de vie étaient précaires, voire absentes » et qu’il a choisi le Luxembourg au vu de sa situation géographique centrale en Europe. En plus il résulte des pièces versées au dossier que Monsieur … est entré sur le territoire de l’Union européenne le 8 juillet 2002. Il y a dès lors lieu de retenir que ce sont essentiellement des raisons économiques qui ont poussé le demandeur à quitter le Portugal, pays où il n’a aucunement fait l’objet de persécutions au sens de la Convention de Genève.

En ce qui concerne les événements isolés (participation à des manifestations, incident avec la milice, licenciement) mis en avant dans son pays d’origine, au-delà du fait qu’ils datent déjà de 2001, il y a lieu de retenir qu’ils ne sauraient valoir comme motif de persécution au sens de la Convention de la Genève, d’un côté parce qu’ils ne revêtent pas un caractère de gravité suffisant et de l’autre côté parce qu’il n’est pas établi qu’ils ont été commis à cause de la race, de la religion, de la nationalité, de l’appartenance à un certain groupe social ou à cause des opinions politiques de Monsieur ….

Il suit de ce qui précède que le demandeur n’a pas fait état d’une persécution ou d’une crainte de persécution au sens de la Convention de Genève susceptible de justifier la reconnaissance du statut de réfugié dans son chef. Partant le recours en réformation est à rejeter comme étant non fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement, reçoit le recours en réformation en la forme, au fond, le déclare non justifié et en déboute, déclare le recours en annulation irrecevable, condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 27 octobre 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit greffier assumé.

s. Schmit s. Lenert Reproduction certifiée conforme à l’original Luxembourg, le 28.10.2004 Le Greffier en chef du Tribunal administratif 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 18009
Date de la décision : 27/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-10-27;18009 ?

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