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14/06/2004 | LUXEMBOURG | N°17540

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 juin 2004, 17540


Tribunal administratif N° 17540 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2004 Audience publique du 14 juin 2004

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de l’Intérieur et une décision du conseil communal de Pétange en matière de candidature

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 17540 et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2004 par Maître Rosario GRASSO, avocat à la Cour, assisté de Maître Jackye ELOMBO, avo

cat, les deux inscrits au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, employé communal,...

Tribunal administratif N° 17540 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit le 30 janvier 2004 Audience publique du 14 juin 2004

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Recours formé par Monsieur …, … contre une décision du ministre de l’Intérieur et une décision du conseil communal de Pétange en matière de candidature

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JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro du rôle 17540 et déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2004 par Maître Rosario GRASSO, avocat à la Cour, assisté de Maître Jackye ELOMBO, avocat, les deux inscrits au tableau de l'Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de M. …, employé communal, demeurant à L-…, tendant à l’annulation, sinon à la réformation, en ordre principal, d’une décision du ministre de l’Intérieur du 26 novembre 2003 « prise sous forme d’un courrier tenant à une demande de la requérante, relative à l’annulation sinon à la réformation de la nomination du 17 octobre 2003 au poste de chargé de direction de l’Ecole communale de Pétange de Madame X. » et, en ordre subsidiaire, d’une décision du conseil communal de Pétange du 17 octobre 2003 portant nomination de Madame X. au susdit poste ;

Vu le mémoire en réponse déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement le 22 mars 2004 ;

Vu le mémoire en réplique déposé en date du 22 avril 2004 au greffe du tribunal administratif au nom du demandeur ;

Vu le mémoire en duplique déposé au greffe du tribunal administratif par le délégué du gouvernement le 21 mai 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les actes déférés ;

Ouï le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Sandra MAROTEL, en remplacement de Maître Rosario GRASSO, et Monsieur le délégué du gouvernement Marc MATHEKOWITSCH en leurs plaidoiries respectives.

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Par délibération du 17 octobre 2003, le conseil communal de Pétange, appelé à choisir parmi trois candidats, nomma Madame X. au poste vacant de chargé de direction de l’Ecole de musique de la commune de Pétange. Il se dégage d’un extrait du registre aux délibérations du conseil communal de Pétange en date du 21 octobre 2003 que cette décision fut le résultat d’un vote, pris en application des articles 19, 32 et suivants de la loi communale modifiée du 13 décembre 1988, et que la candidature de Madame X. reçut 7 voix favorables, les candidatures concurrentes de Monsieur … et Madame D. S., respectivement 6 et 0 voix favorables.

Par lettre datée du 6 novembre 2003 à l’adresse du collège des bourgmestre et échevins, du bourgmestre, ainsi que du conseil communal de Pétange, Monsieur … contesta la décision de nomination de Madame X., aux motifs que la procédure de nomination n’aurait pas été respectée et que Madame X. ne remplirait pas les conditions légales de formation requises pour pouvoir être nommée au poste à pourvoir.

Par courrier séparé également daté du 6 novembre 2003, Monsieur … demanda au ministre de l’Intérieur de « refuser d’approuver la décision illégale ».

La décision prévisée du 17 octobre 2003 prise par le conseil communal de Pétange fit l’objet d’une décision d’approbation de l’autorité tutélaire, le ministre de l’Intérieur, en date du 14 novembre 2003.

En réponse au courrier lui adressé par Monsieur … en date du 6 novembre 2003, le ministre de l’Intérieur prit position par courrier du 26 novembre 2003, dans les termes suivants :

« Concerne : Votre lettre de réclamation dirigée contre la décision du 17 octobre 2003 du conseil communal de Pétange portant nomination d’un chargé de direction de l’Ecole de Musique.

Monsieur, Faisant suite [à] votre communication prémentionnée, j’ai l’honneur de vous soumettre les considérations suivantes : En vertu de l’article 7 de la loi du 28 avril 1998 portant harmonisation de l’enseignement musical dans le secteur communal, les chargés de direction d’une Ecole de musique sont nommés par le conseil communal parmi le personnel enseignant ayant le statut du fonctionnaire communal, au cas où l’établissement visé n’occupe pas de personnel fonctionnaire, le chargé de direction est désigné parmi les chargés de cours. Le texte légal en question ne fait aucune distinction entre l’employé privé et l’employé communal quant au droit d’accès aux emplois de chargé de direction et n’accorde notamment aucun droit de priorité à l’employé communal à ce sujet. C’est pourquoi il appartient le cas échéant au seul conseil communal de choisir discrétionnairement parmi les chargés de cours la personne qui répond le mieux au profil requis en vue des fonctions briguées.

Dans la mesure où la personne nommée actuellement par le conseil communal au poste de chargé de direction, bénéficie d’un engagement comme chargé de cours auprès de l’Ecole de musique de Pétange et qu’elle suffit aux conditions d’études exigées par l’article 2, alinéa dernier du règlement grand-ducal du 25 septembre 1998 fixant les conditions de formation, d’admission aux emplois et de rémunération des chargés de cours des établissements d’enseignement musical du secteur communal, la décision du conseil communal afférente satisfait aux exigences légales régissant la matière, de sorte que j’ai approuvé la délibération visée en date du 14 novembre 2003.

Veuillez agréer (…) ».

Par requête déposée le 30 janvier 2004, M. … a introduit un recours tendant à l’annulation, sinon à la réformation, en ordre principal, de la « décision » du ministre de l’Intérieur du 26 novembre 2003 « prise sous forme d’un courrier tenant à une demande de la requérante, relative à l’annulation sinon à la réformation de la nomination du 17 octobre 2003 au poste de chargé de direction de l’Ecole communale de Pétange de Madame X. » et, en ordre subsidiaire, de la décision du conseil communal de Pétange du 17 octobre 2003 portant nomination de Madame X. au susdit poste.

QUANT AU VOLET PRINCIPAL DU RECOURS SOUS EXAMEN VISANT LA « DECISION » MINISTERIELLE DU 26 NOVEMBRE 2003 Quant à la compétence de la juridiction saisie Encore que le demandeur entende exercer principalement un recours en annulation et subsidiairement un recours en réformation contre la « décision » ministérielle du 26 novembre 2003, le tribunal a l’obligation d’examiner en premier lieu la possibilité d’exercer un recours en réformation contre l’acte critiqué, l’existence d’une telle possibilité rendant irrecevable l’exercice d’un recours en annulation.

Aucun texte de loi ne prévoyant un recours au fond en la présente matière, le tribunal est incompétent pour connaître du recours en réformation.

Quant à la recevabilité du recours en annulation Le délégué du gouvernement soulève l’irrecevabilité du recours en ce qu’il vise en ordre principal la « décision » prise par le ministre de l’Intérieur le 26 novembre 2003, au motif que la partie défenderesse considérerait à tort que cet acte constituerait une « décision confirmative » de la délibération du 17 octobre 2003 du conseil communal de Pétange, la décision d’approbation tutélaire ayant été prise par acte séparé en date du 14 novembre 2003, la communication du 26 novembre 2003 à l’adresse de Monsieur … ne constituant qu’une simple information en réponse à sa lettre du 6 novembre 2003.

Le demandeur fait soutenir que l’acte du 26 novembre 2003 constituerait l’approbation de la nomination de Madame X. par l’autorité de tutelle et qu’en tant que décision d’approbation et de rejet d’un « recours gracieux », il serait susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux.

L’acte émanant d’une autorité administrative, pour être sujet à un recours contentieux, doit constituer, dans l’intention de l’autorité qui l’émet, une véritable décision, à qualifier d’acte de nature à faire grief, c’est-à-dire un acte susceptible de produire par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle ou patrimoniale de celui qui réclame. Si le caractère décisoire de l’acte attaqué est une condition nécessaire à la recevabilité du recours contentieux, il n’est pas pour autant une condition suffisante. Pour être susceptible de faire l’objet d’un recours, la décision critiquée doit encore être de nature à faire grief (trib. adm. 18 mars 1998, n° 10286 du rôle, Pas. adm. 2003, V° Actes administratifs, I. Décisions susceptibles d’un recours, n° 3, et autres références y citées).

En l’espèce, force est de constater que la lettre ministérielle du 26 novembre 2003 ne constitue pas, d’après le libellé de la lettre en question, dans l’intention de l’autorité qui l’a signée, une véritable décision faisant grief aux intérêts du demandeur. En effet, ladite lettre, répondant à un courrier du demandeur, ne contient pas d’élément décisionnel propre, mais ne fait que l’informer de l’existence d’une décision d’approbation tutélaire prise par acte séparé en date du 14 novembre 2003. Ce constat ne saurait être affecté par le fait que l’autorité ministérielle a en outre expliqué le comment et le pourquoi de la prise de l’approbation tutélaire, cet état des choses ne conférant pas pour autant un caractère décisoire au courrier du 26 novembre 2003.

Ainsi, la lettre en question ne constitue pas un acte qui produit par lui-même des effets juridiques affectant la situation personnelle de Monsieur … et elle n’est pas susceptible de faire l’objet d’un recours contentieux en annulation devant le tribunal administratif.

Il s’ensuit que le recours en annulation dirigé contre la « décision » prise par le ministre de l’Intérieur le 26 novembre 2003 est à déclarer irrecevable.

QUANT AU VOLET SUBSIDIAIRE DU RECOURS AYANT TRAIT A LA DECISION DU CONSEIL COMMUNAL DE PETANGE DU 17 OCTOBRE 2003 A l’audience du 7 juin 2004, fixée pour les plaidoiries, le tribunal a rendu les mandataires des parties attentifs à l’article 4 (2) de la loi modifiée du 21 juin 1999 portant règlement de procédure devant les juridictions administratives et les a invité à faire valoir leurs observations relativement à son incidence éventuelle quant à la recevabilité du recours en ce qu’il vise la décision du conseil communal de Pétange du 17 octobre 2003, pour ne pas avoir été signifié à l’administration communale de Pétange.

Sur ce, le délégué du gouvernement a estimé que le recours devrait être déclaré caduc pour ne pas avoir été signifié à la partie défenderesse, le mandataire du demandeur s’étant en substance rapporté à la sagesse du tribunal quant à ce moyen.

Aux termes de l’article 4 de ladite loi du 21 juin 1999 « (1) sous réserve du paragraphe 2, le requérant fait signifier la requête à la partie défenderesse et aux tiers intéressés, à personne ou à domicile, par exploit d’huissier, dont l’original ou la copie certifiée conforme est déposé sans délai au greffe du tribunal. L’affaire n’est portée au rôle qu’après ce dépôt.

(2) Faute par le requérant d’avoir procédé à la signification de son recours à la partie défenderesse dans le mois du dépôt du recours, celui-ci est caduc. (…) ».

La caducité d’un recours contentieux est acquise à partir du moment où, dans le mois du dépôt de la requête introductive d’instance au greffe du tribunal administratif, celle-ci n’est pas signifiée à l’auteur de la décision ainsi déférée au tribunal, peu importe sa signification à un tiers intéressé (trib. adm. 13 juillet 2000, n° 11652 du rôle, Pas. adm 2003, V° Procédure contentieuse, n° 140 et autres références y citées).

En l’espèce, étant donné que la requête introductive d’instance, déposée au greffe du tribunal administratif le 30 janvier 2004, n’a à aucun moment fait l’objet d’une signification à l’administration communale de Pétange, cette dernière devant être considérée non pas comme partie tierce-intéressée, mais, en tant qu’auteur de la décision querellée, comme partie défenderesse, le recours est caduc pour ce qui concerne le volet relatif à la décision du conseil communal de Pétange du 17 octobre 2003.

Par ces motifs, le tribunal administratif, deuxième chambre, statuant contradictoirement à l’égard de toutes les parties ;

se déclare incompétent pour connaître du recours en réformation dirigé contre la « décision » prise par le ministre de l’Intérieur le 26 novembre 2003 ;

déclare le recours en annulation dirigé contre la susdite « décision » ministérielle irrecevable ;

pour le surplus, déclare le recours caduc ;

condamne le demandeur aux frais.

Ainsi jugé par:

M. Campill, vice-président, M. Spielmann, juge, Mme Gillardin, juge, et lu à l’audience publique du 14 juin 2004, par le vice-président, en présence de M. Legille, greffier.

Legille Campill 5


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : 17540
Date de la décision : 14/06/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-06-14;17540 ?

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