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23/05/2019 | FRANCE | N°16-17895

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 23 mai 2019, 16-17895


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. et Mme A... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme Y... A... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 25 mars 2016), que, par acte du 1er août 2007, Mme E... a donné à bail à M. et Mme A... une maison d'habitation, des bâtiments agricoles et une piste équestre ; qu'elle a saisi le tribunal en résiliation du bail ; que les preneurs ont donné congé pour le 31 janvier 2012 ; que Mme E... a, après expertise, sollicité le paiement d'un solde de fermages

, du préavis et du coût de remise en état ;

Sur le premier moyen, ci-après a...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. et Mme A... du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme Y... A... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 25 mars 2016), que, par acte du 1er août 2007, Mme E... a donné à bail à M. et Mme A... une maison d'habitation, des bâtiments agricoles et une piste équestre ; qu'elle a saisi le tribunal en résiliation du bail ; que les preneurs ont donné congé pour le 31 janvier 2012 ; que Mme E... a, après expertise, sollicité le paiement d'un solde de fermages, du préavis et du coût de remise en état ;

Sur le premier moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. et Mme A... font grief à l'arrêt de les condamner à payer une certaine somme au titre du préavis ;

Mais attendu que l'acceptation de la libération des lieux ne suffit pas à caractériser une renonciation non équivoque aux loyers dus par un locataire jusqu'au terme du délai de préavis ; que la cour d'appel, qui a relevé que, le 29 octobre 2011, M. A... avait notifié à Mme E... qu'il quitterait les lieux au plus tard le 31 janvier 2012 et que celle-ci avait répondu le 17 janvier qu'elle avait pris bonne note de son départ pour cette date, a pu en déduire qu'en l'absence de renonciation par la bailleresse au préavis prévu par le statut des baux ruraux, la demande devait être accueillie ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu que M. et Mme A... font grief à l'arrêt de les condamner à payer une somme au titre de la réfection de la piste équestre ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la piste équestre, qualifiée d'excellente par l'expert, n'avait pas été entretenue en raison d'une négligence imputable aux preneurs qui l'utilisaient et relevé que Mme E... reconnaissait qu'elle n'avait plus fourni de sable après une livraison de 2008, la cour d'appel, qui a partagé par moitié le coût de réfection, en conformité avec la clause du bail prévoyant cette répartition pour le sablage et le nivelage, a pu, abstraction faite d'un motif surabondant sur l'absence de réclamation de la part de M. et Mme A..., accueillir partiellement la demande et apurer les comptes entre parties ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. et Mme A... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme A... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. et Mme A....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir condamné M. et Mme A... à payer à Mme E... la somme de 20.046 € au titre du préavis ;

AUX MOTIFS QUE le 29 octobre 2011, M. A... a notifié à Mme E... qu'il quitterait les lieux au plus tard à la date du 31 janvier 2012, lettre dont cette dernière a accusé réception en répondant le 17 janvier « j'ai bien reçu votre courrier en date du 29 octobre 2011 me précisant votre départ pour le 31 janvier 2012. J'ai pris bonne note de votre départ pour cette date » ; que les époux A... soutiennent qu'il résulte de cet échange un accord évident sur la date de fin du bail et que les parties pouvant décider de mettre fin à un bail rural d'un commun accord, aucun préavis n'est dû ; que pour critiquer le jugement qui a retenu cette thèse, Mme E... soutient que, en application de l'article L.411-55, les preneurs auraient dû respecter un délai de préavis de dix-huit mois et sont débiteurs d'un loyer pendant ce délai, peu important l'établissement d'un constat et la reprise des lieux et peu important qu'elle n'ait pas réclamé cette somme avant ses conclusions de septembre 2014 puisque ce fait ne vaut pas renonciation expresse de sa part ; qu'il sera relevé que, contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges, il ne résulte en rien des termes du jugement du 25 janvier 2013 et des écritures alors déposées un accord exprès pour une résiliation acceptée à la date du 31 janvier 2012, ayant été seulement indiqué que le bail « avait pris fin le 31 janvier 2012 », ce qui ne faisait que traduire la délivrance du congé pour cette date et le départ à cette date sans traduire un accord sur une renonciation au préavis ; qu'étant constant qu'à la date du congé, la décision requalifiant la relation et reconnaissant l'existence R... P... Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation [...] d'un bail rural avait d'ores et déjà été rendue, s'appliquait le délai de préavis d'un bail rural, ce qui conduit à faire droit à la demande de Mme E... ;

ALORS QUE les parties peuvent s'entendre sur la durée d'un préavis ou sur une résiliation anticipée de la convention en cours ; qu'en l'espèce, M. A... avait notifié à Mme E..., le 29 octobre 2011, un congé en indiquant qu'il quitterait les lieux à la date du 31 janvier 2012 et cette dernière avait pris acte de ce congé par courrier du 17 janvier 2012 dans les termes suivants : « J'ai bien reçu votre courrier en date du 29 octobre 2011 me précisant votre départ pour le trente et un janvier deux mille douze. J'ai pris bonne note de votre départ pour cette date » ; qu'en considérant que ce courrier de Mme E... ne traduisait pas un accord sur une renonciation au préavis (arrêt attaqué, p. 4, alinéa 10), cependant que la bailleresse avait clairement manifesté son accord pour une résiliation du contrat de bail à la date du 31 janvier 2012, la cour d'appel a méconnu la volonté des parties et a violé l'article 1134 du code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir condamné M. et Mme A... à payer à Mme E... la somme de 18.608,56 € au titre du coût de remise en état de la piste ;

AUX MOTIFS QUE s'agissant de la piste dont il indique qu'il s'agit d'une excellente piste en forme d'anneau d'une longueur de 1.000 mètres sur sept mètres de largeur soit une superficie de 7.000 m² avec virages relevés, l'expert énonce « depuis 2007, la piste n'a fait l'objet d'aucun entretien par M. A.... Coût de sa remise en état : 37.217,13 euros TTC », énonçant ensuite la clause du contrat de bail suivante : « Le tour de piste sera entretenu sur 1 mètre à la corde par le locataire ainsi que les aires de départ, en particulier côté chemin de fer jusqu'à la haie. La piste qui appartient en usufruit à Mme E... sera entretenue par celle-ci à 50% et le locataire à 50% pour le sablage et le nivelage. Les haies et les fossés de la parcelle appartenant en nue-propriété à M. U... E... seront entretenus par celui-ci en dehors de la piste » pour procéder à une répartition de ce coût, à hauteur de 12.944,30 € pour Mme E... et de 24.272,82 € pour les époux A... ; que les époux E..., qui contestent leur absence d'entretien, relèvent en premier lieu que l'expert a omis de faire mention de la clause suivante du bail qui stipule « Le matériel pour l'entretien de la piste sera mis à disposition du preneur (rouleaux, citerne à eau) » et de la mention suivante de l'état des lieux « manque 150 tonnes minimum de sable sur la piste (à faire sous 1 mois à la charge du bailleur) » et soutiennent que Mme E... n'a jamais mis à leur disposition ces citernes et rouleaux ni délivré la piste qui manquait d'ailleurs selon eux de bien plus que de 150 tonnes de sable ; que sur ce point, il sera relevé qu'ils n'ont jamais adressé la moindre réclamation ou demande à leur bailleresse à ce sujet pendant le cours du bail et que Mme E... verse aux débats une facture de sable du 31 mars 2008 qu'ils ne critiquent pas ; que les époux A... se prévalent encore d'un défaut structurel de drainage mais que les procès-verbaux d'huissier des 23 et 25 mai 2009 qu'ils produisent ne contiennent que le constat de travaux de drainage en cours de réalisation le 23 et de la subsistance le 25 d'une crevasse au niveau du drainage et de stigmates de la tranchée, ce qui ne fait en rien la preuve d'un défaut de drainage expliquant l'état de la piste plusieurs années après et tend au contraire à établir ce que soutient Mme E..., attestations à l'appui, à savoir qu'elle a justement entrepris des travaux de drainage à la demande de M. A..., travaux dont rien n'établit qu'ils n'auraient pas été satisfaisants ; que s'agissant de la prétendue dégradation de la piste qui résulterait de son utilisation par Mme E... avec son véhicule automobile, elle ne résulte d'aucun élément pertinent ; que cela étant, Mme E... reconnaît qu'elle n'a plus fourni de sable après la livraison susvisée car selon elle M. A... n'effectuait pas l'entretien ; qu'il sera encore relevé qu'elle produit l'attestation de M. W... qui énonce « à plusieurs reprises Mme E... a demandé à M. A... de remettre du sable, chaque fois il a répondu qu'il ne pouvait pas financièrement », que le constat d'huissier de sortie mentionnait « le sol de la piste est creusé en multiples endroits particulièrement dans le virage nord-ouest et le côté ouest où le bord intérieur de la piste est affaissé, effondré, le sable s'écoulant sur le terrain agricole situé au milieu de la piste », que le rapport d'expertise n'est pas explicite sur l'imputabilité aux preneurs de travaux d'entretien autres que les sablage et nivelage et que la conclusion de l'expert est la suivante : « Il est constant que M. A... et Mme E... n'ont effectué aucun entretien ni rechargement en sable depuis 2007. Il est d'usage dans la profession de recharger annuellement les pistes en sable à raison de 1 à 2 cm d'épaisseur. Ce total défaut d'entretien a provoqué un léger affaissement de la piste provoquant une zone humide. La conception de la piste n'est pas en cause. Seul le défaut d'entretien reste la conséquence des désordres constatés » ; qu'en conséquence, alors qu'il est admis par la bailleresse qu'elle n'a pas livré de sable après 2008, le partage inégal des frais de remise en état proposé par l'expert n'est pas justifié et il doit être opéré un partage par moitié du coût de réfection de la piste ; que s'agissant du chiffrage de ce coût, l'expert vise un devis B... dont Mme E... soutient qu'il n'émane pas d'un spécialiste des pistes mais seulement d'un terrassier et cette dernière fait état d'un autre devis B... de 55.345,20 € et d'un devis D... de 88.206 €, mais qu'il sera relevé que le nouveau devis B... date de janvier 2016 et que le chiffrage peut résulter d'une dégradation postérieure non imputable dans ce cas au locataire ; que s'agissant du devis D..., il avait été soumis à l'expert qui n'a pas estimé devoir le retenir et il résulte de son examen qu'il ne concerne pas des prestations identiques et notamment vise des prestations autres que celles relatives à la seule piste ; que l'évaluation de l'expert sera donc retenue, soit une somme de 18.608,56 € à la charge des preneurs ;

ALORS QUE le bailleur doit, pendant tout le cours du bail, entretenir la chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, sans mise en demeure préalable du locataire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le contrat de bail conclu par les parties prévoyait que l'entretien de la piste pesait à la fois sur le bailleur et les locataires et précisait qu'en toute hypothèse, « le matériel pour l'entretien de la piste sera mis à disposition du preneur (rouleaux, citerne à eau) » (arrêt attaqué, p. 6, alinéa 1er) ; que dans leurs écritures d'appel (conclusions p. 12, in fine et p. 14, alinéa 1er), M. et Mme A... faisaient valoir qu'il ne pouvait leur être imputé un défaut d'entretien de la piste, dès lors que Mme E... avait failli à son obligation consistant à mettre à leur disposition le matériel nécessaire à cet entretien ; qu'en écartant ce moyen de défense de M. et Mme A... au motif que, « sur ce point, il sera relevé qu'ils n'ont jamais adressé la moindre réclamation ou demande à leur bailleresse à ce sujet pendant le cours du bail » (arrêt attaqué, p. 6, alinéa 2), cependant que Mme E... avait l'obligation de mettre spontanément à disposition des preneurs le matériel visé par le contrat de bail, sans attendre une quelconque réclamation formulée par ces derniers, et qu'elle ne pouvait donc se prévaloir d'une absence de réclamation des locataires sur ce point pour leur imputer un défaut d'entretien de la piste, la cour d'appel a violé les articles 1134, 1146 et 1719 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 16-17895
Date de la décision : 23/05/2019
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 25 mars 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 23 mai. 2019, pourvoi n°16-17895


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvin (président)
Avocat(s) : Me Balat, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:16.17895
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