La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/12/2020 | LUXEMBOURG | N°167/20

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 10 décembre 2020, 167/20


N° 167 / 2020 pénal du 10.12.2020 Not. 4849/17/CD + 5052/17/CD Numéro CAS-2019-00171 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, dix décembre deux mille vingt, sur le pourvoi de :

W), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

R), ayant élu domicile en l’étude de Maître Céline MARCHETTO, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, demanderesse au civil, déf

enderesse en cassation, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 6 novembre...

N° 167 / 2020 pénal du 10.12.2020 Not. 4849/17/CD + 5052/17/CD Numéro CAS-2019-00171 du registre La Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg a rendu en son audience publique du jeudi, dix décembre deux mille vingt, sur le pourvoi de :

W), prévenu et défendeur au civil, demandeur en cassation, comparant par Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, en présence du Ministère public et de :

R), ayant élu domicile en l’étude de Maître Céline MARCHETTO, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, demanderesse au civil, défenderesse en cassation, l’arrêt qui suit :

Vu l’arrêt attaqué, rendu le 6 novembre 2019 sous le numéro 38/19 par la chambre criminelle de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg ;

Vu le pourvoi en cassation formé par Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, au nom de W), suivant déclaration du 3 décembre 2019 au greffe de la Cour supérieure de justice ;Vu le mémoire en cassation signifié le 30 décembre 2019 par W) à R) en son domicile élu en l’étude de Maître Céline MARCHETTO, avocat à la Cour, demeurant à Luxembourg, déposé le 31 décembre 2019 au greffe de la Cour ;

Sur le rapport du président Jean-Claude WIWINIUS et les conclusions de l’avocat général Elisabeth EWERT ;

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, siégeant en matière criminelle, avait condamné W) du chef notamment de viol commis sur une personne vulnérable et de séquestration à une peine de réclusion. La Cour d’appel a, par réformation partielle, réduit la peine de réclusion.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l'article 375 du Code pénal, par dénaturation des faits, sinon absence de motivation, sinon motivation insuffisante ce que la décision attaquée a décidé que les éléments constitutifs de l'infraction de viol étaient réunis sans pourtant qualifier le consentement de la victime, aux motifs que .

alors que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l’infraction réprimée, qu'aux termes de l'article 375 du Code pénal, , que l'absence de consentement est repris explicitement dans la définition codifiée du viol, qu'il en est un élément fondamental, que pour condamner Monsieur W) de la prévention du viol, la chambre criminelle de la Cour d'Appel aurait dû caractériser l'absence de consentement de la victime, ce qu'elle n'a pas fait, qu'en ne motivant pas sa décision sur cette absence de consentement dans le chef de la victime, la Cour d'appel a violé l'article 375 du Code pénal. ».

Réponse de la Cour Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, des éléments de fait qui les ont amenés à retenir l’absence de consentement de la victime, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur le second moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation sinon de la fausse application des articles 6-1, 6-2 et 6-3 de la Convention européenne des droits de l'homme et du principe du droit à un procès équitable et du respect des droits de la défense en ce que la décision attaquée a décidé qu'il n'y pas lieu de demander la communication du dossier répressif dirigé contre la prétendue victime R) par le Parquet de Trèves, aux motifs que , pour prononcer finalement une peine de réclusion de douze ans dont seulement l'exécution de trois ans de cette peine de réclusion est assortie d'un sursis probatoire, alors que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments du dossier répressif, et partant tous les éléments constitutifs de l'infraction réprimée, que la recherche de la preuve est gouvernée par deux principes : d'abord celui de la présomption d'innocence qui dispense l'accusé de toute initiative probatoire, la partie poursuivante devant rapporter les éléments de preuve ; ensuite celui que, cependant, la défense peut bénéficier de certaines prérogatives qui lui permettent, pour défendre la présomption d'innocence qui la couvre, de contribuer à la recherche de cette preuve, que la présomption d'innocence est traitée à l'article 6-2 de la Convention européenne des droits de l'homme tandis que les prérogatives de la défense sont énumérées à l'article 6-3 de la même Convention, que la présomption d'innocence exige, entre autres, qu'en remplissant leurs fonctions, les membres du tribunal ne partent pas de l'idée préconçue que le prévenu a commis l'acte incriminé, qu'en outre, il incombe à celle-là […] d'offrir des preuves suffisantes pour fonder une déclaration de culpabilité (CEDH, Barbera, Messegué et Jabardo c.

Espagne, 6 décembre 1988, série A, n° 146, § 77), qu'en déboutant la défense de sa demande en communication du dossier répressif dressé par les autorités judiciaires allemandes contenant les mêmes accusations (de viol !!!) portées par la prétendue victime à l'égard du père de l'actuel demandeur en cassation, il y a violation des droits de la défense consistant à rapporter la preuve de son innocence, qu'il résulte des informations à disposition de Monsieur W) que cette dénonciation calomnieuse dans le chef de Madame R) a connu une suite judiciaire en Allemagne, qu'au vu des considérations qui précèdent, la Cour d'Appel a violé sinon fait une fausse application des articles 6-1, 6-2 et 6-3 de la Convention européenne des droits de l'homme et du principe du droit à un procès équitable et du respect des droits de la défense, qu'il y a dès lieu de casser et d'annuler l'arrêt attaqué et de le déclarer de nul effet, que le présent mémoire en cassation est fondé entre autres sur le réquisitoire dressé par le Parquet de Trèves (Staatsanwaltschaft Trier) à l'encontre de Madame R) et produit tant en première instance qu'en instance d'appel. ».

Réponse de la Cour Sous le couvert du grief tiré de la violation des dispositions visées au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, de l’opportunité de procéder à une mesure d’instruction supplémentaire, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation aux frais de l’instance en cassation, ceux exposés par le Ministère public liquidés à 11,25 euros.

Ainsi jugé par la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg en son audience publique du jeudi, dix décembre deux mille vingt, à la Cité Judiciaire, Bâtiment CR, Plateau du St. Esprit, composée de :

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Eliane EICHER, conseiller à la Cour de cassation, Roger LINDEN, conseiller à la Cour de cassation, Lotty PRUSSEN, conseiller à la Cour de cassation, Anne-Françoise GREMLING, conseiller à la Cour d’appel, qui ont signé le présent arrêt avec le greffier à la Cour Viviane PROBST.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Jean-Claude WIWINIUS, en présence de l’avocat général Monique SCHMITZ et du greffier Viviane PROBST.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation W) / Ministère Public (affaire n° CAS-2019-00171 du registre)

______________________

Par déclaration faite le 3 décembre 2019 au greffe de la Cour Supérieure de Justice, Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, demeurant à Diekirch, forma au nom et pour le compte de W) un recours en cassation au pénal et au civil contre l’arrêt n° 38/19 rendu le 6 novembre 2019 par la Cour d’appel, chambre criminelle.

Cette déclaration de recours a été suivie en date du 31 décembre 2019 du dépôt au greffe de la Cour supérieure de justice d’un mémoire en cassation, signé par Maître Daniel BAULISCH, avocat à la Cour, demeurant à Diekirch, au nom et pour le compte de W) et signifié préalablement le 30 décembre 2019 à la partie civile, en son domicile élu.

La soussignée constate que le mémoire en cassation n’a pas été signifié à la partie civile R) ou à son domicile réel, mais en l’étude de Maître Céline MARCHETTO, avocat ayant occupé pour R) en instance d’appel, étude qualifiée dans l’acte de signification, de « domicile élu ».

Aux termes de l’article 43 de la loi modifiée du 18 février 1885, le mémoire du défendeur au civil, en l’espèce W), devra, sous peine de déchéance, être signifié à la partie civile avant d’être déposé.

L’instance en cassation constitue une instance nouvelle, de sorte que la signification du mémoire doit être faite à la personne ou au domicile réel de la partie défenderesse, à moins qu’un acte d’élection de domicile n’autorise clairement la signification au domicile élu1.

Il ne résulte pourtant pas des pièces de la procédure auxquelles le Parquet général peut avoir égard, qu’un acte d’élection de domicile, établi par R), autorisant la signification au domicile élu pour l’instance en cassation ait été déposé le jour de l’introduction du pourvoi.

La soussignée conclut dès lors que le demandeur en cassation est à déclarer déchu de son pourvoi pour autant qu’il concerne le volet civil.

1 Cass., arrêt n°52 / 2019 pénal du 28 mars 2019, numéro CAS-2018-00012 du registre ; Cass., arrêt n° 26 / 14, du 6 mars 2014, numéro 3309 du registre ; Cass., arrêt n° 51 / 11, du 7 juillet 2011, numéro 2883 du registre.Le pourvoi de cassation au pénal respectant les conditions de recevabilité définies par les articles 41 et 43 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, il est recevable en la pure forme.

Quant aux faits et rétroactes :

Par jugement n°21/2019 du 13 mars 2019, le Tribunal d’arrondissement de et à Luxembourg, siégeant en matière criminelle, a condamné W) du chef de viol commis sur une personne vulnérable, de séquestration, de vol simple, de menaces de mort, de coups et blessures volontaires commis sur une personne vulnérable ainsi que du chef d’outrage à agents, à une peine de réclusion de 16 ans ainsi qu’aux frais de sa poursuite pénale.

W) releva appel de ce jugement.

Par arrêt n°38/19 rendu le 6 novembre 2019, la Cour d’appel a réformé en partie le jugement de première instance en retenant notamment que les infractions de viol et de séquestration se trouvent en concours réel et en ramenant la peine de réclusion prononcée à l’encontre de W) à 12 ans, dont 3 ans assortis du sursis probatoire. Pour le surplus, les juges d’appel ont confirmé le jugement de première instance.

Le pourvoi en cassation est dirigé contre cet arrêt.

Quant au premier moyen de cassation :

Le premier moyen de cassation est tiré de la « violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application, sinon de la fausse interprétation de la loi in specie de l’article 375 du Code pénal, par dénaturation des faits, sinon absence de motivation, sinon motivation insuffisante » en ce que la Cour d’appel a « décidé que les éléments constitutifs de l’infraction de viol étaient réunis sans pourtant qualifier le consentement de la victime. ».

Le demandeur en cassation reproche aux juges d’appel de ne pas avoir caractérisé un des éléments constitutifs de l’infraction de viol, à savoir l’absence de consentement dans le chef de la victime R) et que de ce fait l’arrêt n°38/19 du 6 novembre 2019 encourt la cassation.

La soussignée constate que le moyen revêt une nature complexe en ce qu’il combine plusieurs cas d’ouverture à cassation.

Le demandeur en cassation invoque la violation de la loi, plus précisément la violation de l’article 375 du Code pénal par dénaturation des faits, sinon absence de motivation, sinon motivation insuffisante.

Même si en matière de cassation pénale, les exigences de forme ne sont pas aussi strictes qu’en matière civile, toujours est-il qu’en l’espèce, cet amalgame de cas d’ouverture ne permet pas déterminer le sens et la portée exacte du moyen, de sorte qu’il est à déclarer irrecevable.

A titre subsidiaire, et pour autant que Votre Cour déclare le moyen recevable, en tant que tiré d’une prétendue dénaturation des faits, le moyen ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation des faits de la cause sur base de laquelle les juges d’appel ont retenu que le demandeur en cassation s’était rendu coupable de viol sur la personne d’R).

Cette appréciation des faits relève du pouvoir souverain des juges du fond et échappe au contrôle de la Cour de cassation2.

Le moyen, sous ce rapport, ne saurait être accueilli.

Le moyen en ce qu’il est tiré d’un défaut de motifs, fait valoir un vice de forme.

Votre Cour retient de manière constante qu’une décision judiciaire est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation expresse ou implicite, fût-elle incomplète ou viciée, sur le point considéré3.

Il résulte de l’arrêt attaqué que les juges d’appel ont retenu que :

« Aux sens de l’article 375 du Code pénal tout acte de pénétration sexuelle non consenti est partant constitutif de la prévention de viol.

Ledit article avait été modifié alors que dans sa version ancienne l’une des difficultés résidait dans l’administration de la preuve par la victime de l’absence de consentement exprimé selon l’un des trois modes énumérés à l’alinéa 1er de l’article 375 ancien.

Le nouveau libellé a érigé l’absence de consentement en élément constitutif de l’infraction de viol. Les trois cas de figure de non-consentement qui figuraient dans l’article 375 ancien ont été maintenus à titre purement indicatif.

La nouvelle disposition a partant continué à viser les violences, les menaces graves, la ruse ou l’artifice, non plus comme éléments constitutifs, mais comme 2 Cass. du 28 juin 2018, n° 71/2018 pénal, numéro 4032 du registre 3 Cass. du 29 mars 2018, n° 19/2018 pénal, numéro 3955 du registre ; Cass. du 17 janvier 2019, n° 07/2019 pénal, numéro 4070 du registre cas types de l’absence de consentement. Il s’agit d’une énumération non limitative d’exemples.

Il s’en suit que tous les cas de rapports sexuels non consentis tombent désormais sous le coup de l’article 375 du Code pénal (cf. Doc. Parl. n° 6046, rapport de la commission juridique du 15 juin 2011, session ordinaire 2010-11, p. 9 et avis du Conseil d’Etat session ordinaire 2009-2010 du 9 mars 2010).

En l’occurrence, il est établi qu’R) a eu pendant la période allant du 10 au 17 février 2017 au moins deux rapports sexuels avec W), ce dernier ne contestant pas qu’il y a eu pénétration vaginale.

Tel qu’il a été retenu à bon escient par les juges de première instance, il y a lieu de croire R) lorsqu’elle décrit que le prévenu est passé outre son refus exprimé oralement et qu’il a vaincu sa résistance en la tenant jusqu’à ce qu’elle cède, ce qui, au vu de la stature frêle de la jeune femme, était facilement surmontable. La Cour rejoint encore les juges de première instance en ce qu’ils ont également fait état de ce que R) était, par ailleurs, au vu des menaces constantes d’expulsion du prévenu, pas dans un état d’opposer une résistance appropriée.

La Cour relève que pour une personne en état de faiblesse physique ou psychique, la jurisprudence a même systématiquement admis que sa passivité devant l’agression ne signifie pas son consentement (cf. Françis Caballero, Le droit du sexe, n° 707). Elle peut notamment se trouver dans l’impossibilité morale de se libérer.

Or, en l’occurrence la faiblesse psychique d’R) est établie et il est un fait qu’elle était physiquement plus faible que W), de sorte que non seulement elle a verbalement exprimé son désaccord, mais elle a opposé une certaine résistance physique qui était cependant mesurée aux fins de ne pas trop contrarier W) car elle risquait de déclencher une crise de colère et d’agressivité. ».

Les juges d’appel ont analysé en droit la notion d’absence de consentement et en se basant sur les éléments de preuves de l’espèce, notamment les déclarations de la victime, ils ont retenu que R) n’avait pas consenti aux rapports sexuels que lui imposait W).

Les juges d’appel ont partant caractérisé l’élément constitutif de l’absence de consentement dans le chef de la victime.

La décision attaquée est partant motivée sur le point considéré.

Il en suit que, sous ce rapport, le moyen n’est pas fondé.

Finalement, le moyen fait encore valoir une motivation insuffisante, partant un défaut de base légale au regard des éléments constitutifs exigés par l’article 375 duCode pénal et plus précisément une motivation insuffisante relative à l’absence de consentement dans le chef de la victime.

Le cas d’ouverture du défaut de base légale tend à assurer une exposition complète du fait par les juges du fond. Le défaut de base légale suppose que l’arrêt comporte des motifs de fait, mais incomplets ou imprécis qui ne permettent pas au juge de cassation d’exercer son contrôle sur le droit.

La lecture de l’arrêt permet de constater que les juges d’appel ont fait un examen détaillé des faits de l’espèce et des éléments de preuves et plus particulièrement des déclarations de la victime et de sa crédibilité, pour retenir que R) n’avait pas consenti aux rapports sexuels et que partant W) s’était rendu coupable de viol.

Aucun reproche d’insuffisance de motifs ne saurait être fait à la Cour d’appel qui s’est livrée à un examen minutieux des faits, a caractérisé avec précision les éléments constitutifs de l’infraction de viol retenue et a précisé tous les éléments de fait nécessaires à la justification de sa décision.

Il en suit que l’arrêt entrepris a justifié sa décision, sans encourir le grief du défaut de base légale.

Le moyen n’est partant, sous ce rapport, pas non plus fondé.

Quant au deuxième moyen de cassation :

Le deuxième moyen de cassation est tiré de la « violation sinon de la fausse application des articles 6-1, 6-2 et 6-3 de la Convention européenne des droits de l’homme et du principe du droit à un procès équitable et du respect des droits de la défense » en ce que la Cour d’appel a décidé qu’il n’y a pas lieu de demander la communication du dossier répressif dirigé contre R) par le Parquet de Trèves.

Le demandeur en cassation fait grief aux juges d’appel d’avoir rejeté sa « demande en communication du dossier répressif dressé par les autorités judiciaires allemandes contenant les mêmes accusations (de viol !!!) portées par la prétendue victime à l’égard du père de l’actuel demandeur en cassation » et d’avoir ainsi violé les droits de la défense consistant à rapporter la preuve de son innocence.

La soussignée relève qu’une demande en communication d’un dossier répressif étranger à la cause citée devant les juges d’appel s’analyse en une demande d’une mesure d’instruction complémentaire, telle une demande d’audition de témoin.

Il revient en principe aux juridictions nationales d’apprécier les éléments produits devant elles et la pertinence de ceux dont les accusés souhaitent la production.

L’article 6 de la Convention européenne des Droits de l’Homme leur laisse, toujoursen principe, le soin de juger par exemple de l’utilité d’une offre de preuve par témoins.4 La Cour d’appel a, en l’espèce, analysé en détail la valeur probante des déclarations d’R)5 pour arriver à la conclusion « qu’au vu de tous ces éléments permettant de confirmer la crédibilité des dépositions d’R), les procédures engagées le cas échéant outrageusement en Allemagne par R) contre le père du prévenu, ne portent pas à conséquence quant à la présente affaire et il n’y a pas lieu d’ordonner des mesures d’instruction complémentaires à ce sujet. ».

Les juges d’appel ont ainsi examiné la pertinence de cette demande et ont justifié par des raisons suffisantes leur décision de ne pas l’accorder.

Votre Cour retient de manière constante que les juges d’appel sont libres d’apprécier la pertinence et l’opportunité de procéder à une mesure d’instruction supplémentaire et que cette appréciation, qui relève du pouvoir souverain des juges du fond, échappe au contrôle de Votre Cour 6.

Sous le couvert du grief de la violation des dispositions visées au moyen, celui-ci ne tend partant qu’à remettre en discussion l’appréciation souveraine, par les juges du fond, de l’opportunité d’ordonner la communication d’une pièce supplémentaire, appréciation qui échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

Conclusion :

- Le demandeur en cassation est à déclarer déchu de son pourvoi quant au volet civil.

- Le pourvoi au pénal est recevable mais il est à rejeter.

Pour le Procureur général d’Etat, l’avocat général, 4 CEDH arrêt du 6 mai 2003, affaire Pernac c. Italie, §29 ; CEDH arrêt du 18 décembre 2018, Murtazaliyevac c. Russie, § 140 5 Cour d’appel, arrêt n°38/19 du 6 novembre 2019, p. 33-36 6 Cass. du 28 avril 2016, n° 17/2016 pénal, numéro 3589 du registre ; Cass. du 24 janvier 2019, n° 13/2019 pénal, numéro 4074 du registre ; Cass. du 23 mai 2019, n° 83/2019 pénal, numéro CAS-2018-00062 du registre Elisabeth EWERT 12


Synthèse
Numéro d'arrêt : 167/20
Date de la décision : 10/12/2020

Origine de la décision
Date de l'import : 15/12/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2020-12-10;167.20 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award