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13/10/2004 | LUXEMBOURG | N°18643

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 13 octobre 2004, 18643


Tribunal administratif N° 18643 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 septembre 2004 Audience publique du 13 octobre 2004

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18643 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 septembre 2004 par Maître Pierre-Marc KNAFF, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ord

re des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, né le … à Bijelo Polje (Monténégro / Etat de Serbie et Monté...

Tribunal administratif N° 18643 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 13 septembre 2004 Audience publique du 13 octobre 2004

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière de statut de réfugié

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 18643 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 13 septembre 2004 par Maître Pierre-Marc KNAFF, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, né le … à Bijelo Polje (Monténégro / Etat de Serbie et Monténégro), de nationalité serbo-monténégrine, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 16 août 2004 par laquelle ledit ministre a déclaré manifestement infondée sa demande tendant à la reconnaissance du statut de réfugié ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 22 septembre 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Monsieur le délégué du gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en sa plaidoirie.

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En date du 15 juillet 2004, M. … introduisit oralement auprès du service compétent du ministère de la Justice une demande en reconnaissance du statut de réfugié au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

M. … fut entendu le même jour par un agent du service de police judiciaire, section police des étrangers et des jeux, de la police grand-ducale, sur son identité et l’itinéraire suivi pour venir au Luxembourg.

Il fut encore entendu en date du 29 juillet 2004 par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié.

Par décision du 16 août 2004, notifiée par courrier recommandé en date du 31 août 2004, le ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration informa M. … que sa demande avait été déclarée manifestement infondée au sens de l’article 9 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1) d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile ; 2) d’un régime de protection temporaire, au motif qu’il ne ferait valoir aucune crainte raisonnable de persécution pour une des raisons prévues par la Convention de Genève.

Par requête déposée le 13 septembre 2004, M. … a fait introduire un recours tendant à l’annulation de la décision précitée du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration du 16 août 2004.

Etant donné que l’article 10 (3) de la loi précitée du 3 avril 1996 prévoit qu’un recours en annulation peut être introduit contre les demandes d’asile déclarées manifestement infondées, le recours en annulation, ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, est recevable.

A l’appui de son recours, le demandeur soulève comme unique moyen d’annulation l’incompétence de l’autorité ayant pris la décision litigieuse, au motif que d’après l’article 10 de la loi précitée du 3 avril 1996 le ministre de la Justice aurait seul compétence pour prendre une décision déclarant une demande en obtention du statut de réfugié manifestement infondée à l’exclusion du ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, de sorte que ce dernier aurait « manifestement commis un excès de pouvoir devant être sanctionné par l’annulation de la décision. » C’est à juste titre que le délégué du gouvernement se prévaut de l’arrêté grand-ducal du 7 août 2004 portant constitution des Ministères, publié au Mémorial A n° 147 en date du 11 août 2004, pris en exécution de l’article 76 de la Constitution et de l’arrêté royal grand-

ducal modifié du 9 juillet 1857 portant organisation du gouvernement grand-ducal, et attribuant compétence au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration en matière d’octroi du statut de réfugié.

En effet, l’article 76 de la Constitution autorise le Grand-Duc à régler l’organisation de son Gouvernement (…). Il résulte de ce texte que le Grand-Duc peut librement créer les ministères et faire la répartition des départements ou des affaires ministérielles entre les ministres (voir Pierre MAJERUS, L’Etat luxembourgeois, éd. 1983, page 162). En matière d’organisation du gouvernement cette disposition constitutionnelle confère au Grand-Duc un pouvoir réglementaire direct et autonome en disposant que le Grand-Duc règle l’organisation de son gouvernement. Ce pouvoir est donc indépendant de la cause d’ouverture fondamentale des règlements qui est l’exécution des lois. L’octroi de ce pouvoir autonome par la Constitution procède de l’idée de la séparation des pouvoirs : l’organe gouvernemental doit être indépendant à l’égard du Parlement; pour cette raison, il doit pouvoir déterminer en pleine indépendance son organisation intérieure. Dans le domaine circonscrit par la notion de l’ « organisation du Gouvernement », le Grand-Duc exerce un pouvoir discrétionnaire et originaire; les règlements fondés sur l’article 76 de la Constitution sont donc, dans leurs domaines, des actes équipollents aux lois (voir Pierre PESCATORE, Introduction à la science du droit, éd. 1978, n° 95, page 152).

Il s’ensuit que le prédit arrêté du 7 août 2004, ayant force de loi, a modifié la législation en matière d’« octroi du statut de réfugié » en ce sens que la compétence ministérielle revient dorénavant au ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration, de sorte que l’unique moyen tiré de l’incompétence de l’autorité à la base de la décision litigieuse est à rejeter.

Il se dégage des considérations qui précèdent que le recours formé par le demandeur est à rejeter comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le déclare non justifié et en déboute ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Schroeder, premier juge, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 13 octobre 2004, par le premier juge en présence de M. Legille, greffier.

Legille Schroeder 3


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 18643
Date de la décision : 13/10/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-10-13;18643 ?

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