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23/05/2024 | FRANCE | N°22/08758

France | France, Tribunal judiciaire de Marseille, 1ère chambre cab2, 23 mai 2024, 22/08758


TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE


JUGEMENT N°24/ DU 23 Mai 2024


Enrôlement : N° RG 22/08758 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2IBM

AFFAIRE : Mme [Y] [T] [X]( Me Leila MHATELI)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE


DÉBATS : A l'audience Publique du 14 Mars 2024


COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente (juge rapporteur)
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : ALL

IONE Bernadette

En présence de PORELLI Emmanuelle, Vice-Procureur, Procureur de la République

Vu le rapport fait à l’audience,

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TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

PREMIERE CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT N°24/ DU 23 Mai 2024

Enrôlement : N° RG 22/08758 - N° Portalis DBW3-W-B7G-2IBM

AFFAIRE : Mme [Y] [T] [X]( Me Leila MHATELI)
C/ M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE

DÉBATS : A l'audience Publique du 14 Mars 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : SPATERI Thomas, Vice-Président
Assesseur : JOUBERT Stéfanie, Vice-Présidente (juge rapporteur)
Assesseur : BERGER-GENTIL Blandine, Vice-Présidente

Greffier lors des débats : ALLIONE Bernadette

En présence de PORELLI Emmanuelle, Vice-Procureur, Procureur de la République

Vu le rapport fait à l’audience,

A l'issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 23 Mai 2024

Jugement signé par SPATERI Thomas, Vice-Président et par BERARD Béatrice, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en premier ressort

NOM DES PARTIES

DEMANDERESSE

Madame [Y] [T] [X]
née le 09 Juin 1987 à [Localité 2] (COMORES)
de nationalité Comorienne, demeurant [Adresse 1]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 130550012022009959 du 14/06/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Marseille)
représentée par Me Leila MHATELI, avocat au barreau de MARSEILLE,

C O N T R E

DEFENDERESSE

M. LE PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE DE MARSEILLE, près le TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE en son parquet- Place Monthyon - 6, Rue Joseph Autran - 13281 MARSEILLE CEDEX 6

dispensé du ministère d’avocat

EXPOSE DU LITIGE

Le 27 mai 2021, [Y] [T] [X], née le 9 juin 1987 à [Localité 2] (Comores), a sollicité la délivrance d’un certificat de nationalité française sur le fondement de sa filiation avec son père de nationalité française.

Le 28 mai 2021, le directeur des services de greffe judiciaires du Tribunal judiciaire de Marseille lui a opposé un refus, au motif que sa filiation à l’égard de [T] [X] n’avait été établie que postérieurement à sa majorité.

Par acte en date du 27 juillet 2022, [Y] [T] [X] a fait assigner le Procureur de la République devant le Tribunal judiciaire de Marseille aux fins de voir ordonner la délivrance d’un certificat de nationalité française.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 7 septembre 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, elle demande au Tribunal de :
- la recevoir en toutes ses demandes, fins et conclusions ;
- juger illégal le refus de lui accorder un certificat de nationalité;
- juger rapportée la preuve de sa filiation d’avec M. [T] [X], père ;
- juger rapportée et justifiée la preuve de sa nationalité ;
- ordonner qu’il lui soit accordé un certificat de nationalité française ;
- ordonner la mention de la décision à intervenir sur son acte de naissance ;
- statuer ce que de droit en ce qui concerne les dépens.

Elle soutient que sa filiation à l’égard de son père, [T] [X] X, a été établie avant sa naissance, d’autant plus qu’elle est née pendant le mariage de ses parents; que par jugement rendu le 18 janvier 2022, le tribunal de première instance de [Localité 2] constate en effet que «Madame et Monsieur [T] [X] [Y] et [U] [T] [X], nés respectivement le 25 avril 1987 à [Localité 2] et le 9 juin 1987 à la maternité de [Localité 2] sont les enfants de [T] [X] né vers 1962 à [Localité 2] »; que par jugement du 18 février 2019, le tribunal de première instance de [Localité 2] constate le mariage de ses parents en date du 7 juillet 1984, jugement porté en marge de l’acte de mariage des parents; que par ailleurs, elle a produit l’original de son acte de naissance et nullement une copie, l’original des pièces ayant été déposé au greffe, dûment légalisé; que le Parquet sollicite des documents dont il sait qu’elle est dans l’impossibilité de les obtenir, et il appartient au Procureur de la République de les produire, et notamment la copie de la déclaration de nationalité de [V] [X]; qu’en tout état de cause, la nationalité de [T] [X] est établie par la production de son certificat de nationalité; que la possession d’état de français de [T] [X] ne fait donc aucun doute puisqu’il est toujours en possession de ses documents habituels justifiant de son identité outre son certificat de nationalité.

En défense, dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 23 octobre 2023 auxquelles il est expressément référé pour plus ample exposé des moyens, le Procureur de la République demande au Tribunal de :
- dire que la procédure est régulière au regard de l’article 1040 du Code de procédure civile ;
- débouter [Y] [T] [X] de l’ensemble de ses demandes ;
- dire que [Y] [T] [X], se disant née le 9 juin 1987 à [Localité 2] (Comores), n’est pas de nationalité française ;
- ordonner la mention prévue par l'article 28 du Code civil ;
- la condamner aux dépens.

Il rappelle que le tribunal n’a pas compétence pour ordonner la délivrance d’un certificat de nationalité française, de sorte que cette demande est irrecevable.
Il fait valoir qu’en l’absence de production de l’acte de naissance d’[V] [X], qui serait né en 1938 à [Localité 2] (Comores), et de la déclaration de nationalité française qui aurait été souscrite le 14 septembre 1977, la preuve de la nationalité française de Monsieur [X] n’est pas rapportée, pas plus que la preuve d’un lien de filiation légalement établi entre Monsieur [X] et [V] [X]; qu’un livret de famille ne constitue pas un acte de l’état civil permettant d’établir un lien de filiation.

La procédure a été clôturée à la date du 13 février 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Le récépissé prévu à l’article 1040 du Code de procédure civile a été délivré.

L’article 30 du Code civil dispose que lorsque l’individu qui revendique la nationalité française n’est pas lui même titulaire d’un certificat de nationalité française, la charge de la preuve de sa nationalité lui incombe.

En l’espèce, [Y] [T] [X] n’est pas titulaire d’un certificat de nationalité française, de sorte qu’il lui appartient de rapporter la preuve qu’elle remplit les conditions pour prétendre à la nationalité française.

Le requérant doit produire des pièces d’état civil fiables au sens de l’article 47 du Code civil selon lequel tout acte de l’état civil des français et des étrangers faits en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d’autres actes ou pièces détenues, des données extérieures ou des éléments tirés de l’acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondant pas à la réalité.

Sauf convention internationale, les copies ou extraits d’actes de l’état civil établis par les autorités étrangères, doivent, pour recevoir effet en France, être légalisés. La France n’a conclu aucune convention avec les Comores afin de dispenser ce pays de telles formalités.

La légalisation est la formalité par laquelle est attestée la véracité de la signature, la qualité en laquelle le signataire de l'acte a agi et, le cas échéant, l'identité du sceau ou timbre dont cet acte est revêtu. Elle donne lieu à l'apposition d'un cachet dont les caractéristiques sont définies par arrêté conjoint des ministres chargés de la justice et des affaires étrangères. La légalisation doit émaner des ambassadeurs et chefs de poste consulaires français en poste dans le pays d’établissement de l’acte, ou émaner en application de la coutume internationale de l’ambassadeur ou autorité consulaire de ce pays en France.

En l’espèce, pour justifier de son état civil, [Y] [T] [X] produit une copie d’acte de naissance délivrée le 13 décembre 2021 par [O] [Z].
La mention de légalisation apposée sur cette copie émane d’ANDABY [W], en qualité de chef de la chancellerie, pour le Ministère des Affaires étrangères à [Localité 2], à côté d’un timbre humide “Ministère des Affaires étrangères et de Coopération internationale”.
Elle légalise la signature figurant sur l’acte sans préciser ni la qualité de la personne dont la signature est légalisée.
Cette légalisation incomplète, qui ne peut valablement attester de la qualité en laquelle le signataire de l’acte a agi, n’émane pas d’une autorité habilitée pour légaliser les actes d’état civil.

Cet acte est donc dépourvu de toute force probante au sens de l’article 47 du Code civil.

Ne disposant pas d’un état civil fiable, [Y] [T] [X] doit être déboutée de ses demandes.

Son extranéité sera donc constatée.

Il y a lieu d’ordonner la mention prévue par l’article 28 du Code civil.

Succombant, [Y] [T] [X] sera condamnée aux dépens, qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière d’aide juridictionnelle.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et en premier ressort

Constate que le récépissé prévu par l’article 1040 du Code de procédure civile a été délivré ;

Déboute [Y] [T] [X] de ses demandes ;

Constate l’extranéité de [Y] [T] [X], née le 9 juin 1987 à [Localité 2] (Comores);

Ordonne la mention prévue par l’article 28 du Code civil ;

Condamne [Y] [T] [X] aux dépens, qui seront recouvrés selon les règles applicables en matière d’aide juridictionnelle.

AINSI JUGE PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA PREMIERE CHAMBRE CIVILE DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE LE 23 MAI 2024.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Tribunal judiciaire de Marseille
Formation : 1ère chambre cab2
Numéro d'arrêt : 22/08758
Date de la décision : 23/05/2024
Sens de l'arrêt : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;tribunal.judiciaire;arret;2024-05-23;22.08758 ?
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