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27/05/2021 | FRANCE | N°19-22835

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 27 mai 2021, 19-22835


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 mai 2021

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 465 FS-P

Pourvoi n° P 19-22.835

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MAI 2021

Mme [A] [A], notaire, domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n

° P 19-22.835 contre l'arrêt rendu le 18 juillet 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre 12).

La demanderesse invoque, à l'appui de son pou...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 27 mai 2021

Cassation

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 465 FS-P

Pourvoi n° P 19-22.835

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 27 MAI 2021

Mme [A] [A], notaire, domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 19-22.835 contre l'arrêt rendu le 18 juillet 2019 par la cour d'appel de Colmar (chambre 12).

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de Mme [A], et l'avis de M. Brun, avocat général, après débats en l'audience publique du 13 avril 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Nivôse, Mme Greff-Bohnert, M. Boyer, Mme Abgrall, conseillers, Mmes Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, et Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 18 juillet 2019), par requête du 13 septembre 2017, Mme [A], notaire, a sollicité l'inscription au livre foncier d'une copropriété assise sur deux parcelles distinctes cadastrées section HA n° [Cadastre 1] et section HA n° [Cadastre 1].

2. Le juge du livre foncier ayant rejeté sa demande, Mme [A] a formé un pourvoi immédiat à l'encontre de son ordonnance.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

3. Mme [A] fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'inscription de la création d'une copropriété, alors « que l'article 34 du décret n° 2009-1193 du 7 octobre 2009 n'est applicable qu'en cas de requête en inscription au livre foncier d'une réunion d'immeubles ; qu'une réunion d'immeubles suppose la fusion de deux parcelles cadastrales en une seule parcelle d'un même tenant ; que la requête en inscription d'une copropriété assise sur deux parcelles distinctes ne tend donc pas à une réunion d'immeubles au sens de l'article 34 susvisé et n'est pas régie par ce texte ; que pour néanmoins rejeter la requête de Maître [A] en inscription d'une copropriété créée sur les deux parcelles appartenant à la société IDP, la cour d'appel énonce que l'établissement d'une copropriété sur deux parcelles équivaut à une réunion d'immeubles, et elle en déduit que l'inscription de la copropriété sur les parcelles litigieuses serait juridiquement impossible, puisque leur réunion serait interdite par l'article 34 du décret du 7 octobre 2009 ; qu'en statuant ainsi, par application de dispositions relatives exclusivement à l'hypothèse dans laquelle est sollicitée l'inscription d'une réunion d'immeubles, quand la requête de Maître [A] ne portait que sur l'inscription d'une copropriété assise sur deux parcelles distinctes, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 34 du décret du 7 octobre 2009. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 32 et 34, alinéa 1er, du décret n° 2009-1193 du 7 octobre 2009 relatif au livre foncier et à son informatisation dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle :

4. En application du premier de ces textes, l'assise des immeubles soumis au régime de la copropriété des immeubles bâtis est inscrite au nom du même titulaire de droit et soumise au même régime juridique, l'inscription de la propriété du sol étant remplacée par l'inscription du lot.

5. Aux termes du second, un immeuble foncier peut être réuni à un autre si les immeubles sont situés dans la même circonscription foncière, appartiennent à un même titulaire de droits et ne sont pas grevés de droits ou charges différents.

6. Il résulte de ces dispositions que l'inscription au livre foncier d'un immeuble soumis au régime de la copropriété assis sur deux parcelles distinctes appartenant à un même titulaire de droit n'implique pas la réunion préalable de ces parcelles.

7. Pour confirmer l'ordonnance ayant rejeté la demande de Mme [A], l'arrêt retient que le fait de constituer une assiette de copropriété sur deux parcelles distinctes est assimilé à une réunion de fait qui doit respecter l'article 34 du décret du 7 octobre 2009.

8. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d'application et le second par fausse application.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juillet 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt
et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Laisse les dépens à la charge du Trésor public ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept mai deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour Mme [A].

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la requête de Maître [A] tendant à l'inscription de la création d'une copropriété à l'adresse [Adresse 2], située sur les parcelles S HA n° [Cadastre 2] [Localité 1] et S HA n° [Cadastre 2] [Localité 1], appartenant à la société IDP ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article 32 du décret du 7 octobre 2009 prévoit que l'assise des immeubles soumis au régime de la copropriété est inscrite au nom du même titulaire de droit et soumise au même régime juridique ; l'inscription de la propriété du sol est remplacée par l'inscription du lot ; conformément à la jurisprudence de la cour d'appel de COLMAR, récemment rappelée dans un arrêt RG n° 18/00503 du 12 avril 2018, le fait de constituer une assiette de copropriété sur deux parcelles distinctes est assimilé à une réunion de fait qui doit respecter l'article 34 du décret du 7 octobre 2009 ; l'article 34, alinéa 1er de ce texte précise qu'un immeuble foncier peut être réuni à un autre si les immeubles sont situés dans la même circonscription foncière, appartiennent à un même titulaire de droits et ne sont pas grevés de droits ou charges différents ; en l'espèce, il résulte des pièces du dossier, et notamment des extraits du Livre foncier que, comme le reconnaît Maitre [A], la constitution de la copropriété a eu lieu sur deux parcelles différentes (S HA n°[Cadastre 2] [Localité 1] et S HA n° [Cadastre 2]), lesquelles sont grevées, chacune, d'un droit réel, consistant en un droit de la Ville de [Localité 1] à la résolution de la vente en cas de non-exécution de la condition de surbâtir le terrain ; le notaire ne conteste pas non plus que ces charges sont différentes, portant chacune sur une parcelle différente et étant constituée par des actes de vente distincts, pour le premier du 30 mai 1933 et le second des 27 et 28 juin 1933 ; par lettre du 6 novembre 2017, la ville de [Localité 1] a écrit ne pas consentir à la mainlevée et radiation de ces droits ; en conséquence, les conditions de l'article 34 précité n'étant pas remplies, ni la réunion de ces deux immeubles, ni la constitution d'une copropriété sur ces immeubles, qui s'analyse en une réunion de fait, n'est juridiquement possible ; sera dès lors confirmée l'ordonnance du juge du Livre foncier, ayant retenu, par des motifs pertinents, que cette inscription de ladite copropriété se heurte à l'impossibilité juridique, cas dans lequel il pouvait rendre une telle ordonnance de rejet en application de l'article 84 du décret précité » (arrêt pp. 2 et 3) ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, « il est sollicité l'inscription en copropriété des parcelles sises à [Localité 1] : Section HA n° [Cadastre 1] et Section HA n° [Cadastre 1] ; que lesdites parcelles sont la propriété de la société IDP SARL ; que lesdites parcelles sont grevées de charges différentes qui sont les suivantes : * Parcelle Section HA ? n° [Cadastre 1] : Droit à la résolution de la vente en cas de non-exécution de la condition de surbâtir le terrain, Bénéficiaire : Ville de [Localité 1], Fondement : Acte de vente du 30 Mai 1933 (Annexe 383/1933), * Parcelle Section HA - n° [Cadastre 1] : Droit à la résolution de la vente en cas de non-exécution de l'obligation de surbâtir le terrain, Bénéficiaire : Ville de [Localité 1], Fondement : Acte de vente du 28 juin 1933 (Annexe 686/1933) ; que l'article 32 du Décret du 7 Octobre 2009 stipule en son alinéa 1er : « L'assise des immeubles soumis au régime de la copropriété des immeubles bâtis est inscrite au nom du même titulaire de droit et soumise au même régime juridique » ; que l'article 34 du Décret du 7 Octobre 2009 stipule en son alinéa 1er : « Un immeuble foncier peut être réuni à un autre si les immeubles sont situés dans la même circonscription foncière, appartiennent à un même titulaire de droits et ne sont pas grevés de droits ou charges différents » ; qu'il est de jurisprudence constante que l'établissement d'une copropriété équivaut à une réunion d'immeubles (arrêt Cour d'Appel de COLMAR IX 2672/83 du 18 juin 1985) ; que, d'une part, lors de la création d'une copropriété, l'article 32 du Décret 2009-1193 du 7 octobre 2009 stipule que « l'inscription de la propriété du sol est remplacée par l'inscription du lot » ; il en résulte que les droits de propriété ainsi que les charges qui grèvent la (ou les) parcelle(s) d'assises sont reportés sur tous les lots ; ce qui est contesté par le requérant lorsqu'il fait valoir dans son courrier en date du 11 juin 2018 : « Ces droits grèvent les parcelles et n'ont pas à être reportés sur les lots de copropriété » ; que l'on comprend que la réunion de fait évoquée par l'arrêt de la Cour d'Appel de COLMAR a pour but de prévenir l'impossibilité de mettre en oeuvre une exécution forcée sur la parcelle grevée ; que, d'autre part, en l'espèce, bien que le libellé de chacune des charges soit quasiment identique, il n'en demeure pas moins que chacune desdites charges a été constituée dans le cadre d'un acte distinct, ce qui en fait deux charges différentes ; ce qui est également admis par le requérant dans ses courriers en date des 11 juin et 29 juin 2018 ; aussi, l'attention du notaire requérant a été attirée sur cet état de fait à l'occasion de plusieurs ordonnances intermédiaires dans le but de lever l'obstacle à l'inscription (article 84 du décret du 7 octobre 2009) et notamment de se mettre en contact avec le bénéficiaire desdites charges - Ville de [Localité 1] - ; ainsi la requête ne peut avoir une suite favorable, eu égard à l'obstacle qui, à ce jour, n'a pas été levé ; Vu l'article 84 du décret 2009-1193 du 7 octobre 2009 relatif au livre foncier et à son informatisation dans les départements du BAS-RHIN, du HAUT-RHIN et de la MOSELLE, et stipulant en son 2°/ que la requête est rejetée si « il existe une impossibilité matérielle ou juridique d'inscrire le droit ou la mention », en conséquence, il y a lieu de la rejeter purement et simplement » (ordonnance pp. 1 et 2) ;

ALORS QUE l'article 34 du décret n° 2009-1193 du 7 octobre 2009 n'est applicable qu'en cas de requête en inscription au livre foncier d'une réunion d'immeubles ; qu'une réunion d'immeubles suppose la fusion de deux parcelles cadastrales en une seule parcelle d'un même tenant ; que la requête en inscription d'une copropriété assise sur deux parcelles distinctes ne tend donc pas à une réunion d'immeubles au sens de l'article 34 susvisé et n'est pas régie par ce texte ; que pour néanmoins rejeter la requête de Maître [A] en inscription d'une copropriété créée sur les deux parcelles appartenant à la société IDP, la cour d'appel énonce que l'établissement d'une copropriété sur deux parcelles équivaut à une réunion d'immeubles, et elle en déduit que l'inscription de la copropriété sur les parcelles litigieuses serait juridiquement impossible, puisque leur réunion serait interdite par l'article 34 du décret du 7 octobre 2009 ; qu'en statuant ainsi, par application de dispositions relatives exclusivement à l'hypothèse dans laquelle est sollicitée l'inscription d'une réunion d'immeubles, quand la requête de Maître [A] ne portait que sur l'inscription d'une copropriété assise sur deux parcelles distinctes, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 34 du décret du 7 octobre 2009.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 19-22835
Date de la décision : 27/05/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

ALSACE-MOSELLE - Propriété immobilière - Livre foncier - Inscription - Domaine d'application - Immeuble soumis au régime de la copropriété - Immeuble assis sur deux parcelles distincts - Ensemble immobilier - Défaut - Portée

Il résulte des articles 32 et 34, alinéa 1, du décret n° 2009-1193 du 7 octobre 2009 relatif au livre foncier et son informatisation dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle que l'inscription au livre foncier d'un immeuble soumis au régime de la copropriété et assis sur deux parcelles distinctes appartenant à un même titulaire de droit n'implique pas la réunion préalable de ces parcelles. Par suite, viole ces textes la cour d'appel qui, pour rejeter une requête en inscription au livre foncier, retient que le fait de constituer une assiette de copropriété sur deux parcelles distinctes est assimilé à une réunion de fait supposant que les immeubles soient situés dans la même circonscription foncière, appartiennent à un même titulaire de droits et ne soient pas grevés de droits ou charges différents


Références :

articles 32 et 34, alinéa 1, du décret n° 2009-1193 du 7 octobre 2009.

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 18 juillet 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 27 mai. 2021, pourvoi n°19-22835, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin
Avocat(s) : SCP Marlange et de La Burgade

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.22835
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