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14/06/2004 | LUXEMBOURG | N°17397

Luxembourg | Luxembourg, Tribunal administratif, 14 juin 2004, 17397


Tribunal administratif N° 17397 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit 2 janvier 2004 Audience publique du 14 juin 2004 Recours formé par les époux … et … et consorts, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17397 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 janvier 2004 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Monténégro/Etat de Serbie et Monténégro),

de son épouse, Madame …, née le… , et de leurs enfants mineurs …, … et … …, tous de national...

Tribunal administratif N° 17397 du rôle du Grand-Duché de Luxembourg Inscrit 2 janvier 2004 Audience publique du 14 juin 2004 Recours formé par les époux … et … et consorts, … contre deux décisions du ministre de la Justice en matière de statut de réfugié

JUGEMENT

Vu la requête inscrite sous le numéro 17397 du rôle et déposée au greffe du tribunal administratif le 2 janvier 2004 par Maître Louis TINTI, avocat à la Cour, inscrit au tableau de l’Ordre des avocats à Luxembourg, au nom de Monsieur …, né le … (Monténégro/Etat de Serbie et Monténégro), de son épouse, Madame …, née le… , et de leurs enfants mineurs …, … et … …, tous de nationalité serbo-monténégrine, demeurant actuellement ensemble à L-…, tendant à la réformation d’une décision du ministre de la Justice du 23 septembre 2003 portant rejet de leur demande en reconnaissance du statut de réfugié comme n’étant pas fondée et de celle confirmative du même ministre du 2 décembre 2003, intervenue sur recours gracieux ;

Vu le mémoire en réponse du délégué du Gouvernement déposé au greffe du tribunal administratif le 17 mars 2004 ;

Vu les pièces versées en cause et notamment les décisions entreprises ;

Entendu le juge-rapporteur en son rapport, ainsi que Maître Louis TINTI et Monsieur le délégué du Gouvernement Gilles ROTH en leurs plaidoiries respectives à l’audience publique du 10 mai 2004.

Le 29 avril 1999, Monsieur … et son épouse Madame …, accompagnés de leurs deux enfants mineurs … et … … introduisirent une demande en reconnaissance du statut de réfugié politique au sens de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, approuvée par une loi du 20 mai 1953, et du Protocole relatif au statut des réfugiés, fait à New-York, le 31 janvier 1967, approuvé par règlement grand-ducal du 6 janvier 1971, l’ensemble de ces dispositions étant ci-après dénommé « la Convention de Genève ».

Monsieur … et Madame … furent entendus chacun séparément par un agent du ministère de la Justice sur leur situation et sur leurs motifs à la base de leur demande en reconnaissance du statut de réfugié en date du 2 août 1999.

Par décision du 19 juillet 2003, notifiée le 25 septembre 2000, le ministre de la Justice informa les époux …-… de ce que leur demande d’asile avait été refusée comme non fondée au motif qu’il ne se dégagerait pas des faits et renseignements par eux fournis qu’ils risqueraient d’être persécutés personnellement pour une des raisons énumérées par l’article 1er A, 2 de la Convention de Genève.

Les époux …-… n’introduisirent à l’époque aucun recours à l’encontre de cette décision de refus mais ont projeté de retourner volontairement au Monténégro.

Il s’est avéré cependant que les époux …-…, accompagnés de leurs enfants, ne sont jamais rentrés au Monténégro, mais qu’ils sont restés tout le temps au Luxembourg.

Le 2 novembre 2001, par l’intermédiaire de leur avocat, les époux …-…, accompagnés de leurs trois enfants mineurs, introduisirent une deuxième demande en obtention du statut de réfugié.

Monsieur … fut entendu par un agent du ministère de la Justice sur sa situation et sur les motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié en date du 12 mars 2004.

Madame … fut entendue à son tour sur sa situation et sur ses motifs à la base de sa demande en reconnaissance du statut de réfugié en date du 14 mars 2004.

Par décision du 23 septembre 2003, envoyée par lettre recommandée le 30 septembre 2003, le ministre de la Justice informa les époux …-… de ce que leur demande d’asile avait été refusée comme non fondée au motif qu’ils n’allégueraient aucune crainte raisonnable de persécution pour une des raisons énumérées par l’article 1er A, 2 de la Convention de Genève susceptible de leur rendre leur vie intolérable dans leur pays.

Le 1er novembre 2003, les époux …-… firent introduirent un recours gracieux à l’encontre de cette décision de refus.

Le ministre de la Justice confirma sa décision antérieure par une décision prise en date du 2 décembre 2003.

Par requête déposée au greffe du tribunal administratif le 2 janvier 2004, les époux …-… ont fait déposer un recours en réformation à l’encontre des décisions ministérielles de refus des 23 septembre et 2 décembre 2003.

L’article 12, paragraphe 3 de la loi modifiée du 3 avril 1996 portant création 1.

d’une procédure relative à l’examen d’une demande d’asile, 2. d’un régime de protection temporaire prévoit un recours en réformation en matière de demandes d’asile déclarées non fondées. Le recours en réformation ayant par ailleurs été introduit dans les formes et délai de la loi, il est recevable.

Les demandeurs font valoir que le dépôt de la seconde demande d’asile s’expliquerait par le fait que Monsieur … aurait reçu de la part de son père un jugement aux termes duquel il aurait été condamné à une peine de prison au motif d’un prétendu trafic d’armes. Il estime que cette condamnation, pour des faits dont il serait complètement étranger, serait due à son activisme au sein du parti politique SDA et que dès lors il serait la victime d’une forme de persécution à caractère politique. Il ajoute que ce jugement serait intervenu suite à un premier jugement rendu en date du 30 avril 1999 pour cause de désertion, dont la condamnation aurait été annulée suite au vote de la loi d’amnistie, de sorte que ce deuxième jugement aurait été pris dans l’unique dessein de remplacer la première condamnation par une seconde laquelle échapperait au champ d’application de la loi d’amnistie.

Le délégué du Gouvernement rétorque que le ministre aurait fait une saine appréciation de la situation des demandeurs et que le recours laisserait d’être fondé.

Aux termes de l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève, le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion et de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».

La reconnaissance du statut de réfugié n’est pas uniquement conditionnée par la situation générale du pays d’origine mais aussi et surtout par la situation particulière du demandeur d’asile qui doit établir, concrètement, que sa situation subjective spécifique a été telle qu’elle laissait supposer un danger sérieux pour sa personne.

En l’espèce, l’examen des déclarations faites par les demandeurs lors de leurs auditions respectives telles que celles-ci ont été relatées dans les comptes rendus figurant au dossier, ensemble les moyens et arguments apportés au cours de la procédure contentieuse et gracieuse et les pièces produites en cause, amène le tribunal à conclure que les demandeurs restent en défaut de faire état et d’établir à suffisance de droit des raisons personnelles de nature à justifier dans leur chef une crainte actuelle justifiée de persécution du fait de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de leur appartenance à un certain groupe social ou de leurs opinions politiques ainsi que le prévoit l’article 1er, section A, 2. de la Convention de Genève.

Le seul élément dont les demandeurs font état est la prétendue condamnation de Monsieur … pour détention illicite d’armes à une peine de prison d’une année et 4 mois.

Même à supposer l’authenticité de ce jugement, les demandeurs restent en défaut de prouver que cette condamnation pour une infraction de droit commun serait liée à une soi-disant activité politique de Monsieur … au sein du parti SDA, de sorte que l’affirmation qu’ils seraient victimes d’une persécution à caractère politique reste à l’état de pure allégation. A cela s’ajoute que Monsieur … a déclaré lors de son audition dans le cadre de la première demande d’asile qu’il était simple membre du parti politique SDA, qu’il n’avait pas de fonction au sein du parti et qu’il n’avait jamais participé à des démonstrations politiques.

En ce qui concerne plus particulièrement Madame … elle ne fait état d’aucun élément de persécution qui lui serait propre.

Il résulte des développements qui précèdent que les demandeurs restent en défaut d’établir une persécution ou un risque de persécution pour l’un des motifs prévus par la Convention de Genève, de manière que le recours sous analyse doit être rejeté comme n’étant pas fondé.

Par ces motifs, le tribunal administratif, première chambre, statuant contradictoirement ;

reçoit le recours en réformation à la forme ;

au fond le déclare non justifié et en déboute, condamne les demandeurs aux frais.

Ainsi jugé par et prononcé à l’audience publique du 14 juin 2004 par :

Mme Lenert, premier juge, Mme Thomé, juge, M. Sünnen, juge, en présence de M. Schmit, greffier en chef.

s. Schmit s. Lenert 4


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 17397
Date de la décision : 14/06/2004

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;tribunal.administratif;arret;2004-06-14;17397 ?

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