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05/01/2022 | FRANCE | N°19-25910

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 05 janvier 2022, 19-25910


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 janvier 2022

Rejet non spécialement motivé

Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10004 F-D

Pourvoi n° F 19-25.910

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE,

DU 5 JANVIER 2022

La société DM Elektron, société par actions de droit italien, dont le siège est Via [Adresse 2] (Italie), a formé le pourv...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

DB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 5 janvier 2022

Rejet non spécialement motivé

Mme DARBOIS, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10004 F-D

Pourvoi n° F 19-25.910

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 5 JANVIER 2022

La société DM Elektron, société par actions de droit italien, dont le siège est Via [Adresse 2] (Italie), a formé le pourvoi n° F 19-25.910 contre l'arrêt rendu le 5 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (chambre Internationale, pôle 5, chambre 16), dans le litige l'opposant à la société Socomec, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations écrites de la SARL Ortscheidt, avocat de la société DM Elektron, de Me Brouchot, avocat de la société Socomec, et l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 novembre 2021 où étaient présentes Mme Darbois, conseiller doyen faisant fonction de président, Mmes Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Champalaune, conseiller, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l'article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société DM Elektron aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société DM Elektron et la condamne à payer à la société Socomec la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SARL Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société DM Elektron.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société DM Elektron de ses demandes en responsabilité contractuelle ;

AUX MOTIFS QU'il ressort de l'accord de logistique conclu le 7 juin 2001 et notamment de son paragraphe 2 que la société Socomec s'est engagée, afin que la société DM Elektron puisse négocier le meilleur prix possible avec les fournisseurs de matières premières, à lui fournir « les données concernant le volume global » des commandes « pour les 12 mois suivants » dans le 3e mois du début de cet accord et qu'ensuite « l'horizon de prévision » était fixé à 6 mois ; qu'aux termes de l'article 3 de ce contrat intitulé « Commandes », il est porté face à la rubrique 3.2 intitulée « cycle de commande » la mention « 3 mois » ; qu'en outre au sein de l'article 2 consacré aux « prévisions », l'article 2.6 intitulé « pourcentage minimum de quantité garanti » comporte les mentions suivantes : « 80 % pour 4 et 5 mois ; 50 % pour 6 mois » ainsi que sous la rubrique intitulée « Notes » les observations suivantes : « Les matériels se référant au non-respect de la prévision seront débités au client, au cas où les commandes relatives ne puissent être annulées. En cas d'annulation, les frais relatifs, s'il y en a, seront débités au client » ; qu'il ressort de ces clauses, qui distinguent clairement les « prévisions » des « commandes » que contrairement à ce que soutient la société DM Elektron, l'accord de logistique, qui se distingue des ventes prises en son exécution, ne comporte pas expressément d'obligation d'achat par la société Socomec et ce même si un prévisionnel sur 6 mois est adressé à la société DM Elektron ; que dès lors, ces seules mentions sont insuffisantes pour caractériser une commande ferme par le seul envoi d'un prévisionnel par la société Socomec à la société DM Elektron d'acquérir un minimum de quantité garantie correspondant à 100 % du prévisionnel pour les 3 premiers mois, 80 % pour les 4e et 5e mois et 50 % pour le 6e mois ; qu'en outre, il ne ressort nullement des termes de cet accord que, quand bien même une commande selon le cycle de 3 mois a été passée par la société Socomec, l'absence de correspondance entre la quantité de produit commandé et celle figurant sur le prévisionnel à 6 mois, emporte une obligation pour la société Socomec de se porter acquéreur de 100 % des quantités figurant dans le prévisionnel pour les 3 premiers mois, puis 80 % pour les 4e et 5e mois et 50 % pour le 6e mois ; qu'en effet, la clause 2.6 ne vise pas l'acquisition des produits mais évoque uniquement le remboursement des matériels acquis pour la fabrication des cartes et ce seulement « au cas où les commandes relatives ne puissent pas être annulées » étant ajouté qu'en cas d'annulation, les « frais s'il y en a seront débités au client » ; qu'il s'agissait ainsi manifestement de faire supporter à la société Socomec le coût des matières premières qui ont été acquises par la société DM Elektron pour satisfaire le prévisionnel de commandes au cas où finalement la quantité de cartes commandée est inférieure à celle annoncée dans le prévisionnel ; qu'une telle interprétation du contrat est en outre cohérente avec la justification mentionnée à l'article 2.5 de l'envoi par la société Socomec d'un prévisionnel puisque cet envoi était destiné non pas à engager la société Socomec à acquérir les quantités mentionnées mais à permettre à la société DM Elektron, en ayant une visibilité sur 6 ou 12 mois, de négocier les meilleurs prix pour l'acquisition des matières premières ; qu'au regard de ces clauses contractuelles, qui ne consacrent nullement une obligation pour la société Socomec d'acquérir les cartes imprimées selon le prévisionnel prévu à l'article 2, de rejeter les demandes de la société DM Elektron portant sur la condamnation de la société Socomec à lui payer la somme de 1.612.454 € au titre de l'inexécution des commandes prévisionnelles du mois de juin 2011 ; qu'à titre subsidiaire, la société DM Elektron sollicite la réparation des préjudices qu'elle aurait subis du fait du non-respect par la société Socomec des commandes prévisionnelles et notamment le remboursement des stocks de cartes commandées et non retirées entre juillet et septembre 2011, des matières premières et des frais de stockage ; que, comme indiqué ci-dessus, le non-respect des prévisions ne pouvait contraindre la société Socomec à supporter le paiement des cartes imprimées mais uniquement si la commande en avait été faite, le coût des matières premières acquises par la société DM Elektron dont les commandes n'ont pu être annulées par elle ainsi que le remboursement des frais d'annulation, si toutefois il y en avait ; que la société DM Elektron sera en conséquence déboutée de sa demande de voir condamnée la société Socomec à lui payer la somme de 300.076,38 € correspondant au prix des marchandises pour les mois de juillet, août et septembre 2011 étant observé qu'elle ne justifie en outre d'aucune commande ferme de la part de la société Socomec pour cette période ; que la dernière commande a été passée en avril 2001, couvrant des achats jusqu'en juin 2011, comme en atteste un courriel émanant de cette dernière en date du 20 avril 2011 aux termes duquel celle-ci énumère certaines difficultés dans l'application du contrat de logistique et indique néanmoins que les commandes sont confirmées jusqu'en juin 2011 et que les prévisions transmises courent « jusqu'en mars 2012 » ; que s'agissant du remboursement des matières premières, il est exact que la société Socomec ayant confirmé une commande en avril 2011 ainsi qu'un prévisionnel courant jusqu'en mars 2012, est tenue au remboursement des matières premières acquises par la société DM Elektron à hauteur de 80 % en juillet et août 2011 et de 50 % en septembre 2011 (la question ne se posant pas pour les 3 premiers mois compris entre avril et juin 2011, puisqu'il n'est pas contesté que les produits ont été achetés et payés sur cette période) ; que cependant, la société DM Elektron réclame une somme de 331.192,37 € à ce titre sans produire le détail de son calcul, les pièces 13 à 15, faute de faire apparaître un montant cumulé, ne permettant pas de confirmer ce montant ou d'expliciter le mode de calcul pour y parvenir et ce d'autant que la pièce n° 14 porte sur des factures dont les plus anciennes remontent à novembre 2009, de sorte que la société DM Elektron n'explique pas en quoi la société Socomec serait tenue de payer une matière première stockée et acquise à cette date alors même que les relations commerciales étaient en cours entre les parties à cette époque ; qu'en outre, il y a lieu de constater que s'agissant des matières premières dues pour la période de juillet à septembre 2011, la société DM Elektron ne justifie nullement de l'impossibilité pour elle d'avoir pu faire annuler ces commandes comme le stipule l'accord de logistique d'une part, et/ou que des frais d'annulation auraient été payés par elle ; qu'il convient en conséquence, en l'absence de preuves pertinentes fournies par la société DM Elektron, que la seule production de listings non commentés ne peut suppléer, de la débouter du chef de ces demandes ; qu'il en est de même des frais de stockage dont la société DM Elektron sollicite le remboursement à hauteur d'une somme de 17.225 € qui n'est étayée par aucune pièce ;

1°) ALORS QUE la cour d'appel, après avoir retenu que le non-respect des prévisions ne pouvait contraindre la société Socomec à supporter le paiement des cartes imprimées mais uniquement le coût des matières premières acquises par la société DM Elektron dont les commandes n'ont pu être annulées, en a déduit que la société Socomec ne pouvait être condamnée à payer le montant des factures produites par la société DM Elektron, correspondant au prix des cartes imprimées présentes dans ses entrepôts, entièrement finalisées conformément aux commandes prévisionnelles de la société Socomec (arrêt, p.13, § 66 et 67) ; que la cour d'appel a par ailleurs expressément constaté que le taux de marge de la société DM Elektron était de 21,77 % (arrêt, p. 20, § 119) ; qu'en écartant intégralement la demande d'indemnisation formée par la société DM Elektron au titre des cartes finalisées, sans rechercher si le préjudice subi, s'il ne pouvait correspondre au montant des factures, ne s'élevait pas à 78,33 % de leur montant, représentant le coût des cartes imprimées après déduction de la marge de la société DM Elektron, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ;

2°) ALORS QU'à l'appui de sa demande tendant à la condamnation de la société Socomec à lui payer un montant de 331.192,37 € au titre des matières premières, comprenant les cartes quasi-finalisées, les composants présents dans l'entrepôt de DM Elektron et les composants commandés par DM Elektron à ses propres fournisseurs, hors Socomec, la société DM Elektron avait invoqué, d'une part, la pièce n° 13 comportant un tableau qui faisait apparaître un montant total de 6.894,89 € au titre des « cartes quasi finalisées », de deuxième part la pièce n° 14 comportant un tableau intitulé « composant en stock et achetés – commandes qui ne sont pas encore soldées », indiquant un montant de 301.329,70 € au titre du « total Socomec », de troisième part la pièce n° 15 comportant un tableau intitulé « composant achetés : commandes qui ne sont pas encore soldées » qui faisait ressortir, après déduction des montants correspondant aux commandes effectuées auprès de Socomec, un montant de 22.967,80 € ; qu'ainsi, il résultait des pièces 13 à 15 produites par la société DM Elektron que la somme de 331.192,37 € réclamée correspondait au total des sommes de 6.894,89 €, 301.329,70 € et 22.967,80 €, établies par les trois tableaux figurant dans ces pièces ; qu'en affirmant néanmoins que les pièces 13 à 15 ne permettaient pas de confirmer le montant de 331.192,37 € réclamé par la société DM Elektron ou d'expliciter le calcul pour parvenir à cette somme, la cour d'appel a dénaturé les termes claires et précis des pièces 13, 14 et 15 susvisées, en méconnaissance de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

3°) ALORS QUE la société DM Elektron avait, au soutien de sa demande tendant à la condamnation de la société Socomec au paiement du montant des composants présents dans l'entrepôt de DM Elektron, invoqué la pièce n° 14 intitulée « composants achetés pour les besoins du contrat », qui comportait, d'une part, un tableau intitulé « Liste de toutes les factures », mentionnant les numéros de factures d'achat de composants pour la période comprise entre le 3 novembre 2009 et le 16 janvier 2012 et n'indiquant aucun montant, d'autre part un tableau intitulé « composants en stock et achetés – commandes qui ne sont pas encore soldées », indiquant un montant de 301.329,70 € au titre du « total Socomec » ; que, dans la mesure où la société DM Elektron avait invoqué cette pièce pour établir le montant dû par Socomec au titre des composants figurant dans son entrepôt, la société DM Elektron se prévalait nécessairement, dans ses conclusions, du seul tableau chiffré correspondant aux « composants en stock » ; que, pour juger que la société DM Elektron ne fournissait aucune preuve pertinente au soutien de sa demande, la cour d'appel s'est fondée sur la circonstance selon laquelle la pièce n° 14 qu'elle invoquait portait sur des factures dont les plus anciennes remontaient à novembre 2009, de sorte que la société DM Elektron n'expliquait pas en quoi la société Socomec serait tenue de payer une matière première stockée et acquise à cette date ; qu'en statuant ainsi, tandis qu'il résultait clairement des conclusions de la société DM Elektron que celle-ci ne se prévalait que du tableau, chiffré et relatif aux « composants en stock », figurant dans la pièce n° 14, et non de celui, non chiffré, comportant une liste de toutes les factures remontant à novembre 2009, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société DM Elektron, en méconnaissance de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis et de l'article 4 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Socomec à payer à la société DM Elektron la seule somme de 102.588,86 € à titre de dommages et intérêts en réparation de la rupture brutale des relations commerciales établies ;

AUX MOTIFS QUE, sur les conditions d'application de l'article L. 442-6 I 5e du code de commerce, en application de l'article L. 442 I 5e du code de commerce, dans sa version en vigueur au jour de la rupture soit le 6 juin 2011 : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (?) 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure (?) » ; que, sur l'existence d'une relation commerciale établie, il ressort des pièces versées et n'est pas contesté que la relation commerciale entre les parties a débuté en juin 2001 pour se poursuivre jusqu'au 6 juin 2011, date à laquelle la société Socomec a informé la société DM Elektron qu'étant « actuellement en train de réorganiser ses sources d'approvisionnement pour ce qui concerne l'assemblage des circuits imprimés » elle entendait « interrompre toutes relations d'affaires » avec la société DM Elektron à partir du 30 juin 2011 ; que sur cette période de 10 années, la société Socomec a passé régulièrement des commandes de cartes électroniques imprimées selon un cycle de commande de 3 mois pour des quantités représentant plusieurs milliers de cartes par mois tous modèles confondus ; que les relations commerciales entre les parties sont donc établies ; que, sur l'existence d'un préavis, il convient d'observer que la décision de mettre fin à la relation commerciale est explicitée dans la lettre précitée du 6 juin 2011 par la société Socomec, celle-ci faisant valoir qu'elle « est le résultat d'une série d'insatisfactions et de faibles performances (de votre part) en termes de services, qualité et prix depuis plus d'un an » et que parmi une liste « non exhaustive des événements majeurs » sont invoqués le fait qu'elle a été contrainte d'arrêter « plusieurs fois » les lignes de production de ses deux usines, le niveau « médiocre » de ses services l'ayant obligée à réviser quotidiennement son calendrier de production et ayant provoqué des retards auprès de ses clients suivis de sanctions pécuniaires, l'obligation de supporter des coûts liés à l'achat de composants manquants, la faible qualité des produits et l'absence de confirmation « à plusieurs reprises » des dates de livraison ; qu'il ressort de ces éléments d'une part, que la rupture litigieuse a bien été assortie d'un préavis notifié par écrit de 24 jours, et que d'autre part la société Socomec a, au jour de cette notification, exclu l'existence d'inexécution suffisamment grave par la société DM Elektron, pour considérer que les circonstances justifiaient l'absence de préavis ; qu'en revanche il appartient à la cour d'apprécier si la durée de ce préavis est suffisante au regard de la durée de la relation commerciale, des usages du commerce et des autres circonstances de la cause afin de caractériser la brutalité ou non de la rupture ; que, sur la durée du préavis et le caractère brutal de la rupture, le délai de préavis doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour préparer le redéploiement de son activité, trouver un autre partenaire ou une autre solution de remplacement ; que les principaux critères à prendre en compte sont la dépendance économique, l'ancienneté des relations, le volume d'affaires et la progression du chiffre d'affaires, les investissements spécifiques effectués et non amortis, les relations d'exclusivité et la spécificité des produits et services en cause ; que le délai de préavis suffisant s'apprécie au moment de la notification de la rupture ; que si le délai conventionnel fixé par les parties ne lie pas la cour, dans l'appréciation de la durée de préavis dans l'hypothèse d'une brusque rupture en application de l'article L. 442-6, I, 5° précité, laquelle doit déterminer la durée du préavis raisonnable auquel une société peut prétendre, après avoir analysé l'ancienneté des relations commerciales établies entre les parties et les circonstance de l'espèce, il peut constituer un élément, parmi d'autres, à prendre en compte ; qu'à cet égard, les parties s'opposent sur l'interprétation de la clause 7 intitulée « élimination progressive » portant mention d'une période de 6 mois, que la société DM Elektron analyse comme un préavis contractuellement convenu entre les parties, au contraire de la société SOcomec qui analyse cette clause 7 comme portant sur la durée de la phase d'élimination progressive d'un produit et la durée d'intégration d'un nouveau produit et non comme un délai de préavis pour résilier la convention ; que cette clause n'est en effet pas claire en ce qu'elle évoque un « cycle de commande d'élimination » « minimum » de 6 mois et qu'elle accompagne cette précision d'une note stipulant que « La matière première obsolète doit être payée par le client, de même que les commandes ne pouvant être annulées ou les frais d'annulation », paraissant ainsi cantonner cette période à la suppression d'un produit des commandes et non comme étant destinée à régir l'arrêt de la relation contractuelle entre les parties ; qu'elle permet cependant de donner un indice quant au délai maximum nécessaire pour la société DM Elektron et accepté par la société Socomec, pour retirer de la chaîne de production un modèle de carte imprimée sans perte des matières premières nécessaires à sa fabrication ; qu'au-delà de cet élément, il convient de tenir compte de la durée des relations commerciales établies entre la société DM Elektron et la société Socomec, qui ont perduré pendant 10 années, mais aussi de la fréquence des commandes passées (cycle de commande tous les trois mois et prévisionnel tous les 6 mois) et du volume de ces commandes (plusieurs milliers de cartes imprimées par trimestre) ; que s'agissant de la dépendance de la société DM Elektron envers la société Socomec, cette dernière n'était pas la seule cliente de la société DM Elektron ainsi que cela ressort du propres compte rendu sur l'évaluation de rentabilité des produits communiqué par la société DM Elektron et qui émane d'un expert-comptable et selon lequel « DM Elektron est partenaire industriel avec la plupart des entreprises OEM (original Equipment Manufacturers) dans le monde du ferroviaire, de l'automobile, du médical et de l'industrie grâce à l'obtention des plus importantes certifications de l'industrie électronique comme (?) Iso 13485 pour la production des cartes électroniques pour les dispositifs médicaux actifs non implantables » ; qu'au demeurant, le chiffre d'affaires de la société DM Elektron pour les années 2010 et 2011 tel qu'il ressort globalement de ce document est nettement supérieur à celui réalisé avec la société Socomec puisqu'il était de 30.531.401 € en 2010 et de 32.998.871€ en 2011 alors que le chiffre d'affaires allégué par la société DM Elektron avec la société Socomec serait compris entre 4.881.538 et 6.340.713 €, ce qui écarte toute dépendance alléguée ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, le délai de préavis raisonnable devait être fixé à 6 mois et non à 24 jours comme accordé par la société Socomec ; qu'en revanche, la société DM Elektron ne rapporte nullement la preuve de ce que les cartes imprimées, quand bien même elles auraient été intégrées dans des onduleurs de marque Socomec, ont été vendues elles-mêmes sous marque Socomec de sorte qu'elle n'est pas fondée à solliciter le doublement du délai de préavis prévu par l'article L.442-6, I 5° du code de commerce ; qu'il y a lieu en conséquence d'accorder un délai de préavis d'une durée de 6 mois, duquel sera déduit le préavis de 24 jours accordé ; que, sur le préjudice subi du fait de la rupture brutale, la société DM Elektron fait valoir que le préjudice subi du fait du défaut de préavis est calculé sur la base de la marge brute multipliée par le nombre de mois de préavis ; qu'elle produit un certificat de son expert-comptable pour établir que la marge brute était de 21,77 % ; qu'elle conclut que son indemnisation devrait s'élever à la somme de 708.474 (marge brute X 24 mois X chiffre d'affaires mensuel moyen de 135.598,29 €) ; qu'en réponse, la société Socomec fait valoir que DM Elektron ne justifie ni du chiffre d'affaires réalisé, ni de la marge brute, ni de la marge sur coût variable au moyen de pièces probantes et précise que la marge n'est pas de 21 % mais de 3,7 % ; qu'elle sollicite en conséquence le débouté des demandes de DM Elektron et le remboursement par cette dernière des sommes versées au titre de l'exécution provisoire du jugement de première instance, assortie des intérêts légaux ; qu'il est constant que le préjudice résultant du caractère brutal de la rupture est constitué par la perte de la marge brute que la victime pouvait escompter bénéficier pendant la durée du préavis qui aurait dû lui être accordé à savoir la différence avec le chiffre d'affaires dont la victime a été privée sous déduction des charges qui n'ont pas été supportées du fait de la baisse d'activité résultant de la rupture ; qu'en l'espèce, la société DM Elektron ne justifie nullement du chiffre d'affaires réalisé dans les trois années précédentes avec la société Socomec se prévalant même de chiffres différents, tantôt de 6.340.713 € tantôt de 4.881.538 € sans préciser la période concernée, étant observé que la pièce 16 communiquée à l'appui du premier de ces chiffres ne porte que sur quelques commandes passées à la société Socomec en 2006 et 2008 qui ne permettent nullement de corroborer le chiffre annoncé ; que faute de pouvoir justifier de ces chiffres, seuls pourront être retenus ceux reconnus par la société Socomec, soit les sommes de 580.815 € en 2008, 762.000 € en 2009 et 1.919.629 € en 2010, soit 3.262.44 € sur trois années, et en moyenne 90.623 € par mois ; que s'agissant de la marge brute, la société DM Elektron se prévaut d'un taux de marge de 21,77 % et en justifie par la production d'une attestation d'un expert-comptable ; que si ce chiffre est contesté par la société Socomec, qui prenant appui sur des pièces émanant de la société DM Elektron (« quotation analysis sheet ») évalue la marge à 3,7 %, ce dernier chiffre ne se base cependant que sur le seul coût d'acquisition du matériel nécessaire à la production des cartes imprimées sans prendre en compte l'ensemble du coût brut de fabrication, rendant ainsi pu crédible le taux de marge ainsi déterminé par elle ; qu'en l'absence d'autres éléments probants, le taux de 21,77 %, qui résulte d'une attestation d'un expert-comptable et qui a été déterminé par ce dernier au terme d'une analyse détaillée des pièces comptables de la société DM Elektron, sera retenu ; qu'en conséquence, le préjudice de la société DM Elektron lié à la rupture brutale des relations commerciales établies avec la société Socomec doit être fixé à la somme de 102.588,86 € (90.623 x 21,77 % x 6 – 24 jours) ;

ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, la société DM Elektron avait sollicité l'infirmation du jugement en ce qu'il avait pris en compte, pour diminuer le montant de l'indemnisation due au titre de la rupture brutale des relations commerciales, les « soi-disant 24 jours de préavis concédé par la société Socomec » ; qu'elle avait fait valoir qu'il ne pouvait être tenu compte de cette période de 24 jours dans le calcul du préjudice puisque ce préavis concédé par la société Socomec était « un préavis en tout point théorique, puisque dès la date de la lettre de rupture, Socomec a cessé tout achat auprès de DM Elektron » (concl., p. 20, § 8) ; qu'en se bornant à affirmer, après avoir constaté que la rupture avait été assortie d'un préavis notifié par écrit de 24 jours, qu'il y avait lieu de déduire du délai de préavis d'une durée de 6 mois qu'elle accordait, le préavis de 24 jours accordé par la société Socomec, sans répondre aux conclusions précitées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 19-25910
Date de la décision : 05/01/2022
Sens de l'arrêt : Rejet non spécialement motivé
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 mars 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 05 jan. 2022, pourvoi n°19-25910


Composition du Tribunal
Président : Mme Darbois (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Brouchot, SARL Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:19.25910
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