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14/07/2022 | LUXEMBOURG | N°114/22

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 14 juillet 2022, 114/22


N° 114 / 2022 pénal du 14.07.2022 Not. 35303/16/CD Numéro CAS-2021-00130 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, quatorze juillet deux mille vingt-deux, sur le pourvoi de :

T), demandeur en cassation, comparant par Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

1) L), défendeur en cassation, comparant par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, 2) S), 3) B), 4) X), défendeurs en cassatio

n, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 19 octobre 2021 sous le num...

N° 114 / 2022 pénal du 14.07.2022 Not. 35303/16/CD Numéro CAS-2021-00130 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, quatorze juillet deux mille vingt-deux, sur le pourvoi de :

T), demandeur en cassation, comparant par Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

1) L), défendeur en cassation, comparant par Maître Jean-Marie BAULER, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, 2) S), 3) B), 4) X), défendeurs en cassation, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 19 octobre 2021 sous le numéro 929/21 Ch.c.C.

par la chambre du conseil de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, au nom de T), suivant déclaration du 18 novembre 2021 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 16 décembre 2021 par T) au Ministère public, à L), à S), à B) et à X), déposé le 20 décembre 2021 au greffe de la Cour ;

Ecartant le mémoire, intitulé « mémoire à destination de la Cour de cassation », déposé le 14 janvier 2022 par L) au greffe de la Cour, en ce qu’il n’en ressort pas qu’il a été communiqué au demandeur en cassation.

Sur les conclusions du premier avocat général Serge WAGNER.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de Luxembourg avait renvoyé T) devant une chambre correctionnelle du tribunal du chef de calomnie, diffamation, sinon d’injures et du chef de coups et blessures involontaires à l’encontre d’L).

La chambre du conseil de la Cour d’appel a confirmé cette ordonnance.

Sur la recevabilité du pourvoi L’article 416 du Code de procédure pénale dispose :

« (1) Le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d’instruction ou les jugements de dernier ressort de cette qualité, n’est ouvert qu’après l’arrêt ou le jugement définitif ;(…).

(2) Le recours en cassation est toutefois ouvert contre les arrêts et jugements rendus sur la compétence et contre les dispositions par lesquelles il est statué définitivement sur le principe de l’action civile. ».

L’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel n’a pas mis fin à l’action publique poursuivie à charge du prévenu et n’a statué ni sur une question de compétence, ni définitivement sur le principe de l’action civile.

Il s’ensuit que le recours est irrecevable sur base de l’article 416 du Code de procédure pénale.

Le demandeur en cassation conclut néanmoins à la recevabilité du pourvoi en tant que pourvoi en cassation-nullité en ce que la décision n’a pas prononcé l’irrecevabilité des poursuites à son encontre pour violation de la présomption d’innocence et du procès équitable lui garantis par l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il fait encore valoirque la chambre du conseil de la Cour d’appel aurait insuffisamment motivé sa décision en relation avec le moyen d’irrecevabilité des poursuites pénales.

L’excès de pouvoir est la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité.

Les reproches formulés par le demandeur en cassation ne rentrent pas dans la définition de l’excès de pouvoir.

Il s’ensuit que le pourvoi en cassation-nullité est également irrecevable.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

déclare le pourvoi irrecevable ;

condamne le demandeur en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux du Ministère public étant liquidés à 5,25 euros.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, quatorze juillet deux mille vingt-deux, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Roger LINDEN, président de la Cour, Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, Jean ENGELS, premier conseiller à la Cour d’appel, Anne-Françoise GREMLING, conseiller à la Cour d’appel, Joëlle DIEDERICH, conseiller à la Cour d’appel, qui ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Daniel SCHROEDER.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Roger LINDEN en présence du premier avocat général Serge WAGNER et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation T) en présence du Ministère public et de L) S) B) X) (n° CAS-2021-00130 du registre)

______________________

Par déclaration faite le 18 novembre 2021 au greffe de la Cour Supérieure de Justice du Grand-Duché de Luxembourg, Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, demeurant à Diekirch, forma au nom et pour le compte de T), un recours en cassation contre un arrêt N° 929/21 Ch.c.C. rendu le 19 octobre 2021 par la Chambre du conseil de la Cour d’appel.

Cette déclaration de recours a été suivie en date du 20 décembre 2021 du dépôt d’un mémoire en cassation, qui a été signifié en date du 16 décembre 2021 au ministère public, à la partie civile L), S), B), et à X).

Le pourvoi a été déclaré dans les forme et délais de la loi.

De même le mémoire en cassation prévu à l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation a été déposé dans les formes et délais y prévus.1 Le pourvoi est dès lors recevable quant à la forme et aux délais.

La partie civile L) a déposé un mémoire en date du 14 janvier 2022.

Quant aux faits 1 Le dernier jour pour déposer le mémoire en cassation était le samedi 18 décembre 2021 de sorte qu’il était reporté au lundi 20 décembre 2021 Par ordonnance n°422/21 du 17 mars 2021, la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg a ordonné le renvoi de T), ensemble avec les co-

inculpés S) et X), devant une chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg du chef d’un certain nombre d’infractions, B) bénéficiant d’un non-lieu.

Sur appel de T), S), X) et de la partie civile L), la chambre du conseil de la Cour d’appel, par arrêt n° 929/21 du 19 octobre 2021, a déclaré l’appel de L) partiellement fondé et les autres appels non-fondés, et par réformation a dit qu’il y a lieu à renvoi de B) devant une chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg du chef d’infractions aux articles 418,420, 447 et 448 du Code pénal, confirmant le renvoi de T), S) et X).

Le pourvoi est dirigé contre cet arrêt.

Quant à la recevabilité du pourvoi I) Irrecevabilité sur base de l’article 416 du Code de procédure pénale Aux termes de l'article 416 du Code de procédure pénale, le recours en cassation contre les arrêts préparatoires et d'instruction ou les jugements en dernier ressort de cette qualité n'est ouvert qu'après l'arrêt ou le jugement définitif. Le recours en cassation est toutefois ouvert contre les arrêts et jugements rendus sur la compétence et contre les dispositions par lesquelles il est statué définitivement sur le principe de l'action civile.

L’interdiction de se pourvoir en cassation immédiatement et avant la décision définitive contre les décisions préparatoires ou d’instruction a précisément pour but de prévenir des recours dilatoires2.

Cette disposition légale s'applique à toutes les décisions qui n'épuisent pas la juridiction du juge pénal soit sur l'action publique, soit sur l'action civile. Pour être considérée comme décision définitive au sens de l'article 416, il ne suffit dès lors pas, que la décision du juge épuise sa juridiction sur une question litigieuse précise.

Sont considérées comme arrêts préparatoires ou d’instruction toutes les décisions qui mettent le litige en état de recevoir une solution, mais sans terminer l’instance. Une décision termine l’instance soit lorsqu’elle se prononce au fond - acquittement ou condamnation – soit lorsqu’elle admet une exception d’incompétence ou une autre fin de non-recevoir qui dénie ou enlève au juge la connaissance de la cause.

En l’occurrence, le demandeur en cassation a introduit un pourvoi contre l’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel qui a déclaré son appel dirigé contre l’ordonnance de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement de Luxembourg ayant ordonné son renvoi devant une chambre correctionnelle recevable mais non fondé.

2 Cour de cassation, arrêt numéro 24/2015 du 20 avril 2015, numéro 3459 du registreEtant donné que l’arrêt attaqué n’a statué ni définitivement sur l’action publique ou sur le principe d’une action civile et n’a d’ailleurs pas statué sur une question de compétence3, le pourvoi est dès lors à déclarer irrecevable au titre de l’article 416 du Code de procédure pénale.

II) Pourvoi en cassation-nullité pour excès de pouvoir Le demandeur en cassation conclut néanmoins à la recevabilité de son recours en tant que pourvoi en cassation-nullité pour cause d’excès de pouvoir.

Même si la loi modifiée du 18 février 1985 sur les pourvois et la procédure en cassation n’ouvre pas expressément la voie du pourvoi en cassation-nullité pour excès de pouvoir aux parties, Votre Cour a eu l’occasion de se prononcer sur leur recevabilité. Le parquet général renvoie à cet effet aux arrêts numéros 55/2012 pénal (numéro 3098 du registre) du 6 décembre 2012, 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, 29/2015 pénal (numéro 3503 du registre) du 11 juin 2015, 9/2016 pénal (numéro 3588 du registre) du 18 février 2016, 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016, ainsi que 11/2018 pénal (numéro 4030 du registre) du 1er mars 2018.

Vous avez retenu « que l’excès de pouvoir est la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité.

» Vous en avez déduit que ne rentrent pas dans la définition de l’excès de pouvoir les reproches suivants :

- d’une violation de la loi4 et plus particulièrement de règles de procédure, 5 - d’une violation de l’article 89 de la Constitution,6 - d’une violation de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,7 -de la violation de l’article 133 de Code de procédure pénal et d’un excès de pouvoir négatif,8 3 Dans ce sens : Cour de cassation, arrêt no 107 / 2011 pénal, du 20 octobre 2011, numéro 2946 du registre :

pourvoi dirigé contre la partie du dispositif de l’arrêt de la chambre du conseil de la Cour d’appel ayant confirmé l’ordonnance de la chambre du conseil du tribunal d’arrondissement qui a renvoyé les demandeurs en cassation devant le tribunal correctionnel, déclaré irrecevable au titre de l’article 416 du Code de procédure pénale 4 Cour de cassation, arrêt no 55/2012 pénal (numéro 3098 du registre) du 6 décembre 2012 ; Cour de cassation, arrêt no 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015 5 Cour de cassation arrêt no 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016 6 Cour de cassation, arrêt no 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, Cour de cassation, arrêt no 9/2016 pénal (numéro 3588 du registre) du 18 février 2016 ; Cour de cassation, arrêt no 152/2020 pénal (numéro CAS-2019-00173 du registre) du 19 novembre 2020 7 Cour de cassation, arrêts nos 34/2013 pénal (numéro 3210 du registre) du 6 juin 2013, 24/2015 pénal (numéro 3459 du registre) du 30 avril 2015, 29/2015 pénal (numéro 3503 du registre) du 11 juin 2015, 32/2016 pénal (numéro 3688 du registre) du 14 juillet 2016 8 Cour de cassation, arrêt no 152/2020 pénal (numéro CAS-2019-00173 du registre) du 19 novembre 2020-de la violation des articles 126, 126-1 et 126-2 du Code de procédure pénale,9 -de la violation de l’article 2 de la loi du 8 juin 2004 sur la liberté d’expression dans les médias en combinaison avec l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,10 -d’une abstention de procéder à l’examen moral de l’infraction d’abus de bien sociaux dans le cadre de l’appréciation des charges suffisantes pour ordonner le renvoi, 11 -du défaut de réponse à conclusions quant à l’appréciation du même élément moral, 12 -du refus d’ordonner des devoirs supplémentaires. 13 Dans le présent pourvoi, le demandeur en cassation formule deux moyens de cassation :

-le premier tiré de la violation de l’article 6§2 de la Convention européenne des Droits de l’homme (présomption d’innocence), -le deuxième tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution (insuffisance de motifs)14.

Il résulte de la jurisprudence indiquée ci-dessus qu’aucun des deux moyens de cassation formulés ne rentre dans la définition de l’excès de pouvoir.

En effet, aucun des deux moyens ne vise « la transgression par le juge, compétent pour connaître du litige, d’une règle d’ordre public par laquelle la loi a circonscrit son autorité », ce qui exclut le cas de figure de l’excès de pouvoir à la base du pourvoi en cassation-

nullité.

Le pourvoi est dès lors irrecevable en tant que pourvoi en cassation-nullité.

Conclusion Le pourvoi est irrecevable.

Pour le Procureur général d’Etat, le premier avocat général, Serge WAGNER 9 Cour de cassation, arrêt no 153/2020 pénal (numéro CAS-2019-00167 du registre) du 19 novembre 2020 10 Cour de cassation, arrêt no 153/2020 pénal (numéro CAS-2019-00167 du registre) du 19 novembre 2020 11 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 12 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 13 Cour de cassation arrêt no 86/2019 pénal (numéro CAS-2018-00079 du registre) du 23 mai 2019 14 L’article 89 de la Constitution vise le défaut total de motifs et non l’insuffisance de motifs 8


Synthèse
Numéro d'arrêt : 114/22
Date de la décision : 14/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2022-07-14;114.22 ?

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