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05/12/2019 | LUXEMBOURG | N°165/19

Luxembourg | Luxembourg, Cour de cassation, 05 décembre 2019, 165/19


N° 165 / 2019 du 05.12.2019.

Numéro CAS-2018-00123 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, cinq décembre deux mille dix-neuf.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Romain LUDOVICY, conseiller à la Cour de cassation, Carlo HEYARD, conseiller à la Cour de cassation, Eliane EICHER, conseiller à la Cour de cassation, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Marc HARPES, premier avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

X, faisant le commerce sou

s la dénomination SOC1), demeurant professionnellement à (…), demandeur en cassation, comparant...

N° 165 / 2019 du 05.12.2019.

Numéro CAS-2018-00123 du registre.

Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, cinq décembre deux mille dix-neuf.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Romain LUDOVICY, conseiller à la Cour de cassation, Carlo HEYARD, conseiller à la Cour de cassation, Eliane EICHER, conseiller à la Cour de cassation, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Marc HARPES, premier avocat général, Viviane PROBST, greffier à la Cour.

Entre:

X, faisant le commerce sous la dénomination SOC1), demeurant professionnellement à (…), demandeur en cassation, comparant par la société en commandite simple KLEYR GRASSO, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée par son gérant, la société à responsabilité limitée KLEYR GRASSO GP, et représentée aux fins de la présente instance par Maître Henry DE RON, avocat à la Cour, et:

Y, demeurant à (…), défenderesse en cassation, comparant par Maître Valérie DUPONG, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 18/18, rendu le 31 janvier 2018 sous les numéros 44095 et 44115 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, première chambre, siégeant en matière civile ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 18 décembre 2018 par X à Y, déposé le 24 décembre 2018 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 18 janvier 2019 par Y à X, déposé le 24 janvier 2019 au greffe de la Cour ;

Sur le rapport du conseiller Carlo HEYARD et les conclusions du premier avocat général Marie-Jeanne KAPPWEILER ;

Sur les faits :

Selon l’arrêt attaqué, le tribunal d’arrondissement de Luxembourg, saisi par X, faisant le commerce sous la dénomination SOC1), d’une demande dirigée contre Y et tendant au paiement de travaux et de fournitures effectués dans l’intérêt de son immeuble sis en Grèce, avait déclaré cette demande non fondée. La Cour d’appel a confirmé le jugement entrepris.

Sur le premier moyen de cassation :

« tiré de la fausse application de la loi néerlandaise et ainsi de la violation de l'article 3 du Code civil et des principes généraux régissant le droit international privé.

En ce que la Cour d'appel a dénaturé intellectuellement la loi étrangère dans son application de l'article 217 du Code civil néerlandais, en ne tenant pas compte de l'interprétation que le prédit article reçoit aux Pays-Bas.

Au motif que la Cour d'appel a retenu, en se fondant sur l'article 217 du Code civil néerlandais, que les parties n'étaient pas liées par un contrat ou que la partie demanderesse en cassation ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un contrat entre les parties.

Ce faisant, la Cour d'appel n'a pas tenu compte de l'interprétation jurisprudentielle que le prédit article reçoit aux Pays-Bas.

Or, l'application de l'article 217 du Code civil néerlandais tel qu'interprété par les juridictions néerlandaises aurait conduit la Cour d'appel à adopter une autre conclusion. ».

Le moyen est tiré de la violation, par fausse interprétation, de l’article 217 du Code civil néerlandais.

L’interprétation et l’application de la loi étrangère constituent des questions de fait relevant de l’appréciation souveraine des juges du fond et échappant au contrôle de la Cour de cassation.

Il en suit que le moyen ne saurait être accueilli.

Sur le deuxième moyen de cassation, pris en ses deux branches :

« tiré de la violation de la règle de droit pour défaut d'application de l'article 3 du Code civil et des principes généraux du droit international privé.

En ce que la Cour d'appel a n'a pas statué sur base de la loi étrangère applicable au litige, loi invoquée par la partie demanderesse en cassation, pour trancher le moyen tiré de l'enrichissement sans cause.

Au motif que, la Cour d'appel a, en premier lieu, considéré que le droit néerlandais était applicable au litige, avant d'examiner si, au sens du droit néerlandais, un contrat avait été conclu entre les parties.

La Cour d'appel a, en deuxième lieu, retenu que la partie demanderesse en cassation n'établissait .

La Cour d'appel a, en troisième lieu, jugé :

.

Partant, la Cour d'appel a statué sur le moyen tiré de l'existence d'un contrat entre parties sur base de la loi néerlandaise, mais a fondé sa motivation relative à l’enrichissement sans cause sur le droit luxembourgeois, ce qui constitue un défaut d'application de la loi étrangère au litige et donc une violation de l'article 3 du Code civil et des principes généraux du droit international privé.

Alors que, première branche, l'article 3 du Code civil et des principes généraux du droit international privé font obligation au juge d'appliquer la loi étrangère applicable dès lors qu'elle est invoquée par l'une des parties.

La partie demanderesse en cassation a invoqué l'application de la loi néerlandaise au litige mais les juges d'appel l'ont appliquée à la question de l'existence d'un contrat d'entreprise mais ont refusé de l'appliquer au moyen tiré de l'enrichissement sans cause, tranché sur base de la loi luxembourgeoise.

Alors que, deuxième branche, l'article 3 du Code civil et des principes généraux du droit international privé font obligation au juge de statuer au regard du droit positif étranger.

En vertu de cette obligation, il incombe au juge qui reconnaît applicable un droit étranger d’en rechercher la teneur et de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif étranger.

En tranchant le moyen tiré de l’enrichissement sans cause en se fondant sur la loi luxembourgeoise, la Cour d’appel a manqué à son obligation de donner une solution conforme au droit positif étranger au litige. ».

Les juges d’appel, qui ont exposé que « L’appelant fonde sa demande sur les articles 217 et suivants du livre 6, sinon sur le livre 6 du Burgelijk Wetboek néerlandais, subsidiairement sur les articles 400 et suivants du livre 7 du Burgelijk Wetboek, sinon sur le livre 7 du Burgelijk Wetboek, à titre plus subsidiaire sur les articles 1134, 1134-1, 1135 et suivants du code civil luxembourgeois. Si l’existence d’un contrat entre parties ne devait pas être retenue, l’appelant soutient encore que sa demande en paiement est fondée sur base de l’enrichissement sans cause conformément à l’article 212 du livre 6 du code civil néerlandais. », ont, après avoir retenu que l’existence d’un contrat entre parties n’était pas établie, fait application de la loi néerlandaise lors de l’examen du moyen de l’enrichissement sans cause.

Il en suit que le moyen, pris en ses deux branches, manque en fait.

Sur le troisième moyen de cassation, pris en ses deux branches :

« tiré de la violation sinon de la mauvaise interprétation des articles 1371 et suivants du Code civil et des principes régissant l’enrichissement sans cause.

En ce que la Cour d'appel a soumis l'exercice de l'action de in rem verso à une condition non prévue par la loi en se livrant à une interprétation non conforme du texte des articles 1371 et suivants du Code civil et des principes régissant l'enrichissement sans cause.

Au motif que la Cour d'appel a retenu que .

Cette interprétation est à comprendre en ce qu'est déniée toute efficacité d'une demande fondée sur l'enrichissement sans cause qui n'est pas formulée à titre principa1.

Alors que, première branche, le principe de subsidiarité de l'action de in rem verso signifie qu'elle ne peut être utilisée pour suppléer à une autre action que le demandeur ne pourrait intenter par suite d'une prescription, d'une déchéance ou forclusion ou par l'effet de l'autorité de la chose jugée ou encore parce qu'il ne peut apporter les preuves qu'elle exige, et non qu'elle ne peut pas fonctionner comme action subsidiaire.

Le caractère subsidiaire reconnu à l'action fondée sur l'enrichissement sans cause ne peut s'analyser en une fin de non-recevoir au sens des règles régissant la procédure civile, telle que le défaut d'intérêt pour agir ou l'exception de l'autorité de la chose jugée, mais bien plutôt comme une condition inhérente à l'action, ce dont il se déduit que la demande introduite subsidiairement par Monsieur X sur ce fondement doit être jugée non pas irrecevable, mais éventuellement non fondée.

Alors que, deuxième branche, en retenant que , au sens où toute possibilité de prospérer d'une demande fondée sur l'enrichissement sans cause qui ne serait pas formée à titre principal est rendue impossible, la Cour d'appel a ajouté une condition supplémentaire à la recevabilité de l’actio de in rem verso, condition qui n'est prévue ni par les articles 1371 et suivants du Code civil, ni par les principes régissant l'enrichissement sans cause. ».

Les juges d’appel ont fait application de la loi néerlandaise.

Il en suit que le moyen, pris en ses deux branches, qui repose sur la prémisse que les juges d’appel auraient fait application de la loi luxembourgeoise, manque en fait.

Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure :

Il serait inéquitable de laisser à charge de la défenderesse en cassation l’intégralité des frais exposés non compris dans les dépens. Il convient de lui allouer une indemnité de procédure de 2.500 euros.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

rejette le pourvoi ;

condamne le demandeur en cassation à payer à la défenderesse en cassation une indemnité de procédure de 2.500 euros ;

condamne le demandeur en cassation aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Valérie DUPONG, sur ses affirmations de droit.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Jean-Claude WIWINIUS, en présence du premier avocat général Marc HARPES et du greffier Viviane PROBST.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 165/19
Date de la décision : 05/12/2019

Origine de la décision
Date de l'import : 23/09/2020
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.cassation;arret;2019-12-05;165.19 ?

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