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19/12/2018 | FRANCE | N°17-17311

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 décembre 2018, 17-17311


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 février 2017), que M. Y..., qui exerce la profession d'avocat, a été mis en redressement judiciaire le 21 février 2011, puis en liquidation judiciaire le 2 février 2012 ; qu'il a été placé en arrêt de travail et contraint de cesser toute activité professionnelle à compter du 2 janvier 2012 ; que le 11 avril 2011, puis le 17 avril 2012, la Caisse nationale des barreaux français (la CNBF) a procédé à la déclaration de sa créance de cotisations au titre des ann

ées 2007 à 2011 ; que M. Y... a demandé en vain à la CNBF le bénéfice des...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 février 2017), que M. Y..., qui exerce la profession d'avocat, a été mis en redressement judiciaire le 21 février 2011, puis en liquidation judiciaire le 2 février 2012 ; qu'il a été placé en arrêt de travail et contraint de cesser toute activité professionnelle à compter du 2 janvier 2012 ; que le 11 avril 2011, puis le 17 avril 2012, la Caisse nationale des barreaux français (la CNBF) a procédé à la déclaration de sa créance de cotisations au titre des années 2007 à 2011 ; que M. Y... a demandé en vain à la CNBF le bénéfice des allocations prévues par son règlement en cas d'invalidité temporaire à compter du mois d'avril 2012 jusqu'à la reprise de son activité professionnelle, puis l'a assignée en paiement de ces allocations ;

Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes alors, selon le moyen :

1°/ que l'article L.631-14 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, étend les dispositions de l'article L.622-13 du même code à la procédure de redressement judiciaire ; qu'en énonçant que les dispositions de l'article L. 622-13 du code de commerce ne concernent pas M. Y... dès lors qu'elles ne sont applicables qu'à la seule procédure de sauvegarde de l'entreprise, laquelle n'a pas été mise en oeuvre en ce qui concerne l'activité professionnelle de M. Y..., la cour d'appel a violé par refus d'application l'article L. 631-14 du code de commerce ;

2°/ que rien dans les dispositions de l'article L.622-13 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige n'excepte de leur bénéfice les régimes d'affiliation d'origine légale de la personne physique faisant l'objet d'une procédure collective ; qu'en énonçant que les dispositions de l'article L. 622-13 du code de commerce ne concernent pas M. Y... dès lors que la CNBF n'a pas la qualité de cocontractant de ce dernier, le régime d'affiliation des avocats à ladite caisse étant, au sens de l'article L. 723-1 du code de la sécurité sociale, de source légale, la cour d'appel a violé l'article L. 622-13 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige en lui ajoutant une exception qu'il ne comporte pas ;

Mais attendu qu'abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la première branche, l'arrêt retient exactement que le régime d'affiliation des avocats à la CNBF imposé par l'article L. 723-1 du code de la sécurité sociale est de source légale, que cette caisse n'a, dès lors, pas la qualité de contractant de M. Y... et que ce dernier ne peut, en conséquence, se prévaloir des dispositions de l'article L. 622-13 du code de commerce concernant les seuls contrats en cours ; que le moyen, qui, en sa seconde branche, se borne à invoquer ces dispositions inapplicables, n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. Y... fait le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen, que l'article L. 622-7 du code de commerce autorise l'exception de compensation entre les créances nées avant le jugement d'ouverture de la procédure collective et la créance du débiteur née postérieurement à la condition que ces créances réciproques soient connexes ; que M. Y... demandait au juge de prononcer la compensation entre la somme due à la caisse au titre de la cotisation invalidité décès et les prestations invalidité auxquelles il avait droit et de condamner en conséquence la caisse à lui payer la somme de 16 834,10 euros ; qu'en conditionnant la compensation à l'accord du liquidateur et du juge-commissaire, ainsi qu'à la présentation d'une demande de compensation à la CNBF, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ;

Mais attendu qu'ayant exactement retenu que la CNBF n'avait pas la qualité de contractant de M. Y..., ce dont il résulte que les créances entre lesquelles la compensation était demandée, dépourvues de fondement contractuel, n'étaient pas connexes et ne pouvaient être compensées, c'est à bon droit que la cour d'appel a, par ces seuls motifs, retenu que la CNBF était fondée à refuser à M. Y... le versement de l'allocation sollicitée ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen, pris en sa première branche, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur Y... de ses demandes;

AUX MOTIFS QUE:

«Sur l'ouverture des droits de Jean-Luc Y... au titre de l'allocation invalidité décès pour la période [...] au 1er février 2013 et pour la période courant du 2 février 2013 jusqu'à la date de reprise de son activité professionnelle (
) Qu'il est constant que la dette de Jean-Luc Y... à l'égard de la Caisse Nationale des Barreaux Français a, dans le cadre de la procédure collective dont il a fait l'objet, été évaluée, en avril 2011, à un montant de 16.107 € pour les exercices 2007 à 2010, lequel correspond à une somme de 15.559 € au titre des cotisations retraite (retraite de base et retraite complémentaire) et à une somme de 548 € au titre des cotisations invalidité décès; Que la Caisse Nationale des Barreaux Français a également déclaré au passif de la liquidation judiciaire une créance supplémentaire de 3.949 € au titre de l'exercice 2011; Que l'arriéré de Jean-Luc Y... était, à la date du 14 novembre 2014, d'un montant total de 21.136 €;

Que, par une lettre en date du 10 avril 2012, la Caisse Nationale des Barreaux Français a informé Jean-Luc Y... que, faute d'avoir procédé au paiement de ses cotisations, les dispositions combinées de l'article 59 de ses statuts et de l'article 723-10 du code de la sécurité sociale faisaient obstacle au versement de toute allocation;

Que Jean-Luc Y... soutient que la Caisse Nationale des Barreaux Français ne pouvait valablement conditionner le versement de l'allocation invalidité décès, pour laquelle il pouvait être à jour de cotisations, à la régularisation préalable des cotisations non versées au titre de la retraite;

Que toutefois, c'est par une exacte application de l'article 59 de ses statuts, qui dispose que «Sauf dérogation, accordée par délibération spéciale du Conseil d'Administration de la Caisse, le versement de la retraite du capital décès ou de l'allocation d'invalidité, est subordonné à la condition qu'aucune cotisation exigible -y compris, s'il y a lieu, les intérêts de retard- ne soit due à la Caisse», que la Caisse Nationale des Barreaux Français a refusé d'accorder à Jean-Luc Y... le versement de l'allocation invalidité décès; Qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que Jean-Luc Y... ne réunissait pas les conditions pour pouvoir bénéficier du versement de l'allocation sollicité pour les périodes considérées;

Sur l'application de l'article L.622-13 du code de commerce

(
) Que Jean-Luc Y... soutient qu'en vertu de l'article L.622-13 du code de commerce, qui dispose, dans sa rédaction applicable au litige, que «Le cocontractant doit remplir ses obligations malgré le défaut d'exécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture. Le défaut d'exécution de ces engagements n'ouvre droit au profit des créanciers qu'à déclaration au passif» la Caisse Nationale des Barreaux Français était tenue de lui verser une somme de 17.416,10 € au titre de l'allocation invalidité décès pour la période [...] au 1er février 2013; Que toutefois, les dispositions précitées de l'article L.622-13 du code de commerce ne concernent pas la situation de Jean-Luc Y... dès lors, d'une part, qu'elle ne sont applicables qu'à la seule procédure de sauvegarde de l'entreprise, laquelle n'a pas été mise en œuvre en ce qui concerne l'activité professionnelle de Jean-Luc Y..., d'autre part et en tout état de cause, que la Caisse Nationale des Barreaux Français n'a pas la qualité de cocontractant de Jean-Luc Y..., le régime d'affiliation des avocats à ladite Caisse étant, au sens de l'article L.723-1 du code de la sécurité sociale, de source légale; Qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que Jean-Luc Y... ne pouvait se prévaloir de l'article L.622-13 du code de commerce pour obtenir l'ouverture de ses droits à percevoir l'allocation invalidité décès;

Sur la demande de compensation au titre de l'article L.622-7 du code de commerce

(
) Que, par des courriers en date des 10 avril 2012, 10 juillet 2012, 9 novembre 2012 et 29 mars 2013, la Caisse Nationale des Barreaux Français a proposé à Jean-Luc Y... de compenser les cotisations dues au titre du régime invalidité décès avec les allocations auxquelles il pouvait prétendre afin de lui permettre de bénéficier de l'ouverture de ses droits à ce titre, à la conditions qu'il lui en fasse expressément la demande et sous réserve d'un accord écrit des organes de la procédure collective; Qu'il est constant que Jean-Luc Y... ne justifie pas avoir sollicité l'accord du mandataire liquidateur et du juge commissaire, ni avoir demandé à la Caisse Nationale des Barreaux Français le bénéfice de la compensation; Qu'ainsi, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la Caisse Nationale des Barreaux Français était fondée à refuser à Jean-Luc Y... le versement de l'allocation sollicitée»;

1/ ALORS QUE le jugement doit être motivé à peine de nullité; Que le défaut de réponse aux conclusions équivaut au défaut de motifs; Que, pour affirmer ses droits à la perception d'indemnités journalières, Monsieur Y... faisait valoir en pages 4 in fine et 5 de ses conclusions d'appel (prod.2) qu'il résulte des termes mêmes du courrier de la CNBF en date du 10 avril 2012 (prod.4) que la Caisse y admettait le principe selon lequel elle recouvre par un même appel deux cotisations fondamentalement différentes et donc parfaitement divisibles, d'une part, et que, pour prétendre au bénéfice d'une allocation invalidité, il fallait être à jour des cotisations dues à ce titre, soit de la cotisation invalidité décès, tandis que, pour prétendre à une pension de retraite, il fallait être à jour de la cotisation «retraite de base et retraite complémentaire», d'autre part; Qu'en s'abstenant totalement de vérifier, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions dont elle était saisie, s'il ne résultait pas du propre courrier de la CNBF en date du 10 avril 2012 que cette Caisse pouvait parfaitement, nonobstant les termes de l'article 59 de ses statuts, verser l'allocation d'invalidité temporaire sans exiger que Monsieur Y... soit à jour de ses cotisations retraite, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile;

2/ ALORS QUE l'article L.631-14 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, étend les dispositions de l'article L.622-13 du même code à la procédure de redressement judiciaire; Qu'en énonçant que les dispositions de l'article L.622-13 du code de commerce ne concernent pas Monsieur Y... dès lors qu'elles ne sont applicables qu'à la seule procédure de sauvegarde de l'entreprise, laquelle n'a pas été mise en œuvre en ce qui concerne l'activité professionnelle de Monsieur Y..., la cour d'appel a violé par refus d'application l'article L.631-14 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige;

3/ ALORS QUE rien dans les dispositions de l'article L.622-13 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige n'excepte de leur bénéfice les régimes d'affiliation d'origine légale de la personne physique faisant l'objet d'une procédure collective; Qu'en énonçant que les dispositions de l'article L.622-13 du code de commerce ne concernent pas Monsieur Y... dès lors que la CNBF n'a pas la qualité de cocontractant de ce dernier, le régime d'affiliation des avocats à ladite Caisse étant, au sens de l'article L.723-1 du code de la sécurité sociale, de source légale, la cour d'appel a violé l'article L.622-13 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige en lui ajoutant une exception qu'il ne comporte pas.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir confirmé le juge-ment entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur Y... de ses demandes;

AUX MOTIFS QUE : par des courriers en date des 10 avril 2012, 10 juillet 2012, 9 novembre 2012 et 29 mars 2013, la CAISSE NATIONALE DES BARREAUX FRANÇAIS a proposé à Jean-Luc Y... de compenser les cotisations dues au titre du régime invalidité décès avec les allocations auxquelles il pouvait prétendre afin de lui permettre de bénéficier de l'ouverture de ses droits à ce titre, à la condition qu'il lui en fasse expressément la demande, et sous réserve d'un accord écrit des organes de la procédure collective; qu'il est constant que Jean-Luc Y... ne justifie pas avoir sollicité l'accord du mandataire liquidateur et du juge commissaire, ni avoir demandé à la CAISSE NATIONE DES BARREAUX FRANÇAIS le bénéfice de la compensation; qu'ainsi, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que la CAISSE NATIONALE DES BARREAUX FRANÇAIS était fondée à refuser à Jean-Luc Y... le versement de l'allocation sollicitée;

ALORS QUE l'article L. 622-7 du Code de commerce autorise l'exception de compensation entre les créances nées avant le jugement d'ouverture de la procédure collective et la créance du débiteur née postérieurement à la condition que ces créances réciproques soient connexes; qu'en l'espèce, Monsieur Y... demandait au juge de prononcer la compensation entre la somme due à la caisse au titre de la cotisation invalidité décès et les prestations invalidité auxquelles il avait droit et de condamner en conséquence la caisse à lui payer la somme de 16834,10 euros; qu'en conditionnant en l'espèce la compensation à l'accord du mandataire liquidateur et du juge commissaire, ainsi qu'à la présentation d'une demande de compensation à la CAISSE NATIONALE DES BARREAUX FRANÇAIS, la Cour d'appel a violé la disposition susvisée.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 17-17311
Date de la décision : 19/12/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 février 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 déc. 2018, pourvoi n°17-17311


Composition du Tribunal
Président : M. Guérin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.17311
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