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20/05/2021 | FRANCE | N°19-25949

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 20 mai 2021, 19-25949


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 mai 2021

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 439 F-P

Pourvoi n° Y 19-25.949

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MAI 2021

M. [F] [W], domicilié chez Mme [A] [H], [Adresse 1], a formé le pourv

oi n° Y 19-25.949 contre les arrêts rendus les 23 mai 2019 et 14 novembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7 anciennement d...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

CM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 20 mai 2021

Cassation

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 439 F-P

Pourvoi n° Y 19-25.949

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 20 MAI 2021

M. [F] [W], domicilié chez Mme [A] [H], [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 19-25.949 contre les arrêts rendus les 23 mai 2019 et 14 novembre 2019 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7 anciennement dénommée 11e chambre A), dans le litige l'opposant à M. [E] [B], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Kermina, conseiller, les observations de la SCP Gouz-Fitoussi, avocat de M. [W], de Me Le Prado, avocat de M. [B], et l'avis de M. Girard, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 mars 2021 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Kermina, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, Mmes Durin-Karsenty, Maunand, conseillers, M. de Leiris, Mmes Lemoine, Jollec, Bohnert, M. Cardini, Mme Dumas, conseillers référendaires, M. Girard, avocat général et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon les arrêts attaqués (Aix-en-Provence, 23 mai 2019 et 14 novembre 2019), M. [B] a interjeté appel d'un jugement d'un tribunal de grande instance rendu dans un litige l'opposant à M. [W].

2. Par arrêt rendu par défaut le 29 juin 2017, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a partiellement confirmé le jugement et a prononcé des condamnations faisant grief à M. [W], qui a formé opposition le 9 août 2017.

3. L'opposition ayant été déclarée irrecevable pour défaut de paiement des droits de timbres fiscaux, M. [W] a demandé à la cour d'appel de rapporter sa décision.

Examen des moyens

Sur le premier moyen du pourvoi, en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt du 23 mai 2019, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. M. [W] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable l'opposition qu'il a formée contre l'arrêt du 29 juin 2017 pour défaut de paiement des droits aux timbres fiscaux, alors « que l'article 1635 bis P du code général des impôts prévoit qu' « Il est institué un droit d'un montant de 225 euros dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel. Le droit est acquitté par l'avocat postulant pour le compte de son client par voie électronique. Il n'est pas dû par la partie bénéficiaire de l'aide juridictionnelle » ; que ce texte, qui doit être interprété strictement, n'impose pas le paiement d'un droit d'un montant de 225 euros à la partie qui forme opposition ; qu'en prononçant néanmoins l'irrecevabilité de l'opposition formée par M. [W] en raison de l'absence d'acquittement des droits de timbres, bien que l'article 1635 bis P du code général des impôts n'ait pas imposé le paiement de ce droit de timbre en cas d'opposition, la cour d'appel a violé l'article 1635 bis P du code général des impôts. »

Réponse de la Cour

5. Selon l'article 1635 bis P du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi 2014-1654 du 29 décembre 2014, applicable au litige, il est institué un droit d'un montant de 225 euros dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel. Le droit est acquitté par l'avocat postulant pour le compte de son client, soit par voie de timbres mobiles, soit par voie électronique. Il n'est pas dû par la partie bénéficiaire de l'aide juridictionnelle.

6. Selon l'article 963 du code de procédure civile, lorsque l'appel entre dans le champ d'application de l'article précité, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses, selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à cet article.

7. Lorsqu'en raison de son absence de comparution, l'intimé a été jugé par défaut, il peut former une opposition qui, en application des articles 571, 572, 576 et 577 du code de procédure civile, remet en question devant la cour d'appel l'affaire qui a été tranchée, celle-ci étant alors instruite et jugée selon les règles applicables devant la cour d'appel. La recevabilité des prétentions respectives des parties dans l'instance d'appel qui recommence s'apprécie en fonction de la demande primitive, suivant les règles ordinaires.

8. Il s'ensuit que l'intimé qui forme opposition à l'arrêt rendu par défaut dans
une procédure avec représentation obligatoire doit, à peine de l'irrecevabilité
de sa défense, acquitter le droit prévu à l'article 1635 bis P du code général
des impôts.

9. Dès lors, le moyen, qui postule que l'opposant n'est pas tenu de s'acquitter de ce droit, manque en droit.

Mais sur le premier moyen du pourvoi, en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt du 23 mai 2019, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

10. M. [W] fait le même grief à l'arrêt, alors « que le juge, doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que le juge ne peut, d'office, retenir la fin de non-recevoir tirée du défaut de paiement du droit de 225 euros dû en application de l'article 1635 bis P du code général des impôts, sans recueillir préalablement les observations des parties ; qu'en prononçant d'office l'irrecevabilité de l'opposition de M. [W] en raison de l'absence d'acquittement des droits de timbres, sans l'avoir invité à s'expliquer sur le défaut de justification du paiement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 16 du code de procédure civile :
11. En application de ce texte, la fin de non-recevoir tirée du défaut de justification du paiement du droit prévu par l'article 1635 bis P du code général des impôts ne peut être retenue sans que la partie concernée ait été invitée à s'en expliquer ou, qu'à tout le moins, un avis d'avoir à justifier de ce paiement lui ait été préalablement adressé par le greffe.

12. Pour retenir la fin de non-recevoir tirée du défaut d'acquittement de droits de timbres fiscaux, l'arrêt retient que force est de constater que M. [W] ne s'est pas acquitté de ce paiement.

13. En statuant ainsi, sans avoir invité M. [W] à s'expliquer sur le défaut de justification du paiement du droit prévu par l'article 1635 bis P du code général des impôts et alors qu'il ne résulte pas des productions que le greffe l'ait invité à en justifier ou, à tout le moins, à présenter ses observations, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Sur le second moyen du pourvoi, en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt du 14 novembre 2019

Enoncé du moyen

14. M. [W] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de rapport de l'arrêt du 23 mai 2019, alors « que la cassation de l'arrêt du 23 mai 2019 rendue par la cour d'appel d'Aix-en-Provence déclarant l'opposition de M. [W] irrecevable, entraînera, par application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 14 novembre 2019 qui est la suite et s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile :

15. En vertu de ce texte, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

16. La cassation de l'arrêt du 23 mai 2019 déclarant M. [W] irrecevable en son opposition entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt de non-rétractation du 14 novembre 2019 qui en est la suite et s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ;

Constate l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt rendu, entre les parties, le 14 novembre 2019 par la même cour d'appel ;

Condamne M. [B] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [B] et le condamne à payer à M. [W] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille vingt et un, par mise à disposition du greffe de la Cour, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gouz-Fitoussi, avocat aux Conseils, pour M. [W]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué rendu le 23 mai 2019 d'avoir déclaré irrecevable l'opposition formée par M. [W] à l'encontre de l'arrêt du 29 juin 2017 au regard du défaut de paiement par le demandeur à l'opposition des droits aux timbres fiscaux ;

Aux motifs que dans le cas présent, force est de constater que le demandeur à l'opposition, M. [F] [W] n'a pas acquitté les droits de timbres fiscaux à hauteur de 225 euros étant bien entendu que l'acquittement de ces droits de timbres conditionne la recevabilité de l'opposition ; qu'il convient en conséquence de déclarer irrecevable l'opposition formée par M. [F] [W] à l'encontre de l'arrêt rendu le 29 juin 2017 par la 11ème chambre section A de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Alors 1°) que l'article 1635 bis P du code général des impôts prévoit qu' « Il est institué un droit d'un montant de 225 ? dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel. Le droit est acquitté par l'avocat postulant pour le compte de son client par voie électronique. Il n'est pas dû par la partie bénéficiaire de l'aide juridictionnelle » ; que ce texte, qui doit être interprété strictement, n'impose pas le paiement d'un droit d'un montant de 225 euros à la partie qui forme opposition ; qu'en prononçant néanmoins l'irrecevabilité de l'opposition formée par M. [W] en raison de l'absence d'acquittement des droits de timbres, bien que l'article 1635 bis P du code général des impôts n'ait pas imposé le paiement de ce droit de timbre en cas d'opposition, la cour d'appel a violé l'article 1635 bis P du code général des impôts ;

Alors 2°) que le juge, doit en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que le juge ne peut, d'office, retenir la fin de non-recevoir tirée du défaut de paiement du droit de 225 euros dû en application de l'article 1635 bis P du code général des impôts, sans recueillir préalablement les observations des parties ; qu'en prononçant d'office l'irrecevabilité de l'opposition de M. [W] en raison de l'absence d'acquittement des droits de timbres, sans l'avoir invité à s'expliquer sur le défaut de justification du paiement du droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué rendu le 14 novembre 2019 d'avoir débouté M. [W] de sa demande de rapport de l'arrêt du 23 mai 2019 et de l'avoir débouté du surplus de ses demandes ;

Aux motifs qu' en application des dispositions de l'article 573 du code de procédure civile l'opposition est faite dans les formes prévues pour la demande en justice devant la juridiction qui a rendu la décision ; qu'en application des dispositions de l'article 575 du code de procédure civile, l'affaire est instruite et jugée selon les règles applicables devant la juridiction qui a rendu la décision ; qu'au cas particulier s'agissant d'une procédure avec représentation obligatoire, les règles fixées par les articles 963,et 964 du code de procédure civile ainsi que par l'article 1635 bis P du code général des impôts sont donc applicables ; que l'article 1635 bis P alinéa 1 du code général des impôts prévoit en substance qu'il est er institué un droit d'un montant de 225 euros dû par les parties à l'instance d'appel lorsque la constitution d'avocat est obligatoire devant la cour d'appel ; que cette disposition s'agissant des modalités de saisine de la cour d'appel, n'opère aucune distinction selon qu'elle est saisie par déclaration d'appel ou sur opposition étant bien entendu que l'opposition revient à juger une seconde fois le litige par la cour en cas d'arrêt par défaut ; qu'il s'agit ici incontestablement d'une instance d'appel de telle manière que la partie opposante qui souhaite faire juger ses prétentions par la cour est dûment redevable du droit de timbre fiscal ; qu'or, dans le cas présent il est incontestable que dans le cadre de son opposition à arrêt par défaut M. [F] [W] n'a pas acquitté devant la cour les droits de timbre à hauteur de 225 euros ; que dès lors M. [F] [W] est mal fondé en sa demande tendant à la rétractation de l'arrêt du 23 mai 2019 de telle manière qu'il y a lieu de l'en débouter ;

Alors que la cassation de l'arrêt du 23 mai 2019 rendue par la cour d'appel d'Aix-en-Provence déclarant l'opposition de M. [W] irrecevable, entrainera, par application de l'article 625 du code de procédure civile, l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt du 14 novembre 2019 qui est la suite et s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire.

Le greffier de chambre


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 19-25949
Date de la décision : 20/05/2021
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

APPEL CIVIL - Recevabilité - Conditions - Acquittement du droit de timbre dû par les parties à l'instance d'appel - Défaut - Sanction - Fin de non-recevoir - Principe du contradictoire - Nécessité

En application de l'article 16 du code de procédure civile, la fin de non-recevoir tirée du défaut de justification du paiement du droit prévu par l'article 1635 bis P du code général des impôts ne peut être retenue sans que la partie concernée ait été invitée à s'en expliquer ou, qu'à tout le moins, un avis d'avoir à justifier de ce paiement lui ait été préalablement adressé par le greffe


Références :

Sur le numéro 1 : Article 1635 bis P du code général des impôts

article 963 du code de procédure civile.
Sur le numéro 2 : Article 16 du code de procédure civile.

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14 novembre 2019


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 20 mai. 2021, pourvoi n°19-25949, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre
Avocat(s) : SCP Gouz-Fitoussi, Me Le Prado

Origine de la décision
Date de l'import : 16/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.25949
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