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04/02/2021 | LUXEMBOURG | N°19/21

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 04 février 2021, 19/21


N° 19 / 2021 du 04.02.2021 Numéro CAS-2020-00032 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, quatre février deux mille vingt-et-un.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Eliane EICHER, conseiller à la Cour de cassation, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Roger LINDEN, conseiller à la Cour de cassation, Serge THILL, président de chambre à la Cour d’appel, Marie-Jeanne KAPPWEILER, premier avocat général, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre:

la société anonyme

X), (anciennement S) S.A.), demanderesse en cassation, comparant par Maître Guy PERROT, ...

N° 19 / 2021 du 04.02.2021 Numéro CAS-2020-00032 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, quatre février deux mille vingt-et-un.

Composition:

Jean-Claude WIWINIUS, président de la Cour, Eliane EICHER, conseiller à la Cour de cassation, Michel REIFFERS, conseiller à la Cour de cassation, Roger LINDEN, conseiller à la Cour de cassation, Serge THILL, président de chambre à la Cour d’appel, Marie-Jeanne KAPPWEILER, premier avocat général, Daniel SCHROEDER, greffier à la Cour.

Entre:

la société anonyme X), (anciennement S) S.A.), demanderesse en cassation, comparant par Maître Guy PERROT, avocat à la Cour, en l’étude duquel domicile est élu, et:

1) W), veuve de feu AK), 2) K), défenderesses en cassation, comparant par la société anonyme ELVINGER HOSS PRUSSEN, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente instance par Maître Yves PRUSSEN, avocat à la Cour.

Vu les arrêts attaqués, numéro 41/18, rendu le 15 mars 2018 et numéro 132/19, rendu le 19 décembre 2019, sous le numéro 42986 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, huitième chambre, siégeant en matière de droit du travail ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 25 février 2020 par la société anonyme X) à W) et à K), déposé le 5 mars 2020 au greffe de la Cour ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 15 avril 2020 par W) et K) à la société X), déposé le 24 avril 2020 au greffe de la Cour ;

Sur le rapport du conseiller Roger LINDEN et les conclusions du premier avocat général Marie-Jeanne KAPPWEILER ;

Sur les faits Selon les arrêts attaqués, le tribunal du travail de Luxembourg, saisi par AK) d’une demande en paiement de commissions impayées dirigée contre son ancien employeur, la société S) (actuellement la société X)), avait, par jugement du 5 février 2013, déclaré prescrite la demande pour la période antérieure au 24 mai 2009, institué une expertise aux fins de calculer le montant redû au demandeur pour la période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 2010, compte tenu du montant de 472.000 euros qu’il avait déjà perçu de ce chef.

Par jugement du 29 septembre 2015, le tribunal avait dit non fondée la demande principale et accueilli la demande reconventionnelle de la société défenderesse en condamnation du demandeur à lui rembourser un certain montant du chef de commissions indûment payées.

Saisie d’un appel contre le jugement du 29 septembre 2015, la Cour d’appel a, par arrêt du 15 mars 2018, par réformation partielle, institué une expertise avec la mission de déterminer le montant revenant aux défenderesses en cassation, qui avaient repris l’instance en leur qualité d’héritières de feu AK), du chef de commissions redues à ce dernier pour la période du 1er janvier au 23 mai 2009 et réservé la demande reconventionnelle de la société défenderesse en répétition de l’indu.

Par arrêt du 19 décembre 2019, la Cour d’appel a, par réformation, dit non fondée la demande reconventionnelle de la demanderesse en cassation et déchargé les défenderesses en cassation de la condamnation prononcée par le tribunal du travail.

Sur le moyen de cassation qui vise l’arrêt du 15 mars 2018 Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application de la loi, en l'espèce de l'article 1351 du Code civil qui dispose :

en ce que la Cour d'appel a considéré en page 8, paragraphe 7 de l'arrêt du 15 mars 2018 que alors que l'article 1351 du Code civil énonce, de manière claire et ne laissant place à aucune équivoque, que l'autorité de la chose jugée a lieu à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement, autorité de chose jugée que la Cour d'appel n'a pas reconnue en jugeant, par réformation du jugement du 29 septembre 2015, que la mission de l'expert définie dans le jugement du 5 février 2013 devait s'étendre aux commissions prélevées sur la clientèle du requérant pendant la période allant du 1er janvier 2009 au 29 novembre 2010. ».

Réponse de la Cour Vu l’article 1351 du Code civil.

Après avoir retenu que le tribunal du travail avait, par jugement du 5 février 2013, déclaré prescrite la demande en paiement des commissions réclamées pour la période antérieure au 24 mai 2009, les juges d’appel ont dit que « les demandes des appelantes, pour autant qu’elles visent à réformer les dispositions du jugement du 5 février 2013, sont irrecevables » au motif que l’appel ne visait que le jugement du 29 septembre 2015 et non celui du 5 février 2013, de sorte que « le jugement du 5 février 2013 a acquis force de chose jugée en ce qui concerne l’institution de la mesure d’instruction et l’énoncé de la mission de l’expert. ».

En retenant, par réformation du jugement du 29 septembre 2015, qu’il y avait lieu « de dire que la mission de l’expert, telle que définie dans le jugement du 5 février 2013 concernait les commissions prélevées sur la clientèle du requérant pendant la période allant du 1er janvier 2009 au 29 novembre 2010 » et en nommant un expert avec la mission de calculer le montant des commissions redû de ce chef pour la période du 1er janvier au 23 mai 2009, les juges d’appel ont violé la disposition visée au moyen.

Il en suit que l’arrêt encourt la cassation.

Sur le moyen de cassation qui vise l’arrêt du 19 décembre 2019 Enoncé du moyen « Tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d'application de la loi, en l'espèce de l'article 1351 du Code civil qui dispose :

en ce que la Cour d'appel a considéré en page 8, paragraphes 4 et 5 de l'arrêt du 19 décembre 2019 que .

alors que l'article 1351 du Code civil énonce, de manière claire et ne laissant place à aucune équivoque, que l'autorité de la chose jugée a lieu à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement, autorité que la Cour d'appel n'a pas reconnue en jugeant, par réformation du jugement du 29 septembre 2015, qu'il n'y avait pas lieu à répétition du trop-perçu sur la somme de 472.000 EUR sous déduction du montant des commissions calculées par l'expert. ».

Réponse de la Cour Vu l’article 1351 du Code civil.

En retenant dans l’arrêt du 15 mars 2018 que le jugement du 5 février 2013 du tribunal du travail avait acquis autorité de chose jugée, les juges d’appel ne pouvaient dans l’arrêt attaqué remettre en cause la décision relative à la déduction du montant perçu par AK). Les juges d’appel ont partant violé la disposition visée au moyen.

Il en suit que l’arrêt encourt la cassation.

Sur les demandes en allocation d’une indemnité de procédure Les défenderesses en cassation étant à condamner aux dépens de l’instance en cassation, leur demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter.

La condition d'iniquité n'étant pas remplie dans le chef de la demanderesse en cassation, sa demande en allocation d'une indemnité de procédure est à rejeter.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation :

casse et annule les arrêts, numéro 41/18, rendu le 15 mars 2018, et numéro 132/19, rendu le 19 décembre 2019 par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, huitième chambre, siégeant en matière de droit du travail ;

déclare nuls et de nul effet lesdites décisions judiciaires et les actes qui s’en sont suivis, remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant les arrêts cassés et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel, autrement composée ;

rejette les demandes en allocation d’une indemnité de procédure ;

condamne les défenderesses en cassation aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Guy PERROT, sur ses affirmations de droit ;

ordonne qu’à la diligence du procureur général d’Etat, le présent arrêt soit transcrit sur le registre de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg et qu’une mention renvoyant à la transcription de l’arrêt soit consignée en marge de la minute des arrêts annulés.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le président Jean-Claude WIWINIUS en présence du premier avocat général Marie-

Jeanne KAPPWEILER et du greffier Daniel SCHROEDER.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation X) S.A.

contre W) et K) Le pourvoi en cassation introduit par la société anonyme X) S.A. par un mémoire en cassation signifié le 25 février 2020 aux défenderesses en cassation et déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice le 5 mars 2020 est dirigé contre un arrêt n°41/18 rendu en date du 15 mars 2018 et un arrêt n° 132/2019 rendu en date du 19 décembre 2019 par la Cour d’appel, huitième chambre, siégeant en matière de droit du travail, statuant contradictoirement (n° 42986 du rôle). Ces arrêts n’ont pas été signifiés à la demanderesse en cassation.

Le pourvoi en cassation est recevable pour avoir été interjeté dans la forme et le délai prévus à l’article 7 de la loi du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation.

Les défenderesses en cassation ont signifié un mémoire en réponse en date du 15 avril 2020 et l’ont déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice en date du 24 avril 2020.

Ce mémoire peut être pris en considération pour avoir été signifié et déposé dans la forme et le délai prévus à l’article 16 de la loi précitée du 18 février 1885.

Les faits et rétroactes Par requête du 24 mai 2012, AK) a fait convoquer son ancien employeur, la société S) (actuellement la société anonyme X)) devant le tribunal du travail de Luxembourg pour le voir condamner à lui payer le montant de 728.000 € au titre de commissions impayées pour les années 2004 à 2010 sur base de l’article 2 de l’avenant au contrat de travail du 1er août 1996. Il a demandé, pour autant que de besoin, la nomination d’un expert afin de déterminer le montant exact de la rémunération variable qui lui est due, et il a sollicité une indemnité de procédure de 5.000 € sur base de l’article 240 du Nouveau code de procédure civile.

Par jugement du tribunal du travail du 4 décembre 2012, la demande a été déclarée recevable. Le tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu de surseoir à statuer en attendant la décision à intervenir au pénal et a refixé l’affaire.

Par jugement du 5 février 2013, le tribunal du travail a dit qu’AK) n’avait pas renoncé à ses commissions pour les années 2004 à 2010, a déclaré la demande prescrite pour la période antérieure au 24 mai 2009 et a nommé un expert chargé de déterminer le montant exact des commissions dues pour la période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 2010, déduction faite de la somme de 472.000 € qu’il a déjà reçue à ce titre.

Par jugement du 17 décembre 2013, le tribunal du travail a déclaré une demande en interprétation d’AK) irrecevable et a déclaré recevables les demandes reconventionnelles de la société S) (actuellement la société anonyme X)). La demande de S) en paiement d’une indemnité pour procédure abusive et vexatoire a été rejetée et sa demande en paiement d’une indemnité de procédure a été déclarée fondée pour le montant de 1.250 € sur base de l’article 240 du Nouveau code de procédure civile.

Par arrêt du 27 février 2014, la Cour d’appel a déclaré recevable, mais non fondée la demande en relevé de déchéance résultant de l’expiration d’un délai imparti pour agir en justice présentée par AK), a rejeté la demande en paiement d’une indemnité pour procédure abusive et vexatoire présentée par S) et a condamné AK) à payer une indemnité de procédure de 750 €.

Par jugement du 29 septembre 2015, le tribunal du travail statuant en prosécution de cause a rejeté la demande d’AK) tendant à voir calculer ses commissions à partir du 1er janvier 2009, a rejeté la demande d’AK) à voir enjoindre à la société S) de produire sa comptabilité des années 2009 et 2010, a déclaré non fondée la demande d’AK) en paiement de commissions et l’a rejetée, a déclaré fondée la demande de la société S) en remboursement de commissions pour le montant de 300.867,84 € et a condamné AK) à payer ledit montant avec les intérêts légaux, a déclaré non fondée la demande d’AK) en allocation d’une indemnité de procédure, a déclarée fondée la demande de S) en allocation d’une indemnité de procédure pour le montant de 1.500 € sur base de l’article 240 du Nouveau code de procédure civile. AK) a encore été condamné à tous les frais et dépens de l’instance ainsi qu’aux frais de l’expertise.

Par exploit d’huissier du 21 octobre 2015, AK) a relevé appel contre le jugement du 29 septembre 2015 et demande à voir décider, par réformation du jugement entrepris, que l’expert aurait dû se baser sur toutes les pièces nécessaires pour déterminer le montant des commissions devant donner lieu au paiement d’une rémunération complémentaire en janvier 2010, c’est-à-dire l’intégralité des commissions touchées par S) pendant l’année 2009 en rapport avec la clientèle visée dans l’avenant au contrat d’emploi.1 La société S) a soulevé l’irrecevabilité de l’appel pour défaut d’intérêt à agir et elle demande à ce que les demandes de l’appelant soient déclarées irrecevables, sinon non fondées, et elle a demandé la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a condamné AK) au remboursement du montant de 300.867,84 €.

Par contre, elle demande la réformation du jugement entrepris en ce qui concerne la date à compter de laquelle les intérêts légaux sont dus. En outre, elle a demandé la 1 AK) a encore formulé une série d’autres prétentions, qui ne sont toutefois pas visées par le pourvoi en cassation, de sorte que nous nous permettons d’en faire abstraction dans le cadre de l’exposé des faits condamnation d’AK) à lui payer 80.000 € à titre de préjudice matériel engendré par les frais d’avocat exposés sur le fondement de la responsabilité contractuelle, sinon sur base des articles 1382 et 1383 du Code civil, ainsi qu’une indemnité de procédure de 1.500 €.

Par acte de reprise d’instance du 24 mars 2016, W) et K), prises en leur qualité de seules héritières de la succession de feu AK), ont déclaré reprendre volontairement l’instance enrôlée sous le numéro 42986 contre la société anonyme X) (anciennement société anonyme S)).

Par arrêt n°41/18 rendu en date du 15 mars 2018, la Cour d’appel a déclaré la reprise d’instance recevable, mais a déclaré irrecevables les demandes de W) et K) pour autant qu’elles visent à réformer les dispositions du jugement du 5 février 2013.

Quant à la demande principale, l’arrêt a nommé avant tout autre progrès en cause un expert avec la mission de concilier si faire se peut, sinon de déterminer dans un rapport écrit, motivé et détaillé, sur base des documents comptables de la société anonyme X) (anciennement la société anonyme S)) le montant des commissions auquel peuvent encore éventuellement prétendre W) et K), ès qualités, au titre de commissions prélevées sur les clients visés par le point 2 de l’avenant au contrat de travail du 1er août 1996, pendant la période allant du 1er janvier 1009 au 23 mai 2009.2 Le même arrêt a réservé les demandes reconventionnelles en répétition de l’indu et en paiement de dommages et intérêts pour préjudice subi du chef de frais d’avocat exposés, ainsi que les demandes basées sur l’article 240 du Nouveau code de procédure civile.

Le mémoire en cassation indique que cet arrêt est attaqué en ce que la Cour d’appel a nommé un expert avec la mission de déterminer le montant des commissions auquel peuvent encore éventuellement prétendre W) et K), ès qualités, au titre de commissions prélevées sur les clients visés par le point 2 de l’avenant au contrat de travail du 1er août 1996, pendant la période allant du 1er janvier 1009 au 23 mai 2009.

La Cour d’appel a rendu un arrêt n°132/19 en date du 19 décembre 2019 dont le dispositif se lit comme suit :

« vidant l’arrêt du 15 mars 2018, dit l’appel partiellement fondé, dit l’appel incident non fondé, 2 L’arrêt du 15 mars 2018 a encore rejeté une série de prétentions de W) et K), mais dans la mesure où le pourvoi ne vise pas ces dispositions de l’arrêt, nous nous nous permettons d’en faire abstraction dans le cadre de l’exposé des faits.

réformant, dit non fondée la demande reconventionnelle de la société anonyme X) en répétition de l’indu, partant décharge W) et K), agissant ès qualités, de la condamnation au paiement du montant de 300.867,84 €, prononcée contre feu AK), décharge W) et K), agissant ès qualités, de la condamnation au paiement du montant du montant de 1.500 € prononcée contre feu AK) sur base de l’article 240 du Nouveau code de procédure civile, dit non fondée la demande de la société anonyme X) en paiement de dommages et intérêts pour frais d’avocats, dit non fondée la demande de W) et K), agissant ès qualités, en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire, dit non fondées les demandes des parties basées sur l’article 240 du Nouveau code de procédure civile, fait masse de tous les frais et dépens des deux instances et les impose aux parties par moitié. » Le mémoire en cassation indique que toutes les dispositions de cet arrêt sont attaquées.

Or, la demanderesse en cassation n’a aucun intérêt à attaquer les dispositions de l’arrêt par lesquelles elle a obtenu gain de cause, à savoir :

« dit non fondée la demande de W) et K), agissant ès qualités, en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire » et « dit non fondées les demandes des parties basées sur l’article 240 du Nouveau code de procédure civile » pour autant que cela concerne la demande de W) et K).

Le pourvoi est irrecevable en ce qu’il attaque ces dispositions, mais recevable pour le surplus.

Sur l’unique moyen de cassation de l’arrêt du 15 mars 2018 :

L’unique moyen de cassation est « tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application de la loi, en l’espèce de l’article 1351 du Code civil » qui dispose :

« L’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité. » Le moyen de cassation fait grief à l’arrêt attaqué qu’en décidant que « par réformation du jugement entrepris, il y a lieu de dire que la mission de l’expert, telle que définie dans le jugement du 5 février 2013 concernait les commissions prélevées sur la clientèle du requérant pendant la période allant du 1er janvier 2009 au 29 novembre 2010 », la Cour d’appel aurait contredit le jugement du tribunal du travail du 5 février 2013 (notifié aux parties en date des 7 et 8 février 2013), qui avait limité la mission de l’expert à la détermination du montant des commissions auquel peut encore éventuellement prétendre AK) à titre de commissions pour la période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 2010, déduction faite de la somme de 472.000.- € qu’il a déjà reçue à ce titre.

Il ressort de l’arrêt du 15 mars 2018 que l’intimée avait invoqué en instance d’appel l’autorité de la chose jugée du jugement rendu en date du 5 février 2013 concernant la déductibilité de la somme de 472.000 €, de même que concernant le libellé de la mission d’expertise.3 Dans son arrêt du 15 mars 2018, la Cour d’appel a considéré que l’assiette des commissions dues à feu AK) n’avait pas été fixée dans le jugement du tribunal du travail du 5 février 2013, mais seulement dans celui du 29 septembre 2015, qui constitue le jugement entrepris en appel :

« S’il est vrai que dans son jugement du 5 février 2013, le tribunal a demandé à l’expert de déterminer le montant auquel peut encore prétendre AK) à titre de commissions pour la période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 2010, il n’en reste pas moins que concernant l’assiette de ces commissions, il s’est prononcé définitivement dans le jugement entrepris en retenant que « la mission de l’expert se limite partant à calculer le montant des commissions que la partie défenderesse a prélevées sur la clientèle du requérant pendant la période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 2010, déduction faite de la somme de 472.000,- EUR qu’il a déjà reçue à ce titre ».

En effet, le jugement du tribunal du travail du 29 septembre 2015 énonce dans son dispositif que la demande d’AK) tendant à voir calculer ses commissions à partir du 1er janvier 2009 est rejetée. Il ressort du jugement entrepris en appel que le tribunal du travail lui-même considérait que cette question n’avait pas encore été définitivement tranchée dans le jugement du 5 février 2013, mais qu’il devait encore statuer sur cette question.

Etant donné que le point litigieux a été tranché dans le jugement de première instance du 29 septembre 2015, qui a été entrepris par l’acte d’appel, le moyen manque en fait.

Sur l’unique moyen de cassation de l’arrêt du 19 décembre 2019:

L’unique moyen de cassation est « tiré de la violation, sinon de la fausse application, sinon du refus d’application de la loi, en l’espèce de l’article 1351 du Code civil. » L’unique moyen fait grief à l’arrêt du 19 décembre 2019 d’avoir méconnu l’autorité de la chose jugée attachée au jugement du tribunal du travail du 5 février 2013, qui avait décidé que la mission de l’expert se limitait à calculer le montant des commissions éventuellement redues à AK) pour la période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 3 Page 6, paragraphe 4 de l’arrêt du 15 mars 2018 2010, « déduction faite de la somme de 472.000 € qu’il a déjà reçu à ce titre ». La Cour d’appel aurait omis de rechercher si la déductibilité du montant de 472.000 € sur le montant des commissions à déterminer par l’expert n’était pas déjà acquise en vertu du jugement du 5 février 2013 devenu définitif.

Il ressort de l’arrêt du 15 mars 2018 que l’intimée avait invoqué en instance d’appel l’autorité de la chose jugée du jugement rendu en date du 5 février 2013 concernant la déductibilité de la somme de 472.000 €, de même que concernant le libellé de la mission d’expertise.4 Dans l’arrêt du 15 mars 2018, la Cour d’appel relève qu’« il résulte de la requête introductive d’instance ainsi que de la motivation des juges de première instance, reproduite ci-avant, que si AK) a accepté de déduire le montant de 472.000,- EUR du montant auquel il pouvait encore prétendre pour la période allant de 2004 à 2010, il n’a pas accepté d’imputer intégralement cette somme sur le montant auquel il pouvait encore prétendre pour la période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 2010. »5 En effet, à la page 7, paragraphe 9, le jugement du 5 février 2013 a indiqué que « pour le calcul des commissions qui lui sont encore redues, le requérant admet qu’il a déjà perçu le montant de 472.000.- € à titre de ses commissions pour les années 2004 à 2010, montant qu’il veut voir déduire de la somme à laquelle il peut encore prétendre au titre de ses commissions. » L’arrêt attaqué du 19 décembre 2019 ne fait que rappeler : « En effet, tel que développé dans l’arrêt du 15 mars 2018, il est indéniable qu’AK) avait accepté de déduire le montant de 472.000,- EUR du montant auquel il pouvait encore prétendre pour la période allant de 2004 à 2010, mais non de celui redû pour la seule période allant du 24 mai 2009 au 29 novembre 2010. Il ne s’est jamais contredit sur ce point. » Or, l’unique moyen n’est dirigé que contre l’arrêt du 19 décembre 2019, alors que la Cour d’appel a déjà retenu dans son arrêt du 15 mars 2018 quelles conclusions elle tirait de la formulation « malencontreuse » de la mission d’expertise confrontée à la motivation très claire du jugement du 5 février 2013.

S’y ajoute que le moyen indique que l’arrêt du 19 décembre 2019 est attaqué dans toutes ses dispositions, mais il n’indique pas la partie critiquée de la décision et il n’indique pas quelles sont les conclusions dont l’adjudication est demandée.

L’unique moyen dirigé contre l’arrêt du 19 décembre 2019 est irrecevable.

Subsidiairement :

4 Page 6, paragraphe 4 de l’arrêt du 15 mars 2018 5 Page 7, paragraphe 2 de l’arrêt du 15 mars 2018 Tout en reconnaissant que la formulation de la mission d’expertise était « malencontreuse », la Cour d’appel s’est référée à la motivation du jugement du 5 février 2013 pour clarifier ce qu’il fallait entendre par somme déjà reçue « à ce titre ».

Ce faisant, elle n’a pas contredit le jugement du 5 février 2013 en méconnaissant l’autorité de la chose jugée y attachée, mais elle a interprété le dispositif en se référant à la motivation non équivoque dudit jugement.

Le moyen n’est pas fondé.

Conclusion Le pourvoi est recevable.

Il n’est pas fondé.

Pour le Procureur Général d’Etat, Le 1er avocat général, Marie-Jeanne Kappweiler 13



Références :

Origine de la décision
Date de la décision : 04/02/2021
Date de l'import : 10/02/2021

Numérotation
Numéro d'arrêt : 19/21
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2021-02-04;19.21 ?

Source

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