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07/06/2024 | FRANCE | N°22/02785

France | France, Tribunal judiciaire de Versailles, Première chambre, 07 juin 2024, 22/02785


Minute n°





TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Première Chambre
JUGEMENT
07 JUIN 2024


N° RG 22/02785 - N° Portalis DB22-W-B7G-QSCV
Code NAC : 28Z

DEMANDEUR :

Monsieur [H], [E], [Z], [W] [G]
né le [Date naissance 6] 1944 à [Localité 27] (MAROC)
demeurant [Adresse 4]
[Localité 17]
représenté par Me Cindy FOUTEL, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant et Me Julie-Elyssa KRAIEM, avocat au barreau de ROUEN, avocat plaidant


DEFENDEURS :

Monsieur [K], [A], [N] [G]
né le [Date naissance 3]

1940 à [Localité 22] (MAROC)
demeurant [Adresse 10]
[Localité 17]

Madame [D] [E] [I] [G] épouse [L]
née le [Date naissance 11] 1951 à [Lo...

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Première Chambre
JUGEMENT
07 JUIN 2024

N° RG 22/02785 - N° Portalis DB22-W-B7G-QSCV
Code NAC : 28Z

DEMANDEUR :

Monsieur [H], [E], [Z], [W] [G]
né le [Date naissance 6] 1944 à [Localité 27] (MAROC)
demeurant [Adresse 4]
[Localité 17]
représenté par Me Cindy FOUTEL, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant et Me Julie-Elyssa KRAIEM, avocat au barreau de ROUEN, avocat plaidant

DEFENDEURS :

Monsieur [K], [A], [N] [G]
né le [Date naissance 3] 1940 à [Localité 22] (MAROC)
demeurant [Adresse 10]
[Localité 17]

Madame [D] [E] [I] [G] épouse [L]
née le [Date naissance 11] 1951 à [Localité 32] (37)
demeurant [Adresse 14]
[Localité 18]

Monsieur [B], [U], [R] [L]
né le [Date naissance 9] 1987 à [Localité 29] (75)
demeurant [Adresse 13]
[Localité 19]

Madame [C], [V] [Y] [L] épouse [F]
née le [Date naissance 1] 1989 à [Localité 29] (75)
demeurant [Adresse 15]
[Localité 16]

Madame [O], [E], [P] [L]
née le [Date naissance 2] 1990 à [Localité 29] (75)
demeurant [Adresse 8]
[Localité 17]

représentés par Me Céline BORREL, avocat au barreau de VERSAILLES, avocat postulant et Me Virginie MAX-CARLI, avocat au barreau du Val de Marne, avocat plaidant

ACTE INITIAL du 13 Avril 2022 reçu au greffe le 25 Avril 2022.

DÉBATS : A l'audience publique tenue le 05 Avril 2024 Madame DURIGON, Vice-Présidente, siégeant en qualité de juge unique, conformément aux dispositions de l’article 812 du Code de Procédure Civile, assistée de Madame BEAUVALLET, Greffier, a indiqué que l’affaire sera mise en délibéré au 07 Juin 2024.

EXPOSE DU LITIGE

De l’union de Monsieur [U] [G] et de Madame [V] [M] épouse [G], sont nés trois enfants :
-Monsieur [K] [G], né à [Localité 22] (MAROC) le [Date naissance 3] 1940 
-Monsieur [H] [G], né à [Localité 27] (MAROC) le [Date naissance 6] 1944 
-Madame [D] [G], née à [Localité 32] le [Date naissance 11] 1951.

Monsieur [U] [G] est décédé le [Date décès 12] 1982. La totalité des biens meubles et immeubles dépendant de la communauté sont revenus à Madame [V] [G], les époux ayant adopté le régime matrimonial de la communauté universelle.
Madame [V] [G] est décédée le [Date décès 5] 2017. Elle a laissé pour lui succéder ses trois enfants.
Le 7 novembre 2012, Madame [V] [G], a pris des dispositions testamentaires, par acte authentique dressé par Maître [J], notaire, en ces termes :
« Je déclare révoquer tous testaments antérieurs à ce jour. Je lègue à mes trois petits enfants, [B], [C] et [O] [L], le quart (1/4) des biens et droits immobiliers pouvant exister au jour de mon décès.
Le surplus de la succession reviendra à mes trois enfants ([D], [K] et [H]) par parts égales. Toutefois, il sera attribué à mes deux enfants [K] et [D] les meubles meublants, bibelots, objets divers pouvant dépendre de ma succession. Ces derniers étant très attachés aux souvenirs de la famille. La valeur de ces objets et meubles sera estimée au jour de mon décès et s’imputera sur leur part de succession.
[K] et [D] effectueront la répartition du mobilier d’un commun accord. Afin d’assurer l’harmonie je nomme mon gendre [X] [L] exécuteur testamentaire. »

Le projet de déclaration de succession fait état de l’existence de plusieurs contrats d’assurance-vie avec bénéficiaires :
-Un contrat souscrit auprès de la compagnie [20] le 13 mai 1995 et ayant pour bénéficiaire Monsieur [K] [G] ;
-Un contrat souscrit auprès de la compagnie [25] le 21 avril 1993 et ayant pour bénéficiaire Madame [D] [L] ;
-Un contrat souscrit auprès de la compagnie [25] le 22 mai 1992 et ayant pour bénéficiaire Madame [D] [L] ;
-Un contrat souscrit auprès de la compagnie [31] le 10 avril 2006 et ayant pour bénéficiaires Monsieur [B] [L] pour 1/3, Madame [C] [L] pour 1/3 et Madame [O] [L] pour un tiers.
L’actif brut de la succession est estimé par le notaire à 245.329,69 euros et son passif à 4.396,56 euros, soit un actif net de 240 933,13 euros.
Par mail en date du 28 février 2018, Monsieur [H] [G] a interrogé le notaire en charge de la succession, Maître [S] [T], sur le montant des contrats d’assurance-vie.
Par courrier en date du 7 avril 2018 en réponse à Monsieur [H] [G], Maître [S] [T] l’informait des montants des contrats d’assurance-vie et lui en fournissait un tableau récapitulatif détaillé.
Par acte de commissaire de justice signifié à étude le 13 avril 2022, Monsieur [H] [G] a fait assigner Monsieur [K] [G], Madame [D] [G], Monsieur [B] [L], Madame [C] [L] et Madame [O] [L] devant le tribunal judiciaire de Versailles aux fins de :
« Vu l’article L.131-3 du code des assurances
Vu le caractère manifestement excessif des primes des contrats souscrits par Madame [G],
-ORDONNER le rapport à la succession de Madame [G] le montant des primes versées dans les différents contrats d’assurance vie et notamment le contrat d’assurance vie souscrit auprès de la compagnie [20] en date du 13 mai 1995, les contrats d’assurance vie souscrits auprès d’[25] en date du 21 avril 1993 et 22 mai 1992, et les primes versées au contrat souscrit auprès de [31] en date du 10 avril 2006
-ORDONNER le rapport à la succession des sommes indûment perçues
-CONDAMNER les défendeurs aux dépens dont distraction au profit de Maître Julie-Elyssa KRAIEM pour ceux dont il aurait fait l’avance sans avoir reçu provision
-CONDAMNER le(s) défendeur(s) au paiement de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. »

Dans ses dernières conclusions signifiées le 27 janvier 2023, Monsieur [H] [G] demande au tribunal, de :
« -DÉBOUTER purement et simplement Monsieur [K] [G], Madame [D] [G], Madame [C] [L], Madame [O] [L] et Monsieur [B] [L] de leurs demandes, fins et conclusions
-ORDONNER le rapport à la succession de Madame [G] le montant des primes versées dans les différents contrats d’assurance vie et notamment le contrat d’assurance vie souscrit auprès de la compagnie [20] en date du 13 mai 1995, les contrats d’assurance vie souscrit auprès d’[25] en date 21 avril 1993 et 22 mai 1992, et les primes versées au contrat souscrit auprès de [31] en date du 10 avril 2006
-ORDONNER le rapport à la succession des sommes indûment perçues
-CONDAMNER les défendeurs aux dépens dont distraction au profit de Maître Julie-Elyssa KRAIEM pour ceux dont il aurait fait l’avance sans avoir reçu provision ;
-CONDAMNER le(s) défendeur(s) au paiement de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile. »
Monsieur [H] [G] soutient, au visa de l’article L.132-1 3 du code des assurances, que les primes versées aux héritiers dans le cadre des contrats d’assurance-vie conclus par Madame [V] [G] présentent un caractère manifestement exagéré eu égard aux facultés de cette dernière, justifiant que ces sommes soient rapportées à la succession. Il fait valoir qu’il est constant que ces dispositions s’interprètent à l’aune de l’âge, de la situation patrimoniale et familiale du souscripteur ainsi que de l’utilité de la souscription, ces deux critères devant être appréciés au moment du versement des primes. Monsieur [H] [G] estime qu’au regard des revenus et charges annuels de Madame [V] [G], qui étaient selon lui respectivement de 42.300 euros et de 54.700 euros en 2016, cette dernière n’était pas en capacité financière de consentir le versement de primes aussi élevées. Il ajoute que le patrimoine immobilier de Madame [V] [G], estimé à 220.000 euros, ne peut pas être qualifié d’important. Monsieur [H] [G] soutient que le montant des primes versées est égal au triple voire au quadruple des revenus de Madame [V] [G], revêtant un caractère manifestement excessif et justifiant selon lui que les primes ainsi versées soient rapportées à la succession.
Il conteste le fait que Madame [V] [G] disposait d’un patrimoine important au moment des versements des primes d’assurance-vie, affirmant qu’en 1997, date du premier versement, la maison de « [Adresse 26] » et l’appartement de [Localité 28] avaient été vendus et qu’elle ne disposait plus comme revenus que de la pension de réversion de son époux défunt ainsi que de revenus fonciers, qui demeuraient inférieurs à ses charges. Monsieur [H] [G] affirme par ailleurs que l’âge de Madame [V] [G] au moment des versements révèle l’inutilité de l’assurance vie pour cette dernière et la disparition d’un quelconque aléa pour les bénéficiaires. Il fait en effet valoir qu’elle était âgée de 78, 83 et 87 ans lors des trois versements et estime, eu égard à l’espérance de vie moyenne des femmes en France aujourd’hui qui est fixée à 82 ans, que ces âges avancés font perdre toute utilité à l’assurance-vie pour Madame [V] [G], révélant son objectif de faire des donations déguisées à Monsieur [K] et Madame [D] [G] ainsi qu’à ses petits-enfants, et partant de le déshériter.

Dans leurs dernières conclusions signifiées le 27 mars 2023, Monsieur [K] [G], Madame [D] [G] épouse [L], Monsieur [B] [L], Madame [C], [L] épouse [F] et Madame [O] [L] demandent au tribunal de :
« Vu l’article L132-13 du code des Assurances.
-DÉBOUTER purement et simplement Monsieur [H] [G] de toutes ses demandes, fins et conclusions.
-CONDAMNER Monsieur [H] [G] à verser à Madame [D] [G] épouse [L], Monsieur [K] [G], Madame [C] [L], Madame [O] [L], et Monsieur [B] [L] la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du CPC.
-CONDAMNER Monsieur [H] [G] aux dépens. »
Ils contestent le caractère disproportionné des primes versées par Madame [V] [G], dont ils estiment que Monsieur [H] [G] ne rapporte pas la preuve. Ils font valoir que Madame [V] [G] disposait d’un patrimoine immobilier important, notamment d’un appartement dans le [Localité 7] qu’elle a vendu en 1990 pour acheter un appartement à [Localité 32] moyennant le prix de 291.178 euros. Ils font aussi état d’une maison de « [Adresse 26] » qu’elle a vendue en 1995 au prix de 137.201 euros et d’un immeuble qu’elle détenait en indivision avec ses frères à [Localité 21], vendu en 2016 et lui rapportant 136.500 euros.
Les défendeurs soutiennent que Madame [V] [G] effectuait des placements financiers, dans un premier temps en actions et SICAV, avant de placer son argent sur des contrats d’assurance-vie qu’elle considérait comme plus sûrs. Ils estiment que lors des différents versements effectués, ces investissements n’excédaient pas ses facultés financières étant donné qu’elle possédait des liquidités sous forme d’actions et de SICAV. Ils qualifient les versements effectués de restructurations de portefeuille et affirment qu’à la date des différents versements, Madame [V] [G] avait bien la capacité financière d’y procéder. Ils soutiennent en outre que les placements effectués étaient destinés prioritairement à régler les charges quotidiennes de Madame [V] [G], cette dernière effectuant régulièrement des rachats partiels sur ses contrats d’assurance-vie afin de couvrir ses dépenses de personnel et de répondre à ses besoins croissants de prise en charge. Enfin, les défendeurs précisent que Monsieur [K] [G] et Madame [D] [G] ont pris en charge seuls le paiement, après la succession, de la somme de 43.000 euros au titre du solde de charges après le décès de leur mère, « au regard des capitaux d’assurance vie dont ils sont bénéficiaires », acte témoignant selon eux de leur volonté d’utiliser ces primes d’assurance-vie pour couvrir les charges de Madame [V] [G].
Le tribunal renvoie expressément aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions, en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance ce clôture a été prononcée le 19 septembre 2023.
L’affaire a été appelée à l’audience du 5 avril 2024 et mise en délibéré au 7 juin 2024.

MOTIFS

Sur la demande tendant au rapport des primes d’assurance-vie à la succession formée par Monsieur [H] [G]
L’article 843 alinéa 1 du code civil dispose que tout héritier, « même ayant accepté à concurrence de l’actif », venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement : il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient été faits expressément « hors part successorale ».
L’article L.132-12 du code des assurances dispose : « Le capital ou la rente stipulée payable lors du décès de l’assuré à un bénéficiaire déterminé voire ses héritiers ne font pas partie de la succession de l’assuré.
Le bénéficiaire, quelles que soient la forme et la date de la désignation, est réputé y avoir eu seul droit à partir du jour du contrat même si son acceptation est postérieure à la mort de l’assuré. »
L’article L.132-13 du code des assurances précise que :
« Le capital ou la rente payable au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles de rapport à la succession ni à celle de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.
Une exception existe toutefois pour le cas où les primes versées par le souscripteur sont manifestement exagérées eu égard à ses facultés financières.
Ces règles ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés. »
Conformément aux dispositions de l’article L.132-13 alinéa 2 du code des assurances, lorsque les primes ont été manifestement exagérées eu égard aux facultés du contractant, les règles de rapport et de la réduction ont vocation à s’appliquer.
Il appartient aux juges du fond d’apprécier si le montant des primes d’assurance versées ont été manifestement exagérées par rapport aux facultés du contractant au moment de leur versement au regard de l’âge, des situations patrimoniales et familiales du souscripteur.
Il appartient à Monsieur [H] [G] de rapporter la preuve du caractère manifestement exagéré des primes d’assurances versées par Madame [V] [G].
En l’espèce, il ressort des débats que les défendeurs ont respectivement perçu, après le décès de Madame [V] [G], les sommes suivantes :
- Monsieur [K] [G] a perçu 279.095,00 euros au titre du contrat d’assurance-vie [20] n°10726651, pour lequel Madame [V] [G] a versé à la souscription, le 13 mai 1995, 47.887 euros ;
- Madame [D] [G] a perçu 289.487,00 euros :
- Au titre du contrat d’assurance-vie [25] n°413 [25] Evolution Patrimoine n°00174043, pour lequel Madame [V] [G] a versé à la souscription, le 11 août 2006, 55.421,88 euros ;
- Au titre du contrat d’assurance-vie [25] n°136 Cervin 13605227 pour lequel Madame [V] [G] a versé à la souscription, les 1er novembre 1991 et 1er juin 1992, 19.818,37 euros et 15.963,25 euros ;
- Monsieur [B] [L], Madame [C] [L] et Madame [O] [L] ont respectivement perçu 26.987,90 euros au titre du contrat d’assurance-vie [31] n°216/64488778, pour lequel Madame [V] [G] a versé, à la souscription, le 10 avril 2006, la somme de 15.300 euros.
Il ressort du projet de déclaration de succession et des tableaux des primes et rachats partiels d’assurance-vie de Madame [V] [G] produits par les défendeurs ainsi que du courrier de Maître [T], notaire adressé à M. [H] [G] le 7 avril 2018 les éléments suivants :
- S’agissant tout d’abord du contrat [20] n°10726651 ayant pour bénéficiaire Monsieur [K] [G], il apparaît que les primes versées après les 70 ans de Madame [V] [G] s’élèvent à 53.986,83 euros et les primes versées avant s’élèvent à la somme de 84.524 euros ; les opérations suivantes ont été enregistrées :
13/05/1995 : un versement initial de 47.887 euros ;01/02/2003 : un versement de 6.100 euros.- S’agissant du contrat d’assurance-vie souscrit auprès de [25] Evolution 413 Patrimoine n°00174043 ayant pour bénéficiaire Madame [D] [G], il apparaît que les primes versées après les 70 ans de Madame [V] [G] s’élèvent à la somme de 30.489,80 euros ; les opérations suivantes ont été enregistrées :
11/08/2006 : un versement initial de 55.421,88 euros ;03/09/2014 : un versement de 1.022,42 euros.- S’agissant du contrat [25] 136 Cervin n°13605227 ayant également pour bénéficiaire Madame [D] [G] ; il apparaît que les primes versées après les 70 ans de Madame [V] [G] s’élèvent à la somme de 26.634,68 euros et les primes versées avant s’élèvent à la somme de 84.524 euros ; les opérations suivantes ont été enregistrées au vu du tableau produit :
01/11/1991 : un versement initial de 19.818,37 euros ;01/06/1992 : un versement de 15.963,25 euros ;01/06/1996 : un versement de 10.671,43 euros ;18/01/1997 : un versement de 106.714,31 euros.- S’agissant enfin du contrat d’assurance vie [31] n°216/64488778, ayant pour bénéficiaires les petits-enfants de Madame [V] [G], il apparaît que les primes versées après les 70 ans de Madame [V] [G] s’élèvent à la somme de 80.963,70 euros ; les opérations suivantes ont été enregistrées :
10/04/2006 : versement initial de 15.300 euros ;19/07/2016 : versement de 110.000 euros.Il convient donc de rechercher si à l’époque des versements des primes par Madame [V] [G], leurs montants étaient disproportionnés au regard de la situation financière de cette dernière notamment.
Il ressort des débats qu’après le décès de son époux en 1982, avec qui elle était mariée sous le régime de la communauté universelle, Madame [V] [G] était propriétaire d’un appartement à [Localité 7] dont les défendeurs exposent que sa valeur était en 1981 de 121.959 euros, une maison de campagne « [Adresse 26] » estimée selon les défendeurs à 103.665 euros en 1981.
Monsieur [H] [G] estime par ailleurs que le bien dont Madame [V] [G] était propriétaire à [Localité 28] valait 200.000 euros.
Les défendeurs indiquent que Madame [V] [G] a vendu son appartement à [Localité 28] en 1990 et a acquis un appartement dans une [Adresse 30] à [Localité 32] où elle s’est installée par la suite.
Il ressort des conclusions des défendeurs que Madame [V] [G] a acquis en indivision avec ses frères et sœur un immeuble à [Localité 21], qui lui a permis de percevoir des revenus fonciers. Ce bien a été vendu le 8 juillet 2016, la part revenant à Madame [V] [G] s’élevant à la somme de 136.500 euros, selon les défendeurs.
En 1995, la maison de campagne a été vendue moyennant le versement de 137.204 euros au vu des conclusions des défendeurs (page 6 des dernières conclusions).
Il résulte de ces éléments que Madame [V] [G] disposait d’un patrimoine immobilier qui a évolué au fil du temps.
Par ailleurs, comme l’expose Monsieur [H] [G], sa mère a perçu des revenus s’élevant à la somme de 42.300 euros pour l’année 2016, comme il en ressort de sa déclaration d’impôts pour l’année 2016, avec des charges s’élevant à 54 .00 euros la même année.
En outre, il doit être relevé qu’en 1995, au vu des déclarations des défendeurs, Madame [V] [G] disposait, sur un portefeuille SICAV et d’actions au [24] ([23]), de 169 107 euros de liquidités ainsi qu’une assurance vie de 87.200 euros ; une assurance PERCAP de 9 300 euros ; un portefeuille d’actions et obligations de 19 056 euros ainsi que de 45 735 euros sur un PEL.
Il convient de relever qu’en 1997, date du versement de la prime de 106.714,31 euros sur le contrat d’assurance-vie [25] Cervin ayant pour bénéficiaire Madame [D] [G], Madame [V] [G] venait de vendre son bien immobilier « [Adresse 26] » comme l’affirment les défendeurs au vu des tableaux récapitulatifs qu’ils produisent. En outre, ces derniers allèguent que Madame [V] [G] a perçu en 2016 la somme de 136.500 euros résultant de la vente de l’immeuble sis à [Localité 21] et que la même année, elle a effectué un versement de 110.000 euros sur le contrat d’assurance-vie [31] ayant pour bénéficiaires ses petits-enfants. Il ressort donc de ces éléments qu’en 1997 et 2016, dates des versements des primes les plus élevées, Madame [V] [G] disposait de facultés financières supérieures à ses facultés habituelles.
Il ressort de l’ensemble de ces éléments qu’au moment du versement des différentes primes, Madame [V] [G] disposait non seulement d’un patrimoine immobilier important mais également de liquidités. Il ne peut donc être raisonnablement soutenu que le montant des primes versées est disproportionné par rapport à ses facultés contributives.
Monsieur [H] [G] ne démontre pas le caractère disproportionné des primes versées par rapport aux revenus et au patrimoine de Madame [V] [G], étant en outre précisé que cette dernière a procédé à différents versements de primes à des âges différents et a permis de prévoir la gestion de ses dépenses, les défendeurs exposant notamment que des rachats d’assurance-vie ont été effectués pour faire face au paiement de frais liés à la résidence de service dans laquelle Madame [V] [G] vivait.
Au surplus, il doit être relevé que les versements de primes relèvent de la liberté contractuelle de Madame [V] [G], cette dernière n’étant pas dans l’impossibilité d’exprimer librement son consentement ; le seul âge de Madame [V] [G] ne pouvant permettre de démontrer que les primes étaient manifestement exagérées au vu de son patrimoine et ses liquidités.
Monsieur [H] [G], qui succombe dans la charge de la preuve qui lui incombe, sera donc débouté de ses demandes des rapports des primes versées par Madame [V] [G] sur ses différents contrats d’assurance-vie.

Sur les autres demandes

En application de l’article 696 du code procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
Monsieur [H] [G], partie qui succombe, sera condamné aux dépens de l’instance.
Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.
En l’espèce, l’équité et les liens familiaux existant entre les parties commandent de ne pas faire droit aux demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
En conséquence, Monsieur [H] [G] sera débouté de ses demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Monsieur [K] [G], Madame [D] [G] épouse [L], Monsieur [B] [L], Madame [C] [L] épouse [F] et Madame [O] [L] seront également déboutés de leurs demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’exécution provisoire de la présente décision est de droit.
Toutefois, eu égard au sens de la présente décision, il y a lieu d’écarter l’exécution provisoire.
PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant contradictoirement par jugement rendu publiquement et en premier ressort,

DÉBOUTE Monsieur [H] [G] de toutes ses demandes, 
DÉBOUTE Monsieur [K] [G], Madame [D] [G] épouse [L], Monsieur [B] [L], Madame [C] [L] épouse [F] et Madame [O] [L] de leur demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [H] [G] aux dépens de l’instance ;
ÉCARTE l’exécution provisoire de la présente décision.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 07 JUIN 2024 par Madame DURIGON, Vice-Présidente, assistée de Madame BEAUVALLET, greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Versailles
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : 22/02785
Date de la décision : 07/06/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-06-07;22.02785 ?
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