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24/06/2021 | FRANCE | N°20-11044

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 24 juin 2021, 20-11044


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 juin 2021

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 642 F-B

Pourvoi n° 20-11.044

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [K] [X].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 JUIN 2021

Mme [K] [X], domiciliée [Adresse 1], a form...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 24 juin 2021

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 642 F-B

Pourvoi n° 20-11.044

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de Mme [K] [X].
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 14 novembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 24 JUIN 2021

Mme [K] [X], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° 20-11.044 contre l'ordonnance rendue le 20 mars 2019 par le président du pôle social du tribunal de grande instance de Brest, dans le litige l'opposant à la caisse d'allocations familiales (CAF) du Finistère, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Renault-Malignac, conseiller, les observations de Me Bertrand, avocat de Mme [X], et l'avis de M. de Monteynard, avocat général, après débats en l'audience publique du 19 mai 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Renault-Malignac, conseiller rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, et Mme Aubagna, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'ordonnance attaquée (président du pôle social du tribunal de grande instance de Brest, 20 mars 2019), rendue en dernier ressort, la caisse d'allocations familiales du Finistère (la caisse) a réclamé à Mme [X] (l'allocataire) le remboursement d'un trop perçu de prestations familiales d'un certain montant.

2. La caisse ayant partiellement accueilli sa demande de remise de dette, l'allocataire a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen relevé d'office

4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code.

Vu l'article L. 553-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, applicable au litige :

5. Selon ce texte, la créance de l'organisme de prestations familiales peut être réduite ou remise en cas de précarité de la situation du débiteur, sauf en cas de manoeuvre frauduleuse ou de fausses déclarations.

6. Dès lors qu'il est régulièrement saisi d'un recours contre la décision administrative ayant rejeté en tout ou en partie une demande de remise gracieuse d'une dette de prestations familiales, il appartient au juge d'apprécier si la situation du débiteur justifie une remise totale ou partielle de la dette en cause ou si une manoeuvre frauduleuse ou de fausses déclarations l'excluent.

7. Pour déclarer irrecevable la requête formée par l'allocataire, l'ordonnance relève que celle-ci vise à réformer la décision de la caisse d'allocations familiales en date du 19 février 2019 ne lui accordant qu'une remise partielle de sa dette au titre du versement de prestations familiales indues, qu'il reste due la somme de 1 874,91 euros et que la décision précise qu'elle est définitive et ne peut être contestée. Il retient qu'il ressort de l'article L. 256-4 du code de la sécurité sociale que les caisses de sécurité sociale ont seules qualité pour réduire le montant de leurs créances autres que de cotisations et majorations de retard nées de l'application de la législation de sécurité sociale en cas de précarité de la situation du débiteur, le juge judiciaire n'ayant pas qualité pour statuer sur une telle demande.

8. En statuant ainsi, sur le fondement d'un texte inapplicable au litige, le président du tribunal, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 20 mars 2019, entre les parties, par le président du tribunal de grande instance de Brest ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cette décision et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Brest.

Condamne la caisse d'allocations familiales du Finistère aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour Mme [X]

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir déclaré irrecevable d'office la requête de Mme [K] [X] du 25 février 2019 tendant à faire réformer la décision de la CAF du Finistère du 19 février 2019 lui accordant, sur le fondement de l'article L.256-4 du code de la sécurité sociale, une remise partielle de sa dette, à raison de l'incompétence du pôle social du tribunal de grande instance de Brest pour statuer sur une telle demande ;

AUX MOTIFS QU' il ressort de l'article L.256-4 du code de la sécurité sociale que « sauf en ce qui concerne les cotisations et majorations de retard, les créances des caisses nées de l'application de la législation de sécurité sociale (?) peuvent être réduites en cas de précarité de la situation du débiteur par décision motivée par la caisse ». Les caisses de sécurité sociale ont seules qualité pour réduire le montant de leurs créances autres que de cotisations et majorations de retard nées de l'application de la législation de sécurité sociale en cas de précarité de la situation du débiteur, le juge judiciaire n'ayant pas qualité pour statuer sur une telle demande (Civ. 2ème, 10 mai 2012, pourvoi n° 11-11.278, Bull. II, n° 79). La Cour de cassation a jugé que l'article L.256-4 du code de la sécurité sociale n'était pas contraire à la Constitution dès lors que la réduction de sa créance par la caisse n'est pas un droit pour le débiteur (Civ. 2ème, 7 juillet 2011, pourvoi n° 11-40.028) ;

ALORS, d'une part, QUE les juges du fond ont l'obligation de ne pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; qu'en considérant que la requête de Mme [X] enregistrée le 25 février 2019 ne tendait qu'à la remise ou à la réduction de sa dette au regard de la précarité de sa situation et qu'une telle demande échappait à la compétence du juge, quand, dans sa requête, Mme [X] invitait expressément le juge à statuer « sur le bien-fondé » de la demande en remboursement de l'indu formée par la CAF du Finistère, demande qui entrait dans le champ de compétence des juridictions de sécurité sociale, le président du pôle social du tribunal de grande instance de Brest a dénaturé les termes clairs et précis de la requête de Mme [X] et a ainsi méconnu le principe susvisé ;

ALORS, d'autre part, QU' aux termes de l'article L. 142-1 du code de la sécurité sociale, l'organisation du contentieux général de la sécurité sociale règle les différends auxquels donne lieu l'application des législations et réglementations de sécurité sociale et de mutualité sociale agricole, et qui ne relèvent pas, par leur nature, d'un autre contentieux ; que le contentieux relatif au recouvrement de l'indu afférent à une allocation versée par une caisse d'allocation familiale relève de la compétence de la juridiction de sécurité sociale ; qu'en déclarant irrecevable la requête présentée par Mme [X] au motif que le pôle social du tribunal de grande instance de Brest était incompétent pour en connaître, quand la requête de Mme [X] invitait le juge à se prononcer « sur le bien-fondé » de la demande de remboursement d'un indu émanant de la CAF du Finistère, demande qui entre dans le champ de compétence de la juridiction de sécurité sociale, le président du pôle social du tribunal de grande instance de Brest a méconnu sa compétence et a violé l'article L.142-1 du code de la sécurité sociale ;

ALORS, enfin et subsidiairement, QUE la juridiction de sécurité sociale n'est incompétente pour statuer sur une demande de remise ou de réduction de la dette de l'assuré social invoquant la précarité de sa situation que lorsque ce dernier a saisi directement le juge, sans recours gracieux préalable auprès de la caisse ; qu'il est constant que Mme [X] a sollicité de la CAF du Finistère une remise de dette avant de saisir le juge ; qu'en déclarant néanmoins le pôle social du tribunal de grande instance incompétent pour connaître de la requête de Mme [X], le président de cette juridiction a violé l'article L.142-1 du code de la sécurité sociale, ainsi que l'article L. 256-4 du même code.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-11044
Date de la décision : 24/06/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE - Caisse - Créances - Réduction - Précarité de la situation du débiteur - Office du juge

SECURITE SOCIALE, PRESTATIONS FAMILIALES - Prestations - Prestations indues - Réduction - Office du juge - Appréciation de la situation du débiteur SECURITE SOCIALE, CONTENTIEUX - Contentieux général - Compétence matérielle - Créances des caisses - Réduction - Office du juge - Appréciation de la situation du débiteur

Dès lors qu'il est régulièrement saisi d'un recours contre la décision administrative ayant rejeté en tout ou en partie une demande de remise gracieuse d'une dette de prestations familiales formée en application de l'article L. 553-2 du code de la sécurité sociale (dans sa rédaction issue de la loi n°2008-1330 du 17 décembre 2008), il appartient au juge d'apprécier si la situation du débiteur justifie une remise totale ou partielle de la dette en cause ou si une manoeuvre frauduleuse ou de fausses déclarations l'excluent


Références :

Article L. 553-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008.

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Brest, 20 mars 2019

En sens contraire : Soc., 6 mai 1993, pourvoi n° 91-14531, Bull. 1993, V, n° 133 (cassation) ;Avis de la Cour de cassation, 28 novembre 2019, n° 19-70.019, Bull. 2019. A rapprocher : 2e Civ., 28 mai 2020, pourvoi n° 18-26512, Bull. 2020, (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 24 jui. 2021, pourvoi n°20-11044, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre
Avocat(s) : Me Bertrand

Origine de la décision
Date de l'import : 14/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:20.11044
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