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21/06/2004 | LUXEMBOURG | N°17224

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 21 juin 2004, 17224


Tribunal administratif N° 17224 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 décembre 2003 Audience publique du 21 juin 2004 Recours formé par Madame … et Madame …, X., contre une décision du bourgmestre de la commune d’X.

en présence de Monsieur …, X.

en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17224 du rôle et déposée le 2 décembre 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Gerry OSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assisté de Maître Pol URBA

NY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Madame …, retr...

Tribunal administratif N° 17224 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 2 décembre 2003 Audience publique du 21 juin 2004 Recours formé par Madame … et Madame …, X., contre une décision du bourgmestre de la commune d’X.

en présence de Monsieur …, X.

en matière de permis de construire

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17224 du rôle et déposée le 2 décembre 2003 au greffe du tribunal administratif par Maître Gerry OSCH, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, assisté de Maître Pol URBANY, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Diekirch, au nom de Madame …, retraitée, demeurant à L-…, et de Madame …, employée privée, demeurant à L-…, tendant à l’annulation d’une décision du 18 décembre 2002 du bourgmestre de la commune d’X. autorisant Monsieur … à transformer un garage en maison unifamiliale sur un fonds sis à X., inscrit au cadastre de la commune d’X., section B d’X., sous le numéro …, lieu-dit « X. » ;

Vu l’exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA, demeurant à Diekirch, du 11 décembre 2003, portant signification de la prédite requête à l’administration communale d’X., établie à L-8706 X., 4, Place Centrale, et à Monsieur …, fonctionnaire, demeurant à L-… ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif le 11 mars 2004 par Maître Edmond DAUPHIN, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de l’administration communale d’X. ;

Vu le mémoire en réplique déposé le 8 avril 2004 au greffe du tribunal administratif en nom des demanderesses, lequel mémoire a été signifié par exploit de l’huissier de justice Gilbert RUKAVINA en date du 27 avril 2004 à l’administration communale d’X. et à Monsieur … ;

Vu les pièces versées en cause et notamment la décision attaquée ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport et Maîtres Gerry OSCH et Edmond DAUPHIN en leurs plaidoiries respectives.

Le 23 octobre 2002, le bourgmestre de la commune d’X. informa Madame … du fait que Monsieur … avait introduit une demande en vue d’effectuer des travaux de transformation concernant un immeuble sis à X., …, inscrit au cadastre de la commune d’X., section B d’X., sous le numéro …, lieu-dit « X. », immeuble adjacent à l’immeuble habité par Madame …, et l’invita à venir consulter aux heures de bureau au secrétariat communal le dossier administratif se rapportant à ladite demande d’autorisation, tout en l’informant qu’elle disposerait d’un délai jusqu’au 14 novembre 2002 pour faire connaître par écrit ses éventuelles observations.

Suivant lettre recommandée du 8 novembre 2002, Madame …, à la suite d’une entrevue en date du 6 novembre 2002 avec Monsieur François WILTGEN, secrétaire communal, fit savoir au bourgmestre de la commune d’X. que les plans introduits par Monsieur … seraient contraires au règlement des bâtisses et qu’elle se réserverait « d’ores-et-déjà tous droits généralement quelconques ».

Le 18 décembre 2002, le bourgmestre de la commune d’X. délivra à Monsieur … l’autorisation de construire sollicitée.

Suivant courrier recommandé du 22 avril 2003, Madame … et Madame …, désignées dans la suite par « les consorts … », par l’intermédiaire de Maître Pol URBANY, firent savoir au bourgmestre de la commune d’X. qu’elles disposeraient uniquement de 3 plans de la construction autorisée, à savoir les plans reprenant la façade avant, la façade arrière et la façade latérale droite et que le quatrième plan concernant le côté latéral gauche « juxtaposant » leur propriété ferait défaut.

Suivant courrier recommandé de leur mandataire du 24 juin 2003, les consorts … introduisirent un recours gracieux à l’encontre de l’autorisation accordée, tout en demandant au bourgmestre de la commune d’X. de bien vouloir revenir sur sa décision et de prendre les mesures adéquates pour garantir et sauvegarder leurs droits et en sommant ledit bourgmestre de leur faire parvenir sans délai une copie de l’autorisation de bâtir accordée.

Les consorts …, par l’intermédiaire de Maître Gerry OSCH, réitérèrent le contenu de leur recours gracieux par courrier recommandé du 1er juillet 2003 et leur demande en communication du plan manquant, estimant que les vues pratiquées et la terrasse construite par Monsieur … violeraient leurs droits.

Suivant courrier du 2 septembre 2003, Maître Edmond DAUPHIN, pour compte de l’administration communale d’X., communiqua aux mandataires des consorts … en photocopie un extrait du plan de la façade latérale gauche (plan numéro 632-04), plan qui d’après le mandataire de l’administration communale d’X. avait été égaré, suite à une hospitalisation du secrétaire communal, et expliqua aux dits mandataires que le bourgmestre, au moment de la délivrance du permis de construire disposait du plan numéro 632-02, plan qui aurait cependant suffi pour prendre la décision d’autorisation de construire en connaissance de cause et leur fit savoir que « les autorités communales ne voient donc pas pour quels motifs elles retireraient le permis de construire à Monsieur … ».

Estimant que l’autorisation accordée violerait les articles 676 et 678 du Code civil et qu’elle aurait été prise sur base d’un dossier incomplet, les consorts … ont introduit, par requête déposée au greffe du tribunal administratif en date du 2 décembre 2003, un recours contentieux tendant à l’annulation de ladite autorisation de construire.

Le recours, non autrement contesté sous ce rapport, est recevable pour avoir été introduit dans les formes et délai prévu par la loi.

A l’appui de leur recours, les demanderesses soutiennent que la construction litigieuse, qui consiste en la transformation d’un hangar respectivement garage en maison d’habitation, priverait de soleil leur propriété, ce qui serait nocif à la santé de Madame …, et permettrait à Monsieur … d’avoir une vue directe sur la terrasse de celle-ci. Elles soulignement plus particulièrement qu’elles auraient été écartées du déroulement de la procédure d’autorisation pendant de long mois et qu’elles n’auraient reçu copie de la décision attaquée que dans le cadre de la réponse à leur recours gracieux introduit le 24 juin 2003, de même qu’une copie complète des plans de la construction projetée. Les demanderesses soutiennent plus particulièrement que « la construction envisagée serait contraire aux articles 676 et 678 du Code civil, étant donné que ladite construction permettrait à Monsieur … d’avoir une vue directe sur le fonds voisin, construction qui pour le surplus ne respecterait pas une distance minimale de 19 décimètres ».

Pour le surplus, la procédure ayant abouti à la délivrance de l’autorisation attaquée aurait été contraire à l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979 relatif à la procédure à suivre par les administrations relevant de l’Etat et des communes, en ce que l’administration communale d’X. n’aurait accédé que tardivement à leur demande en communication des plans, dont notamment le plan de façade latérale gauche donnant sur leur propriété, et en ce que ladite administration n’aurait que communiqué tardivement la décision prise.

Il s’ensuivrait que la décision attaquée devrait être annulée pour violation de la loi, détournement de pouvoir respectivement violation des formes destinées à protéger un intérêt privé.

Dans son mémoire en réponse, l’administration communale d’X. rétorque en premier lieu que la mise en conformité de la construction litigieuse aux articles 676 et 678 du Code civil aurait été imposée par le bourgmestre au maître de l’ouvrage et que la propriété des demanderesses ne souffrirait pas d’un manque d’ensoleillement dû à la construction autorisée, au vu de l’orientation de ladite construction. Pour le surplus, la décision attaquée aurait été prise de manière éclairée sur base d’une « copie des plans tenus par le bourgmestre dans ses bureaux » et en conformité avec les dispositions du Code civil et du règlement sur les bâtisses de la commune d’X., de sorte que le reproche tiré d’une erreur manifeste d’appréciation ne serait pas donné. Finalement, le reproche tiré d’une prétendue violation de l’article 5 du règlement grand-ducal du 8 juin 1979, précité, serait dénué de fondement, au motif que la commune avait procédé à l’affichage de l’autorisation attaquée à la maison communale, mode de communication auquel elle « a de tout temps recouru » .

Dans leur mémoire en réplique, les demanderesses réitèrent leur argumentation ayant trait à la non-conformité de la construction avec les articles 676 et 678 du code civil et insistent encore une fois sur le fait, en formulant une offre de preuve par témoins, que le bourgmestre, au moment de la délivrance ne disposait pas de la totalité des plans, et plus particulièrement du plan 632-04 ayant trait à la façade latérale gauche de la bâtisse donnant sur leur propriété, pour conclure que le bourgmestre n’aurait pas pu autoriser la construction litigieuse, à défaut de disposer des plans complets de la bâtisse projetée.

Le tribunal n’est pas tenu de suivre l’ordre dans lequel les moyens sont présentés par une partie demanderesse mais, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, sinon de la logique inhérente aux éléments de fait et de droit touchés par les moyens soulevés, peut les traiter suivant un ordre différent (cf. trib. adm. 21 novembre 2001, n° 12121 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Procédure contentieuse, n° 183).

Concernant la régularité formelle de l’autorisation délivrée à Monsieur …, et plus précisément le contenu du dossier dont disposait le bourgmestre de la commune d’X., l’article 84 sub. d) du règlement des bâtisses de la commune d’X., énumérant les pièces à déposer à l’appui d’une demande en autorisation de bâtir, dispose comme suit :

« Les plans de construction doivent contenir :

1) les plans de tous niveaux, y compris ceux de la cave et des combles, avec indication de la forme du toit ; ces plans fourniront les données sur les installations de ventilations, les foyers et les cheminées ;

2) les coupes longitudinales et transversales indispensables à l’étude du projet de construction, avec indication de la topographie existante du terrain, et des modifications qu’il est prévu d’y apporter ;

3) les vues en élévation de toutes les façades, sur lesquelles sont marquées les pentes des voies publiques, les niveaux des cours ».

Or, il est constant en cause pour être admis par la commune d’X., dans le courrier de son mandataire du 2 septembre 2003, que le bourgmestre au moment de la délivrance de l’autorisation litigieuse ne disposait pas du plan numéro 632-04, plan visant la façade latérale gauche de la construction litigieuse, et a partant statué sur base d’un dossier incomplet non conforme aux prescriptions du règlement des bâtisses, et plus particulièrement à son article 84.

L’exigence de devoir statuer sur base d’un dossier complet ne constitue pas une simple formalité, mais s’impose en raison du fait que le bourgmestre doit veiller à la conformité du projet par rapport aux dispositions d’urbanisme applicables et au respect des droits des tiers et plus particulièrement des voisins directs d’une construction à autoriser. Or, en l’espèce le bourgmestre de la commune d’X. ne pouvait pas prendre en considération la totalité des doléances des consorts …, à défaut de disposer au moment de la délivrance de l’autorisation attaquée du plan reprenant les vues en élévation de la façade du côté de la propriété des demanderesses.

Par conséquent, au regard à ce seul manquement, il y a lieu de déclarer le recours en annulation fondé et d’annuler la décision du bourgmestre de la commune d’X. du 18 décembre 2002.

Enfin, il convient de rejeter la demande en allocation d’une indemnité de procédure présentée par les consorts …, basée sur l’article 33 de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives, étant donné que les conditions légales ne sont pas remplies.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant à l’égard de toutes les parties ;

reçoit le recours en annulation en la forme ;

au fond, le dit justifié ;

partant annule la décision déférée du bourgmestre de la commune d’X. du 18 décembre 2002 et lui renvoie le dossier en prosécution de cause ;

rejette la demande en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne l’administration communale d’X. aux frais.

Ainsi jugé par :

M. Campill, vice-président, M. Schroeder, premier juge, M. Spielmann, juge, et lu à l’audience publique du 21 juin 2004 par le vice-président, en présence de M.

Legille, greffier.

Legille Campill 6


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17224
Date de la décision : 21/06/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-06-21;17224 ?

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