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08/07/2021 | FRANCE | N°20-13263

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 08 juillet 2021, 20-13263


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 755 F-B

Pourvoi n° E 20-13.263

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 JUILLET 2021

La société Rhodia Chimie, société par actions simplifiée, dont l

e siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 20-13.263 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble (chambre social...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 8 juillet 2021

Rejet

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 755 F-B

Pourvoi n° E 20-13.263

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 8 JUILLET 2021

La société Rhodia Chimie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 20-13.263 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2019 par la cour d'appel de Grenoble (chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à Mme [P] [V], épouse [H], domiciliée [Adresse 2], représentante légale de sa fille mineure [C] [H],

2°/ à M. [R] [H], domicilié [Adresse 2],

3°/ à M. [I] [V],

4°/ à Mme [X] [A], épouse [V],

tous deux domiciliés [Adresse 3],

5°/ à Mme [H] [V], domiciliée [Adresse 4],

pris tous cinq tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit de [V] [V],

6°/ à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Isère, dont le siège est [Adresse 5],

7°/ au Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA), dont le siège est [Adresse 6],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Rovinski, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Rhodia Chimie, et après débats en l'audience publique du 9 juin 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Rovinski, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Désistement partiel

1. Il est donné acte à la société Rhodia Chimie du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme [P] [V] épouse [H], prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de [V] [V], agissant également au nom de sa fille mineure [C] [H], M. [R] [H], M. [I] [V], Mme [X] [A] épouse [V], Mme [H] [V], tous pris tant en leur nom personnel qu'en qualité d'ayants droit de [V] [V], et le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 17 décembre 2019), [V] [V] (la victime), salarié de la société Rhône Poulenc devenue Rhodia Silicones, puis Rhodia Chimie (l'employeur), en qualité d'agent d'entretien puis de mécanicien, a déclaré le 11 août 1993, au vu d'un certificat médical de première constatation du 9 avril 1993, une affection pulmonaire que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère (la caisse) a accepté de prendre en charge le 13 janvier 1995 au titre du tableau 30 E des maladies professionnelles. Son état a été déclaré consolidé au 8 septembre 1995. Par jugement du 15 mars 2007, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Vienne, saisi par la victime, a reconnu la faute inexcusable de l'employeur à l'origine de la maladie professionnelle et une indemnisation complémentaire lui a été allouée. Le 28 juillet 2015, suite au décès de la victime, la caisse, qui a reconnu l'imputabilité du décès à la maladie initialement prise en charge, a accordé à sa veuve une rente de conjoint survivant. Le 25 mai 2016, les ayants droit de la victime ont engagé une procédure de conciliation aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur comme étant à l'origine du décès. Le 28 février 2017, ils ont saisi une juridiction de sécurité sociale pour réclamer l'indemnisation de leurs préjudices moraux personnels et une nouvelle indemnisation du préjudice subi par la victime avant son décès au titre de leur action successorale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la caisse fera l'avance des sommes dues et qu'elle en récupérera le montant sur lui alors « qu'aux termes de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998 la charge des prestations sociales concernant les maladies professionnelles ayant fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et le 24 décembre 1998 et indemnisées à la suite de la réouverture des délais de prescription est définitivement supportée par la branche accidents du travail et maladies professionnelles ; que la disposition s'applique y compris aux réparations allouées en cas de faute inexcusable qui ne peuvent dès lors faire l'objet d'une action récursoire exercée par la caisse à l'encontre de l'employeur ; qu'au cas présent, il soutenait que la première constatation médicale de la maladie de la victime était datée du 26 mai 1993 et que les ayants droit avaient agi en faute inexcusable prés de 25 ans plus tard, le 25 mai 2017, à la faveur de la réouverture des délais accordée par l'article 40 de loi du 23 décembre 1998 ; qu'elle soutenait dès lors que les conséquences de la faute inexcusable devaient être définitivement supportées par la branche accidents du travail et maladies professionnelles ; qu'en jugeant cependant que la caisse pouvait récupérer le montant des réparations accordées aux ayants droit de la victime auprès de l'employeur au titre de la faute inexcusable, la cour d'appel a violé les articles L. 452-3 du code de la sécurité sociale et l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998. »

Réponse de la Cour

4. Il résulte de la combinaison des articles L. 432-2, 3°, et L. 443-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale que les droits des ayants droit de la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle se prescrivent par deux ans à dater du jour du décès de la victime.

5. Aux termes de l'article 40, II, de la loi n°98-1194 du 23 décembre 1998, les droits aux prestations, indemnités et majorations prévus par le livre IV du code de la sécurité sociale, y compris en cas de faute inexcusable, et ceux de leurs ayants droit, sont rouverts dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et la date de promulgation de la loi.

6. Selon l'article 40, IV, de la même loi, la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général supporte définitivement la charge imputable à la prise en charge des prestations, indemnités et majorations alloués aux victimes dont les droits ont été rouverts en application du II susmentionné, ainsi qu'à leurs ayants droit.

7. Pour fixer l'indemnisation du préjudice moral de chacun des ayants droit de la victime et dire que la caisse fera l'avance de ces sommes et qu'elle en récupérera le montant sur l'employeur, l'arrêt énonce qu'il résulte des articles L. 452-3 et L. 451-1 du code de la sécurité sociale qu'en cas de maladie professionnelle suivie d'une mort ayant pour origine une faute inexcusable de l'employeur, les ayants droit de la victime peuvent demander à l'employeur la réparation de leur préjudice moral, que le point de départ de la prescription biennale est la date du décès survenu le 28 juillet 2015, que les ayants droit de la victime ayant engagé la procédure de conciliation le 25 mai 2016 et la procédure contentieuse le 27 février 2017, leurs prétentions ne sont pas atteintes par la prescription biennale.

8. De ces constatations, dont elle a fait ressortir que l'action des ayants droit avait été engagée dans les deux ans suivant le décès de la victime, de sorte qu'elle n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998, la cour d'appel a exactement déduit que la caisse ferait l'avance des réparations dues aux ayants droit et qu'elle en récupérerait ensuite le montant sur l'employeur.

9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.

Condamne la société Rhodia Chimie aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit juillet deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Rhodia Chimie

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la CPAM de l'Isère fera l'avance des sommes et qu'elle en récupérera le montant sur la société Rhodia Chimie ;

AUX MOTIFS QU' « en application de l'article L452-3 du code de la sécurité sociale , la CPAM de l'Isère avancera les sommes devant revenir aux appelants et elle en récupérera le montant sur la société Rhodia Chimie » ; ALORS QU'aux termes de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998 la charge des prestations sociales concernant les maladies professionnelles ayant fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et le 24 décembre 1998 et indemnisées à la suite de la réouverture des délais de prescription est définitivement supportée par la branche accidents du travail et maladies professionnelles ; que la disposition s'applique y compris aux réparations allouées en cas de faute inexcusable qui ne peuvent dès lors faire l'objet d'une action récursoire exercée par la CPAM à l'encontre de l'employeur ; qu'au cas présent, la société Rhodia Chimie soutenait que la première constatation médicale de la maladie de M. [V] était datée du 26 mai 1993 et que les ayants droits avaient agi en faute inexcusable prés de 25 ans plus tard, le 25 mai 2017, à la faveur de la réouverture des délais accordée par l'article 40 de loi du 23 décembre 1998 ; qu'elle soutenait dès lors que les conséquences de la faute inexcusable devaient être définitivement supportées par la branche accidents du travail et maladies professionnelles ; qu'en jugeant cependant que la CPAM de l'Isère pouvait récupérer le montant des réparations accordées aux consorts [V] auprès de la société Rhodia Chimie au titre de la faute inexcusable, la cour d'appel a violé les articles L. 452-3 du Code de la sécurité sociale et l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-13263
Date de la décision : 08/07/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Action de la victime ou de ses ayants droit contre l'employeur - Ayants droit de la victime - Indemnisation - Action dans le délai de deux ans à compter du décès - Conséquences - Avance des réparations par la CPAM récupérable sur l'employeur

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Maladies professionnelles - Dispositions générales - Prestations - Action en réparation - Prescription

Il résulte de la combinaison des articles L. 432-2, 3°, et L. 443-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale que les droits des ayants droit de la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle se prescrivent par deux ans à dater du jour du décès de la victime. Aux termes de l'article 40, II, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, les droits aux prestations, indemnités et majorations prévus par le livre IV du code de la sécurité sociale, y compris en cas de faute inexcusable, et ceux de leurs ayants droit, sont rouverts dès lors qu'ils ont fait l'objet d'une première constatation médicale entre le 1er janvier 1947 et la date de promulgation de la loi. Selon l'article 40, IV, de la même loi, la branche accidents du travail et maladies professionnelles du régime général supporte définitivement la charge imputable à la prise en charge des prestations, indemnités et majorations alloués aux victimes dont les droits ont été rouverts en application du II susmentionné, ainsi qu'à leurs ayants droit. Fonde légalement sa décision la cour d'appel qui, par ses constatations, a fait ressortir que l'action des ayants droit avait été engagée dans les deux ans suivant le décès de la victime, de sorte qu'elle n'entrait pas dans le champ d'application de l'article 40 de la loi du 23 décembre 1998, pour en déduire que la caisse ferait l'avance des réparations dues aux ayants droit et qu'elle en récupérerait ensuite le montant sur l'employeur


Références :

Article 40, II, de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998

articles L. 432-2, 3°, et L. 443-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 17 décembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 08 jui. 2021, pourvoi n°20-13263, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.13263
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