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21/06/2004 | LUXEMBOURG | N°17567

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 juin 2004, 17567


Tribunal administratif N° 17567 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 février 2004 Audience publique du 21 juin 2004 Recours formé par la société … s.àr.l., … contre une décision de la Ville d’Echternach en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17567 du rôle et déposée le 10 février 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître James JUNKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société … s.à r.l., établie et ayant son siège social à L-â€

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Tribunal administratif N° 17567 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 10 février 2004 Audience publique du 21 juin 2004 Recours formé par la société … s.àr.l., … contre une décision de la Ville d’Echternach en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17567 du rôle et déposée le 10 février 2004 au greffe du tribunal administratif par Maître James JUNKER, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de la société … s.à r.l., établie et ayant son siège social à L-…, tendant à la réformation, sinon à l’annulation de la décision de refus datée du 11 novembre 2003 de l’administration communale de la Ville d’Echternach de faire droit à sa demande concernant le raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA, demeurant à Diekirch, du 11 février 2004 portant signification de ce recours à l’administration communale de la Ville d’Echternach ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision critiquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître James JUNKER en sa plaidoirie à l’audience publique du 9 juin 2004.

La société … s.àr.l., ci-après dénommée « la société … » déposa en date du 18 août 2003 par l’intermédiaire du bureau d’ingénieur … s.a. auprès du bourgmestre de la Ville d’Echternach une demande tendant à voir raccorder le site de la société … à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach.

Par courrier recommandé du 11 novembre 2003, le mandataire de la Ville d’Echternach adressa au bureau d’ingénieur … s.a. un refus formulé en les termes suivants :

« Nous nous réfèrons à votre courrier du 18 août 2003 par lequel vous sollicitez, d’ordre et pour compte de la société … s.à r.l. une autorisation de raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach, que nous conseillons dans cette affaire, et qui nous charge d’y apporter la présente réponse.

Dans votre courrier précité vous vous référez à l’arrêt rendu par la Cour administrative en date du 08 juillet 2003.

Si cette décision a rejeté le recours contre l’autorisation délivrée par M. le Ministre de l’Environnement, elle a également retenu que :

- l’ensemble des bâtiments qui se trouvent sur le site n’ont pas de caractère légal.

Les décisions que sont amenés à prendre les pouvoirs communaux sont indépendantes par rapport à une décision d’un pouvoir gouvernemental. Chaque pouvoir doit agir dans le cadre des lois et règlements qui lui confèrent compétence.

Notre mandante, la Ville d’Echternach, n’est donc aucunement obligée - par la seule existence d’une autorisation gouvernementale - de vous accorder la moindre autorisation qui heurterait les lois et règlements de compétence communale.

Nous sommes dès lors au regret de devoir vous informer que notre mandante entend maintenir sa décision antérieure du 28 juillet 2000, par laquelle elle avait déjà avisé l’entreprise … qu’aucune suite favorable ne saurait être réservée à sa demande de branchement de diverses installations au système sanitaire de la Ville d’Echternach.

Le terrain de votre mandante se trouve en « zone extérieure au périmètre d’agglomération » et toutes les constructions qui s’y trouvent ont été érigées de façon illégale. Le règlement sur les bâtisses de la Ville d’Echternach ne permet donc pas d’accéder à la demande formulée.

Notre mandante a par ailleurs appris qu’un étage du bâtiment administratif serait utilisé à des fins d’habitation. Vous voudrez inviter la société … à faire cesser cet état de fait avec effet immédiat, aucune affectation à des fins résidentielles n’étant possible sur ce site.

La présente décision peut faire l’objet d’un recours devant les juridictions administratives dans un délai de 3 mois par requête signée par un avocat à la Cour.

Nous vous prions de croire (…) ».

C’est contre cette décision de refus datée du 11 novembre 2003 que la société … fit introduire par requête du 10 février 2004 un recours tendant principalement à sa réformation et subsidiairement à son annulation.

A l’appui de son recours, la demanderesse fait plaider que le refus lui aurait été opposé à tort, les constructions présentes sur le site et destinées à être raccordées à la canalisation et au réseau d’eau potable de la Ville d’Echternach étant légales, car érigées et exploitées antérieurement à l’adoption par la Ville d’Echternach de son règlement sur les bâtisses.

Elle souligne par ailleurs disposer de diverses autorisations lui délivrées par les autorités gouvernementales, à savoir une permission de cours d’eau délivrée par le ministre de l’Agriculture, une autorisation du ministre de la Justice d’exploiter un dépôt d’explosifs, une seconde autorisation du même ministre relative à des réservoirs souterrains de gazoil et à deux pompes, une autre autorisation du même ministre portant sur l’exploitation d’un réservoir à bitume, d’une pompe et d’un mélangeur et enfin une autorisation, toujours du ministre de la Justice, autorisant une installation de concassage, une bande transporteuse, une installation de criblage, un compresseur et dix moteurs électriques, de sorte que les installations présentes sur son site ne sauraient être considérées comme illégales.

Elle en conclut que la décision critiquée manquerait en fait et en droit et devrait par conséquent être réformée, le tribunal administratif étant invité à accorder l’autorisation sollicitée, sinon et à titre subsidiaire être annulée.

Il y a lieu de relever de prime abord que l’administration communale de la Ville d’Echternach n’a pas fourni de mémoire en réponse en cause dans le délai légal bien que la requête introductive lui ait été valablement signifiée en date du 11 février 2004.

Conformément aux dispositions de l’article 6 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, le tribunal statue néanmoins à l’égard de toutes les parties par un jugement ayant les effets d’une décision contradictoire, même si la partie défenderesse n’a pas comparu dans le délai prévu par la loi.

Aucune disposition légale ne prévoit de recours au fond en matière d’urbanisme, de sorte que le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation introduit par ailleurs à titre principal.

Le recours en annulation, introduit en ordre subsidiaire est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai de la loi.

La décision litigieuse, concernant le raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable du site de la demanderesse, est motivée par le mandataire de la Ville d’Echternach par référence au règlement sur les bâtisses de cette commune.

Si la demanderesse ne prend pas position par rapport à la qualification à donner tant à cette décision qu’à sa demande, le tribunal constate qu’aux termes de l’article 13/ 2 du règlement sur les bâtisses, intitulé « Obligation de l’autorisation de bâtir », une obligation de bâtir est requise pour toute construction généralement quelconque, et notamment « pour les travaux entraînant une modification de la distribution des bâtiments sur des points visés par les règlements sanitaires ( … ) », travaux comprenant tous travaux de raccordement à la canalisation et au réseau d’eau potable publics.

Il s’ensuit que la demande datée du 18 août 2003 adressée au bourgmestre de la Ville d’Echternach, effectuée en conformité avec la disposition réglementaire citée ci-

dessus, est à qualifier de demande en autorisation de bâtir, et par conséquent la décision critiquée de refus d’autorisation de bâtir.

Or, la compétence de principe pour délivrer une autorisation de bâtir, et a fortiori pour en refuser la délivrance en exécution du règlement des bâtisses, appartient, conformément à l’article 67 de la loi communale du 13 décembre 1988 telle que modifiée, au seul bourgmestre agissant dans le cadre de ses attributions de police.

Il s’agit en effet d’une compétence propre, attachée à la fonction de bourgmestre en sa qualité d’autorité investie du pouvoir de police locale. Par ailleurs, aux termes de l’article 67 in fine de la loi communale le bourgmestre peut seulement, sous sa responsabilité, déléguer cette attribution, en tout ou en partie, à un des échevins.

Force est cependant de constater, au-delà de la question de la qualification des pouvoirs conférés par la Ville d’Echternach à un avocat au vu de la restriction édictée par l’article 67 précité, que le courrier daté du 11 novembre 2003 émane d’un avocat mandaté non pas par le bourgmestre de la Ville d’Echternach, mais par un mandant énoncé d’une manière vague et générale comme étant la Ville d’Echternach.

En présence d’une compétence de police attribuée spécifiquement et exclusivement au bourgmestre, le refus d’une autorisation de bâtir délivrée de manière vague pour compte de la Ville d’Echternach, entité dépourvue en tant que telle d’une quelconque attribution en cette matière, est à annuler pour incompétence.

La demanderesse réclame encore l’allocation d’une indemnité de procédure d’un montant de 5.000 €.

Au vu des circonstances particulières du présent litige et notamment en raison de son issue, du fait que le demandeur a été obligé de se pourvoir en justice sous l’assistance d’un avocat, et de l’absence de toute contestation de la part de l’administration communale, faute de s’être fait représenter en cause, il serait inéquitable de laisser à charge de la demanderesse l’intégralité des frais et honoraires non compris dans les dépens.

Compte tenu des éléments d’appréciation en possession du tribunal, des devoirs et degré de difficulté de l’affaire ainsi que du montant réclamé, et au vu de l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, il y a lieu d’évaluer ex æquo et bono l’indemnité à allouer à la demanderesse à un montant de 500.- €.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond le dit justifié;

partant annule la décision déférée ;

condamne l’administration communale de la Ville d’Echternach à payer à la demanderesse une indemnité de procédure d’un montant de 500.- € ;

la condamne également aux frais.

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du 21 juin 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 5


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17567
Date de la décision : 21/06/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-06-21;17567 ?

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